Chromogranines et phéochromocytome Chromogranins and pheochromocytoma Y. Anouar*, L. Yon* points FORTS ▲ Les principaux membres de la famille des chromogranines ou granines sont la chromogranine A (CgA), la chromogranine B (CgB) et la sécrétogranine II (SgII). ▲ Les granines sont des constituants majoritaires des granules de sécrétion des cellules endocrines, neuroendocrines et nerveuses, et sont colibérées avec les hormones et les neurotransmetteurs après stimulation de ces cellules. ▲ La CgA joue un rôle physiologique dans la formation des grains de sécrétion dans les cellules chromaffines de la médullosurrénale et l’invalidation de son gène entraîne une hypertension artérielle. ▲ Les granines donnent naissance à des peptides biologiquement actifs après maturation dans les grains de sécrétion. ▲ La CgA, la SgII et des peptides dérivés sont fortement exprimés dans les phéochromocytomes et leurs concentrations sont élevées dans la circulation de patients atteints de ce type de tumeur. La CgA est un marqueur plasmatique très sensible pour le diagnostic des phéochromocytomes. ▲ Le dosage tissulaire et plasmatique de peptides dérivés des granines, tel l’EM66 issu de la maturation de la SgII, est un moyen fiable et prometteur pour établir le diagnostic et le pronostic des phéochromocytomes. Mots-clés : Chromogranine – Sécrétogranine – Peptide – Phéochromocytome – Diagnostic – Pronostic. Keywords: Chromogranin – Secretogranin – Peptide – Pheochromocytoma – Diagnosis – Prognosis. L es chromogranines/sécrétogranines, également connues sous le terme générique de granines, représentent une classe de protéines sécrétées qui est exprimée dans les cellules endocrines, neuroendocrines et nerveuses. Les principales granines sont la chromogranine A (CgA), la chromogranine B (CgB) et la sécrétogranine II (SgII), même si plusieurs protéines présen* Inserm U413, université de Rouen, MontSaint-Aignan. tant des caractéristiques physicochimiques similaires ont été décrites (1). Les granines CgA, CgB et SgII sont constituées d’environ 400 à 650 acides aminés, ont un caractère acide puisque leur contenu en résidus acides peut atteindre 30 % et sont codées par des gènes uniques dont les loci sont situés dans des régions de chromosomes homologues où l’ordre des gènes est conservé chez différentes espèces (tableau, p. 62). L’expression des différentes granines est associée à la voie de sécrétion régulée, mécanisme cellulaire permettant aux cellules nerveuses et (neuro)endocrines de libérer les neurotransmetteurs et les hormones en grande quantité uniquement en réponse à une stimulation. En effet, les granines sont des constituants majeurs des granules dits “à cœur dense” du fait de leur aspect en microscopie électronique à transmission (figure 1, p. 62), présents dans les cellules sécrétrices spécialisées. Dans ces granules de sécrétion, les granines sont costockées avec les hormones, les neurotransmetteurs et divers neuropeptides. De ce fait, leur libération dans le milieu extracellulaire et dans la circulation est contrôlée par de multiples facteurs régulateurs qui, généralement, agissent à la fois sur la sécrétion du neurotransmetteur ou de l’hormone spécifique de la cellule nerveuse ou endocrine et sur celle d’au moins une granine. À titre d’exemple, la biosynthèse et la libération des granines sont contrôlées de façon gène-spécifique par les estrogènes dans l’hypophyse (2) ou par les glucocorticoïdes ou certains neurotransmetteurs dans la médullosurrénale (3). Les mécanismes moléculaires régissant ces régulations ne sont pas complètement élucidés, même si plusieurs études ont indiqué l’importance fonctionnelle d’éléments géniques de type cAMP response element (CRE) systématiquement présents sur les promoteurs des gènes des différentes granines. La spécificité d’expression et de régulation de chaque gène d’une granine est probablement dictée par d’autres éléments géniques et des facteurs cellulaires spécifiques