Un nouveau regard sur la mission

2005-2006, Année de la mission – Diocèse de Lyon
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PENTECOTE 2006
UN NOUVEAU REGARD SUR LA MISSION
Veux-tu découvrir le dynamisme des disciples du Christ ? Alors, prends le livre des
'Actes des Apôtres' et lis-le : tu y trouveras la vitalité des communautés chrétiennes aux
origines de l'Eglise. Dès la première page, Jésus le Ressuscité met les siens en face de leur
responsabilité :
"Vous allez recevoir une force,
celle de l'Esprit Saint qui descendra sur vous.
Alors, vous serez mes témoins
à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie
et jusqu'aux extrémités de la terre" (Actes 1, 8).
Le dynamisme de la Pentecôte
Effectivement, le jour de la Pentecôte, le groupe des premiers disciples a été saisi par
un souffle qui les a poussés à témoigner. La naissance de l'Eglise, c'est un envoi en mission.
La Bonne Nouvelle du monde nouveau retentit aussitôt et se répand dans toutes les directions
comme une traînée de poudre.
Aujourd'hui encore, le même Esprit souffle toujours. Il nous stimule et nous envoie
dans notre monde aux mille visages qui se demande où il va. Une immense diversité de
cultures marque les esprits et les façons de vivre. Des religions de toutes sortes proposent
leurs lumières. Des besoins profonds, spirituels aussi bien que matériels, cherchent à être
satisfaits.
'Chargés de mission'
Face à tant de problèmes, nous pouvons être tentés de baisser les bras et de dire : 'A
quoi bon ? A chacun sa route et ses soucis ! Intervenir auprès de ces groupes humains
risquerait de les déstabiliser ! A quel titre vouloir les rencontrer, puisqu'ils sont déjà installés
dans leur façon de vivre ? Pourquoi leur annoncer un message nouveau ?'
Pourtant, portés par l'espérance et la joie qui nous viennent de notre foi en Christ,
nous ne pouvons pas garder pour nous seuls la lumière et la libération que le Message de
Jésus nous apporte. Notre monde écrasé et bouleversé a besoin de solidarité. Nos sociétés
inquiètes cherchent un sens à leur existence. Nous-mêmes, nous sommes impliqués dans ce
bouillonnement et nous avons à coeur de transmettre aux autres notre expérience de vie avec
le Seigneur.
Oui, dynamisés par l'Esprit de Pentecôte, nous sommes 'chargés de mission'. Prenons
le temps de réfléchir ensemble à cette tâche qui nous est confiée. Et d'abord, de quoi s'agit-il
exactement ? Quelle est cette Bonne Nouvelle que nous voulons proposer ?

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I - UN PROJET DE FRATERNITE
C'est une toute nouvelle vision du monde que le Christ nous apporte. Il veut
transformer notre regard. Pour élargir notre horizon, il nous révèle un 'Projet d'Amour', celui
que Dieu avait au cœur quand il a créé le monde.
Un chemin de bonheur
S'il a mis en route ce formidable mouvement de vie qu'est notre univers, c'est pour que
toute l'humanité y trouve son épanouissement. Le Père nous aime : il nous invite tous et toutes
à entrer en communion avec lui. Lui-même forme avec son Fils et son Esprit une parfaite
communauté d'Amour, et il nous appelle à y participer (Ephésiens 1, 3-14).
Ce que le Père nous propose, c'est de nous accueillir en lui, pour que nous y trouvions
la véritable joie, celle d'un bonheur authentique et définitif. C'est précisément pour cela qu'il
nous a envoyé son Fils (Jn 3, 16-17). Celui-ci s'est fait l'un de nous, il est devenu notre frère.
Et ainsi, par cette proximité, il nous communique son Esprit qui est pour nous source de vie.
Si nous accueillons cette offre merveilleuse, nous serons réellement vivifiés par
l'Esprit. Nous deviendrons alors frères et sœurs du Christ, et, par là même, fils et filles du
Père. En lui, nous serons tous rassemblés. Nous serons véritablement : Maison de l'Esprit,
Fraternité en Christ, Famille du Père.
