La PME-PMI Algérienne : Passé, Présent et Perspectives
Meliani Hakim & Bouadam Kamel
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LA PME-PMI ALGERIENNE : PASSE, PRESENT ET PERSPECTIVES
Meliani Hakim et Bouadam Kamel
Faculté des Sciences Economiques et de Gestion Université de Sétif
Résumé :
La PME-PMI est reconnue universellement comme une école de formation de
managers, des cadres et de la main d’œuvre. En Algérie où la PME-PMI n’est pas développée,
la promotion de ce secteur est un moyen non seulement de densifier, de diversifier l’économie
et d’élever le niveau de vie des populations mais aussi de créer une élite de managers
industriels.
L’artisanat et la PME-PMI sont des aménageurs de territoire en ce sens, qu’ils répartissent
les efforts et les résultats à travers tout le territoire.
Introduction
Comme l’opinion publique le constate aujourd’hui cette « industrie industrialisante »,
stratégie défi du temps », comme se plaisent à l’évertuer certaines critiques, n’a pas rattrapé le
retard promis de rejoindre les pays limitrophes mais a placé l’Algérie derrière ses voisins, le
Maroc et la Tunisie, avec en plus, un crise multidimensionnelle qu’a vécue la société et qui s’est
aggravée depuis une décennie.
Pour mettre à cette « économie sauvage et sans scrupules », la PME –PMI s’avère
incontestablement un remède, une voie de développement à la dimension de la société.
Dans la première partie, nous analyserons les causes et les faiblesses du développement de la
PME-PMI en Algérie.
En deuxième partie, nous montrerons comment la PME-PMI peut être un facteur de stratégie
de développement économique et productrice d’une technologie.
1. Causes des faiblesses.
Un fait est réel, l’hostilité du pouvoir pour la promotion de la PME-PMI et l’artisanat privés
date des premières années de l’indépendance. La méfiance en le secteur privé est consommée dès
lors le système « socialisant tous azimuts » engagé un véritable « ratissage » de
nationalisation allant de la PME-PMI jusqu’au petit artisan. Face au secteur privé, les arguments
de mauvais aloi ne manquent pas. Ainsi, le capitaliste algérien est présenté comme l’incarnation
La PME-PMI Algérienne : Passé, Présent et Perspectives
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de la classe bourgeoise et celui-ci, d’un comportement individualiste, et exploiteur, n’a d’intérêt
que pour le profit. Se ravisant de la peur et de la débandade créées qui avaient conduit à une fuite
massive du capital privé, particulièrement en France, l’Etat a aussitôt institué le premier code des
investissements en 1963 qui offre une certaine garantie au capital étranger avec autorisation de
transfert d’une partie des résultats, mais le capital privé national demeure porté aux oubliettes.
De 1963 à 1965, seulement 2 projets d’investissement de PMI ont été initiés, l’un portant sur
une unité de chaussures et l’autre sur des produits chimiques. Quant au capital étranger, il ne
s’est pas manifesté outre mesure.
La proclamation du 19 juin 1965 qui a promis au peuple un redressement de l’ordre social et
de l’économie en particulier s’est appuyé cette fois sur un certain nombre de technocrates à la
franquiste influents pour définir et élaborer la stratégie. En proclamant la voie socialiste comme
style de développement, ces technocrates ont fait appel à leur tour aux experts étrangers, lesquels
sans état d’âme ont produit la stratégie dite « industrialisation industrialisante » inspiré du
schéma de reproduction socialiste qui donne la priorité au secteur de production de biens
d’équipement, qui à son tour, créera automatiquement la dynamique du secteur des biens de
consommation par le fameux « effets d’entraînement ». Ces experts ont avancé des arguments
aussi fallacieux que tendancieux tels :
L’artisanat, et la PME-PMI à eus seuls ne peuvent être un facteur de
développement et que seule une industrie à grande dimension et à haute intensité de
capital est en mesure de vaincre rapidement le sous-développement de l’Algérie et de
la mettre au diapason des pays industrialisés actuels ;
Le monde vit le progrès au rythme de la technologie de pointe, d’économie
d’échelle, fait de grandes concentrations industrielles, de monopoles, d’accumulation
du capital, de baisse des coûts des facteurs, des prix de revient, l’Algérie ne doit
demeurer en marge ;
L’Algérie à développement planifié et coordonné ne peut s’accommoder d’un
secteur de propriété exploiteuse générateur ou géniteur d’une bourgeoisie compradore,
ennemie du socialisme, susceptible de mettre en cause et de confisquer le pouvoir des
« masses laborieuses » ;
Les produits de consommation courante sont moins onéreux à importer qu’à
fabriquer sur place.
