Levi-Strauss - Médiathèque Jacques BAUMEL

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Levi-Strauss
Extrait du Médiathèque Jacques BAUMEL
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Levi-Strauss
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Date de mise en ligne : samedi 17 avril 2010
Description :
Pour découvrir Claude Levi-Strauss : bio-bibliographie
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Levi-Strauss
A l'occasion de la mort de Levi-Strauss, il convient de rappeler le parcours de ce grand
penseur du XX ème siècle tout en soulignant les thèmes fondateurs de son oeuvre immense.
Le livret
BIOGRAPHIE
L'anthropologue et ethnologue français, Claude Lévi-Strauss, né le 28 novembre 1908 à Bruxelles et mort le 30
octobre 2009 à Paris, a exercé une influence décisive sur les sciences humaines dans la seconde moitié du XXème
siècle en étant notamment l'une des figures fondatrices de la pensée structuraliste.
« Si l'activité inconsciente de l'esprit consiste à imposer des formes à un contenu, et si ces formes sont
fondamentalement les mêmes pour tous les esprits, anciens et modernes, primitifs et civilisés, comme l'étude de la
fonction symbolique, il faut et il suffit d'atteindre la structure inconsciente, sous-jacente à chaque institution et à
chaque coutume, pour obtenir un principe d'interprétation valide pour d'autres institutions et d'autres coutumes. »
Claude Levi-Strauss
Issu d'une famille juive d'origine alsacienne, Claude Levi-Strauss est né à Bruxelles de parents français. La famille
s'installe à Paris. Son père, peintre portraitiste, est rapidement ruiné par l'arrivée de la photographie.
Au lycée Janson-de-Sailly, Claude effectue ses études secondaires jusqu'au baccalauréat tout en entreprenant la
lecture de Marx qui l'oriente vers le parti socialiste français. Après une année d'hypokhâgne, il entre à la faculté de
droit et de philosophie. Il obtient l'agrégation de philosophie en 1931 aux côtés de Simone Weil.
L'année suivante, après son mariage avec Dina Dreyfus, on lui attribue son premier poste d'enseignant au lycée de
Mont-de-Marsan. Il est alors candidat socialiste aux élections cantonales mais un accident de voiture met fin à ce
projet politique.
En 1933 il écrit : « J'ai commencé à m'ennuyer, j'avais envie de bouger, de voir le monde. »
C'est la lecture de l'ouvrage de Robert H. Lowie, Primitive society qui est alors une révélation.
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« Au lieu de notions empruntées à des livres et immédiatement métamorphosées en concepts philosophiques,
j'étais confronté à une expérience vécue des sociétés indigènes. »
« Ma carrière s'est jouée un dimanche de l'automne 1934, à 9 heures du matin, sur un coup de téléphone. C'était
Célestin Bouglé, alors directeur de l'Ecole Normale Supérieure. » Celui-ci lui propose de devenir membre de la
mission universitaire au Brésil en tant que professeur de sociologie à Sao Paulo. Aussi, il va partir avec sa femme
pour enseigner jusqu'en 1939 tout en menant des missions ethnographiques en Amazonie, auprès de populations
indiennes, ce qui lui permet de réunir les premiers matériaux qui seront à la base de sa thèse sur Les Structures
élémentaires de la parenté (soutenue en 1949).
En 1939, il rentre à Paris et se sépare de sa femme. Sous la menace des lois raciales, il doit quitter la France et se
réfugie à New York.
Dans ce haut lieu de bouillonnement culturel, il va rencontrer Roman Jakobson dont l'influence sera déterminante.
En effet, la linguistique structurale lui faisait défaut jusque-là dans son travail sur les systèmes de parenté.
Ces années, comprises entre 1941 et 1949, Claude Levi-Strauss les passe entre Paris et New York, des années de
rencontres décisives et d'ébullition intellectuelle. Il a été fortement influencé par l'anthropologie culturelle avec Boas
qui avait déjà préconisé la recherche des « structures inconscientes des sociétés » ainsi que par Sapir, linguiste et
anthropologue, intéressé par les rapports entre les phénomènes culturels et linguistiques. Avec Kroeber, il a partagé
la même vision de l'anthropologie.