Une Communauté de vie
L'Eglise qui est née le jour de la Pentecôte est une Communauté en laquelle réside
l'Esprit Saint capable de transformer notre existence. C'est une Fraternité où nous pouvons
tous communier à la vie du Christ ressuscité. C'est cette Famille du Père où l'humanité toute
entière accède à la joie d'une existence pleinement épanouie.
Tel est le Projet que, par amour pour nous, Dieu a mis en route dès les origines de
l'univers, et dont la réalisation est déjà commencée. Durant de longs siècles, il s'est révélé
petit à petit, discrètement, jusqu'à sa claire manifestation dans la venue du Christ. Celui-ci est
réellement notre frère, et sa vie de ressuscité nous est désormais accessible.
Même si beaucoup de gens ignorent cette Bonne Nouvelle, c'est un fait : le Royaume
de Dieu est là, au milieu de nous. Jésus lui-même nous l'affirme :
"Le temps de l'accomplissement est arrivé :
le Règne de Dieu est proche.
Changez votre regard sur la vie
et croyez à la Bonne Nouvelle" (Mc 1, 15).
Une Bonne Nouvelle à répandre
C'est cette nouvelle vision du monde que nous sommes chargés de faire connaître,
parce qu'elle est une source inépuisable de vie, proposée à tous. Mais comment assumer cette
mission qui est la nôtre ? Est-il possible de préciser ce que le Seigneur nous demande de
faire ? Quelle est au juste la 'feuille de route' qu'il nous confie ?

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Trois expressions caractéristiques vont nous guider dans notre recherche. Chacune
d'elles suggère en quel sens et dans quel esprit nous sommes invités à rayonner la Bonne
Nouvelle :
– La Mission, c'est aller à la rencontre des autres, dans l'Esprit d'Amour. Partager et
dialoguer fraternellement, à travers une charité effective, afin de manifester que "Dieu
a visité son Peuple".
– La Mission, c'est proposer la Fraternité réalisée en Christ. Vivre avec les autres et
témoigner de la Bonne Nouvelle, en rayonnant la foi qui nous fait vivre : "Venez et
voyez".
– La Mission, c'est "bâtir le Corps du Christ". S'unir pour construire la Fraternité,
en marchant tous ensemble vers le Royaume du Père. Se soutenir et s'entraîner
mutuellement, en devenant des ferments d'espérance dans le monde actuel qui prépare
celui de demain.
II – ALLER A LA RENCONTRE DES AUTRES
L'amour que Dieu le Père nous porte n'exclut personne : son Projet de Fraternité
englobe tous les humains de tous les temps. Voilà ce que l'Eglise a mission de faire connaître
à tous les peuples, dans toutes les régions et toutes les cultures du monde.
C'est le Message du Christ, 'l'Evangile' : Bonne Nouvelle pour nous aujourd'hui. Il se
présente bien comme une nouveauté, une richesse inattendue qu'on n'aurait même pas pu
imaginer. Et comme une nouveauté qui est bonne, car elle est une véritable source de bonheur
et d'épanouissement :
"Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau,
et, moi, je vous donnerai le repos" (Mt 11, 28).
Envoyés en mission
Cette invitation bouleversante et merveilleuse, il nous revient de la communiquer
autour de nous à tous nos frères et sœurs qui cherchent un sens à leur vie. Nous sommes
envoyés en mission. C'est à nous tous que, aujourd'hui encore, le Christ ressuscité confie cette
tâche. Les quatre évangélistes nous transmettent le même 'ordre de mission', mais chacun à sa
façon : - "Comme le Père m'a envoyé, moi aussi, je vous envoie" (Jn 20, 21).
- "Vous serez mes témoins" (Lc 24, 48 et Actes 1, 8).
- "Annoncez la Bonne Nouvelle" (Mc 16, 15).
