Les TIC à l`université : potentiel des outils et conditions d

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Les TIC à l’université : potentiel des outils et
conditions d’accès à l’autonomie de
l’apprentissage
IRRUPTION DE L’INSTRUMENTATION DE LA CONNAISSANCE COMME
PROBLEME
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Jusqu’ici, la description des enseignements à l’université était fondée pour l’essentiel sur la définition :
• des territoires et des contenus scientifiques,
• des objectifs et des méthodes disciplinaires,
• des critères de sanction de la compétence chez les chercheurs, les enseignants et les
étudiants.
La maîtrise des processus et des outils de connaissance était considérée comme acquise ou allant de
soi.
Avec les technologies de l’intelligence : rupture dans les modes de diffusion et de traitement, mais
aussi de production et d’acquisition des connaissances.
Mutation des outils de connaissance :
transformation des produits, permanence des processus
• Les TIC ne transforment pas les processus cognitifs de base mais les moyens et conditions socioéconomiques de production et d’acquisition des connaissances.
• Cette transformation modifie les pratiques et les usages de la vie courante, mais aussi
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l’épistémologie et les conditions de production et de validation de la connaissance savante.
Modification des conceptions de temps, espace et causalité,
des modèles de rationalité, de
raisonnement
Interactivité dynamique, multimodalité sensorielle, opérativité et manipulabilité directe des formes,
accessibilité : la synergie de ces propriétés dans la représentation symbolique des TIC crée de
nouvelles relations à la connaissance.
 D ’une vision descriptive à une vision performative.
LES TIC, OUTILS AMPLIFICATEURS DE PROCESSUS
• TIC : d ’abord des outils fonctionnels du voir et du faire qui nous attaquent directement au niveau
neurophysiologique.
• Amplificateurs cognitifs qui catalysent la puissance et la vitesse de nos fonctions d’action,
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perception, représentation et affect.
Mais amplificateurs hyperdynamiques qui tendent à privilégier les processus aux dépens des
contenus et la conduite de l’action (les moyens) aux dépens de la réflexion (les fins).
--> Ambivalence des TIC liée à l’ambivalence (puissance et artifice) de leurs représentations virtuelles
du réel :
– Outils d’action remarquables : pour agir, interagir, explorer, expérimenter, chercher de
l’information, échanger, inventer;
– Outils de réflexion pauvres et même parfois contre-performants. La performance immédiate tend
à masquer les coûts, les conditions et limites de validité et les conséquences à moyen terme de
son efficacité.
DE LA RAISON LINEAIRE A LA RAISON RETICULAIRE
• Depuis toujours, l’évolution des modes de production et de diffusion des connaissances se fait au
travers des outils, équipements, méthodes d’exploration, recueil et de validation.
• Réseau : support typique des formes auto-organisatrices complexes : interactives, dynamiques,
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réflexives, fluctuantes, incertaines. Avec les TIC, les acteurs de l’action, leurs situation et leurs aléas
entrent comme éléments dans les processus mêmes de conceptualisation et de théorisation.
--> Cyber-pensée : une rationalité de type réticulaire à logique floue, non exclusive, non
hiérarchique, non linéaire.
--> Fonctionnement par associations, agrégats et nœuds de relations, par « modèles » composites
plus ou moins vérifiables et réfutables, par conceptions de type collaboratif et inter-disciplinaire
déterminées par leurs thèmes et leurs objets.
Enseignement des contenus vs pédagogie des processus
• Remise en cause des modèles classiques d’enseignement par transmission fondés sur la culture
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du livre, le discours expert du maître, l’autorité des textes consacrés par l’expérience passée (cf :
« crise de l’école » dans tous les pays).
Recours à une pédagogie de formation des processus cognitifs: souhaitable mais complexe et
difficile à mettre en oeuvre.
Pourquoi? En éducation :
– Efficacité des TIC comme outils d’apprentissage : toujours pas démontrée à grande échelle :
gouffre entre réussites locales et globales.
