EXTRAITS DE PRESSE
Gouverner c’est servir, Jacques Dalarun
Presse écrite
La Croix, 8 avril 2013
Management et église
Dans un ouvrage récent (3), un historien montre l'originalité et la créativité de gouvernance
de certains lieux d'Église comme l'abbaye de Fontevraud, que dirigeait une femme non
consacrée : c'était au XIIe siècle !
Les institutions du XXIe siècle feraient bien de se montrer aussi créatives en matière
d'organisation du pouvoir.
Maurice Thévenet
[3] J. Dalarun, Gouverner, c'est servir : essai de démocratie médiévale. Alma Editeur, 2012.
La Vie, 21 mars 2013
La pauvreté exigeante de François d'Assise
Le nouveau pape a pris pour guide une figure qui rayonne depuis huit siècles sur la
chrétienté. Retour sur la vie de ce saint pour qui humilité, amour et service des pauvres
sont indissociables de l'attachement au Christ et à la Création.
« La pauvreté matérielle et la pauvreté spirituelle, en tant que renoncement à l'orgueil et
remise confiante à Dieu, ne sont absolument pas disjointes chez François. Il pouvait entrer
dans des colères noires quand des frères cédaient à la tentation du confort », rappelle
Jacques Dalarun, médiéviste, directeur de la publication des Sources franciscaines (Cerf) et
auteur de Gouverner c'est servir. Essai de démocratie médiévale (Alma). Un livre dans lequel
il démontre que la détestation de l'argent du Poverello va de pair avec sa conception du
pouvoir comme service et non comme domination.
À l'image du Christ lavant les pieds des apôtres. Refusant de se faire appeler abba (père) par
ses disciples, le va-nu-pieds d'Assise se présentait donc à eux comme leur « mère ». Pour
autant, et contrairement à une idée reçue, plutôt que de s'opposer à l'autorité ecclésiale,
l'époux de dame Pauvreté a toujours promu l'obéissance à ses représentants. En premier
lieu les papes, Innocent III puis Grégoire IX, avec qui le saint entretint des relations
confiantes. « Il est vrai, souligne Jacques Dalarun, que ces derniers ont compris la
pertinence du message et de l'action de François, en réponse à la demande des fidèles. Et ils
ont su y donner une suite favorable, non sans renforcer en même temps l'autorité papale. »
De fait, à la différence des jésuites - leur fondateur, Ignace de Loyola, était admiratif de
François et s'est inspiré de lui -, les franciscains n’ont guère été en butte à la papauté. Mais
ils se sont violemment querellés entre eux s la mort de leur fondateur. Le courant dit des
spirituels, partisans d'une vie itinérante, supposant à celui dit des conventuels, promoteurs
d'une vie plus structurée en couvent, garante a leurs yeux d'une meilleure efficacité
apostolique « On a l'illustration frappante de la tension entre la fonction charismatique
ou prophétique de l'Église, et sa dimension institutionnelle, bureaucratique Ce conflit entre
l'enseignement de Jésus et sa délicate mise en œuvre est palpable s les Actes des apôtres »,
commente encore Jacques Dalarun
[…]
Jean-Claude Noye
Evangiles aujourd'hui, mars 2013
DES SŒURS SERVANTES A SAINT-DAMIEN. ET APRES ?
Dans son dernier ouvrage Gouverner c'est servir (Alma éditeur), Jacques Dalarun montre
qu'à Saint-Damien, il a existé très t (dès 1220), une partition de la communauté entre des
« dames » ou « sœurs » d'un côté, et des servantes ou « sœurs servantes » de l'autre.
Le Télégramme, 29 janvier 2013
Spiritualité. Cinq règles monastiques à adopter
Se retirer des turbulences du monde, s'offrir le luxe du temps et du silence, plonger en soi
pour redonner du sens à sa vie... Ce n'est pas un hasard si les retraites spirituelles
connaissent un succès croissant. L'ascèse monastique serait-elle le nouveau Graal ? Elle a en
tout cas donné des clés […] à l'historien Jacques Dalarun qui, dans « Gouverner c'est servir
» (Alma Editeur, 2012), voit les ordres religieux comme « les laboratoires de nos
démocraties ». Ces vies vouées à la spiritualité, construites sur les deux piliers que sont
l'intériorité et la communauté, nous ont également inspirés. Parce qu'elles peuvent aider à
donner une assise à notre quotidien, plus d'attention à nos relations, nous avons choisi
d'adapter à la vie profane les cinq grands principes communs à toutes les règles
monastiques, occidentales et orientales.
Une ascèse à pratiquer avec constance et modération, comme le précise saint Benoît, qui
invite son lecteur à « n'établir rien de rigoureux ni de trop pénible ».
