Le magazine du Parc naturel régional - N° 68 | octobre 2015 P. 22 | dossier L’étude du changement climatique 18. É dito 25. Les milieux humides et leur préservation 19. L e réchauffement climatique pourrait-il 26. Pour un Vercors bouleverser nos plus sobre en énergie modes de vie ? 27. Énergies 21. A griculture et forêt : participatives objectif excellence 22. S ciences en Vercors : l’étude du changement climatique P. 14 | Demain le vercors P. 28 | VERCORS Énergie renouvelable, À VIVRE territoire renouvelé ? De cime en cime PANORAMA Le vercors n° 68 � Octobre 2015 Insolite Le Vercors est une publication du Parc naturel régional du Vercors Directrice de la publication : Catherine Brette Directeur de la rédaction : Jean-Philippe Delorme Conception - Rédaction - Coordination - Suivi de réalisation : Raphaële Bruyère Recherche et conseil iconographique : Sandrine Collavet Ont collaboré à la rédaction de ce numéro : Jeanne Aimé-Sintès, Marion Blanchard, Dominique Gimelle, Margot Isk, Corine Lacrampe, Thierry Lebel, Jeanne Palay, Marie Paturel, Laurent Rivet, Célia Vaudaine, Michel Wullschleger, Bernard Lelièvre de la Librairie Mosaïque, Claude Ruel de Cuisine et passion en Vercors, Terre vivante et le CPIE. à l’illustration : Marc Perotto. Contributeurs et / ou relecteurs : Nicolas Antoine, Hélène Barrielle, Benoît Betton, Olivier Bielakoff, Pierre-Eymard Biron, Armelle Bouquet, Mireille Delahaye, Patrick Deldon, Stéphane Fayollat, Dominique Gimelle, Emmanuel Jeanjean, Mathieu Rocheblave. Remerciements : à toute l’équipe technique du Parc, à l’Office du tourisme de Lus-la-Croix-Haute et à Jean-Louis Bernezat. Réalisation : Corinne Tourrasse Photographie de couverture : Nicolas Biron Imprimeur : Imprimerie des Deux Ponts PNR du Vercors : 255, chemin des Fusillés – 38250 Lans-en-Vercors Tél. 04 76 94 38 26 – www.parc-du-vercors.fr Dépôt légal à parution : ISSN 2271-2364 Commission paritaire : 2-123ADEP Une femme assoupie au Pashupatinath, le temple hindou le plus important du Népal. Pour soutenir le pays, se rapprocher de l’association Himalayak Solidarité. photo : Bernard Angelin plus d’infos : www.himalayak.fr photo : Musée de la Résistance et Déportation de l’Isère Soutien au Népal photo : Stephane Desrousseaux Les Rochers des Deux Sœurs dans la montagne de l’Épenet, autrement dit La Momie du Vercors. Prendre le maquis Chantier de la jeunesse du Vercors, une page du livre Prendre le maquis, à paraître en mars 2016 aux éditions Libel, en co-édition avec le réseau Mémorha dont le Parc du Vercors est membre. Sommaire Un balcon sur le Vercors - P 2 à 17 2Panorama 4Cœur de nature La Jarjatte, un vallon en beauté photo : Raphaële Bruyère 7Cas d’espèce Le retour du castor dans le Royans 8Territoire inspiré Le Vercors, terre de refuge et de méditation 11Portrait Incompréhensible Un homme grandeur nature ! Monter si haut pour un acte si petit : un petit pin à crochets a été coupé sur le mont Aiguille. En prenant une forme rabougrie, l’arbre était parvenu à s’adapter aux conditions climatique et de vent. 12Initiatives Relier, l’or et la pierre 14Demain le Vercors Énergie renouvelable, territoire renouvelé ? 17Là est la question La nuit, doit-il faire jour ? Les pages du syndicat mixte - P 18 à 27 18L’édito de Catherine Brette 19zoom du conseil scientifique Le réchauffement climatique pourrait-il bouleverser nos modes de vie ? 21Décryptage Agriculture et forêt : objectif excellence 22Dossier Sciences en Vercors : l’étude du changement climatique 25Qui fait quoi ? 2 Lionel Terray et Jacques Soubis sur le Mont Huntington en Alaska (1964). photo : Jean-Louis Bernezat Le 4 juin dernier, le comité de rédaction du Journal Le Vercors a proposé un temps de rencontre avec les rédacteurs et photographes. Une occasion pour échanger et mieux se connaître (croqué par le dessinateur espiègle). photo : Bernard Bellon Rencontre de la rédaction Octobre 2015 � Le vercors n° 68 Le tétras-lyre Skieurs, randonneurs, pour une bonne cohabitation, respectez les zones refuges indiquées par les panneaux sur les pistes et sentiers. Les milieux humides et leur préservation 26Une équipe, des métiers Pour un Vercors plus sobre en énergie 27Les pieds dans le Parc Énergies participatives Vercors à vivre - P 28 à 35 28 De cime en cime 30 Le Royans, entre montagnes et rivières 32 Chaud devant… Le Vercors demain ? 34 Aux livres, citoyens ! Le vercors n° 68 � Octobre 2015 3 photo : Christian Wolf photo : Marc Pavier photo : J.-M. Jacquet photo : Prises 2 vues (m) Cœur de nature par Jeanne Aimé-Sintès De la lavande au génépi Vallon d’extrêmes et de contrastes, la Jarjatte donne au Parc du Vercors son visage résolument alpin, mais aussi son point culminant drômois, le Rocher Rond, perché à 2 453 mètres. C’est l’un de ses rares secteurs, avec les crêtes de la bordure orientale du Vercors, marqué par la présence de l’étage alpin. Là, au-dessus de 2000 mètres d’altitude, les landes et les pelouses remplacent la forêt. Benoît Betton, chargé de mission Biodiversité au Parc, note : « L’influence du Dévoluy donne au vallon de la Jarjatte une structure géologique différente, qui se lit dans les paysages ». Sur près de 1 500 mètres de dénivelé, « le vallon de la Jarjatte concentre des milieux et des ambiances très différents, 4 photo : Marc Pavier À la limite du Vercors, influencé par le Dévoluy, le vallon de la Jarjatte étonne par ses spécificités. Les paysages se démarquent du caractère de plateau, trait habituel du Parc et s’enivrent de pics et d’aiguilles émergeant de la forêt. Un régal lorsque le vallon se pare de couleurs d’automne… photo : Christian Wolf La Jarjatte, un vallon en beauté en quelques heures de marche seulement » explique à son tour Alain Matheron, maire de Lus-la-Croix-Haute et président de la Communauté des Communes du Diois. Une impression soulignée également par « le contraste entre un adret sec et ensoleillé et un ubac plus humide ». La situation climatique du vallon ajoute sa touche : à la limite entre influences méditerranéenne et continentale. « Ici se côtoient des ambiances très marquées Sud et Nord. Ce qui explique, par exemple, la présence de la lavande et du génépi, presque deux extrêmes » ajoute-t-il. Et puis de noter : « La Jarjatte offre une très large palette de biodiversité. Quasiment toutes les espèces faunistiques et floristiques de la Drôme répondent présentes. » Quand la nature brouille les pistes… Pas étonnant que dans ce cadre particulier, quelques raretés se dévoilent, ajoutant encore une valeur écologique au vallon ! Lus-la-Croix-Haute, première commune forestière de la Drôme, Octobre 2015 � Le vercors n° 68 de mieux connaître son fonctionnement à travers des possède à la Jarjatte les plus beaux spécimens de La Jarjatte « fayards » et de sapins, une magnifique hêtraie-sapi- donne au Parc mesures du sol et de la végétation et un suivi therdu Vercors nière. C’est de cet écrin forestier que se détachent les mique. son visage Aiguilles si caractéristiques du vallon, « qui font partie résolument … ou se fait discrète ! du patrimoine géologique du Vercors et de Rhônealpin Cependant, « la nature n’est pas toujours démonstraAlpes » précise Benoît Betton. Le site de Combe Obscure tive » explique Alain Matheron. « Même s’il est bien sûr porte également bien son nom, accueillant un phénomène particulier à l’abri d’un éboulis calcaire dénommé « éboulis plaisant de surprendre un groupe de chamois jouer sur un névé au froid ». Sous la face nord de la Rama, la circulation d’air froid à printemps, la particularité du vallon de la Jarjatte vient de présences beaucoup plus secrètes. » Aux côtés du cortège habituel de travers les vides du pierrier crée une anomalie thermique froide, à la faune et de la flore alpine, chamois, marmottes, gentianes…, seulement 1 500 mètres d’altitude. La flore qu’on y rencontre d’autres espèces retiennent l’attention. C’est par exemple le cas de brouille les pistes, puisqu’elle se trouve habituellement… la sanguisorbe, plante herbacée plutôt discrète qui joue le rôle 1 000 mètres au-dessus ! Aux côtés de bouleaux rabougris, c’est le « d’étendard de ralliement entre deux espèces qui vivent en comdomaine du lycopode à rameaux annuels (Lycopodium annotinum), qui évoque davantage la toundra que la Drôme, ou de la plémentarité : l’azuré de la sanguisorbe et la fourmi ». La femelle cystopéride des Alpes, fougère rare et protégée. Ce milieu particude ce petit papillon bleuté pond en effet ses œufs exclusivement lier retient l’attention de nombreux chercheurs associés qui tentent sur la sanguisorbe, où ils trouveront refuge et nourriture. Puis ses Le vercors n° 68 � Octobre 2015 5 par Dominique Gimelle CAS D’ESPÈCE Cœur de nature par Jeanne Aimé-Sintès Le retour du castor dans le Royans Les castors commencent à s’installer sur les bords de la Bourne. Ce sont des castors d’Eurasie appelés encore « Castor fiber », seule espèce que l’on rencontre en France. Les castors sont difficiles à voir, en effet ils vivent la nuit et préfèrent les endroits inaccessibles pour vaquer à leurs occupations. photo : Christian Wolf chenilles tombent au sol et sont alors recueillies par des fourmis, qui les nourrissent et en prennent soin dans leur fourmilière. Au printemps suivant, des papillons s’envoleront de leur gîte, renouvelant ce surprenant manège autour d’une symbiose entre une plante et deux insectes. La Jarjatte gérée durablement Enclave sud-est du Parc du Vercors, le vallon de la Jarjatte et l’ensemble de la commune de Lus-la-Croix-Haute ont rejoint la belle aventure du Parc naturel régional du Vercors en 2008. « Notre adhésion, sur proposition du Parc, peut paraître surprenante dans une logique de massif » précise Alain Matheron, « mais s’inscrit pleinement dans une logique environnementale ». Plusieurs mesures de protection assurent une préservation et une gestion durables du vallon : site classé en 2012 sur près de 3 000 hectares, il est reconnu en tant que paysage remarquable. La zone de protection géologique de Combe Obscure va dans le même sens en le protégeant sur 10 hectares. Le vallon de la Jarjatte fait également partie du réseau Natura 2000 sur plus de 3 600 hectares. Cette mesure de l’Union Européenne vise à préserver des espèces protégées et à conserver des milieux, en tenant compte des activités humaines. Dans cette logique, des contrats Natura 2000 de gestion durable de la forêt sur 30 ans ont été mis en place. 6 Un mini-village de montagne Le hameau de la Jarjatte, l’un des vingt-trois ensembles bâtis dispersés sur la commune de Lus-la-Croix-Haute, fonctionne presque comme un mini-village. Il compte aujourd’hui une trentaine d’habitants à l’année, autour de son cimetière, de son ancienne école, de sa chapelle et de ses maisons conservées dans leur architecture originelle. Il accueille également des hébergements touristiques, ainsi qu’une ferme proposant la vente directe de ses produits fromagers. Maisons bioclimatiques, labels bio et Marque Parc, très présents dans le hameau, témoignent d’une vraie recherche de cohérence. Dans un paysage en patchwork, la forêt laisse la place aux cultures, en fond de vallon, ainsi qu’aux prairies d’altitude. À la belle saison, l’ensemble des montagnes est occupé par les troupeaux, dont la descente, en octobre, annonce l’automne. Au final, forêts, falaises, torrents, champs, hameaux… composent « une montagne vivante que de nombreuses personnes aiment retrouver en toutes saisons, autant pour pratiquer une activité que pour aller chercher le lait à la ferme. Le vallon de la Jarjatte, c’est à la fois un terrain d’initiation au ski, à la rando pédestre ou à la via ferrata et une Mecque de la cascade de glace et du ski de randonnée » conclut Alain Matheron. Octobre 2015 � Le vercors n° 68 Le vercors n° 68 � Octobre 2015 photo : Mille traces photo : Christian Wolf photo : J.-M. Jacquet L e retour des castors sur la Bourne – une espèce sensible à la pollution – est une preuve de l’amélioration de la qualité de l’eau. La mise en fonction des centres de traitement des eaux usées de Villard-de-Lans et de Saint-Nazaire-en-Royans explique peut-être ce progrès. Une étude de 2009 (de Jean-Pierre Choisy - PNRV) rappelle que des castors ont été réintroduits près des barrages de Pizancon et de Beauvoir-en-Royans. Vraisemblablement les nouveaux habitants de la Bourne sont des enfants du castor de l’Isère. Chez le castor, la cellule sociale de base est la famille, composée d’un couple adulte, des jeunes de plus d’un an et de ceux de l’année. Les naissances (deux jeunes par portée en moyenne) ont lieu en mai après 105 jours de gestation. En France, l’habitat du castor se situe entre la plaine et l’étage collinéen (rarement audelà de 800 m d’altitude). Dans le Royans, ils sont installés entre 180 m et 220 m d’altitude. Une famille occupe en général un territoire qui varie de 500 m à 3 km le long d’un cours d’eau selon les ressources alimentaires des berges. Le régime alimentaire du castor est exclusivement végétarien : écorces, feuilles et jeunes pousses des plantes ligneuses, hydrophytes, fruits et végétation herbacée. Environ une trentaine d’espèces d’arbres peuvent être consommées (Cornouiller sanguin, Noisetier, Orme champêtre...), les Salicacées (Saules et Peupliers) étant les plus recherchées. L’essentiel des coupes concerne des arbres et des branches de 2 à 8 cm de diamètre. Les conditions nécessaires à l’implantation du castor sont donc : une densité suffisante de la ripisylve (formations boisées, buissonnantes et herbacées sur les bords d’un cours d’eau), la présence permanente d’eau avec une profondeur minimum de 60 cm (l’accès au gîte est immergé). La pente du cours d’eau et la vitesse du courant doivent être relativement faibles. La présence de barrages hydroélectriques infranchissables ou incontournables est en revanche un facteur qui limite sa colonisation. L’inventaire de la faune menacée en France (1994) mentionne le castor comme « espèce à surveiller ». Depuis, la population est en expansion. On estime aujourd’hui la population a plus de 14 000 individus sur une cinquantaine de départements. Pour la gestion de cette espèce, il convient de favoriser les possibilités de franchissements des ouvrages, de ménager des « corridors verts » le long des cours d’eau (une bande arbustive d’au moins 5 m de large de Salicacées), d’adapter la lutte contre les rongeurs nuisibles comme le ragondin avec lequel il est parfois confondu, de réhabiliter les cours d’eau dégradés et de développer une gestion soucieuse des équilibres écologiques dans le cadre notamment de Contrats de rivière. Fiche signalétique Classe : mammifère Ordre : rongeur Famille : Castoridés (castoridae) Poids : 20 à 22 kg en moyenne Longueur totale du corps : 80 à 110 cm Queue : 29 à 31 cm pour la partie externe, aplatie dorso-ventralement et apparence écailleuse. Base de section circulaire couverte de poils. Pelage dense, poil brun jaunâtre. Pattes antérieures (mains) : 5 à 6 cm de long, 5 cm de large. 5 doigts munis d’ongles forts et recourbés. Pattes postérieures (pieds) : 15 cm de long, 10 cm de large. 5 orteils, palmure complète. Formule dentaire : 20 dents, mâchoires supérieure et inférieure similaires : 2 incisives, 2 prémolaires, 6 molaires. Longévité : 10 à 15 ans en moyenne ; 15 à 20 ans en captivité. Période d’activité : crépuscule et nuit. 7 photo : SCIC SA Nouveau Monastère Le Vercors, terre de refuge et de méditation Le Vercors, éternel refuge spirituel ? Le massif a très vite séduit moines, chanoines et autres hommes de foi. Dès le xiie siècle, certains trouvèrent leur « désert » dans ses contreforts. Les religions changent, mais cet appel spirituel perdure. 