Le pouvoir législatif de 1870 à 1940. Le pouvoir législatif est la

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Le pouvoir législatif de 1870 à 1940.
Le pouvoir législatif est la capacité de faire la loi. Il est l’une des composantes de l’Etat
moderne avec le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire. Il est, le plus souvent associé au
Parlement. G. Cornu définit le Parlement comme étant le « nom donné à l'assemblée ou aux
assemblées délibérantes de l’État, issues au moins partiellement d'une élection, et ayant pour
mission principale de voter les lois et le budget, souvent aussi, de contrôler les ministres. »
Le pouvoir législatif est définit dans la constitution, qui est l'ensemble des règles écrites ou
coutumières déterminant la forme de l’État, la dévolution et l'exercice du pouvoir. Celle-ci ne peut
exister sans la séparation des pouvoirs, selon l'article 16 la Déclaration des droits de l'homme et du
citoyen de 1789.
La constitution est principalement mise en œuvre dans les démocraties, et notamment dans
les républiques. En effet la démocratie est le gouvernement du peuple, pour le peuple et par le
peuple, mais elle ne se confond pas avec la république, car la république est un régime où le pouvoir
est une chose publique et où les gouvernants exercent le pouvoir en vertu d'un droit propre et du
corps social.
La France est dotée d'une histoire constitutionnelle riche depuis la révolution en 1789. Elle a
expérimentée deux monarchies, deux empires ainsi que cinq républiques. Ces différents régimes, à
durées variables, ont influencés et façonnés le paysage politique français de l'actuelle Vème
République. La IIIème République se démarque dans l’histoire constitutionnelle française, de part
son exceptionnelle longévité et de part son fonctionnement. Elle demeure la plus longue république
française à l’heure actuelle.
Durant le second empire, Napoléon III organise en mai 1870, un référendum demandant aux
français s'ils approuvent l'évolution de l'empire vers un régime parlementaire. Les français
approuvent car la guerre contre la Prusse est un véritable échec militaire qui se solde par la
capitulation à Sedan le 2 septembre 1870 de Napoléon III.
Le 4 septembre 1870, un gouvernement provisoire est formé et la IIIème République est
proclamé. Ce même gouvernement provisoire procédera par la suite à l'élaboration de la
constitution, ou plutôt des lois constitutionnelles de 1875 (le 24 février 1875, le 25 février 1875 et le
16 juillet 1875). Ces lois constitutionnelles tiennent le rôle de constitution, en cela elles définissent
les pouvoirs, les organes, leurs attributions et leurs fonctionnements. Elles représentent le réel
élément fondateur de la IIIème République.
Par la suite le régime sera enclin à la crise du 16 mai 1877, qui va bouleverser la pratique
constitutionnelle du régime, à une instabilité gouvernementale ainsi qu'à un déséquilibre des
institutions important. Enfin, la IIIème République, après avoir résisté à une première guerre
mondiale, succombera au début de la seconde guerre mondiale avec le vote de la loi du 10 juillet
1940.
En outre, la IIIème République est caractérisé par la place prépondérante du pouvoir
législatif. Le Parlement, habituellement au centre des régimes parlementaires, occupe ici une place
surplombant toute les autres institutions. En cela, comment arrive-t-il à se placer sur un piédestal ?
Comment s'exerce le pouvoir législatif ? Par quelles institutions est-il exercé ? Quels sont les
moyens dont-il dispose? Comment fonctionne le Parlement ? Quels seront les conséquences de cette
prééminence ? En outre, comment le Parlement est-il devenu le centre de la vie politique sous la
IIIème République (1870-1940) ?
L'affirmation du Parlement dans la vie politique de la IIIème République s'explique par deux
phénomènes. Dans un premier temps, sa prééminence apparaît avec l'installation du pouvoir
législatif (I), puis dans un second temps, le Parlement s'affirme à travers la pratique
constitutionnelle (II), qui ne sera pas sans conséquences.
I) L’installation du pouvoir législatif.
L’installation du pouvoir législatif, dont une certaine prééminence du Parlement, s’est faite
grâce à la mise en place du régime dans un premier temps (A), puis dans un second temps, elle s’est
faite grâce à l’organisation et au fonctionnement du pouvoir législatif (B).
