premiers pas aux urgences recit de la situation clinique

Trace d'apprentissage
AGBOJAN Marine Mélia
Tuteur : Dr Lazimi
SEMESTRE 2 : mai 2010 - novembre 2010
CHU Ambroise Paré, Boulogne-Billancourt, Service d'accueil des urgences, Pr Elkharrat
Compétences visées 11 - Exécuter avec sécurité les gestes techniques les plus fréquents en soins de
première ligne
PREMIERS PAS AUX URGENCES ...
RECIT DE LA SITUATION CLINIQUE
Lundi 03 mai 2010
Actuellement en stage aux urgences du CHU Ambroise Paré, je suis amenée à prendre
régulièrement des gardes dans le service. Les motifs de consultation y sont très variés, de jour comme de
nuit, allant de la simple "bobologie" aux urgences graves de patients dont le pronostic vital est engagé à
court terme.
Le stage aux urgences, outre la mise en application de nos connaissances médicales théoriques,
constitue un excellent terrain d’apprentissage des gestes techniques d’urgence que nous retrouvons trop
peu souvent développés dans les livres.
Et ce, particulièrement pour moi, n’ayant pas eu la chance d'effectuer un stage aux urgences durant mon
externat, c’est en tant qu’interne que je ferai l'apprentissage de tous ces gestes techniques d'urgence et
de premier recours…
Voici le récit de ma première garde nocturne aux urgences…Lundi 03 mai 2010, premier jour du
semestre, je me retrouve de garde aux urgences, tirée au sort pour la fameuse première garde du
semestre, celle dont personne ne veut! Déjà qu'il m'était intimidant de débuter ce nouveau stage...Il est
d’autant plus effrayant pour moi qui suis novice, avec mes premiers pas aux urgences...
18H05, la garde débute...J'espère que mon premier patient ne sera pas trop complexe... Mon sénior
m’envoie au box 6 voir Mr L. ...
Mr L. est un patient SDF, éthylique chronique, habitué du service avec une moyenne de deux
consultations par semaine au Service d'accueil des urgences, toujours amené par les pompiers pour état
d'ébriété sur la voie publique.
Mes souhaits n'ont pas été exaucés...Je sens que l'interrogatoire et l'examen clinique vont être
particulièrement cocaces!
Cette fois, Mr L. a été retrouvé allongé au sol dans le Bois de Boulogne .L'éthylotest est à 3.22g/L. Il
présente une plaie de l’arcade sourcilière droite.
Mr L. a pour seuls antécédents son éthylisme chronique. Il ne prend aucun traitement.
Armée de courage je rentre donc dans le box numéro 6. Mr L est assis en tailleur sur son brancard. Il est
en train de chanter et de marmonner des paroles incohérentes. Cela fait sourire l’équipe paramédicale de
l’autre côté du couloir, car ils le connaissent bien. Moi, je ne souris pas…Je suis un peu perplexe et
effrayée face à cette situation...
Il a le faciès erythrosique, l’haleine oenolique, les conjonctives injectées. Comment aborder le patient ?
J’espère qu’il n’est pas agressif... J'espère qu'il est compliant ….Il n’est pas encore déshabillé...Mais
comment vais-je le déshabiller, moi, toute seule ?? Je suis un peu désemparée face au tableau.
De toute façon, je n'ai pas le choix, je me lance…
« Bonjour Mr L., qu’est ce qui vous amène ? »…Ma question est assez maladroite je l'avoue, car je savais
d'avance que la réponse ne serait pas fructueuse. En effet, Mr L. me « baragouine » des paroles
incompréhensibles et incohérentes, ce qui ne m'avance guère dans mon anamnèse. Je me résous à me
passer d'interrogatoire pour le moment !
Je me lance donc dans l’examen clinique, espérant plus de succès. Je tente d'inviter le patient à se
déshabiller, mais sans effet. Je finis par m'y atteler prudemment. Heureusement Mr L. se laisse faire
tranquillement.
Dans ce contexte d'ivresse aigue avec traumatisme crânio- facial, les enjeux principaux de mon examen
clinique sont d'éliminer un traumatisme crânien grave avec une potentielle hémorragie intra - cérébrale,
notamment l'hématome sous dural très fréquent chez le sujet éthylique, mais aussi d'explorer sa plaie du
scalp proche des structures nobles de l'oeil droit, et enfin de rechercher d'autres traumatismes associés.