8 Octobre 2015 � Le vercors n° 68 un temporel (un domaine) toujours plus grand. Elles confient alors leurs biens fonciers et leur bétail à des laïcs, des paysans pour l’essentiel. Mais les conflits se multiplient, les procès aussi. Et la situation s’envenime avec la Réforme de l’exploitation forestière impulsée par la monarchie et son service des Eaux et Forêt, grande source de revenus pour tous, moines et laïcs, seigneurs et villageois. Les monastères sont invités à cantonner les droits d’usage des villageois, c’est-à-dire à en limiter l’exercice dans le temps et surtout dans l’espace. Les tensions se multiplient. La Révolution met définitivement fin à cette forte présence monastique. Seuls quelques bâtiments témoignent de cette puissance, à l’instar de l’église abbatiale de Léoncel, inscrite en 1840 sur la première liste des monuments historiques établie par Prosper Mérimée. photo : Sebastian Giner M assif et altier, le Vercors dresse ses versants abrupts entre Un système agro-sylvo-pastoral... Nul besoin de s’enfoncer alors plus profondément dans le Vercors. le sillon rhodanien et les grandes Alpes. Les premiers L’isolement est déjà total, la nature potentiellement nourricière et moines trouvèrent l’isolement et le silence indispensables l’eau présente. Comme celle du désert, la géographie de l’eau a à leur retraite spirituelle en s’enfonçant dans quelques plis secrets pesé sur le choix des sites. Proches de la vallée du Rhône, l’un des de ses piémonts. On ne sait dire aujourd’hui qui furent les pionniers de ce Vercors monastique. Était-ce ce couvent construit en axes d’échanges les plus fréquentés de l’époque, et de la ville de 610 dans le vallon de Combeau, haute combe verdoyante proche Die, devenue siège épiscopal au iiie siècle au même titre que Valence et Vienne, ces lieux isolés en piémont permettent aux du col de Menée ? Il fut incendié en 735 par les Sarrasins. Quant moines de sortir du monde comme l’avaient enseigné leurs aux premiers chanoines réguliers, mention est faite de leur présence à Sainte-Croix dans le pays de Quint dès 1095. L’heure des devanciers égyptiens, l’ermite Antoine (251-356) et la communauté de moines créée par Pacôme (286-346). Ils sortent du puissants pères ermites du Vercors allait alors bientôt sonner ! Des monde mais leur rôle est de prier pour l’humanité. Chartreux grimpèrent d’abord dans les Écouges On retrouve le mythe du désert favorable à l’ascé(1116) pour installer une chartreuse dans l’étroite La puissance tisme, à la contemplation et à la prière qui vallée de la Drévenne, sous les rochers de d’attraction du « désert » du Vercors éloignent les tentations du diable. Les Chartreux Cumacle dans l’axe de l’entaille s’ouvrant de la perdure. Depuis des Écouges ou du Val Sainte-Marie tentent alors plaine de Saint-Gervais. Vingt-huit ans plus tard, le Moyen-âge ! de réaliser une synthèse en associant la vie érémid’autres disciples de Saint-Bruno montèrent tique des pères qui vivent, lisent et prient dans la jusqu’au fond d’un val étroit ouvert sur le Royans solitude de maisonnettes individuelles de la maison haute et celle, pour bâtir une seconde chartreuse, dans un cirque isolé, séparé du cénobitique (communautaire), des frères convers qui habitent la vallon principal par un étroit défilé taillé par le ruisseau de Chaillard. Reçue en donation du Dauphin, cette terre accueillit leur maison basse dite correrie ou courerie. Chez les Cisterciens, monastère baptisé Chartreuse du Val Sainte-Marie de Bouvante. moines profès et frères convers vivent en communauté dans un Douze moines de l’ordre des Cîteaux avaient alors déjà choisi de même lieu regroupant église, cloître et ailes des moines, des s’établir au fond de la vallée de la Lyonne, au cœur d’une petite convers et des services. Dans les deux cas, les moines tirent leur dépression à plus de 900 mètres d’altitude. Ils y fondèrent Léoncel subsistance des terres qu’ils occupent. Soucieuse de son salut, la en 1137, la plus ancienne des abbayes cisterciennes du Vercors. société féodale se montre généreuse, faisant don de terres, bois et Enfin d’autres Cisterciens s’aventurèrent au pied de la montagne alpages. À l’exception du temporel de Valcroissant, entravé dans de Glandasse, ce lieu grandiose et sévère, à tout juste 6 km de Die. sa croissance par la présence trop proche du siège épiscopal de Le monastère fut installé à 650 mètres d’altitude, un peu à l’aval Die, les autres finissent par étendre leur domaine aux plaines bordières. Tous réalisent d’abord leur exigence d’autarcie en pratide la source d’eau donnant naissance au ruisseau de Valcroissant. quant le « faire valoir direct » : les domaines sont exploités par les Il en prit le nom. L’abbaye cistercienne de Léoncel. frères convers entrés au monastère pour assumer les tâches matérielles. Ils cultivent des céréales sur les meilleures terres, travaillent vignes et chènevières et pratiquent l’élevage des ovins pour la laine et le lait, des bœufs, chevaux et mules pour le trait ou le voyage. La forêt leur permet de satisfaire leurs besoins en bois divers et en produits de cueillette. Plus tard, ils déploieront même des activités connexes, comme la métallurgie par l’édification à Bouvante de martinets pour traiter le minerai. … bousculé dès le xiiie siècle Dès le xiiie siècle, la vie monastique devient plus difficile : aux guerres féodales s’ajoutent les épidémies de peste, les pillages des mercenaires de la guerre de Cent Ans et la revendication de droits d’usage en alpage et en forêt par les communautés villageoises unies et combatives. Ce fut notamment le cas aux Écouges. Les moines demandèrent, et obtinrent, en 1294, l’autorisation de délocaliser leur chartreuse à Revesty, au pied de la montagne, mais ils restèrent en haut pendant encore un siècle avant de tout quitter en 1391. Même les puissantes Abbaye de Léoncel ou Chartreuse de Val Sainte-Marie souffrent. Elles peinent à recruter suffisamment de frères convers pour exploiter Le vercors n° 68 � Octobre 2015 photo : Fabian Da Costa photo : Sebastian Giner TERRITOIRE INSPIRÉ par Margot Isk & Michel Wullschleger Le monastère Saint-Antoine à Saint-Laurent-en-Royans. 9 TERRITOIRE INSPIRÉ par Margot Isk & Michel Wullschleger par Raphaële Bruyère PORTRAIT Un homme grandeur nature ! photo : Fabian Da Costa Centre d’étude et de pratique du bouddhisme tibétain de Montchardon à Izeron. Un attrait spirituel renouvelé Si elle connut son apogée au Moyen-âge, la puissance d’attraction du « désert » du Vercors demeure. Ces espaces continuent de séduire des hommes et des femmes qui prient et méditent. « Avant que nous arrivions, un moine bénédictin a vécu en ermite pendant 18 ans, en face, dans les Monts du Matin » témoigne Père Placide (Deseille), fondateur du Monastère orthodoxe Saint-Antoine-leGrand. C’est avec son compagnon d’ascèse, le Père Séraphin, que cet ancien moine cistercien devenu orthodoxe s’installe en 1978, dans la reculée de Combe-Laval cernée de hautes falaises. Légué par une famille orthodoxe, le lieu, situé à proximité d’un ancien prieuré antonin, est austère et la maison inhabitée depuis 1912. D’autres approches spirituelles et d’ascétisme Loin de leur référence spirituelle première, certaines pratiques d’apaisement intérieur connaissent un vrai essor. On compterait en France deux millions de pratiquants de Yoga, discipline créée voilà 2500 ans en Inde. Son principe ? Assouplir corps et esprit par un enchaînement de postures, le travail du souffle et la méditation. On tonifie ainsi son corps tout en calmant son mental. Pratique de purification de l’organisme (et de l’esprit), le jeûne fait aussi des émules. En Allemagne, reconnu comme traitement médical (de l’arthrite et du diabète de type 2 notamment), il est pratiqué par 15 % de la population. En France, il se déploie essentiellement en formule diète et randonnée pour quelques jours. La Fédération Jeûne et randonnée recense 6000 adeptes et compte aujourd’hui 30 organisateurs agréés. 10 Difficile à imaginer lorsque l’on pénètre aujourd’hui dans l’enceinte de ce métachion (dépendance) du monastère Simonos Patra du Mont Athos ! Père Placide, 89 ans, y poursuit sa vie d’ascèse avec une poignée de moines orthodoxes. La communauté vit des dons et de l’accueil de laïcs. À 35 km de là, au pied des Coulmes, sur la commune d’Izeron, un autre lieu spirituel rayonne depuis les années 80, le centre bouddhiste tibétain créé par le docteur Jean-Pierre Schnetzler. Lorsque le vénérable Lama Teunsang s’installe à Montchardon en 1976 dans ce qui allait devenir Karma Migyur ling, ce n’est alors qu’une vieille ferme sans chauffage cachée dans un repli du Vercors à 800 mètres d’altitude. « On a passé 30 ans à tout construire » résume Frédéric Cattin, son directeur depuis 35 ans. Porté par une douzaine de bénévoles dévoués, le centre vit aussi de l’accueil de stagiaires et pratiquants qui fréquentent le temple consacré par le Dalaï-lama Lama en 1993. Aujourd’hui le rayonnement des monastères ne se mesure plus à l’immensité de leur domaine temporel, s’élançant, au Moyen-âge, jusqu’aux alpages. Les temps changent, les sources de la spiritualité sont diverses, mais aujourd’hui encore, le Vercors joue ce rôle de ressourcement et de méditation qui prend ses racines dans la richesse de ce passé spirituel. L’attrait du désert du Vercors a traversé les siècles ! Plus d’infos : www.leoncel-abbaye.com - www.montchardon.org monasteresaintantoine.fr - www.le-monastere.org Films Vercors TV sur les Chartreux des Écouges : http://vercorstv.wmaker.tv Octobre 2015 � Le vercors n° 68 O n dit qu’il n’a jamais froid, qu’il ne sent pas la pluie, qu’il oublie de manger et qu’il oublie le temps s’il est à l’affût d’un animal. On ne sait pas comment, on ne sait pas depuis quand, mais dès qu’il y a un combat écologiste à mener qui compte à ses yeux, on le retrouve partout en France et en Europe. Jean-Paul Vieron, Popol pour ceux qui le connaissent, est un passionné infatigable. Il est arrivé dans le Vercors en 1975, c’est à cette date que débute sa vie de montagnard. Bien loin des années pendant lesquelles Jean-Paul a travaillé dans la finance en Anjou d’abord, sa région d’origine, puis au ministère des Finances à Paris après l’obtention d’un concours interne brillamment réussi. Mais il n’y est pas heureux. Il repense au bocage des alentours de la ferme de ses parents et de ses « premiers émois naturalistes lorsqu’il se perdait – tout jeune avec la frousse au ventre dans cette nature un peu étrange ». Une campagne qu’il dit avoir vu se modifier par le remembrement, et l’arrivée des produits phytosanitaires. Parti ou viré du ministère, il se forme et prend des responsabilités dans un foyer de jeunes travailleurs hébergeant des réfugiés chiliens en 1973. Déjà « éveillé » par mai 68, sa conscience politique passe un cap supplémentaire à ce moment-là. Fort de ces rencontres, mobilisé contre les injustices, Jean-Paul s’installe près des Écouges où il « s’émerveille des falaises emblématiques et des espèces prestigieuses comme le faucon pèlerin et l’aigle royal ». Aujourd’hui et depuis des années installé dans le Royans, JeanPaul s’est impliqué activement dans les instances de participation citoyenne sur le territoire du Parc et au-delà. Un naturaliste hors normes En 1979, il passe le diplôme d’accompagnateur en moyenne montagne. Henri-Jacques Sentis se souvient : « En plein examen, JeanPaul arrive la tête en sang, rayonnant, et balayant mon inquiétude d’un revers de la main, il me dit “C’est pas grave, j’ai trouvé la balise !” C’est tout lui ! Il lui arrive aussi de disparaître totalement… il est tout simplement en bivouac devant un terrier de blaireau ! » À cette époque, Jean-Paul est un précurseur de la randonnée naturaliste aux Parcs de la Vanoise, du Vercors, pour des clubs et associations… en tant que directeur adjoint de centres de vacances. Le vercors n° 68 � Octobre 2015 photo : J.-P. Vieron Jean-Paul Vieron cite Théodore Monod : « Celui qui cueille une fleur, dérange une étoile », et cela convient bien à cet homme discret sur lui-même. Si Pierre-Eymard Biron, conservateur de la Réserve des HautsPlateaux salue ses « connaissances naturalistes inouïes », JeanPaul dit avoir toujours eu le souci de « créer l’émotion en plus de l’apport scientifique » auprès des publics qu’il accompagnait. Un militant du quotidien « Génial agitateur », « naturaliste incontournable » pour certains. « desperado » dit Jean-Paul de lui-même. Son indépendance d’esprit n’a pas fait l’affaire avec le programme de l’Office national de la chasse qu’il voulait intégrer… Ambassadeur du Parc, il fait partie des fondateurs ou membres actifs de nombreuses associations comme la FRAPNA, le CORA, le CPIE, Mille traces, la FAUP, Faune et flore du Royans, la LPO… Il a transformé sa maison en refuge et relais vétérinaire ce qui a souvent donné lieu à des situations burlesques. Il a œuvré aux réintroductions du gypaète barbu en Haute-Savoie et du bouquetin à Archiane et dans le Royans. Il pointe d’ailleurs « la grande contradiction et la responsabilité de notre espèce d’avoir à tenter de réintroduire celles qu’elle fait disparaître peu à peu ». Pierre-Eymard Biron affirme : « C’est un homme d’utilité publique, incapable de rentrer dans le rang, un homme des grandes causes. » Dans les bistrots pour rencontrer les chasseurs réunis et critiquer certaines pratiques de chasse, chez les éleveurs pour échanger sur la réapparition du loup qu’il défend, de maison en maison pour transmettre des informations… François Brunsvick ajoute : « Il a une connaissance et une compréhension intimes de la nature et des hommes. » Et tous de constater que non seulement, il n’a peur de rien ni de personne mais ses prises de position ne sont jamais violentes. Aujourd’hui, alors qu’une maladie l’handicape sérieusement pour communiquer et peut le gêner dans la marche, Popol aurait bien pu semer ses amis, au retour de la Fête de la Charbonnière, plus alerte qu’eux en montagne et dans la nuit noire. « Militant dans l’âme » donc, rien n’arrête Jean-Paul et l’énergie de ses convictions. Merci à ses amis cités pêle-mêle dans ce portrait. 