Au lieu d’une industrie tous les espoirs sont permis, qui devait transformer les
matières premières locales et mettre fin au chômage, nous assistons à un énorme banc
industriel coûteux, inefficace, avec un gonflement de structures qui ont engendré une
bureaucratie pléthorique, lourde et lente, au demeurant fossoyeuse de l’économie.
Ce dérapage industriel est en majeure partie la cause principale de la frustration, de la rareté,
du trabendo, des scandales politico financiers, d’inégalité, de violence que vit actuellement la
société.
L’Algérie est elle contaminée par les pays producteurs de pétrole qui, eux, privilégient le
développement de l’industrie pétrolière pour l’intérêt de la rente, au point d’afficher un mépris
pour la PME-PMI et l’artisanat synonymes de techniques désuètes et archaïques ?
A notre avis, il n’y a jamais eu de pays industrialisés qui s’est développé sur une mono
industrie à l’exception de l’Algérie. Il n’y a jamais de pays qui ont un savoir –faire et d’autres
qui n’en ont pas. Par contre, il y a des pays qui croient en la savoir, et le savoirfaire des autres.
Il est aberrant que la PME-PMI et l’artisanat soient exclus de la stratégie et relégués à vivre
dans un ghetto, alors que la puissance économique des USA, du Japon, des pays de l’Europe, de
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la Chine, et de tous les pays qui sont actuellement sur le podium des puissances technologiques
sont le produit de « petite production marchande ». fort de l’aisance des disponibilités financières
provenant de la manne pétrolière généreuse des années 70, le pouvoir a foncé tête baissée pour
une importation massive des équipements et du savoir-faire étranger absorbant 45% du budget de
l’Etat, sans résultats probants.
A propos du transfert de technologie à grande échelle, bon nombre d’experts analysent la
politique de technologies en Algérie en affirmant que ces technologies peuvent être efficaces
dans leurs pays d’origine, mais pour l’Algérie, elles posent plus de problèmes qu’elles n’en
résolvent.
Malgré le spectre qui pèse sur les privés, un certain nombre de commerçants ont décidé de
mobiliser leurs capitaux dans l’investissement productif. Le nombre des PME-PMI créées est de
263 entreprises offrant 10200 postes de travail en 1966. en 1968 le nombre passe à 1086, et à
1434 en 1973, toutes activités confondues y compris le BTP.
A cette date, la PME-PMI privée occupe 63,6% de l’ensemble de l’industrie. Le textile
occupe à lui seul 35.5% de l’ensemble de la PME-PMI
1
.
Le véto répété du ministère de l’industrie causant l’agrément au compte-goutte des projets a
découragé l’élan du capital privé.
Da,s la dernière moitié des années 70, beaucoup d’investisseurs ont entrepris des centaines
d’études technico-économiques et de faisabilité à grands frais pour voir ensuite leurs dossiers
rejetés par les commissions d’agréments des investissements sous prétexte que l’activité
souhaitée relève du monopole d’état. Quant au capital étranger, tout projet était
systématiquement écarté.
2. La marginalisation.
La fin des années 70 marque l’essoufflement de la stratégie avec ses relents de
dysfonctionnements. Le privé qui a des capacités financières disponibles est laissé à lui-même,
faute d’une politique claire de l’Etat. Ne sachant quoi faire de lui, avec lui ou contre lui, le statut
quo a poussé la majorité du privé à utiliser le système « D », à se verser dans des activités
occultes propices à l’économie souterraine avec tout ce que cela comporte de gain facile, de
corruption, de trafics d’influence, de mafia, de spéculation, de passe droits et nous en passons.
