
durement ressentir ses conséquences, du fait de la compression drastique des dépenses en vue
d’une réduction des créances futures. Le choix, à l'époque, n'était pas entre le refus d'une telle
politique et son acceptation passive, mais entre la possibilité d'entrevoir, au prix de sacrifices,
un avenir meilleur, et la certitude de s'enfoncer dans la voie du déclin. Cette politique qui
consiste à affamer pour développer n’est pas nouvelle.
La conjugaison de toutes ces situations a conduit progressivement tous les Etats
africains à adopter des programmes de stabilisation et d’ajustement et les mécanismes de
gestion qui les accompagnent avec l’appui de la Banque mondiale et du FMI au détriment des
stratégies planifiées de développement. A une politique volontariste orientée vers la
modernisation des bases du développement a ainsi succédé un ensemble de programmes de
gestion des déséquilibres macroéconomiques et à court terme.
Toutefois, les stratégies de développement telles qu’elles se sont déployées durant un
quart de siècle de règne sans partage des PAS, ont conduit à l’impasse au double point de vue
des perspectives nationales comme de celui de l’ordre mondial. Les problèmes des nations
comme ceux des individus ce sont multipliés. Paradoxalement, l’abondance n’a pas apporté
l’amélioration du niveau ou de la qualité de la vie aux populations. Elle a plutôt pollué
l’environnement, gaspillé de gigantesques ressources, engendré la peur et le doute
relativement aux relations intergénérationnelles. L’incapacité à maîtriser les turbulences des
systèmes économiques et financiers, à gérer les risques et les incertitudes et à gouverner
l’ordre mondial sont quelques manifestations évidentes qui rendent indispensables et urgents
des changements fondamentaux dans toutes les sphères des économies mondiales et des
sociétés. L’Afrique, non seulement continue toujours d’être confrontée à l'aggravation de ses
déséquilibres financiers, à la stagnation voire au recul de ses systèmes de production mais la
pauvreté est grandissante avec un approfondissement du couple chômage et pauvreté. Les
populations sont de plus en plus insatisfaites et impatientes et les jeunesses sont frustrées de
leur manque et de leur pénurie quant aux nécessités les plus élémentaires de la vie :
nourriture, éducation, soins médicaux, logement, eau potable. Or, il est bien connu qu’un
monde qui désespère est un monde qui va exploser.
Il s’agit d’une crise profonde de développement caractérisée par : l’existence et la
perpétuation d’un sévère dysfonctionnement agro-alimentaire découlant des politiques
agricoles inadéquates et faisant du continent une zone d’insécurité alimentaire endémique ;
l’échec de l’amorce d’industrialisation d’import-substitution des décennies 1960 et 1970 ; de
lourds déficits, notamment des balances des paiements, du commerce extérieur, des finances
publiques et des entreprises publiques. (ces derniers déficits précarisent voire disqualifient
l’Etat dans le jeu économique) ; la montée de l’endettement qui conduit à l’accumulation
d’arriérés que ne peuvent résorber ni les ressources budgétaires internes, ni les
rééchelonnements et divers allégements ; la double explosion démographique et urbaine qui
accentue les déséquilibres macroéconomiques et induit de nouveaux rapports sociaux.
Cette crise est-elle celle du régime d’accumulation fondé sur la valorisation de la rente
agricole ou minière ou celle des institutions de régulation libérale conséquemment à la
généralisation des programmes d’ajustement structurel issus du « consensus de
Washington »
? Dans tous les cas, les études prévisionnelles ou prospectives sur l’évolution
du monde au-delà de l’an 2025 sont formelles : l’Afrique restera toujours à cette échéance, à
la périphérie d’une mondialisation déferlante, c’est-à-dire, classée dans la catégorie des pays
Hakim Ben Hammouda (1999): L’économie politique du post-ajustement, Edit. Karthala,393p.