Le Dsi en jongleur chinois
Technologie, réseaux, sécurité, développements… Face à leurs évolutions, comment
maintenir la continuité des services rendus par l’informatique ? Quelques réponses
donnés par Bernard Laur, consultant en stratégie informatique.
Lorsque l’on ne tient pas seulement compte de la première facture, mais de toutes celles qui suivent (formation,
assistance, administration...) le poste de travail est l’élément le plus onéreux d’une architecture informatique. A
150€ l’heure de technicien, on a vite fait de mettre en l’air l’économie d’un projet. Certains choix peuvent s’avérer
très pénalisants.
On peut citer à cet égard l’exemple de la ville de Munich. Son projet de migration de ses postes de travail vers
Linux a déjà pris un an de retard. Menée dans deux ou trois ans, on peut penser qu’une telle opération se
passera sans difficulté. Aujourd’hui, ça marche, mais seulement à 90%. Les performances du noyau ne sont pas
en cause. On manque simplement encore de code d’environnement, et pour les 10% restant, il n’y a pas les bons
drivers, ou le bios pose problème… Souvenons-nous qu’à ses débuts, windows NT ne marchait que sur machines
neuves. Il a mis 10 ans à percer et à devenir compatible avec tous les drivers des machines. On le critique parce
qu’il serait « trop gros ». Tellement gros qu’il va fonctionner peut-être à 96%. 96% contre 90%, c’est ce qui fera
toute là différence des coûts, et de l’économie de deux projets.
Depuis 15 ans, l’informatique s’est popularisée et les discours sur l’informatique, en parallèle, sont devenus
simplistes. Mais laisser s’appliquer les règles de conduite de l’informatique individuelle dans l’entreprise conduirait
à un résultat dantesque.
En informatique grand public, on ne gère pas un parc, on remplace tout. Souvent aussi, on perd tous. Des années
de photos par exemple. L’informatique grand public ne connaît pas le problème de l’informatique de l’entreprise :
faire vivre dans le temps ses programmes et ses données, à coup de migrations et de gestion d’héritage. Ce qui
se traduit presque toujours par : gérer une diversité d’architectures.
Le directeur informatique ressemble à un jongleur chinois avec ses assiettes. Il doit en ajouter sans cesse, sans
casser celles qui tournent déjà. L’hétérogénéité du parc est un état de fait : il n’y a pas les budgets pour tout
changer en permanence. Il y a des solutions intéressantes qui permettent de reprendre une partie de l’héritage,
le déport d’interface par exemple, mais il n’existe pas de solution uniforme : technologies et architectures sont
multiformes.
Bien sûr, on pourra trouver
le
cas de la nouvelle architecture-panancée et celui de l’entreprise qui a réussi à tout
migrer en même temps. Mais le cas général reste celui d’une dualité entre une partie de l’architecture qui
récupère l’existant et la fait tourner, tandis qu’une autre partie est tournée vers l’avenir. Il faut faire cohabiter
mainframes et peer-to peer, en même temps que des architectures client/serveur à plusieurs niveaux.
Puissance, sécurité, développements
Les cycles de l’innovation se sont beaucoup accélérés. Tous les équipements offrent une puissance suffisante par
rapport aux usages que l’on peut envisager d’en faire. Les derniers smartphones ont la puissance des PC d’il y a
3-4 ans, avec des disques durs de 5 Go. A comparer avec les 3 Go de données d’un poste de travail classique. Le
Pda apparaît davantage comme un hybride. Même s’il est meilleur en entrées/sorties, il est en perte vitesse sur
le marché. Sans supprimer le PC, le smartphone permettra de consulter celui-ci, où que l’on soit. L’absence de
clavier est un désavantage, pour aujourd’hui. Mais lorsqu’on montre un blackberry à « des jeunes », c'est-à-dire à
ceux qui formeront le personnel des entreprises dans quelques années ils demandent : « pourquoi un clavier
azerty ? »
Les réseaux deviennent pervasifs et l’internet synchrone. Dans sa nouvelle version, la livebox de France Telecom
bascule du Gprs au wifi. Certains opérateurs nordiques proposent de passer par Skipe. Le Pc portable de Fujitsu
intègre un décodeur Tnt. Sony voit ses ventes percer grâce à la qualité de ses écrans. Le poste de travail se doit
d’être mobile, multifonctionnel, avec « tout dans la boîte ».
La montée en puissance des réseaux et des serveurs laisse apparaître une croyance dans des « postes de travail
légers » où l’on trouverait moins de choses et qui seraient éventuellement moins puissants. Une diminution de la
puissance ? Cela ne s’est encore jamais vu. Et il faut être très prudent. Faire tourner un OS demande de la
puissance. Obtenir une bonne restitution aussi. Les économies de bande passante, pour éviter les engorgements
et les pics, demandent de la compression. La sécurisation des postes, un gros enjeu, demande elle aussi
beaucoup de compression et du cryptage.
Auparavant, les programmes étaient compilés, pour un couple machine/Os. Aujourd’hui, ils deviennent
indépendants. Ils tournent sur n’importe quelle machine, avec n’importe quel Os. Ils sont interprétés sur la
machine, qui devient plus gourmande en puissance et en mémoire. La portabilité des applications repose sur leur
capacité d’interprétation, elle demande des postes de travail sophistiqs. Tout concourt à la nécessité de
disposer de puissance.
La problématique est celle du processus, de la continuité dans la chaîne du traitement de l’information, sans
reprise manuelle. D’où l’importance croissante du middleware, qui assure l’interopérabilité entre machines,
applications, réseaux et permet de lier des systèmes auparavant incompatibles entre eux.
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