11 INITIATIVES par Marie Paturel L Un vieux mur de pierres, un livre aux pages jaunies, une sculpture ternie par les siècles : les objets et les bâtiments racontent une histoire, notre histoire. Détenteurs d’un savoir-faire séculaire, quelques artisans soignent les témoins de notre passé. Rencontre avec trois passionnés. L’atelier Zador de Pascal Damange 12 photo : atelierzador.odexpo.com I l scintille dans la lumière et suscite toutes les convoitises depuis des siècles. Il fut même l’objet de véritables ruées porteuses d’un espoir universel : la richesse. L’or, matière noble par excellence, est devenu un étalon sur la planète toute entière. Mais il est aussi un matériau travaillé avec minutie par des artisans qui, au-delà de leur fascination pour ce métal tant convoité, éprouvent aussi envers lui un indéniable respect. « On ne dompte pas l’or. C’est l’or qui vous dompte », affirme Pascal Damange, doreur à Crest depuis neuf ans. Enfant puis adulte, Pascal Damange n’a jamais cessé de voir de l’or partout autour de lui. « Lorsqu’on y prête attention, on réalise que l’or est omniprésent dans notre vie quotidienne. Après une première carrière professionnelle, j’ai décidé de changer radicalement de vie et de me former au métier de doreur. C’est ainsi que je suis devenu artisan à 34 ans », raconte ce travailleur solitaire qui évolue non seulement dans son atelier drômois mais aussi sur des chantiers. La dorure est effectivement plurielle, non seulement parce qu’il existe une vaste palette d’ors, mais aussi parce qu’il ne s’agit pas toujours de restaurer dans le confort de l’atelier. « J’aime quitter parfois mon atelier et découvrir des lieux exceptionnels comme des hôtels particuliers, des palais, des villas privées. J’y rencontre d’autres corps de métier auxquels je succède sur les chantiers car la dorure intervient toujours à la fin, sans poussière. » Pour obtenir une surface parfaite, le travail se révèle long, complexe et minutieux. Après une première étape de blanchissage réalisée à l’aide d’apprêts composés de carbonate de calcium et de colle de peau de lapin, un adoucissage permet de retrouver une surface lisse. « Puis on procède à la reparure qui consiste à remodeler les sculptures empâtées, et ensuite au nettoyage, au jaunissage et à l’assiettage avec du bol d’Arménie, notamment composé d’argile kaolinique », explique Pascal Damange. Ce n’est qu’en dernière instance que l’or est appliqué, soit à l’eau, soit à l’huile. « Mais la plus belle dorure est à l’eau », affirme l’artisan crestois. « Si les étapes préliminaires ne sont pas réalisées correctement, la dorure, qui ne fait que 2 à 3 microns d’épaisseur, est forcément ratée. L’or ne tolère pas l’imperfection. » Dans le cas d’une restauration, une ultime opération consiste à patiner l’objet pour lui donner un air ancien. Être doreur, ce n’est pas seulement travailler une matière noble. C’est aussi participer à la préservation du patrimoine et apprendre tous les jours comment préserver au mieux notre héritage. « La restauration nécessite le respect de l’objet. Il faut que notre travail soit réversible afin qu’un doreur puisse voir, dans 30 ou 40 ans, ce que nous avons fait. C’est pourquoi nous n’utilisons que des produits naturels et aucun élément chimique », ajoute Pascal Damange. « Ce qui me fait le plus plaisir, c’est lorsqu’un client me dit que je n’ai rien fait à son objet. Pourquoi ? Parce que cela signifie que ma restauration ne se voit pas, donc qu’elle est réussie. » Rénover, réhabiliter, restaurer : quelle différence ? • La rénovation consiste à remettre à neuf un bâtiment ou un objet vétuste et peut aller jusqu’à la destruction totale en vue d’une nouvelle construction, sans aucune préoccupation de restauration. • La réhabilitation remet aux normes actuelles (confort, hygiène, sécurité) un bâtiment ancien. • La restauration redonne à un bâtiment ou un objet son caractère originel en employant les matériaux, voire les méthodes, d’époque. Elle exige des savoir-faire spécifiques, un respect de l’objet ou du bâti ainsi qu’une réversibilité. Autrement dit, toute intervention doit permettre de retrouver l’état initial de l’objet ou du bâtiment. Octobre 2015 � Le vercors n° 68 ’univers du livre, Valérie Servien le connaît comme sa poche. Il y a quelques années, licenciée de son emploi dans une librairie de Romans-sur-Isère, elle pousse la porte de la boutique attenante : un atelier de relieurs. Pendant dix ans, Valérie Servien officie donc dans l’atelier, apprenant sur le tas le savoirfaire et les secrets de la reliure. « Je faisais alors beaucoup de restauration de papiers, tandis que je ne fais plus de restauration à proprement parler aujourd’hui », évoque Valérie Servien. « Je travaille davantage dans la réparation, ce qui signifie que je soigne les livres abîmés sans forcément respecter les principes et méthodes datant de l’époque du livre. » Dans son atelier de SaintMartin-en-Vercors, Valérie Servien démonte les livres, récupère les cahiers, recoud, cartonne, refait les couvertures. Objectif ? « Protéger les documents et les rendre de nouveau consultables. Parfois, on m’apporte de véritables chiffons et je leur redonne une nouvelle jeunesse ! » Passionnée par son métier, Valérie Servien souligne la transmission de son savoir-faire qu’elle a appris aux côtés des artisans qui l’ont embauchée après un licenciement. Elle-même partage aussi ses connaissances avec des stagiaires et enseigne également à Saint-Ismier, dans la banlieue grenobloise. « Je travaille dans cette école en binôme avec une relieuse qui m’apprend beaucoup », se réjouit Valérie Servien, assoiffée de nouvelles techniques et astuces pour mieux travailler le papier et les matériaux de couvrure. « Les matières, les caractéristiques techniques et les couleurs des matériaux sont très différentes. Ce métier comporte une forte dimension créative car on peut superposer des papiers, utiliser des matières variées, jouer sur les coloris, travailler le cuir, s’amuser à écrire le titre en sortant des sentiers battus. » Valérie Servien a ainsi laissé courir son imagination pour réaliser le livre d’or du Mémorial de la Résistance qui, sans être une œuvre de restauration, reste en prise directe avec la mémoire collective. « Je suis toujours troublée de constater que des livres très anciens peuvent être mieux conservés que des supports modernes qui, finalement, risquent de disparaître très rapidement. Je suis sensible aux choses qui laissent des traces dans le temps. » Pierre-Jean Combier, un tailleur pour l’éclat des pierres L ’image du tailleur de pierre nous plonge plusieurs siècles en arrière et attise nos souvenirs d’enfants fans des aventures d’Obélix, le célèbre tailleur de menhir. Le métier de Pierre-Jean Combier n’a pourtant rien à voir avec le personnage de Goscinny et Uderzo. « Je travaille non seulement la pierre pour restaurer le patrimoine, qu’il soit classé ou non, mais aussi différents enduits à base de chaux naturelle et de sable local », explique l’artisan installé à La Motte Fanjas. Depuis une dizaine d’années, Pierre-Jean Combier intervient à la fois chez des particuliers et sur des édifices tels que des églises, des remparts ou encore des châteaux. Pour faire face à l’ampleur des travaux et être en mesure de répondre aux appels d’offres, l’entreprise originelle s’est progressivement agrandie pour rassembler aujourd’hui une équipe de 16 personnes réparties dans les bureaux, dans l’atelier et sur les chantiers. « Je tourne désormais chaque jour sur les différents chantiers, mais je ne travaille plus la pierre au quotidien », précise Pierre-Jean Combier qui emploie notamment des tailleurs de pierre en atelier, des maçons de pierre Le vercors n° 68 � Octobre 2015 et des enduiseurs. « Il faut s’adapter à chaque bâtiment et faire du sur-mesure tout en respectant un cahier des charges très précis, notamment lorsqu’il s’agit d’un chantier encadré par les architectes des Bâtiments de France. » Pour redonner leur éclat aux vieux édifices, le recours à des techniques ancestrales s’avère nécessaire et les matériaux naturels continuent à être les meilleurs alliés. « Pour les pierres dures comme le calcaire, nous nous approvisionnons dans le Nord Isère. Pour les pierres plus tendres, telles que la molasse, nous utilisons du grès d’Espagne ou des Vosges. Quant aux enduits, il s’agit de la chaux de Saint-Astier ou du pisé composé d’argile et de sable », précise PierreJean Combier qui a récemment restauré l’abbaye de Léoncel, l’église de Saint-Agnan-enVercors ou encore le clocher de l’église de SaintJulien-en-Vercors. Modeler la pierre et la terre, c’est recourir à des matériaux sains et résistants qui assurent une pérennité à la restauration et aux bâtiments. « Lorsqu’une pierre est bien choisie, bien taillée et bien travaillée, elle peut tenir pendant des siècles ! » conclut Pierre-Jean Combier avec enthousiasme. photo : DR Relier, l’or et la pierre 13 photos : DR L’atelier de reliure du tilleul de Valérie Servien DEMAIN LE VERCORS par Laurent Rivet Énergie renouvelable, territoire renouvelé ? Côté Parc Les ambitions sont là. Devenir un « territoire à énergie positive » dit TEPOS d’ici 2050 (voir encadré), un engagement qui va bien au-delà du Paquet Énergie Climat. À la fois territoire de montagne, d’accueil touristique été-hiver et d’expérimentation, le Parc est naturellement très sensible aux enjeux climatiques et environnementaux. Dès 2008, la promotion des économies d’énergies et des énergies renouvelables, comptait, d’ailleurs, parmi les vingt objectifs stratégiques du territoire inscrits dans sa Charte avec l’ambition d’atteindre 55 % d’autosuffisance énergétique. Et les atouts ne manquent pas. Comme le rappelle Emmanuel Jeanjean, nouveau chargé de mission Énergie et mobilité du Parc : « Le Vercors compte deux principales sources d’énergie renouvelable déjà largement valorisées : l’hydroélectricité avec les centrales de la Bourne et de l’Isère et le bois énergie. » Historiquement, dès le début du xxe siècle, le Vercors s’est tourné vers l’hydroélectricité. Sa production est d’ores et déjà optimisée pour atteindre, aujourd’hui, 600 GWh annuels. « Le bois énergie est en constante progression, avec plus de 150 installations de chauffage automatique dont 70 équipements publics et une dizaine de projets en cours sur le territoire pour un total d’environ 11 Mégawatts installés en 2012 » précise-t-il. Si le potentiel boisénergie reste très important, d’autres sources telles que le solaire thermique Nouveaux objectifs européens Paquet Énergie Climat 2030 2020 -20 % Réduction des émissions de gaz à effet de serre Augmentation de la part des énergies renouvelables dans la consommation d’énergie finale S i les grands objectifs climatiques se dessinent à l’échelle du monde, et pour nous, à celle de l’Europe, c’est bien sur chaque territoire que nous réussirons à les atteindre. Concrètement, notre pays a signé un engagement européen en 2014, le « Paquet Énergie Climat ». Il comporte trois objectifs d’ici 2030 : réduire de 40 % nos émissions de gaz à effet de serre (CO2) – par rapport au niveau d’émission de 1990 – et atteindre 27 % d’énergies renouvelables dans notre consommation énergétique. Le troisième demande 30 % d’économies d’énergie supplémentaires. Le but est de contenir l’augmentation de la température globale de la planète à moins de 2 °C d’ici 2050. Pour l’instant, le compte n’y est pas… Nous sommes actuellement sur une tendance d’augmentation de 3 °C à 4 °C… Au-delà de 2 °C, les spécialistes du GIEC1 estiment que le climat serait hors de contrôle. 1. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est un organisme intergouvernemental, ouvert à tous les pays membres de l’ONU. 14 Octobre 2015 � Le vercors n° 68 Le vercors n° 68 � Octobre 2015 20 % 27 % -20 % -27 % Réduction des consommations d’énergie (pour la production d’eau chaude) et le solaire photovoltaïque (pour la production d’électricité) et pourquoi pas l’éolien s’annoncent prometteuses avec de nouvelles formes d’exploitation comme les Centrales Villageoises (voir rubrique « Les pieds dans le Parc »). « Une centrale dans chaque village » photo : DR La France, du 30 novembre au 11 décembre 2015, accueillera à Paris la conférence de l’ONU sur le climat dite « COP 21 » ou Conference of the Parties. Les « parties » sont les pays assis autour de la table de négociation sur le climat. À cette occasion, le nôtre se doit d’être exemplaire. Mais comment le Vercors aborde cette question ? -40 % au moins TEPOS. Quésaco ? C’est une info de dernière minute ! Le Parc du Vercors a décidé de devenir un TEPOS ou Territoire à Énergie POSitive. Il s’engage à réduire ses consommations de 50 % d’ici 2050, et à produire le reste par des énergies renouvelables. Les priorités : les transports et l’habitat qui représentent environ 80 % de la consommation d’énergie finale. Trois territoires en partie dans le Parc du Vercors sont déjà reconnus TEPOS par la Région et l’ADEME : la communauté de communes du Trièves, le Pays Sud Grésivaudan et Biovallée. Chacun de ces territoires s’est doté d’une stratégie, d’un plan d’actions et d’une animation territoriale qui leur permettent de se mettre en route vers l’autosuffisance énergétique. Depuis très récemment, les TEPOS ont été reconnus « Territoires à énergie positive pour la croissance verte » (TEPCV) par le ministère de l’Énergie. 2030 Yves Chazalet, élu à Combovin (Gervanne) et délégué du Parc a une vision, celle d’une énergie produite localement pour son territoire. Au-delà de la production d’électricité, ce pionnier de la Centrale Villageoise Photovoltaïque y voit un catalyseur de réflexion, de prise de conscience et d’action. Avec plusieurs élus et habitants de la Gervanne, ils lancent, fin 2010, l’idée de créer localement et de manière participative de l’électricité photovoltaïque sur toitures évitant ainsi des installations au sol gourmandes en foncier, peu intégrées au paysage. Grâce à l’engagement de toutes les parties prenantes (voir rubrique « Les pieds dans le Parc »), le projet a donné lieu à la création d’une entreprise coopérative sous statut de SAS (Société par Actions Simplifiée) en 2012 dont l’objectif est de produire de l’énergie tout en rémunérant ses actionnaires locaux. Elle est présidée par René Druguet, maire de Plan-de-Baix. Cette nouvelle manière d’envisager son avenir énergétique marque bien la volonté de ne pas vivre sous la totale dépendance des énergies traditionnelles ou des grands opérateurs industriels. Comme le rêve Yves Chazalet « l’idéal serait de créer une centrale villageoise dans chaque village ! », de prendre son destin en main « pour une énergie accessible à tous avant que des bouleversements sur l’approvisionnement ou le coût de l’énergie n’interviennent sur lesquels nous n’aurons aucune prise ». Plus d’infos : un film de Vercors TV http://vercorstv.wmaker.tv Enercoop, le Parc adhère Le parc achète son électricité à Enercoop. Cette coopérative s’approvisionne directement et à 100 % auprès de producteurs d’énergie renouvelable : solaire, éolienne, hydraulique et biogaz. 