dont Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 2, mars/avril 2006 et paragangliome Phéochromocytome 61 Phéochromocytome et paragangliome Tableau. Propriétés des granines chez l’homme. Localisation chromosomique Résidus Précurseur Protéine mature Masse moléculaire (kD)a Calculée Apparente Résidus acides (% E + D) Point isoélectrique (pHi) Sites multibasiquesb Pont disulfure CgA 14q32 CgB 20pter-p12 SgII 2q35-q36 457 439 677 657 617 590 49 74 21 + 4 4,37 10 17-38 76 120 18 + 6 4,83 15 16-37 68 86 13 + 7 4,47 9 Non CgA : chromogranine A ; CgB : chromogranine B ; SgII : sécrétogranine II. a La masse moléculaire est déduite de la structure primaire. La masse moléculaire apparente est déterminée par électrophorèse sur gel de polyacrylamide-SDS. b Les sites multibasiques correspondent aux sites contenant deux résidus R ou K consécutifs ou plus. Figure 1. Photographies prises en microscopie électronique illustrant le confinement des granines dans les granules de sécrétion (flèches orange) de cellules endocrines et neuroendocrines : des réactions immunocytochimiques révèlent la présence de la SgII (grains noirs dans les vésicules denses aux électrons) dans une cellule chromaffine (Ch) de la médullosurrénale, ainsi que dans les cellules gonadotrope (Gn) et lactotrope (PRL) de l’hypophyse. Voie de sécrétion constitutive CgA CgB Hormones RER Voie de sécrétion régulée Cis-Golgi Trans-Golgi Figure 2. Schéma illustrant le rôle intracellulaire de la CgA et de la CgB dans l’empaquetage des hormones et neurotransmetteurs au cours de la formation des grains de sécrétion. Les granines s’agrègent dans le trans-Golgi et interagissent en même temps, par l’intermédiaire de leur région N-terminale, avec la membrane des granules. Elles permettent ainsi le tri des produits qui seront libérés par la voie régulée et le bourgeonnement des vésicules de sécrétion renfermant ces produits. RER = réticulum endoplasmique rugueux. 62 Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 2, mars/avril 2006 l’existence a été suggérée par plusieurs études (4), mais dont l’identité reste inconnue. La fonction des granines est demeurée énigmatique durant de nombreuses années après leur identification. Toutefois, des avancées majeures ont été réalisées récemment dans la compréhension de leur rôle, que ce soit sur le plan intracellulaire dans la formation des granules de sécrétion ou extracellulaire en tant que peptides biologiquement actifs. Fonctions intracellulaires des granines La séquence des granines est riche en résidus acides qui peuvent représenter jusqu’au tiers de la composition globale en acides aminés. Des expériences in vitro ont permis de montrer que cette propriété des granines est à la base de leur capacité à s’agréger en présence de concentrations élevées de calcium à pH acide, conditions caractéristiques du milieu intragranulaire (5). Ces observations ont permis de suggérer que les granines pourraient être impliquées dans la formation des grains de sécrétion. En effet, les granines peuvent jouer un rôle de protéines chaperonnes facilitant l’agrégation et le stockage du contenu des vésicules de sécrétion lors de leur bourgeonnement à partir de l’appareil de Golgi (figure 2). Cette hypothèse est restée longtemps débattue, jusqu’à ce que l’équipe de Y.P. Loh (6) ait montré en 2001 que l’inhibition de l’expression de la CgA entraînait une diminution importante du nombre de vésicules de sécrétion et de la libération hormonale dans des cellules neuroendocrines. D’autres études ont ensuite montré que la CgB et la SgII sont également capables d’induire la formation de structures apparentées aux grains de sécrétion dans des cellules normalement dépourvues de voie de sécré- tion régulée (7, 8). Ces données obtenues dans des modèles cellulaires ont été récemment confirmées par des expériences d’invalidation du gène de la CgA in vivo. Une première étude utilisant des animaux transgéniques a permis de montrer que l’expression de la CgA est