
adaptation des posologies ). Le papa étant HIV+ et l’objet souillé, l’enfant est à traiter après
avoir effectué un bilan initial biologique et sérologique.
Le traitement comporte trois antirétroviraux : l’AZT ( RETROVIR ), le 3TC ( EPIVIR ) et le
Nelfinavir ( VIRACEPT ), à mettre en route au maximum dans les 48 heures suivant
l’exposition, puis se mettre en contact dès le lundi matin avec l’un des référents, M. M ou
Mme B, aux urgences pédiatriques de l’hôpital l’ Archet avec prise de rendez-vous dans les
trois jours pour décision thérapeutique : arrêter ou poursuivre le traitement.
Bien évidemment au SAU, nous ne possédons que des traitements dont la galénique, déjà
problématique pour les adultes, se trouve inadaptée aux posologies de l’enfant notamment de
trois ans ( poids de 18kgs ).
Il fut donc nécessaire de contacter la pharmacienne de garde sur l’hôpital pour réussir à se les
procurer en cette fin de dimanche. Ce type de produits, n’étant pas disponible sur Cannes, elle
devait se renseigner sur les autres sites hospitaliers des environs et me tenait au courant dès
que possible. Pendant ce temps, je décidai alors de m’attacher à informer et à rassurer la mère
d’A .
Le taux de transmission du HIV est faible par rapport aux taux d’attaque d’autres virus, et le
rasoir, bien que souillé, n’avait pas été utilisé depuis 48 heures. D’autre part, le taux de
contagiosité dépendait vraisemblablement de la charge virale présente chez le père. Elle
semblait rassurée, son visage se détendait momentanément. Elle sourit lorsque notre attention
se porta sur notre petit patient ; A. , réservé au départ, s’était émancipé pendant notre
conversation, les jeux de son âge allégeant l’atmosphère de la pièce. J’admirais cette maman
en apparence si calme mais qui devait penser à mille choses à la fois. Elle restait avenante et à
l’écoute de tout ce que je lui rapportais. Passée la phase d’urgence, la tension retomba quelque
peu. Elle se confia : aucun membre de sa famille ni de sa belle famille n’avait été mis au
courant de la situation. Elle ne savait pas vers qui se tourner et craignait que le secret ne soit
découvert avant d’être dévoilé. Elle devait en effet passer le lendemain en famille et, sans
l’avouer, semblait ressentir le besoin d’être épaulée par des proches avertis : ce secret ne
facilitait pas l’ensemble de ses démarches.
Je lui conseillai de sortir faire un tour pour s’aérer, elle et son enfant, et de se représenter à
l’accueil des urgences d’ici trois quarts d’heure.
Entre temps, la pharmacienne de garde avait réussi à trouver les produits en poudre ou en
suspension buvable sur la pharmacie de l’hôpital de Grasse et à envoyer un coursier rapide les
chercher. Nous les avons donc reçus finalement dans un délai relativement court mais qui
avait permis à la maman de déposer son enfant et de revenir accompagnée de son frère et de
sa belle-sœur ( à qui elle s’était confiée ) afin de récupérer le traitement.
Je m’isolais avec elle pour lui expliquer les modalités d’administration ainsi que les
posologies à donner à A. . Tout est bien pensé pharmacologiquement ( seringue graduée,
cuillère à mesure ) mais le traitement n’en reste pas moins lourd et astreignant. Pour diminuer
son inquiétude, je notai lisiblement le récapitulatif de l’ensemble des informations que je lui
transmettais oralement sur une feuille qu’elle emmènerait avec elle en rentrant : DC,
posologies, horaires de prise, numéros à contacter. Le jeune A. souffrant en ce moment d’une
banale gastro-entérite virale, je lui dis d’en profiter pour lui faire prendre les médicaments
sous ce prétexte d’autant plus que ça pouvait permettre de « dissimuler » les effets
indésirables auxquels il était exposé : nausées, vomissements, diarrhées. Elle sembla
reprendre le dessus malgré tous les problèmes qu’elle rencontrait ; restait un dernier souci : il
serait préférable qu’A. n’aille pas à l’école afin de prendre des médicaments et d’aller à la
consultation spécialisée. De son côté, la maman devait elle aussi être arrêtée deux trois jours
sans pour autant que l’école ou l’employeur ne soient mis au courant de la situation réelle.