15 DEMAIN LE VERCORS par Laurent Rivet photo : Les Ailes de Taillard/Ph.Heitz par Marion Blanchard LÀ EST LA QUESTION 200 personnes participent à une visite guidée du site du projet éolien participatif des Ailes de Taillard (PNR du Pilat, Loire). À dupliquer pour toutes les énergies ? En tournant le regard vers le Parc du Pilat, on s’aperçoit que oui. Et, de surcroît, à propos d’une source d’énergie renouvelable sensible, l’éolien. Cécile Hausherr, responsable du Pôle Économie durable, explique que le permis de construire d’un ambitieux parc de 10 éoliennes – « Les ailes de Taillard » est en cours de dépôt. « Ce projet n’a pu avancer que grâce à trois éléments clés : la participation des citoyens et des élus y compris les plus impactés par les éoliennes ; une implantation mûrement réfléchie sur le plan paysager et de la biodiversité ; une société privée – Quadran, en l’occurrence – capable d’adapter son modèle économique à la création d’une SAS intégrant des citoyens et des collectivités. » Et du temps. Des premières études à la demande du permis de construire, six années se sont écoulées. Quatre projets éoliens en Vercors, notamment sur les territoires de la Gervanne et du Trièves, en sont au stade de l’idée. Le Pilat fera-t-il école en Vercors ? Oui mais… La bonne calorie, c’est celle que l’on ne consomme pas ! Emmanuel Jeanjean rappelle que « réduire la facture énergétique, c’est l’enjeu essentiel. Beaucoup reste à faire pour adapter le bâti aux normes actuelles dans les stations, par exemple. Penser autonomie énergétique et énergies renouvelables sans limiter la consommation en amont, cela ne peut pas fonctionner. C’est aussi un véritable enjeu économique car les entreprises locales ont, sur place, un marché très important, côté réhabilitation/isolation et production de la ressource bois et solaire. » L’association Négawatt propose, d’ailleurs, une intéressante démarche en trois temps – non dissociables – pour parvenir à l’autonomie énergétique : sobriété (ce qui relève du comportement individuel et de l’organisation collective), efficacité (amélioration des performances techniques des appareils, des véhicules, des bâtiments) et le complément par les énergies renouvelables. Comment s’y prendre pour économiser l’énergie ? Deux exemples pour passer à l’acte… • Les Langlet de Villard-de-Lans, après la construction de leur maison à ossature bois, se lancent, en 2011, dans le concours des familles à énergie positive au sein de l’équipe « Vercors ». Organisé par l’Ageden – Espace Info Énergie – et financé par l’ADEME et les collectivités impliquées, cette « compétition » valorise, par équipe, celles et ceux qui s’engagent par leur comportement à réduire d’au moins 8 % leur consommation sur 6 mois, mesures à l’appui. « Nous avons acquis des réflexes et réfléchi à nos gestes. Pas tant pour la question économique que pour l’aspect citoyen, responsable. Je débranche, par exemple, ma machine à laver qui consomme même à l’arrêt. Je l’ai découvert grâce au concours » explique Élisabeth Langlet. Leur maison construite par des artisans du Vercors, « made in Vercors » 16 poursuit-elle est aussi un choix délibéré, une fierté. Et comme « pendulaire », elle ne prend plus sa voiture pour se rendre dans la vallée mais le bus. « C’est deux fois plus long mais beaucoup moins fatigant et je fais de belles rencontres. » http://isere.familles-a-energie-positive.fr • La ferme du Pescher à Omblèze, engagée depuis 40 ans. son histoire mérite le détour. De son isolement qui n’a d’égal que sa beauté, elle en tire une force : l’exemplarité et l’indépendance énergétique puisque le raccordement au réseau électrique n’était pas envisageable. Dotée au départ de 18 m2 de panneaux photovoltaïques – grâce au concours du Parc –, devenus 36 m2, il y a dix ans, d’une pico centrale hydraulique, d’un four à bois pour le potier et d’un groupe électrogène de secours (au cas où), les activités de la photo : Stephane Desrousseaux Ils l’ont fait ! ferme s’organisent autour de la fromagerie, de l’accueil touristique et de la poterie. À tel point qu’elle attire beaucoup de visiteurs souhaitant imiter la démarche. « Le secret, c’est l’attitude, vivre simplement en éliminant les appareils qui consomment trop comme la bouilloire ou la machine à café, en partageant le congélateur. Si une famille ne joue pas le jeu, elle met en péril les autres… Le plus grand gisement d’énergie se trouve dans l’économie de son utilisation » explique Florence Rety de la ferme du Pescher. www.lafermedupescher.com Octobre 2015 � Le vercors n° 68 La nuit, doit-il faire jour ? Le 10 octobre a lieu le 7e Jour de la Nuit. Une manifestation destinée à sensibiliser au problème des pollutions lumineuses, dont l’éclairage public est le principal responsable. Un éclairage public également montré du doigt dans le budget des communes… Emmanuel Berrod, chargé du programme Nuit de Noé au sein de l’association Noé conservation. Valéry Friol, maire de Saint-Thomas-en-Royans. La loi Grenelle II a prévu des dispositions visant à réduire les nuisances lumineuses. Qu’entend-on par « nuisances lumineuses » ? Emmanuel Berrod : Les nuisances évoquent quelque chose de temporaire (le fait d’être ébloui par exemple), contrairement à la pollution lumineuse dont les effets sont durables : cela concerne essentiellement l’astronomie et la biodiversité. On parlera donc plutôt des pollutions. Il y a eu beaucoup d’études sur le sujet et ce que l’on connaît le mieux, ce sont les impacts directs de la lumière artificielle sur la biodiversité. Les cycles biologiques des espèces sont déréglés par la lumière artificielle. Ainsi, les insectes sont attirés par les lampes tout comme les oiseaux nocturnes qui les chassent ; à l’inverse, les chauves-souris sont lucifuges, elles vont fuir la lumière. Les effets indirects, plus difficiles à évaluer, sont ceux qui touchent le comportement, comme la modification des périodes de reproduction. Plus globalement, on peut se demander quel est l’effet sur l’écosystème ? Valéry Friol : Les nuisances lumineuses générées par l’éclairage public existent, c’est un fait. Sur notre commune, depuis cette année, nous éteignons la nuit, mais c’est dans une optique de réduction des coûts. De la même façon, nous essayons de privilégier les nouvelles technologies pour l’éclairage public. L’interdiction des ampoules à vapeur de mercure depuis le mois d’avril et celle des ampoules halogènes à partir de 2018 devrait conduire à une forte augmentation des ventes de LED : quels avantages et inconvénients peuvent présenter ces LED ? E. B. : Les LED présentent un intérêt économique évident, puisqu’elles permettent de réduire la consommation de moitié. On peut faire varier leur intensité en la réduisant de 70 %, ce qui est très intéressant pour l’éclairage public. Mais on ne connaît pas bien l’impact de ces LED sur la vue, ni sur la biodiversité. L’autre inconvénient des LED est qu’avec l’explosion de ce marché, on trouve des produits de mauvaise qualité : il faut que les collectivités soient vigilantes. Et surtout, qu’elles investissent dans cette technologie pour remplacer et non pour ajouter de l’éclairage. V. F. : Nous avons été sollicités dès 2013 par une entreprise fournisseur de LED intelligentes, c’est-à-dire que leur intensité lumineuse peut varier de 10 à 100 % et que tout est géré depuis un ordinateur Le vercors n° 68 � Octobre 2015 ou un smartphone. Nous avons mis en place ce système sur 14 points lumineux dans le village depuis mars 2014. Chaque point lumineux est indépendant et peut donc être programmé différemment. C’est une expérience grandeur nature qui n’a rien coûté à la commune. Après un an et demi, on constate une baisse sensible de la consommation et beaucoup moins d’interventions dues à des pannes, mais pour que ce soit valable, il faudrait que l’ensemble de la commune soit équipé. C’est un investissement important, difficile à envisager pour une petite commune comme la nôtre. Le procédé est récent, on manque de recul, mais à ce jour le bilan est positif. Les maires ont l’obligation de garantir des rues commodes et sûres dans leur commune : est-ce compatible avec la nécessité de réduire les pollutions visuelles et réaliser des économies d’énergie ? E. B. : Les problématiques ne sont pas les mêmes en fonction de la taille de la commune et de ce que l’on appelle les « usages et les besoins ». On pourra envisager plus facilement d’éteindre une partie de la nuit l’éclairage dans un quartier résidentiel que dans une rue où se trouvent des commerces nocturnes. De la même façon, une extinction nocturne est envisageable dans des villages ou des petites villes, alors que cela provoquerait une sensation d’insécurité plus importante dans une grande ville. On peut aussi réduire l’intensité de l’éclairage public ou mettre en place, notamment dans les grandes villes, un système de détection de présence humaine. Les LED offrent cette souplesse. V. F. : Si nous avons pris la décision d’éteindre une partie de la nuit cette année, ce n’est pas de gaieté de cœur. La population, surtout les personnes âgées, a un sentiment d’insécurité. Éteindre la nuit permet de réduire la facture, mais ce n’est pas forcément une bonne solution. Ce qui me semble beaucoup plus intéressant aujourd’hui, en attendant de pouvoir peut-être généraliser la technologie dont nous avons bénéficié, c’est d’éclairer avec des intensités plus faibles. 17 par Thierry Lebel zoom du conseil scientifique édito 25. Les milieux humides et leur préservation 26. Pour un Vercors plus sobre en énergie 27. Énergies participatives de Catherine Brette Présidente du Parc naturel régional du Vercors Une façon simple pour chacun de faire un geste pour la planète Certains de nos aliments parcourent des kilomètres avant d’arriver dans notre assiette. Si bien que nos choix alimentaires ont un impact sur le modèle économique de l’agriculture et – de façon plus ou moins importante – sur le réchauffement climatique de notre planète. Dans cette période de préparation de la conférence internationale sur le climat qui se déroulera à Paris la première quinzaine du mois de décembre, il est bon de se rappeler tout ce qui procède d’une attitude responsable face à cette problématique. Ainsi, par exemple, manger des produits locaux et de saison est une façon simple pour chacun d’entre nous de faire un geste pour le climat. Cela contribue du même coup à maintenir et développer sur notre territoire une agriculture durable. La Fête du Bleu qui s’est déroulée avec un grand succès en août dernier à Villard-de-Lans correspond à cette dynamique. Cette fête, conçue par le Parc du Vercors il y a 15 ans pour accompagner le lancement de l’AOC Bleu du Vercors Sassenage, a montré de quelle façon le territoire est capable d’innovation dans le domaine. Pour négocier avantageusement les enjeux et mutations en cours, c’est sans relâche que nous devons faire la preuve de notre capacité collective d’innovation sociétale et territoriale pour qu’« Une autre vie s’invente ici ». Le Parc du Vercors, les territoires des CDDRA* Royans-Vercors et Sud Grésivaudan ont été retenus par la Région Rhône-Alpes pour un programme européen Leader intitulé « TERRES D’ÉChOS ». Conçu pour « agir en faveur d’une économie de proximité », ce programme s’appuie sur deux enjeux d’avenir complémentaires pour le territoire : l’économie rurale et une stratégie alimentaire durable. Ce qui signifie, en d’autres termes : consolider l’emploi local, préserver les productions et savoir-faire du territoire, accompagner la mutation des modes d’exploitation agricole et la sobriété énergétique, enfin renforcer les coopérations à toutes les échelles territoriales. Gageons que ce programme nous aidera à relever ces défis pour valoriser et développer nos atouts. *Contrats de Développement Durable de Rhône-Alpes. Protéger les oiseaux de l’Isère ! La Ligue pour la Protection des Oiseaux, ERDF, le Département de l’Isère, le Parc national des Écrins, les Parcs régionaux du Vercors et de Chartreuse ont mis en place un partenariat visant à réduire l’impact des réseaux électriques sur l’avifaune. Une plaquette de présentation est parue avant l’été pour présenter les actions et inciter chacun à participer au recensement des cas de mortalité d’oiseaux en transmettant ses observations à la LPO Isère (date, localisation exacte, photo) : [email protected] – tél. : 04 76 51 78 03 - www.faune-isere.org 18 Film gagnant ! Le film « Mission P.O.I.A », une fiction institutionnelle décalée produite par le Parc naturel régional du Vercors raconte comment s’est déroulé le programme de diversification touristique du Vercors. Financé par l’Europe, l’État, la Région Rhône-Alpes, et les collectivités locales dans le cadre du CIMA – POIA, il a reçu, en juin 2015, le Totem d’argent aux « Deauville Green Awards » dans la catégorie « films d’entreprises et institutionnels ». Film réalisé par le collectif grenoblois Keep It Up Octobre 2015 � Le vercors n° 68 PHOTO : Thierry Lebel Au Sahel, les populations sont dépendantes pour leur survie d’une eau rare et difficile d’accès. Le réchauffement climatique pourrait-il bouleverser nos modes de vie ? hivernales pourraient augmenter, mais dans tous les cas la limite pluie/neige, qui est déjà remontée significativement, remontera encore. La durée d’enneigement à 1 500 m devrait en être réduite de plusieurs semaines. Par contre, on ne peut exclure que le cumul de neige tombant en une saison au-dessus de 2 000 mètres se maintienne. Les activités économiques conditionnées par le climat – dont notamment le tourisme hivernal et l’agriculture – vont donc se trouver fortement impactées. Les paysages vont se transformer, particulièrement les glaciers, dont la fonte va s’accélérer du fait de vagues de chaleur accrues en été – même si une hausse des précipitations neigeuses en haute altitude l’hiver pourrait amortir un peu ce processus. Les zones de végétation vont, elles aussi, évoluer, avec une remontée de la forêt et le retrait en altitude des pelouses alpines. Le réchauffement climatique est une réalité avérée, qui va aller en s’accentuant. Cela pourrait faire franchir à notre planète des points de rupture amenant à de nouveaux équilibres environnementaux auxquels nous devrons nous adapter. L a réalité du réchauffement climatique planétaire, présent et futur, ainsi que son origine anthropique, ne sont plus contestées par aucun scientifique indépendant travaillant dans le domaine des sciences du climat et de l’environnement. À la Conférence scientifique (« Our Common Future under Climate Change ») qui s’est tenue à Paris du 7 au 10 juillet dernier, tous les ministres et décideurs qui sont intervenus en ouverture ou en clôture ont pris acte de cette réalité et engagé les chercheurs à œuvrer pour que les enjeux sociétaux du réchauffement climatique soient mieux perçus par tous. Toutes les régions de la planète seront affectées par le réchauffement climatique. Un point très important à avoir en tête est que le réchauffement sur les continents est bien plus élevé que la hausse moyenne de 0,8°C déjà enregistrée depuis le début du xxe siècle pour l’ensemble de la planète. Sur les Alpes, par exemple, on est actuellement aux alentours de +1,7 à +1,8°C, et dans les scénarios moyens on dépassera certainement +3°C à l’horizon 2100, soit une remontée de la limite pluie/neige de 450 mètres. Si rien n’est fait pour ralentir nos émissions de CO2 et autres gaz à Le vercors n° 68 � Octobre 2015 Mesures météorologiques sur le glacier de Saint Sorlin par le laboratoire grenoblois LTHE. PHOTO : Thierry Lebel PHOTO : PNRV / Raphaële Bruyère 19. Le réchauffement climatique pourrait-il bouleverser nos modes de vie ? 21. Agriculture et forêt : objectif excellence 22.Sciences en Vercors : l’étude du changement climatique effet de serre (GES), cette augmentation pourrait aller jusqu’à +6°C sur les Alpes, soit une remontée de la limite pluie/ neige de 900 mètres. Quels que soient les scénarios d’émission, la réalité sera plus complexe que les chiffres moyens indiqués ci-dessus. En effet le réchauffement sera plus marqué en été qu’en hiver, et les précipitations L’exemple alpin permet de pointer trois éléments essentiels du réchauffement climatique et de ses effets : 1 • La communauté scientifique peut s’appuyer aujourd’hui sur des acquis solides concernant l’évolution du climat à l’échelle globale, le premier d’entre eux ayant trait à des hausses de températures constatées et prévues d’une rapidité jamais connue depuis l’existence d’Homo Sapiens. 2 • Par contre, de nombreuses incertitudes apparaissent concernant les impacts localisés de cette évolution globale, à la fois du fait de fortes disparités régionales et des interactions entre changement climatique et autres changements environnementaux ou socioéconomiques. 3 • De faibles modifications climatiques peuvent avoir de fortes conséquences en matière de disponibilité des ressources en eau, d’exposition aux risques liés aux sécheresses et aux inondations, ou de menaces sur la biodiversité. 