Ainsi, il n’est pas inutile de le répéter, la présence de la PME-PMI et de l’artisanat, aurait joué
un rôle prépondérant et sécurisant pour la promotion d’une nouvelle industrie capable de
générer de l’emploi et la valeur ajoutée.
3. Pour une démarche stratégique adaptée au contexte de la PME en Algérie
C’est avec une grande prudence que l’on avancera quelques propositions. De quel type de
management stratégique la PME a-t-elle besoin ? Peut-elle se passer d’une telle approche.
o Un besoin minimum de planification stratégique devrait posséder les attributs suivants :
o Consommer le moins de ressources possible, en incluant dans ce terme le temps
disponible du dirigeant ;
o Etre cohérent avec le style stratégique intuitif des dirigeants concernés ; en particulier le
système adopté ne devrait en aucun cas les empêcher de saisir les opportunités à mesure
qu’elles se présentent ;
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o Aider le dirigeant à avoir une vision à long terme de son entreprise, et, à concevoir les
options susceptibles de la guider dans le cadre de cette vision.
o Donner la priorité à la mise en place d’un système d’information stratégique. Les PME
ont donc besoin , tout autant que les grandes entreprises, d’un système d’information
stratégique. Celui-ci doit être cohérent avec la structure de la PME. Celle-ci doit surveiller à
peu près les mêmes parties d’environnement que la grande entreprise, mais avec des
moyens de moindre coût et du moindre formalisme. La priorité doit être donnée à ce qui se
fait déjà dans l’entreprise- et notamment au système d’information informel du dirigeant-,
l’amélioration devant porter surtout sur les techniques permettant de stocker les
informations et de les retrouver rapidement dès que le besoin se fait sentir.
o Penser plus tôt à la faisabilité des stratégies et à leurs problèmes éventuels d'application.
Bon nombre de dirigeants reconnaissent avoir rencontré de sérieux problèmes pendant la
phase d'exécution de leurs décisions14. Un des moyens de remédier à cet état de choses est
de réaliser, dès la phase de la conception, la nature stratégique de la décision qui va être
prise. Une fois retenue, cette option tiendra en compte toutes les ressources de l'entreprise:
financières, capacités de production, personnel disponible, etc.…
o Un problème souvent occulté et pourtant majeur est celui de la collaboration du personnel
aux choix stratégiques du dirigeant. Dans certains cas, il peut y avoir une situation de
blocage. Dans beaucoup de PME, des choix stratégiques majeurs sont décidés par le
dirigeant seul, chez qui d’ailleurs sont concentrées la plupart du temps les informations
nécessaires à la prise de décision. Celle ci se caractérise alors par des qualités de rapidité,
d’efficacité et de secret parfois nécessaire. Malheureusement, les proches collaborateurs
n’ont pas été associer à la prise de décision, et il en résulte des inconvénients majeurs. La
décision, prise par un seul homme, n’a peut-être pas intégrer toutes les contraintes
nécessaires ; par exemple, seul un collaborateur chargé de la fonction financière ou, à,
défaut, l’expert comptable ou le banquier pourraient dire au dirigeant si la stratégie de
croissance envisagée ne va pas entraîner une augmentation excessive du besoin de fonds de
roulement, et donc des problèmes de trésorerie incompatibles avec le maintien d’un
minimum de sécurité financière.
3.1 La PME et PMI en Algérie
Les petites entreprises moins de 10 salariés représentent 93.24% et emploient 22195 salariés, soit
35% de l’effectif global. Quant aux PME employant 10 et plus représentent à peu près 7% et
comptent 412400 salariés soit, 65% du total
2
.
La PME et PMI est essentiellement concentrée dans cinq secteurs d’activité :
BTP ( 26.7%), commerce ( 16.34%), transport et communications (8.7%), services (8.6%) et
industries agro-alimentaires (7.3%), soit 68% du total.