directement corrélée à la capacité de cellules sécrétrices, telles que les cellules chromaffines de la médullosurrénale, à générer des vésicules de sécrétion (9). Dans une autre étude où le gène de la CgA a été invalidé par recombinaison homologue, les auteurs ont montré que non seulement la formation des granules est affectée chez les souris transgéniques, mais qu’en plus la pression artérielle est élevée chez ces animaux et que le taux des catécholamines est effondré dans la médullosurrénale, alors qu’il est augmenté dans le sang, suggérant que l’absence de CgA est responsable d’une libération accrue de catécholamines entraînant une source d’hypertension (10). L’ensemble de ces données obtenues in vitro et in vivo plaide en faveur d’un rôle physiologique des granines, notamment la CgA, dans le stockage et la libération des hormones. D’autres rôles intracellulaires ont été proposés pour certaines granines. À titre d’exemple, il a été montré que la CgA et la CgB sont impliquées dans la mobilisation du Ca 2+ intracellulaire, puisque ces granines se lient au récepteur des inositols phosphates présents sur la membrane des grains de sécrétion pour faciliter la libération de Ca2+ (11). Il a également été montré qu’une fraction immunoréactive de la CgB présente dans les cellules PC12 est localisée dans le noyau, et que la granine est capable de stimuler ou d’inhiber la transcription de différents gènes, y compris des facteurs de transcription, lorsque son gène est transfecté dans des lignées cellulaires de neuroblastome (12). La signification physiologique de ces résultats n’est pas encore claire. Fonctions extracellulaires des granines La possibilité que les granines puissent être des précurseurs de peptides actifs a été proposée lorsqu’un peptide isolé à partir du pancréas, appelé pancréastatine (PST) et capable d’inhiber la libération d’insuline, a été identifié comme étant un fragment de la CgA. En effet, le clonage pour la première fois d’une granine, la CgA, a révélé que cette protéine contenait de nombreux sites dibasiques de clivage par des prohormones convertases (PC) et que la PST pouvait être un produit de maturation de la CgA à la suite de l’action de ces enzymes (13). La présence de sites de maturation pouvant donner naissance à des peptides a été retrouvée dans d’autres granines telles que la CgB et la SgII, et des peptides dérivés de ces granines exerçant des activités biologiques ont été identifiés dans de nombreux tissus. Ainsi, la CgA est également le précurseur de peptides appelés vasostatine (VST) et catestatine (CST) (1). La VST inhibe la vasoconstriction de vaisseaux sanguins humains isolés et l’adhésion de cellules musculaires lisses d’artères coronariennes. La CST inhibe la libération de catécholamines à partir des cellules chromaffines de la médullosurrénale en bloquant le récepteur nicotinique de l’acétylcholine, principal régulateur physiologique de cette glande. Des résultats récents indiquent que des variations de la concentration de ce peptide seraient à l’origine de cas d’hypertension artérielle (14). D’autre part, la VST et la CST sont dotées d’activités antimicrobienne et antifongique et pourraient être impliquées dans la défense contre des agents pathogènes (15). Parmi les autres peptides dérivés des granines exerçant des activités biologiques, citons également l’exemple de la sécrétoneurine (SN), un peptide de 33 acides aminés dérivé de la SgII qui joue un rôle important dans la communication entre le système neuroendocrine et le système immunitaire (16). La caractérisation moléculaire des granines chez des espèces inframamaliennes a permis ces dernières années de découvrir de nouveaux peptides dont les séquences ont été conservées au cours de l’évolution, témoignant de rôles importants qui restent encore à déterminer (17). Certains de ces peptides tels que l’EM66 dérivé de la SgII ou le WE14 dérivé de la CgA sont présents dans des tissus endocrines tels que l’hypophyse ou