- "Allez, suscitez des disciples" (Mt 28, 19).
Tous les aspects sont là : nous sommes 'envoyés' – c'est-à-dire 'apôtres' – comme
'témoins', pour proclamer la 'Bonne Nouvelle', afin que naissent des 'disciples'.
Remarquons bien aussi que cette mission est absolument universelle : elle est "pour
tous les peuples" (Lc 24, 47), "jusqu'aux extrémités de la terre" (Actes 1, 8), destinée "à toutes les
nations" (Mt 28, 19), "dans le monde entier" (Mc 16, 15). En effet "Dieu veut que tous les
hommes soient sauvés et arrivent à connaître la vérité" (1 Timothée 2, 4).

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L'Eglise est Mission
L'Eglise se définit par la mission qu'elle a reçue. Elle n'existe que pour actualiser la
présence du Christ-Ressuscité dans tous les peuples et à toutes les époques de l'histoire
humaine. Dire que l'Eglise 'a' cette fonction serait insuffisant et même inexact car, en réalité,
elle 'est' mission. Cette mission n'est pas une fonction particulière parmi d'autres ; elle est la
raison d'être de l'Eglise. Et c'est pourquoi le concile Vatican II tient à affirmer :
"L'Eglise est envoyée par Dieu aux nations pour être 'le sacrement universel du salut'.
En vertu des exigences intimes de sa propre catholicité et dans l'obéissance à l'ordre
de son fondateur, elle tend de toutes ses forces à 'annoncer l'Evangile à tous les
hommes'. […] Dans l'ordre actuel des choses, qui voit naître une nouvelle situation
pour l'humanité, l'Eglise est 'sel de la terre et lumière du monde'. Elle est appelée de
façon plus urgente à sauver et à rénover toute créature, afin que tout soit rétabli
dans le Christ et qu'en Lui les humains constituent une seule Famille et un seul Peuple
de Dieu"
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.
Cette Mission a jailli du cœur de Dieu à travers l'envoi du Fils et de l'Esprit, elle est
bien une oeuvre d'Amour. Il n'est donc pas étonnant que l'un des premiers noms donnés à
l'Eglise soit celui de : 'Agapè', ce qui signifie : 'Amour'. En effet, si l'Eglise existe, c'est pour
manifester l'Amour que Dieu a envers nous et nous permettre d'y communier. Le Concile le
dit clairement :
"Dans son pèlerinage, l'Eglise est missionnaire de par sa propre nature, car elle tire
son origine de la mission du Fils et de la mission de l'Esprit, selon le Projet de Dieu le
Père. Or ce projet découle de la 'source d'amour' qu'est Dieu le Père qui est Amour.
[…] Il nous a créés librement, dans sa bonté surabondante et miséricordieuse. Et, de
surcroît, il nous appelle gratuitement à communier avec Lui dans la vie et la gloire"
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De cet Amour, l'Eglise est le 'sacrement', c'est-à-dire à la fois le signe et le chemin :
– Signe, elle doit manifester à tous les humains l'Amour dont vivent le Père, le Fils
et l'Esprit, et auquel il nous est proposé de participer.
– Chemin, car c'est par elle et en elle que nous pouvons entrer dans cette famille qui
est communion d'Amour à laquelle nous sommes tous invités et que Jésus appelle
'le Royaume'.
La Mission est Rencontre
Tel est l'événement qui vient bouleverser et illuminer toute l'histoire de notre univers :
"Dieu a visité son Peuple". C'est le cri de joie des foules lorsque Jésus ressuscite le jeune
homme de Naïm (Lc 7, 16). C'est aussi ce que chantait Zacharie lors de la naissance de son fils
Jean-Baptiste : "Béni soit le Seigneur, car il a visité et libéré son peuple" (Lc 1, 68 et 78). C'est
le cri de joie que lance l'Evangile :
"Dieu a tellement aimé le monde
qu'il a donné son Fils, son unique,
pour que quiconque croit en lui ne périsse pas,
mais qu'il obtienne la vie éternelle" (Jn 3, 16).