Il a été aussi marqué par Mauss, ses théories de l'échange et sa conception des rapports symboliques.
Plus tard, en 1949, il devient sous-directeur du Musée de l'homme.
C'est en 1955 qu'il publie son livre le plus célèbre Tristes tropiques, oeuvre à mi-chemin entre l'autobiographie, la
méditation philosophique et le témoignage ethnologique. Ce livre connaît un énorme succès à sa sortie et de
nombreux intellectuels apprécient cet ouvrage qui sort des sentiers battus.
En 1959, il est élu professeur au Collège de France où il occupe la chaire d'anthropologie sociale de 1959 à 1982.
A partir des années 1960, et ce pendant quarante ans, Claude Levi-Strauss se consacre à l'étude des mythes, en
particulier de la mythologie améridienne, ce qui va donner lieu à la publication d'une tétralogie Mythologies : Le Cru
et le cuit, Du miel aux cendres et L'Origine des manières de table. En 1961, il crée la revue L'Homme qui s'ouvre aux
multiples courants de l'ethnologie et de l'anthropologie en favorisant une approche interdisciplinaire.
En 1973, il est élu à l'Académie française et deviendra le premier centenaire de cette institution.
Au début de l'année 2005, lors d'une de ses dernières apparitions à la télévision française, il déclare :
« Ce que je constate : ce sont les ravages actuels ; c'est la disparition effrayante des espèces vivantes, qu'elles
soient végétales ou
animales ; le fait que du fait même de sa densité actuelle, l'espèce humaine vit sous une
sorte de régime d'empoisonnement interne et je pense au présent et au monde dans lequel je suis en train de finir
mon existence. Ce n'est pas un monde que j'aime ».
En novembre 2008, à l'occasion de son centenaire, le musée du Quai Branly lui rend hommage en invitant des
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écrivains, scientifiques et artistes qui lisent certains de ses textes.
Levi-Strauss meurt d'une crise cardiaque le 30 octobre 2009 chez lui à Paris.
Robert Maggiori estime que l'héritage le plus « sacré » de Lévi-Strauss « est l'idée que les cultures ont la même
force et la même dignité, parce qu'on trouve en chacune, aussi éloignée soit elle des autres, des éléments
poétiques, musicaux, mythiques qui sont communs ».
TRAVAUX
L'ethnologie pour Levi-Strauss « représente un premier pas vers la synthèse » .
M. Mauss, un des fondateurs de l'ethnologie française et proche de Durkheim, considère l'ethnologie comme une «
partie » de la sociologie, celle qui s'intéresse « aux nations dites sauvages » situées dans un espace différent et peu
marqué par l'écriture et la machine.
Pour Levi-Strauss, l'anthropologie « vise à atteindre, dans sa description des sociétés étranges et lointaines, le point
de vue de l'indigène lui-même ; puis elle élargit son objet jusqu'à y inclure la société de l'observateur mais en tâchant
alors de dégager un système de référence fondé sur l'expérience ethnographique et qui soit indépendant à la fois de
l'observateur et de son objet ».
Contrairement à Malinowski qui concevait l'ethnologie comme l'étude des sociétés différentes, Levi-strauss fait de
cette étude un moyen et non une fin, la finalité étant la connaissance de l'homme dans toutes ses dimensions,
géographiques comme historiques. L'ethnologie ne serait pour Levi-Strauss, philosophe à l'origine, qu'un détour
permettant de se tourner vers la philosophie pour engager une réflexion sur l'homme.
« Son but fondamental est de découvrir des vérités sur l'esprit humain et ainsi l'organisation d'une société
particulière n'a guère retenu son attention » souligne R. Deliège
Bien qu'il souligne la diversité des cultures pouvant conduire à une « observation morcelée », il rappelle que toute
science doit unifier.