la surrénale (18-20). et paragangliome Phéochromocytome Granines et phéochromocytome Les granines et les peptides issus de leur maturation sont exprimés dans de nombreuses tumeurs neuroendocrines telles que les carcinoïdes gastro-intestinaux, les carcinomes médullaires thyroïdiens, les adénomes hypophysaires, les carcinomes bronchiques et mammaires et les phéochromocytomes (1). La détection aisée de ces protéines et leur sécrétion dans la circulation ont permis d’envisager leur utilisation en tant que marqueurs de certaines néoplasies neuroendocrines. L’intérêt s’est porté principalement sur la CgA, puisque cette protéine a été la première identifiée de cette famille, plus de quinze ans avant toute autre granine. Dosage de la CgA La mise au point d’un dosage radioimmunologique de la CgA circulante chez des patients atteints d’un phéochromocytome a permis de démontrer l’intérêt de cette protéine en biologie clinique (21). Ce premier dosage de la CgA utilisait un traceur marqué à l’iode 125, de la CgA humaine purifiée à partir d’un Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 2, mars/avril 2006 63 Phéochromocytome et paragangliome phéochromocytome et un anticorps polyclonal. Par la suite, de nombreuses équipes ont développé des méthodes de dosage de la CgA utilisant d’autres traceurs (enzymatiques), d’autres anticorps (monoclonaux, polyclonaux) et d’autres standards (CgA bovine). Des résultats divergents par rapport à la méthode de référence ont été constatés, principalement en raison du niveau de purification variable du traceur et des différents anticorps utilisés susceptibles de reconnaître des épitopes distincts. Il est généralement recommandé d’utiliser des dosages immunométriques fondés sur l’emploi d’anticorps dirigés contre la partie médiane de la CgA, puisque cette protéine est soumise à une protéolyse précoce sur ces extrémités carboxy- et amino-terminales. Actuellement, trois trousses de dosage plasmatique de la CgA sont commercialisées par DakoCytomation, Cis-Bio International et Eurodiagnostica. La sensibilité et la spécificité diagnostique de chacune de ces trousses testées sur une série de 46 patients atteints de tumeurs neuroendocrines ont montré que, selon la trousse utilisée, la sensibilité variait de 67 à 93 % et la spécificité de 85 à 96 % (22) ! Ces observations doivent donc être prises en compte par le clinicien pour l’interprétation des tests diagnostiques. Sensibilité et spécificité du dosage plasmatique de la CgA Chez les patients porteurs de tumeurs neuroendocrines, la sensibilité du dosage de la CgA circulante dépend principalement de trois paramètres : le volume tumoral, le siège de la tumeur primitive et l’existence d’une sécrétion hormonale associée. Les phéochromocytomes surrénaliens font partie de la catégorie des tumeurs neuroendocrines à forte sécrétion de CgA et pour lesquelles la sensibilité du dosage de la protéine varie de 76 à 100 %. D’autre part, il a été montré que les concen- 64 trations de CgA sont corrélées de façon linéaire à la taille de la tumeur (23). On peut donc s’attendre à des valeurs normales (faux négatifs) dans les petites tumeurs, par exemple la majorité des paragangliomes de la tête et du cou. Par ailleurs, comme mentionné précédemment, les concentrations circulantes de CgA sont directement corrélées à l’existence d’une sécrétion, et on peut donc également s’attendre à des valeurs normales dans certains paragangliomes non sécrétants. De fait, une étude portant sur une série de 25 patients atteints de paragangliomes rapporte une sensibilité du dosage de la CgA de 8 % seulement, alors que l’énolase spécifique du neurone, un autre marqueur général des tumeurs neuroendocrines, présente une sensibilité presque cinq fois supérieure (24). La mesure de la CgA plasmatique peut également être à l’origine de faux positifs dus à un stress majeur, une insuffisance rénale ou une hypergastrinémie secondaire (inhibiteurs de la pompe à protons, gastrite