A) La mise en place du régime
Suite à la défaite de sedan en septembre 1870, se met en place un régime provisoire de 1871
à 1875. Ce régime provisoire est un régime d’assemblée avec des constitutions souples. C’est un
régime d’assemblée car l’assemblée nationale élue en 1871 est la seule assemblée législative,
constituante et composée à majorité de monarchistes. La plus part des monarchistes sont favorables
à la paix avec la Prusse et veulent le retour à la royauté. On parle de constitution souple lorsque la
procédure de révision est la même que la procédure d’adoption des lois (nécessite aucune procédure
particulière). Les constitutions (ou lois) de Rivet (31 août 1871) de Broglie (13 mars 1873) et du
septennat (20 novembre 1873) modifient le visage du régime qui devient peu à peu parlementaire,
en supprimant la responsabilité présidentielle au profit de la responsabilité ministérielle. La
constitution de rivet (composée de 3 articles) est une constitution au sens matériel ; elles créent les
institutions de la IIIème république. Elle crée également un nouveau titre « le président de la
république française » remplaçant ainsi « le chef de l’exécutif » qui est assisté de ministres qu’il
peut révoquer. Ainsi, Adolphe Thiers nommé chef du pouvoir de l’exécutif par l’assemblée
nationale le 17 février 1871, devient donc le président de la république française. L’objectif
essentiel de cette constitution est de faire diminuer la responsabilité de Thiers et de
réaffirmer la prépondérance du pouvoir législatif sur l’autorité exécutive. En effet, le
Président et ses ministres peuvent être contraints à la démission.
La constitution de Broglie régie également les institutions provisoires de la IIIème
république (composée de 5 articles) elle suit la logique de la constitution de rivet. La personnalité
assez forte de Thiers ne correspond pas avec la réduction des capacités du président ce qui entraine
des conflits entre le chef de l’exécutif et l’assemblée nationale. Le but de cette constitution est de
rendre plus rare l’intervention de Thiers dans les débats et de réduire son influence donc de
l’affaiblir. Thiers originairement monarchiste s’est converti aux idées républicaines, il finit ainsi par
être considéré comme dangereux c’est pourquoi le 24 mai 1873 est élu Mac Mahon comme
président de la république française. Enfin, la constitution du septennat (composée de 2 articles)
confie le pouvoir exécutif à Mac Mahon.
Entre février et juillet 1875 sont votées par l’assemblée nationale des lois constitutionnelles
qui instaurent définitivement la IIIème république. Ces lois sont aux nombres de trois :
Tout d’abord, il y a la loi du 24 février 1875 qui porte sur l’organisation du sénat (composée
de 11 articles). Ensuite, il y a la loi du 25 février 1875 qui porte sur l’organisation des pouvoirs
publics (9 articles). Pour finir, il y a la loi du 16 juillet 1875 sur les rapports entre les pouvoirs
publics (14 articles).
La IIIème république est un régime parlementaire moniste (à partir de 1879) camouflé par
un régime d’assemblée avec un discours appelé « constitution » de Jules Grévy. Ce dernier est élu
par le congrès de Versailles président de la république suite à la démission de Mc Mahon le 30
janvier 1879. Lors de ce discours le 6 février 1879 Jules Grévy déclarera« je n’entrerai jamais en
lutte contre la volonté nationale ». Cette phrase montre que l’exécutif accepte de s’effacer au profit
du législatif.
B) Le fonctionnement du pouvoir législatif
Sous la IIIème république, le pouvoir législatif est détenu par un parlement bicaméral qui
comprend la chambre des députés et le sénat, s’est inscrit dans l’article premier de la loi du 25
février 1875 « Le pouvoir législatif s’exerce par deux assemblées : la chambre des députées et le
sénat ».
La chambre des députées correspond à la chambre basse du parlement sous la IIIème
république. Elle est plus légitime que le sénat de par son élection au suffrage universel direct
masculin, c’est l’article 1er de la loi du 25 février 1875 « La chambre des députées est nommée par
le suffrage universel dans les dans les conditions déterminées par la loi électorale ».
Elle est élue pour quatre ans. De plus, elle élit son bureau chaque année au début de la session.
C’est le président de la république qui prononce la clôture de la cession. Les pouvoirs de la chambre
des députées sont les suivant :
- Elle peut proposer et voter les lois
- Elle contrôle le gouvernement, et peut le renverser
- Elle est maîtresse de son ordre du jour
- Elle examine et vote en premier les lois de finances
- Elle contrôle le gouvernement et peut le renverser
- Elle vote la déclaration de guerre, elle autorise la ratification de certains traités tels que les traités
de paix de commerce etc.
- Elle peut mettre en accusation le président de la république pour haute trahison ou les ministres
pour des crimes commis dans l’exercice de leur fonction.
Néanmoins, la chambre peut être dissoute.