Flavia Mazelin Salvi
Religions et Histoire 47, décembre 2012
Jacques Dalarun
Ancien directeur des études médiévales à lÉcole française de Rome puis directeur de
l’Institut de recherche et d’histoire des textes (IRHT CNRS), Jacques Dalarun est
actuellement directeur de recherche au CNRS. Ses travaux passés et présents portent
principalement sur l'érémitisme et le monachisme au Moyen âge, les expériences religieuses
féminines dans l’Italie des XIII et XIV siècles et les grandes figures franciscaines.
Inventer la démocratie
Le monastère médiéval, un laboratoire d'expérimentation politique ?
DANS LES DEUX ANNÉES à peine écoulées, l'espérance démocratique a fleuri en divers
points du globe, de manière imprévue, spontanée et buissonnière. Comment ne pas s'en
réjouir ? On connaît la boutade de Winston Churchill : « La démocratie est la pire forme de
gouvernement à l'exception de toutes les autres formes qui ont été essayées au long des
temps. » À l'abri de cette évidence, le régime démocratique est un des rares sujets qui fasse
consensus dans nos démocraties occidentales. Et comme tous les consensus, il est source
d'interrogation. On s'est interrogé sur les origines de la démocratie. Les premières traces en
ont été identifiées à Sumer ou en Inde. Athènes en offre, au V siècle avant notre ère, la
forme classique, le paradigme absolu, éclipsant même celui de la publique romaine. Puis
vient le temps des oublis et des balbutiements, avant le retour de la démocratie à l'époque
des Lumières, avec le double flambeau des États-Unis d'Amérique et de la Révolution
française. Ainsi contée, la geste prend vite des allures téléologiques résolument occidentales,
l'histoire de la démocratie serait celle des résurgences successives d'une idée transhistorique,
d'un idéal absolu dont il n'y aurait qu'à tenter de s'approcher sans jamais pouvoir atteindre
sa perfection intrinsèque. La réalité historique n'est pas ainsi faite. Au sein de la seule
Union européenne, nous classons sous le terme générique de « démocratie » une
multiplicité de régimes : régimes parlementaires ou semi-présidentiels, au sein de
républiques aussi bien que de monarchies, dans des États centralisés ou fédéraux - ce qui
rappelle que chacun de ces régimes se clamant de la démocratie est, en fait, la résultante
d'une expérimentation particulière. Pour que l'histoire offre, sur ce point, des clés
d'intelligence du présent, plutôt que de sonder les origines de la démocratie dans l'absolu, il
importe de scruter son éclosion, les conditions et les modalités d'une naissance souvent
répétée et toujours singulière.
Le Moyen Âge occidental est d'ordinaire considéré comme une sorte de trou noir de la
démocratie. Certes, on ne manquera pas de citer telle ou telle assemblée nordique des
hommes libres, le régime communal l à la renaissance urbaine ou le début du
parlementarisme anglais avec la Grande Charte, concédée par Jean sans Terre aux barons en
1215. Mais, dans la sphère civile, ces tentatives limitées ne pèsent guère face à la suprématie
du principe dynastique : partiellement entravé dans l'Empire germanique par le pouvoir
électif des grands seigneurs, il s'affirme sans ambages dans les monarchies et, par le biais de
la féodalisation, s'insinue jusqu'aux plus infimes détenteurs d'une parcelle de la puissance
publique. Le problème se posait tout autrement dans la sphère religieuse. Sans doute les
atermoiements sur le célibat des prêtres laissèrent-ils se constituer de modestes lignages
cléricaux, sans doute le népotisme joua-t-il fréquemment un rôle dans la promotion des
évêques, des abbés ou des papes, mais, d'une manière générale, la chasteté à laquelle
l'appareil ecclésial avait choisi de se soumettre rendait par principe impossible une
transmission des charges par le simple jeu de la filiation biologique.
Il fallut donc inventer. L'exemple venait de l'Église primitive. Pour remplacer Judas au sein
du collège des apôtres, deux candidats avaient été présentés : Joseph, appelé Barsabbas, et
Matthias. « En priant, ils dirent : « Toi, Seigneur, qui connais les cœurs de tous, montre
lequel tu as élu de ces deux-là pour assumer ce ministère et cet apostolat dont Judas s'est
détourné pour aller en son lieu. « Ils tirèrent au sort ; et le sort tomba sur Matthias, qui fit
nombre avec les onze apôtres. » (Actes I, 24-26)
Sous le terme d'« élection », on peut donc entendre diverses pratiques et non notre seul
scrutin. Dans la tradition biblique, aussi bien hébraïque que chrétienne, l'élection est
fondamentalement un choix de Dieu : le « peuple élu », les « peu d'élus » qui se détacheront
des « beaucoup d'appelés ». Dans l'Église médiévale, ce sens ne se perd jamais : la décision,
d'où qu'elle vienne, doit refléter la volonté divine. L'élection n'est toutefois qu'une étape
dans la procédure de nomination. Elle doit être confirmée par une consécration et
boucher sur une investiture. La désignation aux charges subalternes était souvent laissée à
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