atrophique, maladie de Biermer). Dans 9 cas sur 10, les patients porteurs d’un phéochromocytome présentent des signes d’hypertension artérielle témoignant de l’hypersécrétion de noradrénaline. Plusieurs études ont donc été menées afin d’évaluer la spécificité du dosage de la CgA à partir de patients atteints d’hypertension artérielle essentielle. Des résultats contradictoires ont été observés, certaines études rapportant une élévation des concentrations de CgA (25, 26) alors que d’autres ne relevaient aucune différence significative vis-à-vis de témoins normotendus (23, 27). Dosage d’autres granines et peptides dérivés Bien que la CgA soit un marqueur fiable couramment utilisé en clinique, la détection immunohistochimique et la quantification plasmatique d’autres granines ou de Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 2, mars/avril 2006 peptides dérivés peuvent également avoir un intérêt pour le diagnostic des tumeurs neuroendocrines (1). À titre d’exemple, les prolactinomes présentent une immunoréactivité de type CgB et SgII, mais sont dépourvues de CgA. D’autres néoplasmes neuroendocrines produisent de faibles quantités de CgA et, dans ces cas, la sensibilité du dosage de cette granine est faible, i.e. 25 % pour les cancers médullaires de la thyroïde et les tumeurs à cellule de Merkel, et 10 % pour les insulinomes et les paragangliomes. Une étude menée sur une série de tumeurs gastro-intestinales a démontré l’importance de combiner plusieurs marqueurs de la famille des granines, puisque les néoplasies rectales exprimaient plus fréquemment la SgII que la CgA (28). De nombreux travaux sont en cours pour caractériser de nouveaux marqueurs dérivés des granines. Une étude menée sur 27 échantillons plasmatiques a révélé une sensibilité identique, de l’ordre de 80 %, de la CgA et du peptide dérivé WE14 pour le diagnostic des phéochromocytomes, alors que ce peptide est plus sensible que la CgA pour le dépistage des paragangliomes (résultats non publiés). D’autre part, des études d’immunohistochimie et d’immunoblot ont permis de mettre en évidence la présence de la SgII dans les phéochromocytomes à des concentrations comparables à celles de la CgA (29, 30). Enfin, R. Ischia et al. (31) ont montré que les concentrations sériques de la SN augmentent d’un facteur 5 chez les patients porteurs d’un phéochromocytome. La mise au point d’un dosage radioimmunologique du peptide EM66 “flanquant” la SN au sein de la SgII a permis de démontrer une sensibilité de 100 % de ce dosage pour le diagnostic des phéochromocytomes (figure 3, p. 65), et de montrer qu’après exérèse de la tumeur les taux d’EM66 reviennent rapidement à des niveaux contrôles (32). Bien que ces résultats aient été obtenus à EM66 (ng/ml) 35 15 8 6 4 2 contrôles phéos Figure 3. Diagramme de dispersion des concentrations du peptide EM66 mesurées à partir d’échantillons plasmatiques de volontaires sains (contrôles) et de patients atteints de phéochromocytomes (phéos). Les barres représentent les valeurs médianes de chaque groupe. partir d’un faible échantillonnage et nécessitent d’être confirmés à une plus large échelle, il est clair que, dans les cas de phéochromocytome, mais également d’autres tumeurs neuroendocrines, la mesure de peptides dérivés des granines tels que l’EM66, la SN ou le WE14 pourrait être combinée à celle d’autres marqueurs biologiques pour la prise en charge et le suivi des patients. Les phéochromocytomes malins La majorité des phéochromocytomes (80-90 %) est bénigne et curable par exérèse chirurgicale, mais certains sont d’emblée ou secondairement d’évolution maligne et incurables. À l’heure actuelle, le seul critère indiscutable de malignité est la présence de métastases ganglionnaires ou à distance (33). Certains paramètres ont une valeur d’orientation du diagnostic vers une tumeur maligne, même si ces données restent à valider dans des séries conséquentes. En effet, une classification histopathologique permettant de