19 zoom du conseil scientifique par Thierry Lebel Un nuage de lignes de grains, principal source de pluie au Sahel dont les modifications sont associées au changement climatique. >> Thierry Lebel >>>> portrait PHOTO : CNRS Photothèque-Cyril Frésillon Appartenant à une génération qui a vu l’émergence sociétale des questions environnementales, Thierry Lebel s’est passionné très jeune pour les problématiques de développement durable. Il commence sa carrière scientifique au début des années 1980 par une thèse consacrée aux crues extrêmes en région méditerranéenne, prolongée par un séjour postdoctoral à Boulder aux États-Unis, à l’époque « La Mecque » des sciences du climat. Il intègre l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement) en 1985 où il étudie les interactions entre variabilité climatique et cycle de l’eau au Sahel. C’est dans ce cadre qu’il effectue un premier séjour de 4 ans au Niger et reçoit un prix de l’Académie des Sciences. Fort de cette expérience, il lance, avec un confrère du CNRS, un ambitieux programme d’observation et de modélisation du système climatique régional d’Afrique de l’Ouest. Le projet AMMA (Analyses Multidisciplinaires de la Mousson Africaine) voit le jour en 2002 et durera jusqu’en 2010. Ayant regroupé près d’un millier de scientifiques, AMMA a été le premier projet d’une telle ampleur jamais mené dans le monde, ce qui vaut à Thierry Lebel de recevoir la Médaille d’argent du CNRS en 2011. 20 Depuis 2008, il dirige le Laboratoire d’étude des Transferts en Hydrologie et Environnement (LTHE) à l’Université de Grenoble. Ce laboratoire mène des recherches pour mieux comprendre l’impact du changement climatique sur le cycle de l’eau dans les régions de montagne (Alpes, Andes, Himalaya), ouvrant ainsi de nouveaux horizons scientifiques. Avec le conservateur de la Réserve des HautsPlateaux du Vercors, Pierre-Eymard Biron, il a ainsi été à l’initiative d’un observatoire éco-climatique visant à documenter l’impact du réchauffement climatique (1,6° C depuis le début du xxe siècle) sur cet espace naturel emblématique. Pratiquant assidu d’activités de montagne, Thierry Lebel vit à Lans-en-Vercors. Convaincu de la nécessité de mieux insérer la recherche scientifique dans la société, il s’implique à différents niveaux. Il est ainsi membre du Conseil scientifique du Parc naturel régional du Vercors depuis 2009. Il a participé à la COP20 à Lima et est coordinateur du collectif COP21Université Grenoble-Alpes. Son plus grand défi est de tenter de faire comprendre simplement les enjeux complexes du réchauffement climatique, que ce soit à travers des conférences grand public ou en contribuant à différentes revues. Octobre 2015 � Le vercors n° 68 PNRV / Raphaële Bruyère PHOTO : L’existence de singularités et de points de bascule (appelés tipping points en anglais) dans le fonctionnement du Système Terre limite notre capacité à formuler des prédictions détaillées et localisées des dérèglements climatiques à venir. Un point de bascule typique est la disparition des glaciers. Le recul glaciaire en altitude est irrégulier car, s’il est avant tout dû à la hausse des températures, il dépend également des variations du régime de précipitation et de la topographie sousglaciaire – entre autres. Mais tant que le glacier existe, une baisse des températures et/ou une hausse des précipitations neigeuses peuvent produire des ré-avancées du front du glacier, assez rapides. Par contre, il suffit que le glacier passe sous une certaine taille critique pour que sa disparition soit inéluctable. Une fois le glacier disparu, le système bascule dans un autre régime d’équilibre et il faudra des changements de température et de précipitations bien plus extrêmes que ceux qui ont présidé à sa disparition pour que le glacier voie à nouveau le jour. Le franchissement de points de basde l’environnement, mais la plupart nous cule aux effets spectaculaires a déjà été sont inconnus car nous ne les avons jamais observé dans le passé : par exemple, il y approchés. La communauté scientifique a environ 5000 ans, le Sahara était vert, doit donc aujourd’hui faire face à un il s’est transformé en désert en quelques double défi : 1 • purement scientifique centaines d’années, entraînant l’ensablevisant à identifier ces points de bascule ment du fleuve Niger qui a changé de et des méthodes pour détecter quand cours sur plusieurs milliers de kilomètres. on s’en approche ; 2 • sociétal, visant à De même, aujourd’hui, si aucune mesure convaincre les décideurs politiques et écon’est prise pour lutter contre le réchaufnomiques qu’il serait dangereux de laisser fement et l’acidification des dériver les températures, car océans, on peut redouter la la probabilité d’approcher et Une fois de franchir des points de basdisparition des récifs coralle glacier liens, qui ont mis des millécule nous conduirait dans un disparu, le naires pour se construire. En monde inconnu au fonctionnesystème fait, il existe des points de basment duquel nous ne sommes bascule dans cule à toutes les échelles et un autre régime pas certains de pouvoir nous d’équilibre dans tous les compartiments adapter. PHOTO : Thierry Lebel Prédire et anticiper les points de bascule, un enjeu majeur par Marion Blanchard DÉCRYPTAGE Agriculture et forêt : objectif excellence Comment concilier agriculture et maintien de la biodiversité ? Dans un parc naturel régional plus qu’ailleurs, aujourd’hui plus que jamais, agriculture et développement durable doivent avancer « main dans la main ». Rencontre avec Brigitte Briel, vice-présidente du Parc en charge des productions durables. Quels sont les principaux objectifs du Parc dans le domaine des productions durables ? Les productions durables recouvrent deux domaines distincts et fondamentaux pour notre territoire : l’agriculture et la forêt. L’agriculture, dont les fonctions sont multiples, façonne les paysages du Vercors. Quant à la forêt, patrimoine remarquable, elle recouvre 65 % de la surface du massif et assure, entre autres, une fonction de protection majeure contre les risques d’érosion de la montagne (éboulement, avalanche…) et de protection environnementale (qualité de l’eau…). Vitalité des territoires, gestion de la biodiversité, ouverture et maintien des paysages, obtention de revenus décents pour les agriculteurs et les exploitants…, les objectifs sont multiples et s’inscrivent dans cette volonté de construire un projet de développement territorial durable en concertation avec les acteurs. C’est l’excellence à long terme qui est visée. En plus de façonner les paysages, on a l’impression que l’agriculture est un élément très important de l’économie touristique. Est-ce une réalité ? Au sein du Parc, l’agriculture et la forêt constituent les bases de l’économie du massif. Au-delà de leur vocation première de production, elles assurent des fonctions sociales et environnementales. En plus de la vitalité qu’elles impulsent, du lien social qu’elles créent et des services qu’elles maintiennent, elles contribuent fortement, par la sauvegarde des ressources, des paysages, du patrimoine naturel et culturel à l’attractivité résidentielle et touristique. Un tourisme éco-responsable « inspiré Vercors ». Le vercors n° 68 � Octobre 2015 On a pris conscience de l’importance de la biodiversité en même temps que l’on a fait le constat de son érosion continue et irréversible. Elle est ainsi devenue un cadre de réflexion sur la question des relations entre l’homme et les autres espèces. Face aux enjeux de demain (changement climatique, disparition des énergies fossiles…), nous devons absolument réinventer nos modes de production et de consommation dans le respect de la biodiversité. L’enjeu est d’épargner les ressources naturelles (eau, sol, énergie fossile, air…) d’une part en préservant la biodiversité et d’autre part en la considérant justement comme un facteur de production. Des actions structurantes portées par le Parc vont dans le sens d’une cohabitation harmonieuse entre agriculture et biodiversité : l’accompagnement des mesures agro-environnementales et climatiques, la gestion des contrats de rivière (Vercors Eau Pure 1 & 2), les incitations à une utilisation rationnelle de l’énergie, l’animation des sites Natura 2000, la promotion des ressources locales (photovoltaïques, bois-énergie)… C’est la haute valeur naturelle qui est visée par le Parc pour son agriculture et sa forêt, ce qui se traduit par des productions à très faibles intrants sur une part importante des surfaces exploitées. Lors de la prochaine conférence sur le climat qui se tiendra à Paris à la fin de l’année, la préservation des ressources sera au cœur des débats. Quel rôle le Parc peut-il jouer pour intégrer cette problématique à celle du développement de l’agriculture ? C’est principalement autour de la gestion de l’eau que le Parc sera acteur de la préservation des ressources. Le Vercors possède peu d’eau de surface parce qu’en milieu karstique, elle s’infiltre profondément. Sans trop plein, les sources ne coulent pas, ce qui rend l’étiage estival dans les cours d’eau très prononcé. En outre, les versants sud présentent un déficit chronique en eau. L’aggravation prévisible des pénuries rend nécessaire le développement de cultures plus sobres et/ou à plus forte valeur ajoutée. Mais la diversification des cultures suppose l’existence simultanée de débouchés économiques locaux valorisant les productions nouvelles, ce qui reste souvent à inventer. S’appuyant sur la créativité et le dynamisme du monde agricole et forestier, le Parc favorisera les productions de qualité dans des milieux de qualité. 21 PHOTO : Bernard Bellon dossier par Jeanne Aimé-Sintès Sciences en Vercors : l’étude du changement climatique Le changement climatique est devenu une réalité dans le Vercors, comme partout ailleurs. Mais comment l’étudier, le mesurer et agir en conséquence ? C’est l’une des missions du Parc, territoire privilégié d’études scientifiques et de questionnements sur le climat de demain. L e Vercors va connaître des bouleversements climatiques certains » affirme Pierre-Eymard Biron, Conservateur de la Réserve naturelle des Hauts-Plateaux du Vercors. « Cependant, nous n’avons pas encore le recul nécessaire pour quantifier ce changement, car le climat s’étudie sur de longues séries ». À cette échelle, les aléas climatiques et la manière dont nous vivons la météo au quotidien se voient gommés. Et, s’il faut plus qu’un été de canicule pour affirmer que réchauffement climatique il y a, il convient également de mettre en place un véritable protocole scientifique permettant de croiser diverses données, sur un pas de temps suffisamment long ! Ce géologue de formation, passionné par le dialogue entre chercheurs d’horizons variés poursuit : « Avec l’Observatoire bioclimatique du Parc, l’étude du changement du climat dans le Vercors a débuté il y a 10 ans. Les résultats commencent à dessiner des tendances, qu’il reste à préciser ». Tour d’horizon d’un programme de recherche aussi passionnant qu’indispensable et qui permettra, demain, d’apporter des éléments aux élus, aux habitants et aux professionnels, sur l’adaptation de nos activités au changement du climat. Carrefour climatique et zones de combat Le massif du Vercors, et notamment la Réserve naturelle des Hauts-Plateaux, forment un lieu idéal pour mesurer et comprendre les conséquences des changements climatiques. « Nous savons que le changement climatique va être assez visible sur des territoires particuliers, comme le Vercors, où les carrefours des influences climatiques et les étages de la 22 Station météo sur la Réserve des Hauts-Plateaux avec capteurs : ils permettent de mesurer la température, la force et la direction du vent, l’épaisseur de la neige. Un lagopède alpin avec son plumage d’hiver. PHOTO : PNRV / garderie « végétation vont se déplacer » explique Pierre-Eymard Biron. Dans un contexte montagnard, le Vercors se situe à la croisée des influences océanique à l’Ouest, continentale à l’Est et méditerranéenne au Sud. Or cette dernière semble commencer à gagner du terrain… Un indice : la progression de la cigale jusque sur les Hauts-Plateaux ! Sur ce secteur, la « zone de combat » est actuellement très étendue, favorisant un milieu dit « en mosaïque ». Cette zone de passage, entre l’étage montagnard, domaine de la forêt et l’étage subalpin et ses pelouses, risque d’être bouleversée. Une des conséquences probables du changement climatique sera son déplacement en altitude et sa diminution en surface. Quel avenir pour le tétras-lyre qui utilise tout spécialement ce milieu ? Autre répercussion plausible, la disparition de l’étage alpin hébergeant le lagopède. Ces deux espèces, appelées reliques glaciaires, risquent bien de s’éteindre à terme dans le Vercors… Enfin, l’existence même de la Réserve naturelle des Hauts-Plateaux, dont une partie est classée en Réserve Biologique Intégrale (RBI), explique cette attention particulière portée à l’étude et à la recherche. Sa vocation scientifique et Octobre 2015 � Le vercors n° 68 son statut durable de protection en font naturellement un terrain d’étude. Face aux enjeux à venir, le Parc a donc choisi d’orienter une part importante de ses recherches autour de l’angle climatique, dans une approche transversale. En équipant le territoire de six stations météo, dont trois très élaborées, il offre ainsi à ses partenaires scientifiques un véritable laboratoire à ciel ouvert. Plusieurs équipes s’en sont emparées : le LTHE (Laboratoire de Transfert Hydraulique en Environnement), l’IRSTEA (Institut National de Recherche en Sciences et Technologies pour l’Environnement et l’Agriculture) et le LECA (Laboratoire d’écologie Alpine). Ensemble, ils ont été labellisés par le CNRS « Zone Atelier » pour leur action de recherche tournée vers le changement climatique et ses conséquences. Outre le Vercors, cette démarche concerne d’autres zones des Alpes. Le vercors n° 68 � Octobre 2015 le vercors Influences continentales Influences océaniques Influences méditerranéennes Coup de chaud sur le Vercors ? Trois stations principales, Darbounouse à 1 300 m d’altitude au Nord, Gerland à 1 500 m en position centrale et le Jardin du Roi, à 1 800 m au sud, complétées par trois enregistreurs situés dans la Réserve Biologique Intégrale, consignent inlassablement températures, humidité, pluviométrie, vitesse et direction du vent, rayonnement. En complément, trois sources sont étudiées depuis cinq ans autour de la station de Gerland afin d’en suivre l’évolution hydraulique. Ces batteries de mesures, plus ou moins détaillées selon les stations, permettent d’apporter quelques orientations. Mais Pierre-Eymard Biron insiste : « Les résultats actuels sont à prendre avec des pincettes et ne dessinent que des tendances qu’il reste à confirmer avec le temps. » Les températures moyennes de l’année sur les trois stations sont semblables et il semble que les différences d’altitude soient compensées par la latitude, mais l’amplitude thermique est bien plus importante au Nord, au climat continental, qu’au Sud, marqué par un climat méditerranéen. Ce constat confirme la notion de carrefour climatique. « Nous n’avons pas assez de recul pour constater l’augmentation des températures. Cependant, nous avons l’impression que les températures nocturnes augmentent, 23 dossier par Jeanne Aimé-Sintès QUI FAIT QUOI ? avec globalement moins de fraîcheur la nuit, donc moins de rosée. Quelles sont les conséquences sur la ressource en eau et donc sur la faune, la flore et l’activité pastorale ? » s’interroge le conservateur de la Réserve. Enfin, le régime des vents semble avoir changé. C’est ce que les chercheurs ont commencé à mettre en évidence, en étudiant en parallèle les mesures des stations locales avec les données régionales sur 100 ans. Le vent dominant d’Ouest pourrait avoir cédé la place au vent du Sud, parfois violent. Les milieux humides et leur préservation Quels que soient les usages et enjeux dans l’aménagement