Le sénat est élu pour neuf ans par un collège électoral comprenant les députés, les conseillés
généraux, les conseillers d’arrondissements et des délégués élu par les conseillée municipaux au
suffrage universelle indirect (par un système de scrutin majoritaire uninominal ou par un scrutin de
liste). Il est élu pour neuf ans mais renouvelé par tiers tous les trois ans. L’âge d’éligibilité est de
quarante ans. Comme la chambre le sénat procède à la validation de l’élection de ses membres. Il
est composé de 300 sénateurs dont 225 élus et 75 inamovibles (c'est-à-dire élus à vie) par
l’assemblée nationale. N é a n m o i n s s u i t e à l a r é v i s i o n d e l a C o n s t i t u t i o n d e 1 8 8 4 ,
l a c a t é g o r i e d e s sénateurs inamovibles a été supprimée. Le sénat à un pouvoir plus puissant
que la chambre et contrairement à cette dernière le sénat ne peut pas être dissout.
Comme la chambre il peut voter et proposer les lois, voter la déclaration de guerre, autoriser la
ratification de certains traités et il contrôle le gouvernement, et peut le renverser.
Les pouvoirs propres au sénat sont les suivants :
- Il peut se constituer en cour de justice pour juger le président de la république en cas de haute
trahison ou les ministres quand ils ont commis des crimes durant l’exercice de leur fonction ou
en cas de procès pour atteinte à la sureté de l’état
- Lorsque les deux assemblées se réunissent en assemblée nationale c’est le bureau de sénat qui
sert de bureau à l’assemblée
- Il dispose d’une véritable faculté d’empêcher. Il peut faire obstacle à une dissolution et tenir en
échec toute tentative de révision. Il peut opposer un véto aux lois adoptées par la chambre
- Le pouvoir le plus important qui lui est attribué est la procédure de dissolution de la chambre
des députés. Ce pourvoir est garanti par l’article cinq de la loi du 25 février 1875 « Le président
de la république peut sur l’avis conforme du sénat, dissoudre la chambre des députés avant
l’expiration de son mandat ».
Enfin, le sénat et la chambre des députés élisent le président de la république française.
II) La pratique constitutionnelle d’un Parlement puissant.
Les constituants de la IIIème République ont doté le parlement de domaines d’action plus
larges que ceux de l’exécutif et la mise en œuvre de la responsabilité du Gouvernement non
détaillée permet une interprétation libre du Parlement ce qui nous permet de parler de la suprématie
du législatif (A) et que cette pratique n’a pas été sans conséquence (B).
A) la suprématie du législatif
Si on regarde la lettre de la Constitution, le parlement a beaucoup plus de pouvoirs que le
Président de la République et que le Gouvernement plus généralement.
Le parlement est organisé selon un bicaméralisme égalitaire. Les deux chambres (Chambre des
députés + Sénat) ont donc l’initiative des lois, élisent le Président de la République, contrôlent le
Gouvernement ; l’avis favorable du Sénat est nécessaire pour que le Président puisse dissoudre la
Chambre des députés ; il n’y a pas de mécanisme de contrôle de constitutionalité des lois, et même
si le Président de la République dispose lui aussi de nombreux pouvoirs, ils sont en fait très limités
car la majorité de l’assemblée. Il n’a en fait que deux pouvoirs propres qui sont la nomination du
Président du Conseil et la présidence des solennités nationales. C’est d’ailleurs ce que Raymond
Carré de Malberg (fin 19ème siècle-début 20ème siècle) invoque comme cause du parlementarisme
absolu dans un célèbre ouvrage « la loi, expression de la volonté générale ». Pour lui, les
constituants se sont inspirés de la tradition constitutionnelle française ayant pour habitude de placer
le Parlement « en haut de l’échelle », sur un piédestal.
Les lois constitutionnelles de 1875 sont floues, notamment en ce qui concerne la responsabilité du
Gouvernement
devant le Parlement, évoqué à l’article 6 de la loi du 25 février 1875 relative
aux rapports des pouvoirs publics « Les ministres sont solidairement responsables devant les
chambres de la politique générale du Gouvernement, et individuellement de leurs actes personnels.
Le Président de la République n’est responsable que dans le cas de haute trahison. »
C’est pour cette raison que le Gouvernement, dès qu’il est mis en minorité, a pris l’habitude
de se retirer. Le Parlement, lui aussi, démet facilement le Gouvernement en l’absence d’exigence
d’une majorité absolue.
On peut citer également la course aux portefeuilles. En effet, sous la III ème République, il n’y a
pas d’incompatibilité entre les fonctions gouvernementales et parlementaires. Ces derniers ont donc
tout intérêt à renverser les membres du Gouvernement pour tenter d’y entrer.
La crise du 16 mai 1877 a supprimé l’arme principale de l’exécutif qui était la dissolution. On y
voit donc un effacement du Président et donc du coup du Gouvernement.
En effet, Mac Mahon n’avait pas à exiger la démission d’un Président du Conseil qui avait obtenu le
vote de confiance du Parlement et inversement n’avait pas à utiliser son droit de dissolution, dès
lors que le Président du Conseil n’était pas accepté par le Parlement.