Je réalise également un tétanos quick test afin de connaître son statut vaccinal contre le tétanos. Je
procède à l'examen neurologique complet et minutieux de Mr. L. Cet examen s’avère normal, sans déficit
sensitivo- moteur ni signe de localisation neurologique, ni argument pour une éventuelle crise convulsive
aigue. Je suis donc rassurée par la normalité de mon examen neurologique, mais surtout par le
comportement plutôt compliant du patient. J'ai pu mener mon examen clinique à bien sans heurts ni
frayeurs .Quant à la plaie de l'arcade sourcilière droite, elle est superficielle et ne nécessite que quelques
points de suture.
Je décide donc de suturer dans un premier temps puis je réaliserai un scanner cérébral sans injection
dans un second temps afin d'éliminer une hémorragie intra- cérébrale malgré la normalité de mon examen
neurologique, les hématomes sous- duraux sont souvent cliniquement insidieux.
Cependant, je m'inquiète de ce geste technique...Mes derniers points de suture réalisés remontent à mon
stage d'externe en chirurgie il y a 3 ans ! Par peur du ridicule, je n’ose demander à mon sénior de me
réexpliquer la technique... Et ce, d'autant plus que mes externes de DCEM2 défilent devant moi dans tout
le S.A.U. en suturant à la chaîne avec une grande aisance…Les urgences débordent de monde, je ne
vais pas déranger mon senior…Je décide de me lancer seule, en me disant que la technique et le doigté
vont vite me revenir en tête... Et si jamais j’avais un problème, je n'hésiterais pas à demander de l'aide.
L'infirmière m’indique où se trouve le matériel de suture. Je me retrouve face à une grande armoire pleine
de tout le matériel nécessaire. Que dois- je prendre ? Quel type de fil de suture choisir ? Comment ne rien
oublier ? Ces questions, qui pourraient paraître anodines pour la majorité des autres internes me
semblent tellement complexes et sans réponse !
Je décide de procéder par ordre afin de me munir du matériel nécessaire et surtout de ne rien oublier !
1ére étape : antisepsie de la peau, je me munis donc de sérum physiologique, de bétadine
dermique, de compresses stériles
2e étape : installation du champ stérile, je me munis donc de deux paires de gants stériles et d'un
champ perforé stérile
3e étape : anesthésier puis suturer, je me munis donc d'un flacon de xylocaine, d'une seringue de
10cc, d'une aiguille intramusculaire et d'un plateau de suture comprenant un porte- aiguille, une paire de
ciseaux, une pince a griffes ainsi que du fil non résorbable fin type ethilon 5.0 adapté aux sutures du
visage
4e étape : pansement, je me munis donc de strips et de pansements
Je retourne auprès de Mr. L dans le box 6 qui dort à présent. La suture sera peut- être plus simple dans
ces conditions...Je m'installe confortablement afin de mettre toutes les chances de mon côté pour la
ussite de cette suture... Je m'assois à hauteur de la plaie de Mr. L aidée d'un spot lumineux pour bien
exposer la plaie.
Je réalise tout d'abord l'antisepsie cutanée à l'aide d'une compresse stérile imbibée de sérum
physiologique puis de bétadine dermique. Puis je laisse sur la plaie une compresse imbibée de bétadine
afin de protéger la plaie de manière stérile pendant que j'installerai mon champ chirurgical. J'explique à
Mr. L tout ce que je vais faire afin d'éviter toute opposition et tout mouvement brusque de sa part
susceptibles de me déstabiliser. J'enfile les gants stériles puis je dispose le champ perforé stérile en
regard de la plaie. Je ne crains qu'une chose, que Mr L. ne bouge et ne fasse tout tomber. Alors je
continue de lui parler...
Je me munis de la seringue préalablement remplie de xylocaine et j'injecte de part et d'autre de la plaie
une quantité généreuse d'anesthésiant local au sein des berges, afin de m'assurer au mieux de la
tranquilité de ma suture ! Mr L. gémit aux piqûres de xylocaine et manque de destériliser mon champ de
son mouvement de main!Heureusement, il m'écoute lui parler et le rassurer. L'anesthésiant agit en
quelques minutes.
En attendant, je change de gants de stériles et désinfecte à nouveau la plaie avec de la bétadine
dermique.
Puis je débute enfin ma suture, j'enfile avec précaution et la main tremblante mon fil sur le porte aiguille
comme on me l'a appris d’après mes souvenirs.
