I
FMC
En 2000, La dénutrition tou-
chait 7% des personnes âgées,
et ceci bien que les besoins des
séniors ne soient que très peu
modifiés avec l’âge, et qu’ils
soient identiques à ceux de
l’adulte.
Si la vieillesse est parfois un
naufrage, elle devient de plus
en plus un nouvel âge. La lon-
gévité ouvre de nouveaux hori-
zons qui sont loin d’avoir été
tous explorés. Le troisième âge
a longtemps servi de cache
misère à la vieillesse. Mais
aujourd’hui il faut parler de
seniors pour « faire tendance ».
Beaucoup de celles et ceux qui
ont dépassé la cinquantaine
sont d’ailleurs des seniors qui
s’ignorent. Dès le demi siècle,
chacun et chacune basculent
sans toujours bien s’en rendre
compte dans ce nouvel âge. Au
baby-boom de la fin des années
40 correspond le papy-boom
des années 2000. Les seniors
représentent déjà plus d’un
tiers de la population. En 2040
la moitie des français aura plus
de 50 ans. Si les experts ne par-
lent plus de « vieillissement de
la population », la « révolution
de la longévité » est bel et bien
en marche. Tous ces aspects
économiques, médicaux,
sociaux, culturels, politiques, et
éthiques sont loin d’avoir été
mesurés. Cette longévité, qui
correspond au maximum de sur-
vie des individus dans des
conditions idéales de vie, pour-
rait atteindre 120 ans et la
vieillesse ne commencer
qu’à…100 ans (près de 150.000
centenaires prévues en 2050).
En théorie le vieillissement ne
modifie que légèrement le sta-
tut nutritionnel. En pratique un
certain nombre de personnes
âgées sont dans un état plus ou
moins grave de dénutrition. Or
la dénutrition constitue, par sa
fréquence et ses conséquences
un véritable problème de santé
publique. Elle conditionne
notamment une certaine vulné-
rabilité. Les pathologies infec-
tieuses (pneumopathies ou
infections urinaires) sont 2 à 6
fois plus fréquentes et la durée
d’hospitalisations est 2 à 4 fois
plus longue chez le sujet âge
dénutri. La mortalité aussi est 4
à 8 fois plus importante chez
ces sujets. Dépister ces cas est
une mission qui incombe à l’en-
tourage familial et médical de
la personne âgée.
Cette malnutrition protéino-
énergétique touche 2 à 4% des
sujets vivants à leur domicile, et
souvent plus de 50% des sujets
hospitalisés. C’est la pathologie
la plus fréquente en gériatrie et
sa fréquence augmente avec
l’âge. La diminution des apports
alimentaires a de nombreuses
causes : altération de la dentu-
re, du goût, hyperconsomma-
tion médicamenteuse, régimes
trop stricts. Mais la principale
en est les troubles de régulation
de l’appétit qui expliquent la
très grande susceptibilité du
sujet âgé à entrer en anorexie
chronique. Celle-ci est d’ autant
plus dangereuse que le rende-
ment métabolique est altéré
chez les sujets âgés (diminution
du renouvellement protéique,
troubles de la glycorégula-
tion…), avec augmentation de
la consommation des réserves
nutritionnelles de l’organisme,
lors de toute pathologie inflam-
matoire. C’est le plus souvent la
survenue d’une maladie qui fait
entrer le sujet âge dans l’ano-
rexie ou la malnutrition protéi-
no-énergétique.
EVALUATION DE L’ETAT NUTRI-
TIONNEL
Des signes qui attirent l’atten-
tion
Le poids n’est pas un critère
définitif en ce qui concerne la
dénutrition. Pour évaluer la
dénutrition de la personne
âgée le médecin va s’appuyer
sur un interrogatoire détaillé. Il
cherchera des facteurs ayant pu
modifier les habitudes alimen-
taires. Pour le docteur Monique
FERRY, lauréat du prix de la
recherche en nutrition 1999 de
l’institut français pour la nutri-
tion (IFN), la malnutrition pro-
téino-énergétique peut trouver
son origine de différentes
manières « un environnement
inadapté comme un apparte-
ment au 4eme étage pour un
sujet qui présente une arthrose
de hanche est l une des causes
les plus fréquents de malnutri-
tion domicile ». Elle énumère
ensuite d’autres causes : l’insuf-
fisance de ressources finan-
cières, l’isolement et la solitude,
pouvant entrainer une dépres-
sion, les petites handicaps fonc-
tionnels comme une arthrose
de la main, une diminution de
la vision, des probmes den-
taires, des traitements médica-
menteux.
Les médicaments sont parfois
responsables de carences qu’il
conviendra de combler à l’aide
d’un régime adapté. Ainsi,
entre autres, les médicaments
de la sphère digestive, comme
l’hydroxyde d’alumine, favori-
sent l’apparition d’une ostéo-
malacie et dune carence en
phosphore. Le bicarbonate de
sodium entraine une surcharge
en sodium et magnésium. Les
laxatifs et huiles minérales peu-
vent être responsables d’hypo-
calcémie, d’ostéomalacie, de
malabsorption ou de pertes
digestives de vitamines (A, D, E,
et K), de beta carotène. Les
antibiotiques modifient la flore
digestive ainsi que le métabolis-
me du fer et de la vitamine C.
Certains médicaments cardio-
vasculaires altèrent le goût…
Evaluation du pronostic
Pour corréler ces modifications
à la dénutrition, il existe des
indices :
Le rapport entre le poids et la
taille (le BMI ou l’indice de mas-
se corporelle : poids/taille². En
dessous de 22 (le seuil est plus
élevé que chez l’adulte), il faut
considérer le malade comme
malnutri.