du territoire, la préservation de la ressource en eau passe par la préservation des milieux humides qui est ainsi l’affaire de tous. Qu’est-ce qu’un milieu humide ? Le Vercors, terrain laboratoire pour ADAMONT Les principaux facteurs de leur disparition La plus grande part des milieux humides a disparu par remblai, et a été urbanisée (constructions, infrastructures) ou drainée et cultivée. D’autres pratiques ont des impacts lourds : la pollution par les produits phytosanitaires et les rejets industriels, l’utilisation exagérée de fertilisants, organiques ou minéraux... En Vercors, des quartiers récents sont construits en détournant et comblant les sources ou sur des marais remblayés. Les sols humides sont drainés pour l’agriculture, afin d’améliorer leur valeur fourragère ou d’augmenter la surface agricole. Les prairies riveraines des cours d’eau sont gagnées sur de grands marais, défrichés et drainés par les agriculteurs des siècles passés. Des milieux aujourd’hui reconnus et protégés Au cours du xxe siècle, plus de la moitié des milieux humides en Europe et dans le monde a disparu, provoquant la disparition ou la raréfaction de très nombreuses espèces animales et végétales. Les milieux humides sont les seuls milieux naturels à faire l’objet d’une convention internationale pour leur conservation : la convention de Ramsar (1975), 2 000 sites protégés à travers le monde. Au niveau national, le code de l’environnement définit l’objectif d’une gestion équilibrée de la ressource en eau (Art. L.211-1). Il affirme notamment un principe : la préservation et la gestion durable des zones humides sont d’intérêt général. Chaque département a cartographié les principales zones humides, afin qu’elles soient peu à peu protégées dans les PLU et PLUI. L’Androsace lactea. Préservation en Vercors PHOTO : PNRV / garderie PHOTO : Irstea ADAMONT (Impacts du Changement Climatique et Adaptation en territoire de Montagne) est une action de recherche pluridisciplinaire qui, de 2015 à 2017, mobilisera le Parc du Vercors et une équipe d’une trentaine de chercheurs de l’IRSTEA (Institut National de Recherche en Sciences et Technologies pour l’Environnement et l’Agriculture). Agronomes, sociologues, géographes, économistes, forestiers, écologues ou encore spécialistes des risques naturels vont croiser les données produites dans le Parc sous l’angle du changement climatique. Dans le même temps, ils animeront des ateliers-rencontres sur différents thèmes (agriculture, tourisme, gestion de la ressource en eau...). L’objectif : recueillir et traduire les pratiques d’adaptation déjà existantes. De leur côté, les chercheurs de Météo-France, associés au projet, cherchent à régionaliser les grands scénarios climatiques qui se dessinent aujourd’hui. Au final, il s’agira d’apporter aux élus, professionnels et habitants une véritable boîte à outils, donnant des clés de lecture pour anticiper le changement climatique, et proposer des pratiques d’adaptation. Pourquoi le Parc du Vercors ? Dans les zones de montagne, les changements liés au climat sont visibles plus vite, si bien que la montagne devient une véritable sentinelle du changement climatique. Le Parc, partie prenante, a intégré ADAMONT à sa problématique générale de recherche sur le changement climatique et participe à son animation, en mobilisant les forces vives du territoire. Un séminaire de lancement a eu lieu le 22 juin dernier, réunissant sur la journée plus de 90 personnes, chercheurs, élus et socioprofessionnels du Vercors. Station météo Jardin du roi sur la Réserve. C’est un sol habituellement inondé ou gorgé d’eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire. Il est parfois proche de cours d’eau avec lesquels il existe des liens étroits. Appelé aussi zone humide, il en existe une grande diversité : marais, mares naturelles, tourbières, prairies, plaines alluviales, landes et forêts humides, lacs, étangs... ; en bordure des côtes : lagunes, vasières, mangroves... Les mesures purement climatiques et hydrologiques sont complétées par l’observation de la progression d’espèces comme la cigale et le suivi d’espèces végétales par les éco-gardes du Parc, sous la responsabilité du Conservatoire botanique alpin. Plantes discrètes, l’Androsace lactea, le Carex mucronata et le Lichopodium annotinum, une sorte de fougère, sont devenues toutes trois rares en Vercors et risquent de disparaître du fait du changement du climat. Côté oiseaux, plusieurs suivis sont menés tant sur l’écoute et la présence des espèces que sur les dates de migration ou de ponte, notamment avec la LPO (Ligue de Protection des Oiseaux) et le CREA (Centre de Recherche des Écosystèmes d’Altitude). Là encore, de grands bouleversements sont attendus. Mais c’est sur la question de la ressource en eau que Pierre-Eymard Biron s’interroge le plus. Un risque de pénurie estivale pourrait apparaître, non pas du fait de pluies moins abondantes, mais plutôt d’une moindre restitution de l’eau hivernale, liée à moins de neige ou à une fonte plus rapide du manteau neigeux. « La question de l’eau se pose directement pour l’ensemble des activités, du pastoralisme en passant par le tourisme, mais aussi au quotidien pour les habitants du Vercors » conclut-il. Plus d’infos : sur le site du Parc http://urlz.fr/2rGa 24 Octobre 2015 � Le vercors n° 68 Dans le cadre d’un Contrat de Rivière intitulé Vercors Eau Pure II financé par les collectivités maîtres d’ouvrage, l’Agence de l’eau, la Région Rhône-Alpes, les Départements de la Drôme et de l’Isère, le Parc du Vercors réalise avec les collectivités locales un programme d’actions pour la qualité de l’eau et la préservation ou la restauration des cours d’eau et des zones humides encore existantes. Les élus et partenaires se réunissent régulièrement dans un Comité de rivière pour faciliter les échanges et permettre une concertation locale. Le vercors n° 68 � Octobre 2015 PHOTO : PNRV / Mireille Delahaye PHOTO : PNRV / garderie Vivre avec le changement climatique La Bourne au Pont des Aniers en juillet 2015 pendant la sécheresse, à gauche une parcelle de prairie humide avec sa végétation très reconnaissable : saules, épilobes roses, reine des prés blanche, menthes aquatiques, petits joncs. Les milieux humides en France, en Isère, en Vercors Ils couvrent environ 5 % du territoire national, soit 2 à 3 millions d’ha. Selon le Conservatoire des Espaces naturels de l’Isère, ils représentent 45 400 ha en Isère (6 % du département). Le Parc du Vercors a recensé (2004) environ 230 zones humides d’une surface supérieure à un hectare dans le bassin versant de la Bourne et de ses affluents le Méaudret, la Vernaison, et la Lyonne, ainsi que sur le Furon et l’Isère soit une superficie d’un peu plus de 2 400 ha. Un plan de gestion des prairies humides est prévu par le Parc entre 2015 et 2017, ainsi qu’un inventaire participatif des zones de petite taille. Une réserve d’eau douce Les milieux humides aident à recharger les nappes souterraines. Dans le Vercors, ils ralentissent la « fuite » de l’eau vers les plaines alentours et assurent une réserve essentielle en milieu karstique. Un pouvoir d’épuration qui améliore la qualité de l’eau Une partie des végétaux inféodés aux zones humides jouent un rôle de filtres : ils retiennent ou transforment les éléments nutritifs en excès (nitrates, phosphates), les particules fines et certains polluants (pesticides). Ils agissent comme des éponges naturelles Absorbant les précipitations, ils atténuent la violence des crues en ralentissant et en stockant les eaux, qu’ils restituent en période de sécheresse. Un milieu indispensable à la biodiversité Ils constituent des habitats privilégiés pour de nombreuses espèces animales et végétales : en France, l’ensemble des batraciens et des poissons d’eau douce, une part importante des insectes et des invertébrés, la moitié des oiseaux et de nombreuses espèces végétales y sont inféodés. 25 Une équipe, des métiers par Corine Lacrampe par Laurent Rivet LES PIEDS DANS LE PARC Énergies participatives Arrivé sur le plateau du Vercors au printemps 2015, Emmanuel Jeanjean est chargé de mission Énergie et Mobilité au Parc du Vercors. Il vise un Vercors plus sobre, efficace et renouvelable. Un peu de technique mais surtout un état d’esprit et une manière de vivre. S’approprier localement l’énergie ? Citoyens et élus, étroitement associés, ont bénéficié d’un accompagnement du Parc pendant 4 ans. La Centrale Villageoise Photovoltaïque (CVP) en Gervanne a montré l’exemple ! Au quotidien, sa mission consiste à sensibiliser les élus des collectivités locales sur ce qui peut être mené dans le domaine de la maîtrise de l’énergie et de la production d’énergies renouvelables, à leur apporter les informations techniques, financières et organisationnelles. Il qualifie sa mission en termes de diagnostic, appui, accompagnement et coordination des initiatives, proche du terrain. Dans le Queyras, la taille du territoire et les projets naissants nécessitaient un accompagnement systématique. Au Parc du Vercors, qui compte 85 communes, les choses sont bien différentes : les initiatives sont depuis longtemps foisonnantes. Impossible d’être partout ! Emmanuel Vers d’autres aventures Un coup de chapeau à trois membres de l’équipe qui partent vers d’autres aventures. Les trente et quelques années au cours desquelles Serge Charruau a travaillé au Parc n’ont jamais entamé la passion qu’il nourrit pour les questions de mobilité et d’énergie dont il était chargé lors de sa dernière mission. De cette période, il dit retenir le « superbe » outil d’aménagement, de concertation et d’innovation en lien avec les élus. Il a choisi de partir avant l’âge de la retraite pour mener des projets personnels toujours en lien avec le territoire. Il nous en dira peut-être plus bientôt… 26 Guy Caullireau, le grand monsieur, vient de partir à la retraite. Après avoir été instituteur, régisseur d’expositions au Musée Dauphinois et garde dans les Parcs nationaux des Écrins et de la Vanoise, il a arpenté et préservé la Réserve naturelle des Hauts-Plateaux pendant près de 20 ans. Aujourd’hui, toujours habitant de Méaudre où il est né, il a décidé de se consacrer à ses petits enfants et à ses loisirs préférés, la sculpture sur bois et le jardinage. En avril 2007, Marion Rochas devient assistante des secteurs Agriculture et « Alimentation, Santé et Territoires ». Dès le début, elle l’avait dit : son projet personnel était de devenir agricultrice et elle consacrerait une partie de son temps à l’élaboration de cet objectif. Le GAEC Ferme du Pic Saint Michel est né en 2011. Elle a pu rejoindre à plein temps son mari le 1er janvier 2015. Ils vendent des fromages de chèvre à la ferme et sur les marchés. Très investie sur le territoire, Marion est administratrice de l’APAP, membre du bureau de l’Office du tourisme de Lans, du comité de pilotage du réseau des fermes ouvertes « Prenez la clé des champs »… Plus d’infos : www.chevreriedupicsaintmichel.fr Octobre 2015 � Le vercors n° 68 I nitié en 2011, ce projet de CVP vient d’être inauguré le 13 juin dernier par René Druguet, président de la société Centrale Photovoltaïque Villageoise, et maire de Plan-de-Baix. Six toitures recouvertes de panneaux photovoltaïques, intégrés au bâti, viennent d’être raccordées au réseau électrique. Elles couvriront la consommation d’environ 50 personnes. Cette belle aventure est partie d’une initiative de la Commission Énergie du Parc du Vercors. Avec une idée en tête, « produire de l’énergie photovoltaïque de façon participative et citoyenne plutôt que de répondre de manière passive aux sollicitations multiples d’investisseurs » explique Serge Charruau, alors chargé de mission Énergie du Parc. Prendre son destin énergétique en main, en quelque sorte ! Il est donc décidé de lancer le projet autour d’un groupe d’élus et de citoyens de la Gervanne. La question est complexe. Sans accompagnement, le risque d’échec du projet reste très élevé. Entre en scène un deuxième acteur, Rhônalpénergie-environnement (RAEE). Experte en la matière, l’association majoritairement soutenue par la Région, apporte son soutien dans la recherche de financements (européens, régionaux et départementaux) mais également sur toutes les questions techniques et réglementaires. Un vrai casse-tête car l’opération est pionnière et ce mode de fonctionnement participatif perturbe quelque peu les us et coutumes des grands acteurs de l’énergie. Parc et RAEE travaillent de concert avec le CAUE, l’ADIL (Agence D’Information Le vercors n° 68 � Octobre 2015 Discours de René Druguet entouré notamment de Gérard Gagnier, vice-président du Parc du Vercors et de Jean Serret, président de la communauté de communes Val de Drôme. PHOTO : Centrales Villageoises Gervanne Raye Conseil, appui et coordination Jeanjean se concentre donc sur des projets cohérents pour l’ensemble du Parc ou sur ceux qui, bien que locaux, sont fortement innovants. Depuis six mois en poste, il prend en main ses premiers dossiers. Il accompagne des réflexions et des projets collectivités / habitants pour la production d’énergies renouvelables. Suite à l’étude initiée par le Parc en 2013-2014 sur la mobilité et les transports en Vercors, il projette la mise en place d’un centre ressource sur la mobilité en 2016 (sous forme d’un site Internet). Avec 10 000 déplacements quotidiens en moyenne entre le Nord du plateau et l’agglomération grenobloise et les déplacements très importants en périodes touristiques, l’enjeu est de taille. Il faudra aussi faciliter les déplacements à l’intérieur même du territoire. Plusieurs alternatives à la voiture individuelle se développent : promotion du vélo et de la marche à pied, optimisation des transports en commun, covoiturage, auto-stop organisé ou autopartage. Enfin, il prépare pour cet automne la candidature TEPOS (Territoires à Énergie POSitive) en lien étroit avec les communautés de communes du Parc. L’objectif est de produire localement autant d’énergie que celle qui est consommée d’ici à 2050. Emmanuel précise : « Le taux d’équipement en énergie renouvelable est important en Vercors. En 2008, par rapport aux moyennes régionales, il était 3 fois plus important pour le solaire thermique et 15 fois plus important pour les installations bois énergie. Nous devons aujourd’hui refaire un état des lieux et nous fixer de nouveaux objectifs déclinés par filières. La démarche TEPOS va nous y aider. Le Vercors a des atouts : des ressources naturelles et 20 ans de mobilisation des acteurs locaux sur l’énergie. » PHOTO : DR I l a débuté sa carrière dans les années 90 au Laboratoire de Glaciologie à Grenoble et par une mission d’un an en Antarctique. Il travaillait sur les variations climatiques que les glaciers nous enseignent. Assez vite, il passe de l’analyse des problèmes à la recherche de solutions en s’orientant vers le domaine de l’énergie. Il travaille pendant une dizaine d’années à Rhônalpénergie-Environnement à Lyon et connaît ainsi bien la région et ses acteurs. Il a développé des projets sur l’efficacité énergétique des bâtiments, l’éolien, ou encore sur l’éducation à l’énergie... Avant son arrivée au Parc du Vercors, il était en charge de l’énergie et du climat au Parc du Queyras. Dans ce parc de haute montagne (de seulement 10 communes), il y avait tout à faire ! Pendant quatre ans, en concertation avec les acteurs du territoire, il a élaboré un plan climat énergie visant à l’autosuffisance énergétique. Il a également lancé un projet de centrales villageoises avec une dizaine de toitures photovoltaïques. PHOTO : PNRV / Emmanuel Jeanjean Pour un Vercors plus sobre en énergie sur le Logement), ERDF. Un comité de pilotage voit le jour. Le Parc conduit les études paysagères et architecturales, s’implique dans l’animation. Les réunions avec la population s’enchaînent. « Une par mois pendant deux ans » précise Carole Thourigny qui a assuré la démarche participative, « l’objectif était à la fois de mobiliser, de former aux questions énergétiques, d’avancer étape par étape, pour créer les bases d’une structure d’exploitation de l’énergie photovoltaïque ». Dominique Jacques, chargé de mission RAEE pour le projet résume : « L’idée n’était pas de transformer les citoyens en spécialistes mais de les entourer des meilleurs spécialistes pour faire réussir le projet et, surtout, qu’il soit reproductible. » Plus d’infos : www.centralesvillageoises.fr Focus : Une histoire qui commençait mal Fin 2009, un grand projet de centrale photovoltaïque porté par le CEA-Liten divise le plateau. Prévus sur la commune de Lans-en-Vercors, les panneaux devaient être installés sur une vingtaine d’hectares pris sur la forêt. Le projet échoue mais la réflexion s’engage. Pour Michèle Eybalin, vice-présidente du Parc et présidente de la Commission énergie à l’époque, la question ne se pose pas sur le fond mais sur la forme, « les énergies renouvelables, oui mais pas n’importe comment ! » Le Parc veut se doter de principes sur la question de l’énergie : les projets devront intégrer la participation des citoyens, être au service du développement des territoires dans une logique d’intercommunalité. Ça tombe bien, dans le même temps, des élus de la Gervanne proposent une idée, celle d’un projet « territoire et énergie » sur la base d’ateliers participatifs. La dynamique aboutira, quatre ans après, à la création de la première Centrale Villageoise Photovoltaïque. 