C’est la constitution Grévy , en proclamant qu’il ne rentrerait jamais en conflit avec la volonté
nationale des constituants, qui s’est empêchée d’user du droit de dissolution. Aucun autre président
ne réussira à établir l’autorité de l’exécutif. Le droit de dissolution n’a plus été utilisé pendant 18
ans.
Dès 1918, pour tenter de redresser le régime, le Parlement a autorisé le Gouvernement à prendre
dans certaines matières et pour une période déterminée des décrets lois. A la fin de cette période, le
Gouvernement devait déposer un projet de ratification. Ce fut un échec, d’un part puisqu’on y a vu
une atteinte à la séparation des pouvoirs (l’exécutif s’immiscent dans le législatif), une atteinte au
principe selon lequel une compétence ne peut être déléguée à un organe, et d’autre part ces décrets
lois ne résistèrent pas au régime hitlérien de l’Allemagne sur la France.
B) Les conséquences de cette pratique
Les lois de 1875, dans lesquelles on cherchait en vain la moindre amorce de rationalisation, font très
brièvement mention de la responsabilité du gouvernement et du droit de dissolution. Encore celui-ci
tombe-t-il en désuétude après 1877.
Concernant la responsabilité du gouvernement devant la chambre des députés. Aux termes de
l’article 6 de la loi du 25 février 1875, « les ministres sont solidairement responsables devant les
chambres du gouvernement et individuellement de leurs actes personnels ». C’est l’application pure
et simple de la règle fondamentale du régime parlementaire que les constituants ont voulu établir.
On observera que l’extrême brièveté des dispositions constitutionnelles laisse la mise en œuvre de
cette procédure à la discrétion du gouvernement et des chambres, qui peuvent également en prendre
l’initiative.
Concernant la responsabilité du gouvernement devant le sénat. Elle procède de ce même texte
visant la responsabilité du gouvernement devant les chambres, donc aussi devant le sénat.
Effectivement, le gouvernement a été, à plusieurs reprises, obligé de démissionner en raison de
l’hostilité du sénat, soit qu’il ait été en minorité après avoir posé la question de confiance, soit qu’il
ait préféré, après avoir constaté qu’il ne pouvait obtenir l’approbation de la seconde chambre, se
retirer sans engager sa responsabilité au sens précis du terme. La responsabilité du gouvernement
devant le sénat a suscité des critiques de deux sortes. D’une part, on a fait valoir qu’il était anormal
que le gouvernement soit responsable devant une chambre dont il ne pouvait pas faire prononcer la
dissolution, alors que les deux sont liés en régime parlementaire. D’autre part, on a fait valoir qu’il
était anormal que le gouvernement soit responsable devant une chambre dont il ne pouvait pas faire
prononcer la dissolution, alors que les deux sont liés en régime parlementaire. D’autre part, on a
fait valoir qu’il était choquant qu’une chambre de notables contraigne à se retirer un gouvernement
disposant de la confiance de la chambre élue au suffrage universel direct. Ce second argument est
sans doute, quant au fond, décisif. Mais il ne pouvait évidemment pas être retenu dès lors qu’il
existait un texte sans équivoque prévoyant expressément la responsabilité du gouvernement devant
les assemblées.
Concernant la dissolution de la chambre des députés. Il a déjà été indiqué qu’elle n’a plus été
pratiquée après 1877. Mais ce n’est pas à dire que le problème n’a pas été évoqué. Un président de
la république, Millerand (en 1923-24), et un président du conseil des ministres qui avait été
président de la république, Doumergue (en 1934), ont envisagé de rendre la dissolution plus facile
en faisant supprimer la nécessité de l’avis conforme du sénat. Non seulement rien n’a été fait en ce
sens mais encore ils ont été contraints à la démission. Le mythe de la dissolution coup de force de
l’exécutif contre le législatif continu pendant toute la durée de la troisième république à produire ses
effets maléfiques.
Conclusion :
Ainsi, le Parlement est devenu le centre de la vie politique sous la IIIème République grâce
à sa conception dans la lettre constitutionnelle d’une part, et grâce à la pratique constitutionnelle
mis en œuvre d’autre part. En effet, les lois constitutionnelles de 1875 place le Sénat au dessus de la
Chambre des députés, ce qui lui confère une véritable influence sur cette chambre basse. Il est
indissoluble et contrôle la Chambre des députés. De plus, la IIIème République est dans un premier
temps un régime parlementaire dualiste avec Mac-Mahon, puis avec Jules Grévy, et la « constitution
Grévy », elle est passée à un régime parlementaire moniste. Mais ce changement sera lourd de
conséquences. En effet, cela conduira à une forte instabilité gouvernementale. Enfin le Parlement,
par la loi du 10 juillet 1940, confie les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain, qui lui permettra de
réviser la constitution et de définitivement mettre fin à la IIIème République.
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