Je débute par le milieu de la plaie , je pique avec la pointe de mon aiguille de manière perpendiculaire au
plan cutané à environ 5 mm de la berge homolatérale puis je rejoins la berge contro- latérale en traversant
le plan cutané superficiel épidermique pour en ressortir de manière symétrique.
Mr L. me dit qu'il n'a rien senti. Je suis un peu plus apaisée. Le premier point était celui que je redoutais
le plus ! Je réalise mon premier noeud simple afin de rapprocher les berges. Après quelques manoeuvres
hésitantes, je retrouve enfin la technique du noeud. Voila mon premier point de fait ! J'éprouve un grand
soulagement ! 15 minutes pour un seul point de suture tout de même ! La suite se déroule sans incidents,
en prenant peu à peu confiance en moi.
Le pansement fait, je félicite Mr L. pour son calme et sa coopération, et ma cicatrice n'est ma foi, pas si
moche que cela.
Mr L. gardera ses points de suture durant 5 jours, puis il faudra les faire retirer par une infirmière.
Cela m'intrigue de savoir quel sera le résultat esthétique de ma suture. Cependant, comme souvent aux
urgences, nous revoyons très peu souvent nos patients...
PROBLEMES POSES PAR CETTE SITUATION
-Me retrouver seule face à un geste technique fréquent en soins de première ligne que je ne maîtrise pas
- Effectuer avec sécurité la technique de suture
- Effectuer avec sécurité la technique de suture chez un patient peu compliant , attitude et comportement
à adopter face à un sujet alcoolisé potentiellement agressif
OBJECTIFS DE RECHERCHE
- Quels sont les critères de gravité d’une plaie aux urgences ?
- Quelles sont les indications de la suture aux urgences ? Quand ne doit- on pas suturer ?
-Quelle doit-être la préparation cutanée d’une plaie à suturer aux urgences pour en limiter le risque
infectieux ?
- Quelle est la technique de suture ?
RECHERCHE DOCUMENTAIRE
PRISE EN CHARGE DES PLAIES AUX URGENCES
Une plaie se définit comme une effraction de la barrière cutanée par un agent vulnérant.
Les plaies représentent environ 13% des admissions au service des urgences, les situant dans les
premiers rangs des motifs de recours. Elles intéressent principalement la tête, le membre supérieur, et le
membre inférieur.
La prise en charge d'une plaie a pour but de favoriser la cicatrisation et d'en limiter les conséquences
esthétiques. Lorsqu'elle est possible, la suture est la meilleure méthode pour fermer une plaie ou une
perte de substance.
Le traitement optimal suppose que l'urgentiste maîtrise parfaitement l'étape diagnostique initiale, les
techniques anesthésiques et de sutures utilisables en dehors du bloc opératoire.
L'analyse du mécanisme lésionnel, le siège de la blessure, les signes cliniques initiaux et les données de
l'exploration de la plaie devront aboutir à une programmation des soins faisant appel au spécialiste
chaque fois que nécessaire.
Ainsi, il est optimal dans la formation d'un interne de médecine générale en stage aux
urgences de maîtriser la technique de suture et de savoir explorer rapidement une plaie afin d'en
évaluer la gravité potentielle. J'ai su apprécier le siège de la blessure et réaliser un examen
clinique minutieux afin d’éliminer une urgence grave. Cependant, lors de mon interrogatoire,
j'aurais dû m'enquérir du mécanisme lésionnel, qui conditionne le risque infectieux de la plaie et
sa potentielle gravité septique.
QUELS DOIVENT ETRE L'ORGANISATION ET L'AMENAGEMENT DES LOCAUX ?
L'aménagement des locaux des services d’urgence doit comporter une salle consacrée aux
gestes techniques. Dans tous les cas, la suture doit être possible aux urgences. Une source d'éclairage
mobile et orientable est indispensable et le mobilier doit permettre une installation confortable du malade
et du médecin.
Ainsi, malgré la pression des urgences et le souci de délivrer rapidement les soins,
l'interne ne doit pas hésiter à prendre le temps de s’installer correctement et confortablement
malgré l'agitation ambiante des urgences et le stress auquel il est soumis.
QUAND PEUT-ON SUTURER UNE PLAIE AUX URGENCES ?