27 VERCORS À VIVRE VERCORS À VIVRE De cime en cime Le topo Promenade en raquettes à Gresse-enVercors Hommage : 50 anniversaire de la disparition de Lionel Terray dans le Vercors e réaliser différentes escalades avec l’un de ses professeurs (membre du Groupe de Haute Montagne). Revenu à Grenoble dans la maison familiale pour écrire Les conquérants de l’inutile , il nous livre le récit de sa vie en 1961 (éditions Gallimard). Ce livre est considéré par beaucoup comme une référence dans la bibliothèque « montagne ». Michel Guérin, fondateur de la maison d’éditions éponyme spécialisée dans les récits d’alpinisme, entame sa toute nouvelle collection par sa réédition en 1995. Au début des années 60, Lionel Terray se jette à corps perdu dans un entraînement en escalade à faire pâlir les plus jeunes. Le 19 septembre 1965, il fait une chute mortelle avec Marc Martinetti (jeune guide très doué de Chamonix) dans les Arêtes du Gerbier (la fissure en arc de cercle). Lionel Terray aura marqué l’histoire des grandes voies du Vercors. Plus encore le Vercors aura été le lieu du cycle de sa vie avec ses débuts et sa fin tant regrettée. 50 ans après, en cette année 2015, différents événements à Grenoble et au Gua ont donné l’occasion de redécouvrir cet homme d’exception mais aussi les Arêtes Durée du circuit : 2 h 30 Dénivelé : + 166 m / - 166 m Distance : 9 km Niveau : facile à moyen également accessible : à pied, à cheval, en VTT N 500 m PHOTO : Jean-Louis Bernezat Cela peut surprendre de parler de Lionel Terray dans le Vercors ! Lui qui marqua l’alpinisme français d’après guerre avec une énergie peu comparable dans les montagnes les plus difficiles (rappelons la 3e ascension des Grandes Jorasses, 2e à l’Eiger, 1res au Fitz Roy, Makalu, Chomo Lonzo, Annapurna), n’est pourtant pas étranger à certains sommets du massif. C’est son enfance grenobloise, rue SaintLaurent, dans la maison familiale accrochée aux pentes de la Bastille, et sa passion naissante pour la montagne qui le fera venir aux 3 Pucelles dès l’âge de 15 ans. Dans des conditions qu’il qualifiera lui-même de catastrophiques, il réalise en tête de cordée l’ascension du couloir Grange avec des chaussures à clous, passant sans assurance dans la fameuse fissure sandwich ! Il y reviendra deux autres fois dans des conditions plus honorables notamment à 20 ans avec Gaston Rébuffat pour ouvrir une variante. À la fin des années 30, il passe deux années très heureuses au lycée de Villardde-Lans où l’enseignement déjà orienté sur les sports de nature lui laisse la possibilité de former un groupe de randonnée et de du Gerbier qui voient, depuis 1927, l’évolution et l’attrait toujours vivace de l’escalade et de l’alpinisme. Bibliographie : •L es conquérants de l’Inutile, Lionel Terray, Éditions Guérin, 1995 (réédition). • Annapurna, une affaire de cordée, David Roberts, Éditions Guérin, 2000. • Le Gerbier-face Est, 2019 m, Manu Rivaud, Montagnes Magazine, 22/9/2012 : http://www.montagnes-magazine.com/ topos-gerbier-face-est • 3 Pucelles : http://hotroc.free.fr/topo63.htm PHOTO : OT Trièves À Gresse-en-Vercors, un jeu interactif sur la Réserve 28 Depuis le mois de juin dernier, une table interactive est installée à l’office du tourisme de Gresse-en-Vercors, l’une des portes majeures d’entrée sur la Réserve des Hauts-Plateaux. Première du genre dans le Parc, elle apporte de nombreuses informations sur la biodiversité de la Réserve. Alain Rougale, maire de Gresse-en-Vercors, fait remarquer que cette approche qui réunit connaissance, jeu et modernité, plaît tout autant aux très jeunes qu’aux anciens. Un éco-garde du Parc du Vercors, David Leroy, était présent tous les lundis matins en juillet et août pour y jouer avec les visiteurs et échanger sur les randonnées du secteur. Cette table interactive et la muséographie associée sont nées d’un partenariat entre la commune et le Parc du Vercors mis en œuvre par le CPIE. C’est à voir Au départ du circuit et pratiquement tout au long du parcours, contemplez la vue magnifique sur la chaîne de montagne du balcon est du Vercors, surnommée aussi les Dolomites françaises, avec le Grand Veymont comme point culminant. Le départ de cette balade en raquettes s’effectue depuis le parking du lieu-dit « Champ de l’Herse ». Tout en vous laissant guider par le balisage peinture de la Librairie Mosaïque Au loin… jadis... William Henry Hudson, éd. de la Table Ronde, 328 p., 14 €, 2015. William Henry Hudson, écrivain, naturaliste et ornithologue de renom est né en argentine en 1841 et décédé à Londres en 1922. Dans cet ouvrage, écrit à l’âge de 77 ans, il se remémore ses premières années de jeunesse passées dans l’hacienda de ses parents. Les portraits de ses voisins, riches ou pauvres, de sa famille alternent avec la description minutieuse des paysages de la pampa, jusque dans ses moindres détails, ceux de la flore et de la faune. Il nous fait revivre avec talent et sensibilité la naissance de sa passion pour les oiseaux : un livre tonique et rafraîchissant. suivez-les : www.librairiemosaique.fr Le vercors n° 68 � Octobre 2015 Après avoir traversé le ruisseau de l’Aulanier, le chemin rejoint la route puis le « Pas du Bru ». Une fois à « Combe Rouge », ralliez « Aux Fayolles » puis « Côte Emblay », de là possibilité d’emprunter sur la droite le chemin qui mène à « Gressette » pour rejoindre ensuite « Girard » et le parking point de départ de ce sympathique circuit. La carte - Extrait cartographique issue du carto-guide Promenades et randonnées en Vercors Trièves, collection PNRV. En vente dans les Offices du tourisme et à la maison du Parc. Le coup de cœur Plus d’infos : Office du tourisme - Gresse-en-Vercors - 04 76 34 33 40 Octobre 2015 � Le vercors n° 68 jaune-vert, vous êtes invités à suivre les panneaux directionnels en passant par les lieux-dits « Girard » puis « Côte Emblay » et « Aux Fayolles ». À « Combe Rouge », prendre la direction du « Col de l’Allimas », la vue sur le célèbre Mont-Aiguille est spectaculaire. Le retour au « Champ de l’Herse » s’effectue entre prairies et sous-bois jusqu’à « Uclaire ». Conseils de prudence en montagne Les risques en montagne sont réels même à basse altitude. Il convient de toujours prendre quelques précautions : 1.Contacter les services de Météo France montagne et tenir compte du risque d’avalanche ; 2. Faire appel à des professionnels pour pratiquer le hors-piste ; 3. Dans la mesure du possible, ne pas partir seul ; 4.Bien définir son parcours en fonction de son niveau et de ses capacités physiques et techniques ; 5.Se munir du matériel adapté : DVA (détecteur de victime d’avalanche). La pelle, le piolet et la sonde sont indissociables et indispensables dès que l’on s’éloigne du domaine balisé et sécurisé des stations ; 6.Informer son entourage de sa destination et de son heure ou date de retour présumé ; 7. Veiller à être couvert en responsabilité civile ; 8.Ne pas suivre n’importe quelles traces : elles ne sont pas un gage de sécurité ; 9.En cas de doute sur la stabilité de la neige, ne passer qu’un par un, se surveiller mutuellement ; 10.En cas d’accident, prévenir immédiatement les secours, le numéro d’urgence est le 112. 29 Jaco’Pain PHOTO : Fabian Da Costa La boulangerie café restau bio Jaco’Pain, c’est une boulangerie bio, mais aussi beaucoup plus que cela : un lieu d’échanges où l’on est toujours accueilli avec le sourire. Marielle Villeneuve et Sylvain Faure ont repris la boulangerie de Saint-Thomas-en-Royans en 1991, et depuis ils élaborent un pain au levain naturel avec une cuisson au four à bois. Leur production est vendue sur place, ainsi que sur les marchés, les foires et les magasins bio. Depuis 2001, ils ont agrandi leur boulangerie et proposent également un coin épicerie, un salon de thé, ainsi qu’une restauration le midi, sur place ou à emporter, à base de produits bio et locaux. Jaco’Pain accueille aussi des événements ou des festivals comme Textes en l’air, Alimenterre ou Les pieds dans le plat. Un lieu chaleureux et militant, en phase avec l’âme du Royans… Sur les contreforts ouest du Vercors, à cheval entre Drôme et Isère, le Royans est marqué par la présence de l’eau, qui a façonné des gorges spectaculaires et des grottes féeriques. Zoom sur ce territoire qui regorge de richesses touristiques et de produits de qualité. R are dans le Vercors central, l’eau s’infiltre dans le sol calcaire et ressort notamment dans le Royans, où elle a creusé d’impressionnantes gorges comme celles de la Bourne, des Petits et Grands Goulets (Vernaison), ou de Combe Laval (Cholet). Dans ces gorges se faufilent de célèbres routes à encorbellement, traits d’union audacieux entre le Royans et le cœur du Vercors. En sourdine, l’eau fait aussi entendre sa petite musique, sculptant de belles grottes comme celles de Choranche ou de Thaïs. La grotte de Choranche recèle des lacs aux reflets émeraude et de grandes salles constellées de concrétions. Celle de Thaïs, à quelques mètres sous le village de Saint-Nazaire-en-Royans, présente un intérêt historique car elle fut habitée pendant la Préhistoire. Dans ce village, un aqueduc construit à la fin du xixe siècle pour irriguer la plaine de Valence avec l’eau de la Bourne permet de marcher sur l’eau ! Tandis qu’un ascenseur panoramique mène à un déambulatoire à 35 mètres au-dessus du canal. Une croisière en bateau à roue donne l’occasion de naviguer paisiblement sur l’Isère jusqu’au village de La Sône, avec les falaises du Vercors en toile de fond. Le Royans abrite un Musée de l’eau, situé à Pont-en-Royans, à l’entrée des gorges de la Bourne. Un éclairage original de l’eau sous toutes ses formes. Autre curiosité de Pont-en-Royans, les maisons suspendues au-dessus de la Bourne datent du xvie siècle et font partie du patrimoine classé. Territoire fertile car bien irrigué par les eaux du Vercors, le Royans abrite une agriculture et des produits de qualité, parfois inattendus, dont voici quelques exemples. 30 Domaine Mayoussier Le vin du Royans Si l’agriculture du Royans est surtout consacrée à la noix de Grenoble (AOP), le vigneron Antoine Dépierre a fait le pari de créer un vin du Royans sur la terre de ses ancêtres, à Auberives-en-Royans. Le domaine Mayoussier a vu le jour en 2012, faisant revivre une ancienne tradition viticole locale. Antoine Dépierre a choisi de planter principalement des cépages autochtones, comme du viognier et du syrah, en étant le plus proche possible de la nature : travail du sol avec l’aide d’un cheval, taille et récolte à la main, aucun pesticide ni désherbant, et le moins possible de traitements. Après une première vendange artisanale en 2014, la deuxième s’annonce belle cette année, avec environ 4 000 bouteilles de vin blanc et rouge. Un vin fruité qui a du corps, comme le Royans ! plus d’infos : www.facebook.com/ DomaineMayoussier Octobre 2015 � Le vercors n° 68 plus d’infos : www.jacopain.fr Pisciculture Paol Les truites bio de la Lyonne PHOTO : Jeanne Palay PHOTO : Sylvain Yver PHOTO : DR Le Royans, entre montagnes et rivières photo : Fotolia - MSPhotographic VERCORS À VIVRE par Jeanne Palay Installée à Saint-Jean-en-Royans, la pisciculture Paol est alimentée par la rivière Lyonne, et dirigée par Stéphane Paol depuis 2008. Dans ses bassins, il fait un élevage bio de truites arc-en-ciel, de truites fario et de saumons de fontaine. Avec ses six salariés, il s’occupe de tout le processus, depuis la reproduction des poissons jusqu’à la transformation en produits finis : filets fumés, gravelax (poisson mariné), quenelles, soupes… La particularité de cette pisciculture : le poisson sous vide, qui peut être commercialisé dans toutes les boutiques disposant d’une vitrine frigorifique (pas besoin d’un banc de glace). Une façon originale de vendre du poisson qui fonctionne bien ! Le livre de Terre vivante L’autoconstruction écologique, Toutes les clés pour mener à bien son chantier. C. Philippe Lequenne, éd. Terre Vivante, octobre 2015, 192 pages, 23 € - collection Conseils d’expert. Rédigé par un professionnel du bâtiment écologique, cet ouvrage fait le point sur tout ce qu’il faut savoir avant de se lancer dans un projet d’autoconstruction, totale ou partielle. Des étapes préliminaires (organisation, choix des matériaux, démarches administratives) au chantier (gros-œuvre, isolation, électricité, chauffage), des cas concrets sous forme de fiches et un témoignage très inspirant donnent toutes les informations pour débuter un chantier. La Scop Terre vivante accompagne les particuliers pour vivre l’écologie au quotidien, grâce à des livres, un magazine, et un Centre de formation. L’idée recette de Cuisine et passion en Vercors Tourte vertaco La tourte vertaco est appropriée à la fraîcheur des dîners de l’automne et de l’hiver. Les choses simples étant bien souvent les meilleures, elle est composée d’une simple garniture de côtes de blettes et de Bleu du Vercors. La voici pourtant gourmande et copieuse, savoureuse dans son mélange savamment dosé. > La pâte brisée 300 g de farine 5 g de sel fin 150 g de beurre mou 1 œuf > La garniture 5 belles côtes de blettes 200 g de poitrine fumée 1 oignon 200 g de Bleu du Vercors-Sassenage 50 g de noix 2 pommes 2 œufs 10 cl de crème fraîche huile de noix 1. Préparer la pâte brisée. Ne pas trop la pétrir et la garder au frais au moins une heure. 2. Nettoyer et détailler assez finement les côtes de blettes (vert et blanc), les faire revenir à feu moyen dans une poêle creuse type wok avec un peu d’huile de noix. Ajouter les dés de poitrine fumée et l’oignon émincé. 3. Ajouter ensuite le Bleu du Vercors-Sassenage, les noix grossièrement hachées, les pommes émincées. Terminer par l’ajout de 2 œufs entiers et la crème fraîche ou du lait concentré non sucré. 