Cela ne risque-t-il pas de créer des divisions au sein de la médecine générale,
contrairement au souhait d'unité de l'Ordre ?
J.R. Pas du tout ! Si vous appelez médecin généraliste un praticien qui ne fait pas de
médecine générale, mais qui en a la qualification ancienne, c'est la confusion totale ! Or, nous
sommes pour la clarté. Il n'y a aucun désir de nuire aux homéopathes ou aux angéiologues,
par exemple, mais il faudra à chaque fois trouver le cadre adéquat qui corresponde à quelque
chose de clair, pour le public aussi d'ailleurs. Quel intérêt pour le patient de savoir que le
praticien qui lui pique les veines est un pseudo-généraliste ?
La clarification sera parfois difficile à faire : certains omnipraticiens tout en exerçant
vraiment la médecine générale, pratiquent aussi l'homéopathie, l'angéiologie ou
l'acupuncture, etc.
J.R. Oui, mais leur pratique essentielle reste la médecine générale. Un cardiologue qui
s'occupe surtout de personnes âgées n'en devient pas pour autant gériatre ! Il faut avoir tout de
même une certaine souplesse.
Cette reconnaissance de la qualification en médecine générale ne peut donc se faire qu'
individuellement. Combien de temps cela va-t-il prendre ?
J.R. Cela dépend qui le fait. Nous, nous avons deux échelons. Le premier, le plus spécifique,
est celui des commissions de qualification en médecine générale que nous avons créées,
prévoyant ainsi un peu les choses. Mais ces commissions naturellement ne peuvent pas avoir
une action massive. Elles examinent le contenu de chaque dossier, c'est un travail minutieux
et une lourde responsabilité. Le deuxième échelon – celui sur lequel nous insistons et que
j'espère de tout coeur voir retenu – ce sont les conseils départementaux de l'Ordre, auxquels
les médecins pourront s'adresser et qui auront à dire si le Dr Untel pratique réellement ou non
la médecine générale. C'est l'échelon le plus près du terrain et le plus apte à s'occuper de cela ;
ce n'est pas une commission de six membres installée à Paris qui va savoir quel métier fait
exactement tel médecin.
Le critère d'ancienneté dans l'exercice de la médecine générale proposé par Pierre-Jean
Lancry pour la qualification vous semble-t-il pertinent ?
J.R. Absolument. D'ailleurs, c'est une notion européenne. Prenons le cas où nous devons
reconnaître un médecin lituanien, qui est anesthésiste, et qui veut s'installer en France comme
tel. En examinant son dossier, l'Ordre s'aperçoit que le diplôme d'anesthésiste s'obtient dans
son pays en un an, et qu'il ne peut donc l'accepter. Pourtant, la directive européenne nous
amène à dire que nous considérons effectivement comme anesthésiste ce médecin lituanien,
parce qu'il a exercé pendant au moins trois ans, de façon officielle, son métier d'anesthésiste
chez lui. Imaginez l'absurdité qu'il y aurait à reconnaître ce médecin lituanien comme
anesthésiste, et à ne pas reconnaître, chez nous, comme spécialiste en médecine générale un
médecin qui en serait à quinze ou vingt ans d'exercice… Nous sommes obligés d'accepter
cette logique européenne.
Cités par le rapport Lancry, les critères retenus par la commission de qualification du
Cnom concernent quatre domaines précis. Doit-on les réunir tous ou seulement un ou
deux pour obtenir la qualification ?