La suture immédiate est indiquée chaque fois que possible lorsque les deux conditions suivantes sont
réunies :
la plaie ne présente pas de contamination bactérienne inquiétante (vue tôt, mécanisme non
septique) ;
son parage a pu être réalisé de fon satisfaisante (excision des tissus contus voués à la
nécrose, et ablation des corps étrangers).
Lorsqu'elles ne sont pas réunies, il ne faut pas suturer la plaie d’emblée.
Si l’examen clinique ou l’exploration soigneuse de la plaie mettent en évidence des lésions d’éléments
nobles, la plaie est confiée au chirurgien.
Si l’exploration ne peut pas être complète ou laisse persister un doute, un avis chirurgical est nécessaire.
Ainsi, j'ai sutu d'emblée la plaie de Mr L. après avoir éliminé une potentielle
contamination septique de cette plaie qui était récente, après avoir recherché un éventuel corps
étranger et après avoir éliminé toute atteinte d'élément noble.
Les plaies à ne pas suturer sont :
- Les plaies présentant des critères de gravité :
-Lésions articulaires, tendineuses ou vasculo-nerveuses
-Syndrome infectieux systémique ou infection loco-régionale extensive ou locale non controlée
par antibiothérapie
-Morsures complexes
-Plaies par injection sous pression, plaies pénétrantes ,plaies orificielles
- Les plaies nécessitant une prise en charge spécialisée :
-une plaie du globe oculaire est une urgence ophtalmologique
-les plaies des paupières dépassant le plan cutané ou intéressant leur bord libre
-une embarrure, une extériorisation de substance cérébrale ou une fuite de liquide céphalo-
rachidien imposent le transfert en milieu neuro - chirurgical.
- les plaies profondes des joues, les plaies extensives de la langue et de la cavibuccale, les
plaies transfixiantes de l'oreille et du nez
- les plaies avec perte de substance
Ainsi les plaies septiques et les plaies profondes constituent des urgences chirurgicales
graves dont l'exploration doit être alisée en urgence au bloc chirurgical. Par ailleurs, il est important
de connaître les plaies crânio- faciales nécessitant une prise en charge spécialisée en urgence car le
pronostic fonctionnel, parfois vital est en jeu, notamment le cerveau et l'intégrité de la boîte
crânienne, L'oeil et ses structures , les autres organes sensoriels et les plaies à risque septique
Dans tous les autres cas, la plaie peut être prise en charge aux urgences.
Par exemple: les plaies de la face dermo -épidermiques de taille inférieures à 4-5 cm, les plaies de
l'arcade sourcilière, les plaies du cuir chevelu non extensives, les plaies cutanées ou muqueuses
simples des lèvres n’entamant pas le muscle orbiculaire. Une plaie transfixiante de lèvre peut être prise
en charge par un urgentiste expérimenté, les plaies de bord de langue et de la cavité buccale de faible
étendue Les plaies linguales punctiformes peuvent ne pas être suturées de même que les plaies du frein
de lèvre ou de langue
Si le blessé présente une plaie contuse, souillée ou ancienne, la prise en charge initiale est identique
mais la suture n’est envisagée qu’après parage.
QUEL EST LE MATERIEL MEDICAL NECESSAIRE ?
Le matériel d'exploration et de suture est constitué d'un plateau stérile standard comprenant :
-un porte-aiguilles
-une pince à griffes,
-une pince hémostatique,
-une paire de ciseaux,
-une cupule pour l'antiseptique,
-des compresses stériles
-un champ perforé stérile,
-le matériel pour l'anesthésie locale (cupule, seringue à usage unique, aiguille intradermique ou
intramusculaire),
- du fil
-un antiseptique
Les seules aiguilles utilisables pour suturer la peau sont les aiguilles à section triangulaire
Les fils type monofilaments non résorbables sont le plus souvent employés pour les plans cutanés
superficiels
Ainsi, je m'étais munie du bon matériel nécessaire à l’exploration et à la réalisation de ma
suture dans de bonnes conditions. L’existence de plateaux de suture stériles prêts à l’emploi
facilite une prise en charge rapide et optimale aux urgences.
TECHNIQUE DE SUTURE
Les berges d’une perte de substance doivent être rapprochées par des points assurant un bon contact
tissulaire en profondeur et en superficie. Tout décalage doit être évité. . Il existe toujours une rétraction
cicatricielle le long de la section qui a tendance à invaginer disctement la cicatrice.
La technique des points sépas simples est la plus simple et la plus courante aux urgences : les points
chargent l’épiderme de façon symétrique sur chaque berge
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