L’agriculture et l’élevage,
des priorités pour nourrir
la planète : la santé animale,
bien public mondial
L’agriculture et l’élevage ne sont pas considérés, en tant
que tels, comme des biens publics mondiaux mais ils sont
indirectement concernés du fait de leur impact sur la santé
humaine et animale.
En effet, certains biens publics mondiaux sont
interdépendants et des synergies peuvent même apporter
des bénéfices mutuels. Des progrès dans un domaine
peuvent engendrer des améliorations dans d’autres
secteurs.
La santé animale a pu ainsi être prise en compte grâce aux
interconnections avec les enjeux :
– de santé publique, liés aux zoonoses,
– de protection de l’environnement et de la biodiversité,
liés aux maladies et à la préservation de la faune sauvage,
– du développement durable, compte tenu de l’évolution
des systèmes de production.
Depuis plusieurs années, les crises alimentaires ont rappelé
aux décideurs mondiaux que « nourrir la planète » restait
une priorité primaire essentielle alors que les trois quarts
des familles pauvres ne subsistent que par leur production
agricole vivrière et que l’impact des maladies animales sur
leur cheptel obère significativement leurs ressources et
l’avenir de leurs enfants.
Désormais, non seulement la santé mais aussi l’agriculture
et l’élevage sont des sujets inscrits systématiquement à
l’agenda des grandes instances internationales G8 et G20.
Améliorer la production agricole est reconnu comme une
nécessité pour lutter contre la faim et la pauvreté.
La première réunion des ministres de l’Agriculture du G20,
tenue à Paris les 22 et 23 juin 2011 en est l’expression la
plus parfaite. Face à une situation toujours préoccupante,
les ministres ont rappelé la nécessité de politiques agricoles
plus efficaces à l’échelle mondiale et nationale et le besoin
d’une meilleure coordination internationale (8).
Les ministres ont notamment insisté « sur l’importance, en
matière de santé publique, animale et végétale, de renforcer
les réseaux internationaux et régionaux, l’établissement de
normes internationales tenant compte des différences
nationales et régionales, les systèmes d’information, de
surveillance et de traçabilité, la bonne gouvernance et les
services officiels, car ils permettent de détecter
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précocement et de réagir rapidement aux menaces
biologiques, facilitent les flux commerciaux et contribuent
à la sécurité alimentaire mondiale. [Les ministres ont
encouragé] les organisations internationales, notamment
l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et
l’agriculture (FAO), l’OMS, l’OIE, la Commission du
Codex Alimentarius (Codex), la Convention internationale
pour la protection des végétaux (CIPV) et l’Organisation
mondiale du commerce (OMC) à poursuivre leurs efforts
de coopération permettant ainsi une meilleure mobilisation
des financements publics et privés pour des programmes et
initiatives. »
L’orientation des engagements des principaux bailleurs
de fonds publics (Banque mondiale, Union européenne)
ou privés (fondations) témoigne de la prise en compte de
cette nouvelle approche. La prévention et le contrôle
des maladies animales transmissibles et le risque pour les
populations sont considérés comme relevant de l’intérêt
général international. Et l’intérêt d’encourager
les programmes de prévention pour diminuer les risques
est également un message entendu (11). « Mieux vaut
prévenir que guérir » !
La crise économique et sociale liée à l’influenza aviaire dans
les années 2005-2006 a vraisemblablement permis cette
prise de conscience, confortée par plusieurs études
économiques internationales rappelant le coût exorbitant
des crises sanitaires dues à des maladies animales.
Ainsi, trois études économiques commanditées par l’OIE
sur la prévention et le contrôle des maladies animales dans
le monde, cofinancées par la Banque mondiale et
présentées lors d’une conférence organisée conjointement
par la Banque mondiale et l’OIE en collaboration avec
la FAO, ont-elles mis en évidence que le coût de la
prévention de ces maladies grâce à des réseaux de
surveillance appropriés d’éleveurs et de vétérinaires, restait
extrêmement faible comparé à celui des crises (cf. Partie I :
Analyse économique – Coûts comparés de la prévention et
de l’éradication des foyers). Ces études ont également
souligné l’importance de la gouvernance vétérinaire (9).
Dans la même ligne, le rapport publié par la Banque
mondiale en 2010 sous le titre People, Pathogens and Our
Planet; Volume 1: Towards a One Health Approach for
Controlling Zoonotic Diseases (1) a mis en exergue, chiffres à
l’appui, que les maladies animales ont un impact
économique essentiel sur la pauvreté et un impact
significatif sur la santé des populations, handicapant
l’atteinte des Objectifs du millénaire pour le
développement. À titre d’exemple, les rédacteurs du
rapport estiment que les crises liées à l’encéphalopathie
spongiforme bovine (ESB), au syndrome respiratoire aigu
sévère (SRAS) et à la grippe aviaire due au virus H5N1 ont
coûté plus de 20 milliards de dollars US au titre des pertes
économiques directes au cours de la dernière décennie, et