Levi-Strauss va partir du constat que les différences entre les sociétés sont complémentaires. L'anthropologie
cherchera donc l'universel dans les caractéristiques communes à toutes sociétés ainsi que dans la permanence chez
l'homme de structures mentales communes.
« L'ethnologie m'apporte une satisfaction intellectuelle ; comme histoire qui rejoint par ses deux extrémités celle du
monde et la mienne, elle dévoile du même coup leur commune raison. » Tristes tropiques
Comprendre le structuralisme de Levi-Strauss, c'est adopter son « regard ».
Le fondement de sa pensée repose sur le fait qu'au-delà du rationnel, de la logique de l'organisation sociale, des
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pratiques et du vécu des sociétés, au delà de leurs règles qui sont différentes selon les lieux, on retrouve quelque
chose de commun chez l'homme. Il s'agit selon lui de l'inconscient collectif de l'esprit humain qui se nourrit de
mêmes images, de mêmes symboles et de mêmes motivations. L'explication est plus psychologique que
sociologique.
Levi-Strauss va également privilégier une discipline sur laquelle il fondera sa méthode, la linguistique. Selon lui, elle
est de toutes les sciences humaines la plus avancée car, à la différence de la sociologie ou de l'ethnologie, la
linguistique est générale et non relativiste puisque ce sont les mêmes méthodes qui servent à décrire et analyser des
langues différentes. C'est également une discipline qui valorise la culture ; l'essentiel de la culture renvoie à un
système symbolique (langage, parenté, mythe, art ...) établissant la communication entre les hommes.
Levi-Strauss va donc s'attacher à découvrir dans le champ anthropologique l'importance de la communication et de
l'échange. Il existe, explique-t-il, trois niveaux de communication :
celui du mariage, celui des biens et des services et enfin celui des messages (langues, mythes).
Levi-Strauss récuse l'ethnocentrisme, cette habitude de mépriser les autres cultures jugées inférieures à la sienne.
Quel homme mieux qu'un esquimau ou un bédouin saura triompher des extrêmes climatiques ? Quelle civilisation
mieux que celle de la Chine ou de l'Inde, a su assurer une certaine maîtrise sur le corps humain, alors que l'Occident
qui « maîtrise des machines » témoigne à ce sujet de connaissances très élémentaires.
Chaque culture a donc, à sa façon, contribué à l'enrichissement de la civilisation universelle et il n'y a pas de «
peuple enfant ». En fait, le progrès est le fruit d'une collaboration entre les cultures.
« Tout progrès culturel est fonction d'une coalition entre les cultures. » La vertu de l'échange et de la communication
pour l'enrichissement du patrimoine culturel commun est très importante pour Levi-Strauss.
Levi-Strauss souligne, dans les Structures élémentaires de la parenté, l'importance du mariage comme constitutif de
l'alliance entre les groupes. Cette nécessité de l'alliance avec un groupe de parenté étranger, cette règle de
l'exogamie, Levi-Strauss va en faire le thème central de son oeuvre.
Concernant la prohibition de l'inceste, de nombreux ethnologues se sont penchés sur ce phénomène universel.
Levi-Strauss va partir d'un thème qui lui est cher, l'opposition entre « état de nature » et « état de culture ». Rien ne
permet de repérer le passage entre les faits de nature et ceux de culture excepté un, la prohibition de l'inceste :
celle-ci est une règle qui possède un caractère d'universalité tout en prenant des formes différentes selon les
sociétés.
« La prohibition de l'inceste est moins une règle qui interdit d'épouser mère, soeur, fille qu'une règle qui oblige à
donner mère, soeur, fille à autrui. C'est la règle du don par excellence. » Le don est destiné à entretenir des relations
d'alliance.
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Le mythe a longtemps été récusé comme synonyme de « fable », « d'invention », de « fiction ». Ce n'est qu'au
XIXème siècle qu'il est dissocié de la poésie et de la littérature et qu'il est apprécié à sa valeur scientifique comme
une tradition sacrée et une référence pour la compréhension du culte et des rites.
