La présentation du livre « Je pense que l’impact du protocole sur les élèves, et de ce type d’action en général, peut difficilement se mesurer […] je ne peux pas dire avec certitude et après plusieurs années d’application, ce que “ fait ” le protocole aux élèves et ce qu’il ne leur “ fait ” pas, mais je connais son impact sur ma pratique enseignante et je le mesure : moins de crispation devant l’échec ou le refus, plus de prise en compte de leur parole, davantage d’exigence dans le respect des règles et du niveau de langue, moins d’affect déplacé […]. Le protocole m’a permis de redessiner une figure plus complète à partir de l’élève que je voyais en classe et de l’individu enfant ou adolescent dont je devinais une vie que je ne pouvais pas prendre en compte puisque rien dans ma formation professionnelle ne m’avait entraînée à lui trouver une place, si petite fût-elle au sein de ma pratique. » Le protocole évoqué ici est le dispositif Parlons tabou, dont rend compte le livre Prévenir la violence au collège. À travers le dispositif Parlons tabou que vient d’éditer le CRDP de l’académie d’Amiens en partenariat avec le CRAP-Cahiers pédagogiques, Alors que la violence scolaire occupe le devant de l’actualité et que le clivage entre prévention et répression est au cœur du débat sur les solutions à apporter, l’ouvrage de Vijé Franchi, psychologue et maître de conférences, et de Gwenaëlle Colin, professeure de lettres en collège, rappelle qu’aucune représentation simpliste des difficultés n’est capable d’engendrer de véritables solutions. Un constat, une solution : la prévention À l’origine de cette expérience, la prise de conscience de l’ethnicisation de la violence scolaire et du tabou de la ségrégation. Le livre part de ce constat et considère que les conduites dites à risques menacent à la fois la « paix scolaire », indispensable aux apprentissages, et les élèves eux-mêmes. La prévention constitue une alternative aux défis quotidiens à relever mais elle suppose pour l’enseignant d’effectuer au préalable un travail sur soi et sur les autres. Il lui faut apprendre à compter avec ce qui est tabou dans la relation éducative, à savoir la dimension affective, émotionnelle. Une démarche, des outils, un dispositif Les auteures proposent une démarche, des outils et un dispositif (genèse, mise en place, évaluations) Parlons tabou. Ce dispositif de prévention des incivilités et des conduites à risques en milieu scolaire a d’abord été mis en œuvre en Afrique du Sud, quatre ans après la fin de l’apartheid, puis en France, dans l’académie de Lyon (dans six collèges et deux lycées professionnels soit environ seize classes de la sixième à la terminale) après l’avoir été dans les townships d’Afrique du Sud, dans des conditions encore plus difficiles qu’en France. Il a mobilisé, dans ces deux pays, une centaine de professionnels de l’éducation, une trentaine d’étudiants en psychologie et sept cent quarante élèves durant sept années. La démarche consiste à : – faciliter la mise en paroles et à mobiliser les facteurs de protection de l’individu (à travers une série d’exercices, les élèves travaillent l’estime de soi, prennent conscience de leur identité et apprennent à gérer le lien entre image de soi et conduite à risque) ; – renforcer la qualité des liens entre adultes et adolescents (groupe classe) ; – accroître les compétences préventives des adultes pour qu’ils créent un contexte de prévention avec les jeunes. Parlons tabou améliore le climat de l’établissement scolaire Parlons tabou ne prétend pas apporter de solution miracle. Mais ceux qui l’ont testé l’affirment : le protocole rétablit les liens humains, ouvre une perspective d’avenir pour les élèves en les aidant à construire leur personnalité et finalement améliore le climat de l’établissement scolaire. Cet ouvrage est un véritable outil pour les équipes éducatives : argumenté, clair et précis, testé sur le terrain et adaptable. Il peut constituer le point de départ d’actions très concrètes à l’échelle d’une classe ou d’un établissement scolaire.