A) la suprématie du législatif
Si on regarde la lettre de la Constitution, le parlement a beaucoup plus de pouvoirs que le
Président de la République et que le Gouvernement plus généralement.
Le parlement est organisé selon un bicaméralisme égalitaire. Les deux chambres (Chambre des
députés + Sénat) ont donc l’initiative des lois, élisent le Président de la République, contrôlent le
Gouvernement ; l’avis favorable du Sénat est nécessaire pour que le Président puisse dissoudre la
Chambre des députés ; il n’y a pas de mécanisme de contrôle de constitutionalité des lois, et même
si le Président de la République dispose lui aussi de nombreux pouvoirs, ils sont en fait très limités
car la majorité de l’assemblée. Il n’a en fait que deux pouvoirs propres qui sont la nomination du
Président du Conseil et la présidence des solennités nationales. C’est d’ailleurs ce que Raymond
Carré de Malberg (fin 19ème siècle-début 20ème siècle) invoque comme cause du parlementarisme
absolu dans un célèbre ouvrage « la loi, expression de la volonté générale ». Pour lui, les
constituants se sont inspirés de la tradition constitutionnelle française ayant pour habitude de placer
le Parlement « en haut de l’échelle », sur un piédestal.
Les lois constitutionnelles de 1875 sont floues, notamment en ce qui concerne la responsabilité du
Gouvernement devant le Parlement, évoqué à l’article 6 de la loi du 25 février 1875 relative
aux rapports des pouvoirs publics « Les ministres sont solidairement responsables devant les
chambres de la politique générale du Gouvernement, et individuellement de leurs actes personnels.
Le Président de la République n’est responsable que dans le cas de haute trahison. »
C’est pour cette raison que le Gouvernement, dès qu’il est mis en minorité, a pris l’habitude
de se retirer. Le Parlement, lui aussi, démet facilement le Gouvernement en l’absence d’exigence
d’une majorité absolue.
On peut citer également la course aux portefeuilles. En effet, sous la III ème République, il n’y a
pas d’incompatibilité entre les fonctions gouvernementales et parlementaires. Ces derniers ont donc
tout intérêt à renverser les membres du Gouvernement pour tenter d’y entrer.
La crise du 16 mai 1877 a supprimé l’arme principale de l’exécutif qui était la dissolution. On y
voit donc un effacement du Président et donc du coup du Gouvernement.
En effet, Mac Mahon n’avait pas à exiger la démission d’un Président du Conseil qui avait obtenu le
vote de confiance du Parlement et inversement n’avait pas à utiliser son droit de dissolution, dès
lors que le Président du Conseil n’était pas accepté par le Parlement.
C’est la constitution Grévy , en proclamant qu’il ne rentrerait jamais en conflit avec la volonté
nationale des constituants, qui s’est empêchée d’user du droit de dissolution. Aucun autre président
ne réussira à établir l’autorité de l’exécutif. Le droit de dissolution n’a plus été utilisé pendant 18
ans.
Dès 1918, pour tenter de redresser le régime, le Parlement a autorisé le Gouvernement à prendre
dans certaines matières et pour une période déterminée des décrets lois. A la fin de cette période, le
Gouvernement devait déposer un projet de ratification. Ce fut un échec, d’un part puisqu’on y a vu
une atteinte à la séparation des pouvoirs (l’exécutif s’immiscent dans le législatif), une atteinte au
principe selon lequel une compétence ne peut être déléguée à un organe, et d’autre part ces décrets
lois ne résistèrent pas au régime hitlérien de l’Allemagne sur la France.
B) Les conséquences de cette pratique
Les lois de 1875, dans lesquelles on cherchait en vain la moindre amorce de rationalisation, font très
brièvement mention de la responsabilité du gouvernement et du droit de dissolution. Encore celui-ci
tombe-t-il en désuétude après 1877.
Concernant la responsabilité du gouvernement devant la chambre des députés. Aux termes de
l’article 6 de la loi du 25 février 1875, « les ministres sont solidairement responsables devant les
chambres du gouvernement et individuellement de leurs actes personnels ». C’est l’application pure
et simple de la règle fondamentale du régime parlementaire que les constituants ont voulu établir.
On observera que l’extrême brièveté des dispositions constitutionnelles laisse la mise en œuvre de