Le secteur privé industriel représente quant à lui 38800 PMI, soit 24.3% des entreprises
recensées à la date de juillet 2000 et emploie 28.2% des travailleurs. A noter également, dans ce
secteur d’activité, les entreprises de moins de 10 salariés représentent 92% des entreprises
industrielles soit 35800.
La moitié des entreprises est concentrée dans les principales wilayas du nord :
Alger, Oran, Tizi Ouzou, Sétif, Bejaia, Blida, Constantine, Chlef, Tipaza et Boumerdes.
Il faudrait souligner que les wilayas du sud comme Naama, Ghardaia, Bechar, Ouargla, et El
Oued enregistrent respectivement 1449 entreprises pour 132000 hab ; 2521 PME pour 312000
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hab ; 2138 PME pour 232000 hab ; 2468 PME pour 443000 hab ; et 2300 entreprises pour
525000 ha.
3.1.1 Apport de la PME-PMI
Le secteur privé a contribué au cours de l’année 1998 à concurrence de 53.6% hydrocarbures y
compris en produit intérieur brut.
En 1994, la valeur ajoutée du secteur public était de 617.4 milliards de dinars représentant
53.5%, alors que le secteur privé dégageait 538.1 milliards de DA, soit 46.5%. a partir de 1998,
on constate un renversement de situation en faveur du secteur privé avec 1178 milliards de DA,
soit 53.6% contre seulement 46.4% pour le secteur public
3
.
Dans les échanges extérieures, les importations réalisées par les opérateurs privés durant les 9
premiers mois de l’année 1999 se sont élevées à 4399 millions de dollars, soit 65.77% des
importations globales. Les exportations pour la même période par les opérateurs privés se sont
situées à 115 millions de dollars soit 29% des exportations globales.
Investissements
Le nombre de projets déclarés pour l'année 1997 a été de 4989 contre seulement 2075 en
1996, soit plus du double.
L'ensemble de ces projets totalisent 437.8 milliards de DA contre 178.2 en 1996.
Le nombre d'emplois prévu pour 1997 est de l'ordre de 266 000 contre 127 000 en 1996.
Le nombre de projets déclarés en partenariat a été de 59 contre 49 en 1996 avec un coût
global estimé à 21.3 milliards de DA et un emploi prévisionnel de l'ordre de 6378, soit 32 % en
termes d'entreprises, 27 % en termes d'emplois et 32 % en termes de montant par rapport à
l'ensemble des projets déclarés en partenariat depuis le 13 / 11 / 1993.
Les principales caractéristiques des projets durant la période :
- une prépondérance des nouvelles créations représentant 83 % des projets
déclarés;
- une concentration dans les secteurs de l'industrie et des services,
notamment le transport terrestre;
- une localisation autour des grandes métropoles industrielles au centre et au
sud du pays;
- une importance de projets de taille moyenne avec plus de 59 % de projets
emploient entre 20 et 100 salariés et 30 % , dont le coût se situe entre une
fourchette 20 et 50 millions de DA.
3.2. Financement de la PME et PMI :
La question du financement est une problématique nationale qui persiste depuis plusieurs
années. On essaiera d'appréhender quelques facteurs qui font obstacle au financement. Nous
pouvons en citer :
- la lenteur de la réforme du secteur bancaire: La faiblesse des revenus et de
l'épargne a pendant longtemps constitué l'échec du système bancaire ainsi que les limites
du financement planifié basé sur les recettes pétrolières et le concours extérieur. Le
système bancaire construit dans une optique de spécialisation sectorielle et de
complémentarité n'a pu se déployer et jouer pleinement son rôle. Ce n'est pas par hasard
si en 1998, sur 1200 milliards de DA en circulation, seule la moitié était bancarisée,
l'autre moitié échappe au circuits bancaires et pèse sur l'économie réelle , les prix, le
niveau d'évasion fiscale et les grands agrégats de l'économie.
La réforme du secteur bancaire et financier, malgré les étapes franchies depuis la loi sur
le crédit et la monnaie ( Avril 1990 ) reste en deçà des espérances .
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