Des vignettes exotiques aux belles couleurs : présentations nationales à l’EXPO Dans son bilan de clôture, la commissaire générale Birgit Breuel a qualifié glorieusement l’Expo de “ fête des peuples ”. Et le secrétaire d’État Erich Stather, du ministère fédéral de la Coopération économique, a fait l’éloge des pays partenaires participant à l’Exposition qui se seraient consacrés de manière intensive au thème du développement durable et auraient ainsi apporté une contribution essentielle à l’ambitieux contenu de l’Expo. Il est vrai que quelques pays ont présenté à l’Exposition Universelle d’incroyables contributions architectoniques et relatives à ce thème. Les pavillons de la Suisse et des Pays-Bas en font aussi bien partie que, par ex., les présentations de l’Albanie et des États africains du CILSS et de la SADC. Toutefois, la majorité des présentations nationales se réduisait pourtant à une exposition exotique orientée sur une publicité superficielle adressée aux éventuels touristes et investisseurs qui masquait les véritables thèmes urgents. Pendant l’Expo, la fondation “ Stiftung Leben und Umwelt ” a reçu plusieurs journalistes indépendants spécialisés dans l’environnement et originaires de pays du Sud. Ils exprimèrent leur grande déception quant à ces expositions. Ci-après l’appréciation de Nantiya Tangwisutijit, rédactrice du “ The Sunday Nation ” en Thaïlande : Informations tendancieuses La Thaïlande à l’EXPO 2000 de Hanovre de Nantiya Tangwisutijit Rédactrice du “ The Sunday Nation ”, Thaïlande Il y a quelques années de cela, la Thaïlande, royaume de superficie moyenne peuplé d’env. 60 millions d’habitants, fit la une de l’actualité lorsque la crise économique éclata en Asie. Aujourd’hui encore, les conséquences de cette crise pour les habitants de la région sont très nettement perceptibles, mais à l’EXPO 2000, nous ne recevons pas la moindre information à ce sujet. Dans son pavillon joliment décoré, situé au nord-ouest du Site de l’EXPO, la Thaïlande se présente comme une puissance agricole. Les deux Nagas (serpents de la littérature bouddhiste classique) que l’on découvre en entrant dans le pavillon, symbolisent la fertilité de la terre et de l’eau. L’exposition présente des mythes anciens et des technologies modernes tournant autour de la culture du riz, première denrée alimentaire pour le marché intérieur et comme pour l’exportation. Mais est-ce donc là tout ce qu’il y a à dire sur la Thaïlande ? Bien sûr que non. Demandez à des ONG thaïlandaises, elles vous dévoileront certainement le revers de la médaille, ainsi qu’une série d’erreurs commises lors de la participation du pays à l’EXPO et à d’autres manifestations internationales par les instances dirigeantes (à savoir l’administration touristique de la Thaïlande, le ministère de l’Economie, de la Technologie et de l’Environnement ainsi que le Premier ministre). Si on considère le produit intérieur brut, l’agriculture n’est plus l’axe fondamental de l’économie thaïlandaise. Au contraire, cela fait longtemps que la politique de développement du pays s’est déplacée vers des secteurs modernes, dont l’industrie, le commerce et les finances. La crise économique et financière de 1997 est une preuve de la prédominance du secteur moderne. La crise fut causée par les déplacements incontrôlables de masses importantes de capitaux à l’intérieur et vers l’extérieur du pays. Aujourd’hui encore, des millions de Thaïlandais pâtissent de la perte de leur emploi, supprimé par la crise. Les fonds publics en matière d’éducation, de santé et d’environnement sont de plus en plus réduits. Mais, comme dit précédemment, nous n’apprenons rien de tout cela à Hanovre. Naturellement, la Thaïlande n’est pas le seul pays à ne présenter que sous un jour positif à l’EXPO. De nombreuses autres nations, en particulier celles dont l’économie est en voie de développement, se sont surtout préoccupées de montrer au monde à quel point leur pays est beau (afin de promouvoir le tourisme) et combien sont excellents leurs produits d’exportation. Toutes ces nations veulent attirer des investisseurs étrangers en se présentant comme de bons partenaires commerciaux. Il est intéressant de voir que quelques expositions transgressent toutefois le thème EXPO du développement durable – si toutefois il est possible de le prendre au sérieux. Plusieurs pays en voie de développement, prenons l’exemple du Lesotho, sont fiers d’exposer des projets d’immenses barrages, bien que les défenseurs de l’environnement soient unanimes sur le fait que de grands barrages présentent une forme de développement non durable en raison de leurs répercussions sur l’homme et l’environnement. Des informations tendancieuses ne sont pas forcément fausses. Mais il n’est certainement pas nécessaire de se rendre à l’EXPO 2000 pour voir de telles présentations. Les visiteurs peuvent tout bonnement rester chez eux et surfer sur Internet, car ce genre d’informations superficielles n’est pas très difficile à trouver. Reste alors la question de savoir si l’EXPO offre une chance de rencontrer des personnes de presque tous les coins du monde (et si oui, à l’exception des États-Unis) ? Oui et non. On rencontre en effet des personnes, mais dans des conditions assez artificielles. Une des attractions de la présentation commune du Forum Pacifique Sud est, par ex., une scène sur laquelle se trouvent deux hommes revêtus de costumes traditionnels, faits avec de l’herbe et des feuilles. Les spectateurs peuvent les observer en train de tresser des corbeilles et nouer des filets de pêche. Ils sont là pour être observés par les visiteurs de l’Expo qui sont certainement profondément impressionnés par une scène si “ exotique ”. Mais l’occasion de faire leur connaissance en tant que véritables personnes ne leur est pas donnée. Pour de nombreux visiteurs, ces deux hommes ne représentent rien de plus qu’un élément de “ l’exposition ”. L’un des principaux défauts de l’EXPO est le manque de participation de la société civile, par rapport aux organismes officiels et à l’économie privée. En Thaïlande, le public n’a pas été informé de la participation de l’État à l’EXPO et de l’investissement financier qu’elle représente. En effet, seule une poignée de personnes connaît l’EXPO de Hanovre. Quelques journalistes ont été invités, mais leurs articles se limitèrent à l’art, l’architecture et les activités dans le pavillon thaïlandais. A aucun moment, un débat public n’eut lieu à ce sujet pour consulter la population thaïlandaise sur le genre de représentation qu’elle souhaitait pour son pays à une exposition universelle. Bien que les organisateurs aient voulu présenter une vision globale du XXIe siècle, l’EXPO 2000 est surtout conçue selon de vieilles conventions – déterminées par des gouvernements et l’économie privée, avec une participation limitée de la société civile.