– Coûts exorbitants des équipements, des documents et des formations des personnels :
toujours pas résolus.
– Conceptualisation des théories et méthodes d’instrumentation de la connaissance et de
l’apprentissage par TIC : toujours pas au point.
• -> Risques de passer de l’excès de structure du discours magistral à l’excès d’activisme des
outils.
Un paradoxe de l’Enseignement Supérieur
• L’utilisation efficace et autonome des TIC nécessite des compétences socio-cognitives de haut
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niveau autrefois exigées des seuls cadres supérieurs : autonomie, initiative, capacité à gérer
complexité et incertitude, à collaborer, apprendre et s’adapter « tout au long de la vie ».
Le développement massif de ces compétences devient un enjeu politique et industriel majeur et la
maîtrise des TIC un facteur d’exclusion économique et social, entre pays et dans chaque pays.
A l’université, la capacité des étudiants à accéder au travail autonome et à la forme académique de
la connaissance sont deux facteurs décisifs, à l’origine de nombreux échecs.
Pourtant ces compétences sont considérées comme des prérequis hors-discipline qui relèvent de
la pédagogie et de la didactique et ne sont pas à assumer par l’enseignement proprement dit.
Un paradoxe des TIC
• Les TIC actuelles ont tous les potentiels techniques nécessaires pour instrumenter le
développement des processus cognitifs qui conditionnent en amont les capacités de travail autonome
et de formalisation conceptuelle.
• Mais en raison de leur déséquilibre de nature entre fonctions de représentation-action et fonctions de
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réflexion, elles tendent plutôt - chez les débutants - à favoriser les apprentissages de premier ordre
(empiriques, pratiques, dépendants du contexte) par rapport aux apprentissages de second ordre
(abstraits formels).
La recherche montre que par elles-mêmes, les TIC servent surtout à ceux qui savent déjà s’en
servir (les experts et les bons élèves) et qu’elles présupposent acquises plutôt qu’elles ne suscitent
les fonctions cognitives nécessaires à leur usage optimal.
Des résultats de recherche mitigés
• OUI, les TIC peuvent, à tous les niveaux, améliorer certaines modalités cognitives, psycho, sociales
de l’apprentissage;
• NON, sauf pour les utilisateurs déjà experts, elles ne peuvent pas le faire seules, ni en-dehors de
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conditions techniques, institutionnelles, pédagogiques, également observées depuis longtemps en
situation d’enseignement traditionnel.
OUI : les TIC peuvent aider à passer d’une pédagogie de transmission des connaissances à une
pédagogie de construction des processus cognitifs qui les rendent possibles.
NON, elles ne le font pas à grande échelle en raison de :
– la faiblesse générale des conceptions de l’apprentissage qui empêche d’exploiter au mieux les
potentiels des outils.
– la sous-estimation des contraintes de l’innovation qui entraîne à plaquer du neuf sur des
situations inchangées.
Des confusions conceptuelles à réduire
. Interactivité technique (réactivité d’un dispositif lui permettant de s’adapter automatiquement à des
stimuli externes),
Interaction humaine (influence réciproque des actions et comportements d’individus ou groupes
d’individus dotés de sens et d’intention).
-> C’est l’interaction qui pilote l’interactivité et non l’inverse.
. Information (description et organisation rationnelle de données et procédures objectives, matérielles et
symboliques),
Savoir(s) ou connaissances (information finalisée, décrite dans des discours et documents
socialement validés,
Connaissance (processus subjectif interne d’intériorisation des informations et des savoirs par un
individu et état qui en résulte ).
 C’est la connaissance en tant que processus individuel-collectif qui produit l’information et les
connaissances et non l’inverse.