M. Eliade : « Le mythe est une réalité culturelle extrêmement complexe qui raconte une histoire sacrée, un
événement primordial, le temps fabuleux des commencements. »
Il y a donc un lien constant et étroit entre mythe et rite lequel vient constamment le réactualiser. Le mythe est ainsi
revécu. Les mythes les plus importants étant les mythes de création ou cosmogoniques (création et organisation du
monde, des dieux, des hommes).
Levi-Strauss considère que le mythe nous fait entrer dans le plus profond des sentiments fondamentaux de l'homme.
L'esprit y est parfaitement libre de s'abandonner à sa spontanéïté créatrice et ce faisant « livré au tête à tête avec
lui-même. » Le mythe est un message, un moyen de communication entre générations, un peu comme le langage
car il offre un moyen d'analyse proche de ceux utilisés par la linguistique.
Levi-Strauss part de deux observations : le mythe ne présente aucune règle de logique ni de continuité dans la
succession des évènements mais les mythes ont tous un caractère extraordinaire de ressemblance. Contradiction
apparente, la logique n'est pas dans la succession des évènements, elle est dans la ressemblance de certains
thèmes permanents qui reviennent dans les mythes.
Comment procéder ?
En découpant le mythe en unités constitutives ou « mythènes » : phrase courtes qu'on classe et qui sont en relation
entre elles souvent même en opposition. Il en résulte des thèmes ou des personnages. Levi-strauss l'illustre par
l'exemple : dans les mythes amérindiens d'Amérique du nord, il y a un personnage appellé le Trickster ce qui signifie
le fourbe, le tricheur. Ce rôle est dévolu au coyote. Or, l'objet du mythe consiste « à fournir un modèle logique pour
résoudre une contradiction. » Cet animal va servir d'intermédiaire, de médiateur entre deux oppositions : la vie/la
mort, et deux catégories d'animaux, les herbivores et les prédateurs. Le passage entre ces univers opposés devient
alors possible. Le coyote, prédateur mais aussi charognard, à cheval entre les herbivores symbole de vie et
d'agriculture, et les prédateurs, symbole de mort et de guerre.
Le mythe a ainsi pour fonction de médiatiser les contradictions fondamentales de l'existence.
Par son érudition considérable, Claude Levi-Strauss réussit à faire une synthèse remarquable de tous les grands
courants de la pensée ethnologique utilisant les idées des uns pour rejeter ou nuancer celle des autres.
Il renverse ainsi le point de vue traditionnel de l'anthropologie en mettant en évidence les membres secondaires de
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la famille et en centrant son analyse non plus seulement sur les unités mais plutôt sur les relations qu'elles
entretiennent les unes avec les autres.
Avec l'aide de la méthode structuraliste, Lévi-Strauss a donné un nouveau souffle aux études sur la parenté. Il est le
premier à avoir insisté sur l'importance de l'alliance au sein des structures de parenté, et souligné la nécessité de
l'échange et de la réciprocité découlant du principe de prohibition de l'inceste.
Dans cette optique, il est allé jusqu'à avancer l'idée que toute société humaine est fondée sur une unité minimale de
parenté : l'atome de parenté. Cette théorie globale est connue plus communément sous le nom de « théorie de
l'alliance ».
Depuis ses premiers travaux sur les indiens du Brésil qu'il avait étudiés sur le terrain entre 1935 et 1939 et la
publication de sa thèse Les Structures élémentaires de parenté paru en 1949, il a produit une oeuvre scientifique
dont les apports ont été reconnus au plan international.
Françoise Héritier, qui lui a succédé au Collège de France, résume ainsi son héritage :
« Nous avons découvert avec stupéfaction qu'il y avait des mondes qui n'agissaient pas comme nous. Mais aussi
que derrière cette différence apparente, derrière cette rupture radicale avec notre propre réalité, on pouvait mettre en
évidence des appareils cognitifs communs. Ainsi, nous prenions à la fois conscience de la différence et de
l'universalité. Tel est son principal legs, encore aujourd'hui : nous sommes tous très différents, oui, mais nous
pouvons nous entendre, car nos structures mentales fonctionnent de la même manière. »
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