Les protéines de l inflamma-
tion, C.R.P. > 20 mg/Litre
Le taux d’albumine circulant,
< 35 g/Litre.
Ces mesures se complètent par
l’appréciation de la composition
corporelle grâce à l’impédance-
métrie. Tout ces paramètres
sont d’excellents marqueurs du
devenir du malade âgé que la
variable étudiée soit la mortali-
té, la perte d’autonomie, la
durée d’hospitalisation, ou l’en-
trée en Institution.
Échelle de dépistage
L’association des différentes
paramètres diagnostiques et
pronostiques a conduit a la
création d échelles de dépistage
de la malnutrition c est le cas
du mini « nutritional assess-
ment » qui repose sur un score
sur 30 points. Ces échelles de
dépistage sont destines avant
tout aux médecins généralistes.
Le sujet dépisté à l’aide d’une
de ces grilles doit ensuite béné-
ficier d un examen visant à pré-
ciser le type de la malnutrition,
ses causes, et sa sévérité.
LES DIFFERENTES TYPOLOGIES
DE L’ETAT DE DENUTRITION
Cas de la dénutrition exogène :
Cette dé nu trition e xo gène
résulte d’une carence d’apport
et se traduit par une perte de
poids progressive. Il convient
alors de sensibiliser le patient
sur les risques qu’il encourt s’il
ne s’alimente plus. Il faut tenter
de lui réapprendre à s’alimenter
en insistant sur la nécessite de
faire trois vrais repas quotidiens.
Il faut parfois lui apprendre à
mieux se repérer dans le temps,
afin de développer le réflexe de
lheur e de repas, et lui
apprendre à choisir ses aliments
afin de privilégier les apports
vitamino-calorico-protidiques.
C’est qu’intervient le conseil
du pharmacien qui choisira des
compléments type «TIPS » (tarif
interministériel de prestation
sociale) ayant des qualités gus-
tatives proches des produits de
l’alimentation (crèmes desserts,
soupes, mixés, jus de fruits, col-
lations hyper protidiques). Le
marché de ces produits TIPS en
ville est d ailleurs en constante
augmentation. De nouveaux
produits sont commercialisés
presque tous les jours.
Ils sont pris en charge par la
Sécurité Sociale, mais sont
réservés aux patients associant
une dénutrition caractérisée
avec une perte de poids supé-
rieure à 5% du poids habituel
(personnes âgées, Alzheimer…)
ou dans le cas d’une pathologie
figurant parmi celles inscrites à
L.P.P. (Liste Produit Prestation) :
mucoviscidose, VIH-Sida, mala-
die neuromusculaire, épidermo-
lyse bulleuse, tumeur). La prise
en charge est initiée sur pres-
cription.
Cas de la dénutrition endogène
:
La dénutrition endogène est
liée à un état inflammatoire
anormal entrainant une des-
truction cellulaire non compen-
sée par l’alimentation. Le méde-
cin cherchera une cause déter-
minée comme les plaies vari-
queuses, une bronchite
chronique, des escarres…
La nutrition devient un soin
d’accompagnement, ne pou-
vant résoudre seul le problème.
Le médecin aura éventuelle-
ment recours à la nutrition
entérale, mais seulement avec
l’accord du patient ou de la
famille. Cette dernière est
apportée par le biais d’une son-
de (généralement nasogas-
trique) lorsque la nutrition est
de courte durée. Au-delà d’un
mois, on met en place une sto-
mie (gastrostomie ou jéjunosto-
mie). L’apport calorique doit
être de 35 à 45 kcal/kg/jour. Il
faut toujours préférer la nutri-
tion entérale, à l’alimentation
parentérale en gériatrie. Elle est
plus physiologique notamment
pour ce qui concerne la fonc-
tion digestive.
Il existe des cas de dénutrition
qui associent les deux situa-
tions. Il s’agit de patients ano-
rexiques atteints de cancer, en
cours de chimiothérapie ou en
fin de vie. Cette dénutrition est
la plus difficile à gérer et néces-
site souvent de recourir au
moins temporairement à une
nutrition artificielle. Il faut tenir
compte du pronostic de la
pathologie associée à la malnu-
trition et ne pas commencer
une nutrition artificielle chez
un patient au stade terminal. A
l’inverse, une pathologie
curable implique un traitement
curatif et une re-nutrition rapi-
dement efficaces.
En conclusion, Il faut préférer :
L’alimentation orale à l’alimen-
tation artificielle,
La nutrition entérale à la nutri-
tion parentérale
Mais savoir introduire rapide-
ment le mode de nutrition
adaptée.
(Chapitre 52 : le sujet âgé par B.
LESOURD et M. FERRY)
LES DIFFERENTS TRAITEMENTS
DE LA DENUTRITION
La complémentation orale
Beaucoup plus facile à mettre
en place que la nutrition enté-
rale, la complémentation orale
est basé sur la prise de prépara-
tions orales par la bouche, chez
une personne bénéficiant de
fonctions digestives hautes
intactes et ne présentant pas de
troubles de la déglutition ou de
conscience, occlusion intestina-
le, etc.…Elle peut compléter la
nutrition par sonde, en prendre
le relais ou être prescrite d’em-
blée par le médecin.
Les produits de complémenta-
tion orale sont des préparations
Imane HALLAK-BODINIER,
Docteur en Pharmacie
Nutrition du sujet âgé
La malnutrition des personnes âgées n’est pas une fatalité
4 • MEDILIEN 70 - Janvier -vrier - Mars 2011 www.associationmedicalefrancolibanaise.com
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