Des discontinuités à surmonter
• Rupture entre savoirs sociaux externes et connaissance interne des individus. La transformation de
l’un en l’autre constitue l’objet même de l’apprentissage (Psychologie du développement)
• Rupture entre compétence cognitive des experts et compétence des novices. Le passage de l’un à
l’autre explique les problèmes propres à tout apprentissage (Psychologie cognitive).
• Rupture entre les divers espaces de représentation symbolique qui constituent un environnement
d’apprentissage, avec ou sans TIC
– espace-tâche (description objective par l’enseignant expert, du domaine et de l’activité à réaliser)
et espace-problème (interprétation par l’expert des stratégies à mener par le débutant pour
réaliser la tâche et aussi interprétation de cette interprétation par le débutant).
– espace-navigation (espace symbolique des objets, actions et parcours aménagés par l’expert à
l’intention du débutant et pilotage effectif par ce dernier de son propre apprentissage à l’intérieur de
cet espace).
Des transitions cognitives à assurer
• Les difficultés de la transition du premier ordre (pratique) au second ordre (théorique) de la
connaissance sont bien repérées par la recherche. Elles peuvent servir de repères aux conceptions
de formation par TIC . Transitions :
– des objectifs immédiats du faire et du réussir (recherche des effets) au objectifs différés du
comprendre et du réfléchir (recherche des causes et autres relations sous-jacentes),
– de l’abstraction empirique spontanée à l’abstraction conceptuelle formalisée,
– du pilotage cognitif au pilotage méta cognitif de sa propre conduite d’apprentissage,
– des méthodes locales d’analyse aux approches globales synthétiques des contenus, structures et
procédures du domaine.
TIC en éducation : processus d’autonomisation et médiation humaine
• Les pédagogies interactives sont des pédagogies du processus, centrées sur l’activité des
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apprenants. Elle prennent en charge la formation des structures et fonctions cognitives psychologiques et sociales, individuelles et collectives - qui conditionnent en amont l’accès au second
ordre « savant » de la connaissance.
Les TIC ont toutes les propriétés nécessaires pour instrumenter une pédagogie des processus et
la transition vers la connaissance savante. Mais elles ne le font pas seules.
Pour les débutants et semi-débutants, il faut un médiateur humain :
– pour apporter sens, direction et distance réflexive à l’activité spontanée des apprenants,
– pour développer le niveau méta-cognitif de l’autorégulation cognitive qui permet d’accéder à
l’autonomie.
Potentiels des outils et apprentissage humain
• La technicité des TIC est largement en avance sur nos capacités à en faire un usage correct et
approprié.
• La définition de : « qu’est-ce qu’un usage approprié des TIC en éducation » reste à faire. Elle ne
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relève pas seulement de la rationalité technique, mais surtout et d’abord de la rationalité des conduite
humaines, elle-même pilotée par une vision de la société et de l’avenir que l’on désire aménager.
On a encore besoin de beaucoup de recherche et de réflexion pour mieux articuler les propriétés
techniques des outils aux propriétés humaines de l’acte d’apprendre.
Des pistes et des solutions partielles existent. Elles ont toutes en commun de poser la question des
TIC non pas contre, ni à côté, mais en relation avec l’activité humaine en général et avec
l’apprentissage en particulier
TIC en éducation : vers une application du principe de précaution
- Pédagogie des processus et enseignement des contenus ne sont pas antagonistes mais
complémentaires. L’un est la base, l’autre est l’aboutissement. Eliminer l’un au profit de l’autre est
une prise de risque aux conséquences imprévisibles.
- Toute activité instrumentée est un « mixte » incertain qui résulte de l’interaction entre les propriétés
objectives des outils et les capacités subjectives des utilisateurs à les mettre en œuvre (Rabardel,
1992). --> Il n’y pas d’efficacité absolue ni automatique à attendre d’aucun instrument.
- On ne sait pas encore comment, dans chaque discipline, intégrer les TIC pour en faire des moyens
souples et accessibles d’accès à l’apprentissage autonome et à l’abstraction formelle.
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