"Oui, il est venu chez les siens. […]
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Ad Gentes, 1. On relira avec profit les passages du N.T. auxquels ce texte fait allusion : Mt. 5, 13-14 ;
Ephésiens 1, 10 et Colossiens 1, 20. La suite du paragraphe 2 cite encore 1 Corinthiens 15, 28 et Jn 11, 52.
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Ad Gentes, 2.

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Et à ceux qui l'accueillent, à ceux qui croient en lui,
il donne la possibilité de devenir enfants de Dieu" (Jn 1, 11-12).
A chacun de nous, Jésus répète aujourd'hui ce qu'il disait à la Samaritaine : "Si tu
savais le don de Dieu ! Si tu savais qui est celui qui te parle !" (Jn 4, 10). Et il ajoute : "Voici
que je me tiens à la porte et je frappe. Si tu entends ma voix et que tu ouvres la porte,
j'entrerai chez toi, et je me mettrai à table avec toi, et toi avec moi" (Apocalypse 3, 20).
Oui, vraiment, la Mission est une visite qui apporte le bonheur. C'est la rencontre du
Dieu-Amour qui vient à nous : "Lui, le premier, il nous a aimés" (1 Jean 4, 19).
C'est cet Amour que l'Eglise a reçu mission de manifester à travers sa vie : une vie de
proximité, une vie de dialogue, une vie de charité. Et c'est pourquoi l'Eglise est sans cesse
appelée à sortir d'elle-même pour aller à la rencontre des autres, par amour. Un amour qui fait
le premier pas vers ceux en qui il voit des sœurs et des frères. Un amour qui écoute, compatit
et partage. Un amour qui accompagne et se donne, "jusqu'à l'extrême" (Jn 13, 1).
Or l'Eglise, c'est nous (cf. Hébreux 3, 6). Comme elle, nous sommes tous des
'envoyés'. Comme Paul, chaque chrétien est "serviteur de Jésus Christ, appelé à être apôtre,
désigné pour annoncer l'Evangile de Dieu" (Romains 1, 1). Ainsi n'y a-t-il pas de Mission sans
rencontre de l'autre.
III – REVELER ET PROPOSER LA FRATERNITE
Reconnaissons-le, dans le monde francophone, le mot 'Mission', même avec un grand
M, passe mal. Il a encore des relents de conquête.
'Fraternité' : un des premiers noms de l'Eglise
Pourquoi ne pas envisager alors l'activité de l'Eglise comme une 'mission de fraternité' ?
Cette manière de voir s'inspire du concile Vatican II, et elle rejoint le vocabulaire et la
pratique des premières communautés chrétiennes. Conscientes du Projet d'Amour mis en
œuvre par le Père, celles-ci se sont donné le nom de 'Fraternité', c'est-à-dire de 'communauté
de frères et de sœurs' (en grec : adelphotès). Ce titre est le nom propre de l'Eglise. Utilisé pour
la première fois par l'apôtre Pierre (1 Pierre 2, 17 et 5, 9), il s'est largement répandu par la suite.
Cette appellation est née de l'expérience qu'ont faite les disciples, animés par l'Esprit,
de leur communion intime avec le Christ. Jésus n'avait-il pas dit : "Quiconque fait la volonté
de mon Père, c'est lui qui est mon frère, ma sœur" (Mt 12, 50) ? Ils ont donc simplement repris
à leur compte cette parole. Ils ont aussi été profondément marqués par cette confidence, reçue
le soir du Jeudi Saint : "Je ne vous appelle plus serviteurs, je vous appelle amis" (Jn 15, 15). Et
surtout, ils ont retenu la nouveauté de Pâques. Ce jour-là, le Ressuscité les a appelés : "mes
frères". Et il a précisé pourquoi : c'est parce que "mon Père est votre Père" (Jn 20, 17 et Mt
28,10).