4. Garnir un moule de 24 cm de diamètre avec les deux tiers de la pâte brisée préalablement étalée. 5. Déposer la garniture à l’intérieur et recouvrir avec le tiers de pâte restant. 6. Dorer avec un jaune d’œuf et cuire 45 minutes à 180° C. Servir avec une salade. Plus d’informations sur l’association : www.cuisineetpassionenvercors.com plus d’infos : www.terrevivante.org Le vercors n° 68 � Octobre 2015 31 VERCORS À VIVRE par Célia Vaudaine Chaud devant… Le Vercors demain ? Le festival « Chaud devant… Le Vercors demain ? » se tiendra pour la première fois sur le plateau du Vercors du 6 au 13 novembre 2015. Au programme, une série de manifestations sur le changement climatique et la volonté d’influer durablement sur les comportements… Encore en construction, ce programme est susceptible d’être modifié. Vendredi 6 novembre • 20h30 : Cinéma Home de Yann ArthusBertrand suivi d’un débat, entrée libre. > Organisé par Ciné-Village à la salle des fêtes de Méaudre. Lundi 9 novembre • 19h30 : Visite guidée de l’exposition Chaud devant ! Le climat demain (réalisée en 2014 par les élèves de 2de du Lycée Jean Prévost) >H all du lycée. Les invités de la table ronde sont des scientifiques de renommée internationale, qui ont contribué à l’élaboration de rapports du GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat) et sont membres du groupe de travail COP 21-UGA, qui propose à l’échelle locale des moments de réflexion, de débat et d’échanges sur les changements climatiques. Mardi 10 novembre • 20h30 : Cinéma Sacrée croissance de Marie-Monique Robin. La projection sera suivie d’un débat animé par le CCFD-Terre Solidaire. Synopsis : Face à la crise et aux risques écologiques, il faut repenser de fond en comble notre modèle de société fondé sur la croissance. Locales et solidaires, des solutions alternatives existent. Le nouveau documentaire de Marie-Monique Robin témoigne de celles qui vont – peut-être – orienter notre futur. Jeudi 12 novembre • 20h : GrOs déBat – Rencontre participative Quelles adaptations sur le plateau du Vercors ? Animation Parc naturel régional du Vercors, CPIE et Cité scolaire Jean Prévost. > Salle des Fêtes d’Autrans. 2e volet d’un cycle de conférences sur les changements climatiques, portant sur les déplacements et les modes de production et de consommation d’énergie sur le plateau du Vercors. Octobre 2015 � Le vercors n° 68 La nature expliquée aux enfants par le CPIE Vercors Le soleil est l’énergie de notre terre, sa lumière et sa chaleur sont nécessaires à la vie des animaux et des plantes. L’alimentation, notre énergie, en dépend directement. Depuis toujours les hommes essaient de se rendre la vie plus agréable : se chauffer, cuire ses aliments, s’éclairer et se déplacer. Ils inventent alors des machines utilisant des énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) donc épuisables, ou nucléaires. Elles sont polluantes voire dangereuses. Les énergies renouvelables sont inépuisables, non polluantes. Elles utilisent les éléments naturels : soleil, vent, eau, végétaux et forment cinq familles : le solaire, l’éolien, l’hydroénergie, la géothermie et la biomasse. Elles constituent des solutions à développer pour conserver une planète où il fait bon vivre. CPIE Vercors, association d’éducation à l’environnement mandatée par le Parc. plus d’infos : Pour économiser l’énergie : www.energie-environnement.ch/maison et www.parc-du-vercors.fr/themes/cpie/pages/pedagogie/pdf/energie/energie.pdf Le vercors n° 68 � Octobre 2015 • Exposition Alerte aux climats réalisée par l’AGEDEN en partenariat avec le Lycée Jean Prévost, 27 novembre - 18 décembre. PHOTO : Olivier de Sépibus Quatre classes de 2de du Vercors seront réunies pour travailler et débattre sur les enjeux liés aux changements climatiques, via des échanges pédagogiques et des rencontres avec des scientifiques, pour produire des outils de communication et rédiger une résolution par laquelle les élèves s’engagent et sollicitent des engagements de la part des responsables politiques. > Organisé par et au CLAP, Centre culturel Le Cairn à Lans-en-Vercors. * Communauté de Communes du Vercors, Région Rhône-Alpes, Ciné Village (Méaudre),Mairies de Villard-de-Lans et d’Autrans, le Clap, CCFD-Terre solidaire (Comité catholique contre la Faim et pour le Développement), Monde Pluriel, librairie Au Temps Retrouvé, Office de Tourisme de Villard-de-Lans, Ageden (Association pour une Gestion Durable de l’Energie), Numéricopie, COP 21 UGA (Université Grenoble-Alpes), Maison du patrimoine, Bibliothèque scolaire pour tous, Centre d’Information Inter-Peuples… 32 Du mardi 10 au vendredi 13 novembre Séminaire pédagogique à destination de classes de seconde. > Organisation lycée Jean Prévost, Villard-de-Lans. • Exposition photos de l’expédition de Pascaline au Groenland dans le village d’Isérasak, 27 novembre - 18 décembre. • Série de conférences en partenariat avec l’UIAD autour du froid et ses « différents états » dont 2 conférences de Pascaline Bourgain sur l’observation de la fonte des glaciers et l’impact sur les populations locales, 19 septembre 2015 à 20h30 et 3 décembre 2015. Le Parc naturel régional du Vercors organise PHOTO : Pascaline Bourgain Des élèves du Lycée Jean Prévost (Villard-de-Lans) travaillent sur les conséquences des changements climatiques. • 20h : Table ronde Que savons-nous des changements climatiques ? avec Sandrine Mathy, économiste et Thierry Lebel, climatologue. Co-animé par Gérard Figari, Xavier Saliaris et des élèves du lycée Jean Prévost. > Amphithéâtre du lycée Jean Prévost. La Maison du Patrimoine organise Synopsis : Ce concert est une plongée musicale sur les questions du changement climatique. Un spectacle qui nous entraîne dans un dédale multi-diffusé de voix scientifiques, expertes ou poétiques, de musique instrumentale et de sons transformés, d’archives sonores et de publicités d’un monde voué à la consommation. PHOTO : Lycée Jean Prévost Villard-de-Lans Organisé par la Cité Scolaire Jean Prévost (Villard-de-Lans) à la veille de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (Paris, 30 novembre - 11 décembre 2015), ce festival affiche de belles ambitions : en plus de sensibiliser les élèves de la cité scolaire et habitants aux changements climatiques, il devrait aboutir à l’élaboration de plans d’actions, de solutions, voire d’engagements des politiques. L’équipe organisatrice (Xavier Saliaris, à l’origine du projet, Anic Chevalier et Valérie Moine, enseignants au lycée Jean Prévost), aidée entre autres de Gérard Figari, responsable de l’antenne Vercors de l’UIAD (Université Inter-Âges du Dauphiné), du Parc naturel régional du Vercors et du CPIE (Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement), a construit, avec une quinzaine d’autres partenaires*, un programme alternant conférences scientifiques, débats participatifs, projections de films, expositions, spectacles… Autour du festival Vendredi 13 novembre • 20h30 : Clima(x), concert documentaire par la compagnie Miczzaj qui s’inspire de la bande dessinée de Philippe Squarzoni, Saison brune. > La Coupole, Villard-de-Lans. • Ateliers sur les impacts du changement climatique sur les territoires TEPOS du Syndicat mixte Pays Sud Grésivaudan et de la Communauté de communes du Trièves, 3e volet du cycle de conférences, décembre 2015. Le Festival International du Film de Montagne d’Autrans > 2 au 6 décembre • La 32e édition du Festival portera sur le thème « Cimes sonores ». En partenariat avec le Parc du Vercors, il propose une soirée spéciale consacrée au réchauffement climatique, en lien avec la tenue de la COP21, mercredi 2 décembre 2015 (programmation en cours). Le CPIE propose • Expositions Hyper-montagne et Montagne défaite d’Olivier de Sépibus. Office de tourisme de Lans-en-Vercors, 16 - 30 novembre 2015 puis Montagne défaite sera installée au Festival du film de montagne d’Autrans, 2 - 6 décembre 2015 • Une vidéo-projection conférence avec Olivier de Sépibus sur l’histoire de l’image de la haute montagne et la place des glaciers dans l’imaginaire collectif (lieu non encore défini). 33 VERCORS À VIVRE par Célia Vaudaine photo : Librairie Mosaïque 34 plus d’infos : www.librairiemosaique.fr et www.librairie-autempsretrouve.fr Octobre 2015 � Le vercors n° 68 pé plus d’infos : www.saint-marcellin.fr/ma-ville/culture/evenements-culturels/le-salon-du-livre http://passeursdhistoires.aufilduvercors.org http://est-ouest.com http://livresenscene.fr Guil lo Les mots en balade est un programme qui anime le vaste et dynamique réseau des bibliothèques de la Communauté de communes du Trièves depuis 1998, grâce au soutien du Département de l’Isère. Élaboré par les bibliothécaires, professionnels et bénévoles, mis en œuvre par les 3 médiathèques du Trièves et accessible aux 8 bibliothèques-relais, ce programme propose aux habitants un ensemble d’animations autour du livre (accueil d’auteurs, lectures, contes, concerts, manifestations), conçu en partenariat avec les associations locales et, parfois, les territoires voisins (ex. Festival Est-Ouest). Si les médiathèques sont gérées par des professionnels, les bibliothèques-relais ne vivent que par l’action de bénévoles. Ainsi, la Caverne du livre à Chichilianne fonctionne grâce à une douzaine de personnes qui montent et conduisent les animations de l’année. De même à Saint-Michel-les-Portes, un relai dans le café-bibliothèque associatif Le Pilier Sud est ouvert depuis septembre 2014 à l’initiative d’un groupe d’habitants. oine Sur le territoire du Parc du Vercors, Mosaïque à Die et Au Temps Retrouvé à Villard-de-Lans tenues chacune par un couple de libraires, ont su imposer avec succès leur rôle culturel, leurs projets et leur identité auprès des lecteurs et des acteurs locaux. Leur identité quasi militante, c’est celle de la librairie indépendante, parce que le métier ne peut s’envisager autrement : il s’agit de « rester maître dans le choix des livres que nous présentons, qui sont les livres que nous aimons » expliquent David Piovesan et Françoise Teissier, qui ont repris Au Temps Retrouvé en 2012. Ainsi, aucun livre imposé par les éditeurs, mais une sélection maîtrisée et assumée. Pour Florence Bermond et Bernard Lelièvre, libraires de Mosaïque depuis 1990 : « c’est notre rôle de proposer un choix de lecture exigeant et diversifié, loin des modes, mais aussi de conseiller, donner notre avis, forcément subjectif d’ailleurs. » On est donc loin de la standardisation des grands groupes et plus proche du commerce de proximité où convivialité et écoute du lecteur sont mises en avant. Autre trait de leur identité, l’« engagement local » complète la fonction culturelle et commerciale. Ainsi, Mosaïque s’est longtemps associée aux événements du Diois et organisait des événements pour rapprocher auteurs, livres et lecteurs. De même, Au Temps Retrouvé multiplie les animations (rencontres d’auteurs, clubs de lecture, et bientôt, ateliers d’écriture) et s’implique de plus en plus dans les manifestations locales (Livres en scène, Festival du film de montagne à Autrans…) Les mots se baladent en Trièves Malgré les baisses de subventions, les manifestations autour du livre se maintiennent encore, grâce à l’énergie d’acteurs qui ne comptent pas leur temps. À Saint-Marcellin, Marie-Aimée Roybon, directrice de la médiathèque, pilote le bisannuel Salon du Livre avec l’équipe culturelle municipale. Un événement ancré dans le territoire et préparé avec des partenaires locaux : bibliothèques, acteurs culturels, librairies, écoles, collèges, lycées et bien sûr, des « lecteurs motivés ». Malgré un public fidèle, la 9e édition (11-13 mars 2016) intitulée Embarquement immédiat accueillera moins d’auteurs (une vingtaine au lieu de 30) pour cause de réduction de budget. D’autres festivals sont plutôt initiés par des groupes de passionnés de lecture, comme Livres en scène, organisé depuis 2011 sur une des communes des Quatre Montagnes. Le beau programme préparé par l’équipe propose aux lecteurs de rencontrer sur deux jours des acteurs du livre – auteurs, éditeurs… (cette année Lydie Salvayre, prix Goncourt 2014) dans une ambiance résolument conviviale. L’association Passeurs d’histoires anime quant à elle depuis 2008 une multitude de projets autour du patrimoine et des légendes du Vercors (expo, livres, animations, balades contées). Le Festival Est-Ouest, organisé par le théâtre de Die, célèbre depuis 1989 la littérature des pays de l’Est (L’Estonie en septembre 2015). Il existe également un prix littéraire créé en 1999 à l’initiative du Parc et d’un groupe de documentalistes et de bibliothécaires : le Prix Frisson du Vercors, décerné par des élèves de 4e sur une sélection de titres récents. r/An t À l’origine de ces manifestations, on trouve des acteurs locaux, institutionnels (bibliothèques, médiathèques, collectivités) ou privés (bénévoles, associations, libraires) qui, par leurs actions, tiennent un rôle important dans le maillage social et culturel local. En effet, en plus de promouvoir le livre, la littérature et la lecture, ils s’impliquent dans la vie locale en participant à des événements culturels fédérateurs et contribuent à tisser du lien social. Il n’est pas facile de mener des projets quand on est une petite structure avec peu de moyens, ni de maintenir une offre de qualité face aux baisses de subventions, pas facile non plus d’être libraire, métier chronophage, face à la concurrence internet… Mais en Vercors, comme ailleurs, le livre est un métier de passion, et la passion décuple les forces et les énergies. Voici un petit état des lieux non exhaustif. Libraires en Vercors, un acteur fort du territoire photo : DR Les nombreux événements et lieux de lecture sur le territoire du Parc du Vercors témoignent tant de la vitalité d’un secteur qui, au niveau national, s’effrite doucement mais inexorablement, que de la présence des lecteurs. plus d’infos : http://mediatheque-cdi-vercors.opac3d.fr Quelques événements d’en haut et d’en bas d. P icqu ie photo : Le Temps retrouvé À la Chapelle-en-Vercors, la médiathèque n’est pas tout à fait comme les autres. D’abord parce qu’elle est associée au Centre de Documentation et d’Information (CDI) du collège Sport-Nature, avec qui elle partage ses locaux, ses fonds de documents, son temps d’accueil et son public. Ensuite, parce que la structure propose des animations qui dépassent souvent le cadre du livre, quitte à jouer un peu le rôle de centre culturel : « C’est la seule médiathèque du Vercors Sud et c’est ici qu’est organisée une partie des événements culturels du territoire » explique Brigitte Breton, bibliothécaire. En effet, l’agenda préparé avec une équipe de bénévoles très active et des acteurs locaux propose des lectures contées, des « soirées pyjama » (lecture en veillée avec des enfants), des thés d’été (lectures sur les marchés), des animations à destination des collégiens (préparées avec le professeur documentaliste et des enseignants), mais aussi des expositions, de la danse ou des spectacles via la Comédie itinérante de Valence avec qui la Communauté des Communes du Vercors (dont dépend la médiathèque) a établi un partenariat. Question organisation, « ce n’est pas toujours simple à gérer » confie Brigitte Breton, mais nous tenons à cette offre large et variée, possible grâce à l’énergie des bénévoles ». pho to : É Aux livres, citoyens ! photo : Médiathèque du Vercors De la lecture publique à l’animation culturelle plus d’infos : https://trievesculture.wordpress.com www.cc-trieves.fr - www.chichilianne.fr/spip.php?article148 www.trieves-vercors.fr/mediatheque-du-percy.html Le vercors n° 68 � Octobre 2015 35