différencier les phéochromocytomes bénins et malins a été proposée sur la base de divers paramètres tels que le site ectopique, le volume de la tumeur, l’invasion vasculaire, les nécroses ou l’activité mitotique (Ki67/Mib-1) (34). Toutefois, aucun marqueur biologique n’est disponible actuellement en clinique pour discriminer sans ambiguïté les deux types de phéochromocytomes. Le groupe de D.T. O’Connor (35) a observé une augmentation statistiquement significative des concentrations plasmatiques de la CgA chez les patients atteints d’un phéochromocytome malin comparé à ceux atteints d’une tumeur bénigne (188 versus 2 932 ng/ml), et que 100 % des patients présentant une concentration supérieure à 600 ng/ml étaient porteurs d’un néoplasme malin. D’autre part, il a été montré que la noradrénaline et la CgA constituaient des marqueurs sensibles de la réponse au traitement par chimiothérapie, i.e. cycles de 21 jours d’administration de cyclophosphamide/vincristine/dacarbazine, et de la rechute des patients atteints d’un phéochromocytome malin. D’un point de vue histopathologique, l’utilisation en immunohistochimie d’une série de 11 anticorps dirigés contre différentes régions de la CgA, de la CgB et de la SgII n’a révélé aucune différence quantitative entre phéochromocytomes bénins et malins. Néanmoins, dans cette série, deux anticorps dirigés contre les parties C-terminales de la CgB (CgB647-657) et de la SN ont permis de mettre en évidence de larges cellules fusiformes immunomarquées qui semblent spécifiques des néoplasmes malins (30). Le dosage de l’EM66 dans une série de 10 phéochromocytomes (6 bénins et 4 malins) a révélé que les concentrations de ce peptide étaient significativement plus élevées dans les phéochromocytomes bénins par rapport aux tumeurs malignes (36). Ces résultats ont été confirmés récemment dans une plus large série (21 bénins et 7 malins) (figure 4). En fait, la malignité des phéochromocytomes est associée à une réduction du taux d’expression des ARNm de la SgII et des prohormones convertases PC1 et PC2 conduisant à une diminution des concentrations des produits de maturation de la SgII tel l’EM66 (37). Ces observations méritent d’être approfondies afin de démontrer si les peptides dérivés des granines peuvent représenter des outils cliniques pour l’évaluation du pronostic des phéochromocytomes. Conclusion Combiné à la mesure des catécholamines urinaires ou plasmatiques, le dosage des concentrations de granines, par exemple la CgA, et de certains peptides dérivés, tel l’EM66, dans les phéochromocytomes et les tumeurs apparentées comme les paragangliomes représente un outil clinique intéressant pour affirmer le diagnostic et évaluer le pronostic de ces tumeurs du tissu chromaffine. Les résultats préliminaires obtenus avec le dosage du peptide EM66 sont très prometteurs et demandent à être validés dans des cohortes importantes. Les recherches sur les granines CgA, CgB et SgII, dont la fonction était restée indéterminée pendant plusieurs décennies, ont connu des développements importants ces dernières années, mais le rôle que jouent ces protéines au 104 EM66 (ng/mg protéine) 55 et paragangliome Phéochromocytome 103 102 10 1 bénins malins Figure 4. Diagramme de dispersion des concentrations du peptide EM66 mesurées à partir d’extraits tissulaires de phéochromocytomes bénins ou malins. Les barres représentent les valeurs médianes de chaque groupe. Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 2, mars/avril 2006 65 Phéochromocytome et paragangliome 66 cours de la tumorigenèse et de la différenciation des cellules tumorales reste largement inexploré. La connaissance de ce rôle pourra permettre de mieux cibler l’utilisation de ces protéines et des peptides dérivés en tant que marqueurs de différents types de tumeurs neuroendocrines, notamment les phéochromocytomes bénins ou malins, eutopiques ou ectopiques, et sporadiques ou héréditaires. Références 1. Taupenot L, Harper KL, O’Connor DT. The chromogranin-secretogranin family. N Engl J Med 2003;348:1134-49. 