Une piste plus féconde doit être explorée, c’est celle de la sécurité sociale professionnelle,
laquelle fait sans doute appel à une taxation des licenciements, mais pour aller plus loin :
mettre sur pied une véritable mutualisation non seulement du risque de licenciement,
mais aussi du coût du reclassement.
4 – Solidarité contre charité
L’un des grands dangers du plan Borloo est qu’il se situe dans le prolongement de
toutes les politiques sociales menées par la droite, mais aussi par la gauche depuis 20
ans : réduire le coût de la solidarité d’un côté, développer la charité publique et privée
de l’autre. C’était déjà la démarche du RMI il y a 15 ans.
Au fond, les politiques sociales sont aujourd’hui conduites non pas pour retisser du lien
social, mais pour aider les exclus (sans les « inclure » pour autant).
Il nous faut refonder les politiques sociales sur le travail. Cela ne veut pas dire que
l’ensemble des charges de ces politiques doive se traduire par des cotisations. Mais le
discours sur la lutte contre l’exclusion n’a de sens que si l’on revalorise le travail, et les
avantages qui y sont liés.
5 – Le niveau des salaires directs
La revalorisation du travail doit se traduire dans le niveau des salaires directs. La
proposition du rapport Camdessus de limiter à la seule inflation la progression du SMIC
doit être combattue. Un écart suffisant entre SMIC et RMI doit exister, pour éviter toute
« désincitation » au travail, facteur d’exclusion.
La progression des salaires, et en particulier des bas salaires, est possible par la
poursuite d’une politique de réduction des charges et de crédit d’impôt, mais la solution
à terme est le glissement de points de cotisations sociales vers la TVA pour les premiers
euros de salaire, comme l’a évoqué le président de la République à l’occasion de ses
vœux pour 2006. Encore faut-il commencer de le mettre en œuvre.
La part des salaires par rapport aux profits dans la répartition de la valeur ajoutée a
depuis vingt ans fortement diminué.
La question des rémunérations des patrons des entreprises du CAC 40 doit être évoquée.
Le caractère scandaleusement élevé de rémunérations qui sont sans rapport avec le
risque qu’ils prennent (les patrons de petites entreprises risquent leurs économies et
parfois leur maison, mais ceux des grands groupes ne risquent rien), et même sans
rapport avec ce qu’ils apportent à leur groupe (combien de patrons ayant conduit leurs
entreprises à la catastrophe sont en plus surpayés).
6 – L’affaire des 35 heures
La réduction tendancielle de la durée du travail est une donnée liée au développement de
la productivité du travail. Pour autant, nous n’avons jamais été des doctrinaires des 35
heures. Ségolène Royal ne dit pas autre chose.
En effet, elles ont été conçues par Martine Aubry dans une perspective axée sur les
grands groupes. Les conséquences sur la fonction publique (où elles se sont traduites par
une baisse du service rendu) et sur les petites entreprises (où elles se sont traduites par
une baisse des salaires et une augmentation de la flexibilité des horaires) sont patentes. Il
faut certes s’opposer à l’esprit revanchard et doctrinaire de la droite, mais aussi
soutenir les assouplissements qui sont négociés équitablement, c’est-à-dire avec une
réelle contrepartie au niveau des salaires.
Aujourd’hui, il ne s’agit pas de « défendre les 35 heures », qui ne sont pas une
revendication véritable, mais de défendre les intérêts des salariés, dans le cadre d’une
exigence de revalorisation du travail.