2. Anouar Y, Benie T, De Monti M et al. 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Faux : la CgA est un bon marqueur des phéochromocytomes, mais non des paragangliomes. 3. Vrai. 4. Faux : la concentration tissulaire de l’EM66 est plus faible dans les phéochromocytomes malins par rapport aux tumeurs bénignes. Les résultats d’une nouvelle étude renforcent la notion de précision et de fiabilité associée à FlexPen®, stylo d’insuline prérempli parmi les plus utilisés au monde Il s’agit des résultats de l’étude menée par T. Asakura comparant les stylos injecteurs FlexPen® et OptiClik® publiés dans Journal of Clinical Research 2005;8:33-40. Selon cette nouvelle étude, le stylo d’insuline prérempli FlexPen®, un des plus largement utilisés au monde, présente une meilleure précision des doses d’insuline délivrées que le stylo OptiClik® (doses de 10 U ou 30 U) [1]. L’étude a montré qu’OptiClik® comme FlexPen® délivrent des doses médianes comprises dans des limites spécifiées, mais pour OptiClik® la variation des doses est plus ample que celle de FlexPen®. Cent pour cent des stylos FlexPen® présentaient des doses d’insuline conformes aux spécifications. Avec OptiClik®, 17 % des doses de 10 U et 29 % de celles de 30 U étaient inférieures aux limites spécifiées. Selon Mads Krogsgaard Thomsen (Executive Vice President and Chief Science Officer, Novo Nordisk A/S), l’exactitude des stylos d’insuline est cruciale pour que les patients soient assurés de recevoir la bonne quantité d’insuline quand ils en ont besoin. Un dosage imprécis place potentiellement les patients en danger d’hyperglycémie ou d’hypoglycémie. “Avec FlexPen®, les diabétiques peuvent être certains de recevoir la bonne dose d’insuline et de bien contrôler leur glycémie”, précise Mads Krogsgaard Thomsen. Les stylos sont depuis longtemps maintenant reconnus pour leur précision et leur facilité d’utilisation (2-4). En outre, les études ont montré que les patients préfèrent les stylos aux seringues (5). Détails de l’étude Asakura L’étude compare la précision et la fiabilité des doses d’insuline délivrées par OptiClik® et FlexPen®. – La mesure du dosage exact délivré a été évaluée pour des quantités d’insuline de 10 U et 30 U, les doses et les limites de spécification définies étant fondées sur des normes standard ISO (± 1 U à 10 U, ± 1,5 U à 30 U). Les deux stylos ont été utili- Nouvelles sés avec des aiguilles à usage unique de 31 gauges selon les recommandations des deux fabricants. – Pour évaluer la précision à 10 U, l’expérience a été faite avec 24 doses provenant de 10 stylos de chaque type (soit 240 mesures). Pour évaluer celle à 30 U, 9 doses provenant de 5 stylos de chaque type (soit 45 mesures) ont été délivrées. Une nouvelle aiguille a été utilisée à chaque essai. Chaque dose a été pesée sur une balance de précision et les unités d’insuline équivalentes calculées. – Avec FlexPen®, 100 % des échantillons étaient conformes aux normes spécifiées, tandis qu’avec OptiClik®, il y avait sous-dosage dans 17,1 % des cas pour les doses à 10 U et dans 28,9 % des cas pour les doses à 30 U. de l’industrie Communiqués publicitaires des conférences de presse, symposiums, manifestations, organisés par l’industrie pharmaceutique et paragangliome Phéochromocytome 1. Asakura T. Comparison of the dosing accuracy of two insulin injection devices. Journal of Clinical Research 2005;8. 2. Asakura T et al. Diabetes 2005;54:2069-PO 3. Lteif AN, Schwenk FW. Accuracy of pen injectors versus insulin syringes in children with type 1 diabetes. Diabetes Care 1999;22:137-40. 4. Niskanen L et al. Randomized, multinational, open-label, 2-period, crossover comparison of biphasic insulin aspart 30 and biphasic insulin lispro 25 and pen devices in adult patients with type 2 diabetes mellitus. Clin Therapeutics 2004;26:531-40. Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (X), n° 2, mars/avril 2006 67