ASSURER LA PRISE EN CHARGE DE LA TUBERCULOSE MR/UR

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ASSURER LA PRISE EN CHARGE DE LA TUBERCULOSE
MR/UR ET LES SOINS
1.
La prise en charge de la tuberculose MR/UR pose de grandes difficultés aux pays. Il sera question
ici des difficultés liées au modèle choisi pour soigner les patients atteints de tuberculose-MR
(soins hospitaliers par opposition à soins ambulatoires) et des mesures proposées pour y remédier,
à savoir l’équilibre entre soins hospitaliers et soins ambulatoires dans le contexte de l’aide sociale
et des soins communautaires, de l’éthique en matière de traitement et de soins, de la participation
de tous les centres de soins (y compris les hôpitaux) et des besoins des personnes VIH-positives.
1.1
Soins hospitaliers par opposition à soins ambulatoires
Le problème
Le traitement et la prise en charge de la tuberculose-MR sont contraignants, relativement
complexes et coûteux. Bien souvent, les ministères de la santé s’appuient sur des modèles de soins
qui ne sont pas adaptés aux besoins des patients, qui ne sont pas conformes aux recommandations
de l’OMS, qui diminuent les effets du traitement ou qui ne sont pas assez efficaces par rapport à
leur coût. Les principales contraintes tiennent à la durée de la thérapie (deux ans) et à la nécessité
d’administrer le traitement sous observation directe (DOT), selon une approche centrée sur le
malade. La complexité du traitement est due aux éléments suivants:
• Les médicaments antituberculeux de deuxième intention provoquent des réactions
indésirables plus fréquentes et plus graves que les anti-tuberculeux de première intention,
surtout pendant les 6 à 12 premières semaines de traitement. Une mauvaise prise en charge
des effets indésirables contribue à un taux élevé d’abandon du traitement et à l’allongement
de la période de transmission de la tuberculose MR/UR.
• La co-infection tuberculose-VIH peut nécessiter des hospitalisations fréquentes et
prolongées.
• Des mesures appropriées de lutte anti-infectieuse doivent être prises dans les hôpitaux
chaque fois qu’un malade de la tuberculose y est admis; et à domicile pour réduire le risque
de contamination de l’air par le bacille. Mais ces mesures ne doivent pas contribuer à la
stigmatisation.
• La surveillance de la réponse au traitement est fondée sur la mise en culture et pas
seulement sur les frottis.
• Les hôpitaux publics et le secteur privé sont très souvent les premiers ou les seuls à
prodiguer des soins aux malades atteints de tuberculose MR/UR, ou alors ils dispensent ces
soins par intermittence.
• La protection anti-infectieuse des membres de la communauté et des agents de santé qui
soignent les malades soulève d’importantes questions d’éthique.
• La prise en charge des malades est compliquée quand ils migrent dans des endroits où les
moyens de soigner la tuberculose MR/UR sont inégaux.
Le coût élevé de la prise en charge de la tuberculose-MR tient principalement au coût des
anti-tuberculeux de deuxième intention, à l’hospitalisation (jusqu’à 50% du coût total du
traitement dans les pays à revenu intermédiaire) et aux effectifs nécessaires pour diagnostiquer,
traiter et soigner.
La solution
Les pays font face aux contraintes, à la complexité et au coût de la prise en charge de la
tuberculose MR/UR en appliquant un ou deux modèles de soins:
• Les soins ambulatoires, qui consistent à soigner les patients dans les services de
consultation externes dès le début du traitement et à ne les hospitaliser que pour raisons
médicales. Les principaux avantages de ce modèle sont qu’il est mieux accepté socialement
par les patients, qu’il coûte moins cher et qu’il réduit le risque de transmission nosocomiale.
Sa bonne application exige principalement qu’il existe:
• un réseau solide d’aide sociale qui, par l’information et l’éducation, par des services de
conseil psychologique et en aidant à surmonter les obstacles socio-économiques, facilite
l’observance du traitement; et
•
un réseau de centres de soins de santé primaires dont les agents de santé sont qualifiés
pour prendre en charge la tuberculose MR/UR.
• Les soins hospitaliers, qui consistent à hospitaliser les malades jusqu’à ce que leurs
cultures soient négatives (généralement au cours des six premiers mois de traitement), puis
à les soigner en ambulatoire. Les principaux avantages de ce modèle sont que le DOT est
plus facile à appliquer, que le risque de transmission de l’infection aux contacts
domestiques et à la communauté en général est probablement plus faible et qu’il est plus
facile de former les agents de santé qui n’ont pas l’habitude des antituberculeux de
deuxième intention. Sa bonne application exige des fonds et des lits en quantité suffisante
pour une hospitalisation prolongée, des mesures judicieuses de lutte anti-infectieuse à
l’hôpital et l’application de principes éthiques et juridiques fondamentaux qui garantissent
le respect et la promotion des droits de l’homme. La fréquence d’autres pathologies chez
les personnes souffrant d’une co-infection tuberculose/VIH augmente le nombre
d’hospitalisations
Les soins ambulatoires interviennent dans les deux modèles puisque l’hospitalisation pendant
deux ans est impossible pour des raisons évidentes, notamment le coût et l’acceptabilité sociale.
Malgré son coût élevé, le traitement de la tuberculose MR/UR présente un bon rapport
coût/efficacité d’après les critères internationaux et les années de vie ajustées sur l’incapacité
(DALY) qu’il permet d’éviter, à la fois quand les malades sont hospitalisés pendant la phase
initiale du traitement et quand ils sont soignés en ambulatoire pendant toute la durée du traitement.
Toutefois, le rapport coût/efficacité des soins hospitaliers dans les endroits où les ressources sont
rares n’a pas été étudié.
Il n’y a pas de modèle meilleur que l’autre et les deux peuvent coexister. Mais selon les besoins
des patients et les moyens disponibles, l’un peut être préférable à l’autre. Dans un pays de petite
taille, par exemple, qui entend soigner des milliers de cas chaque année, il est très peu probable
que les moyens hospitaliers soient suffisants pour prendre correctement en charge les malades ; il
faut alors privilégier les soins ambulatoires. L’hospitalisation peut cependant être préférable pour
les malades VIH-positifs pendant la phase initiale du traitement, en l’absence de réseaux d’aide
sociale qui facilitent l’observance du traitement, ou encore quand il n’y a pas ou pas assez
d’agents de santé primaires qualifiés pour prendre en charge les effets secondaires.
Mesures à prendre d’urgence
Dans l’ensemble, les pays devraient choisir les modèles de prise en charge de la tuberculose
MR/UR après une analyse approfondie des facteurs suivants, au minimum:
• besoins du patient et options qu’il préfère pour observer le traitement;
• législation et critères éthiques locaux;
• participation du secteur privé et des hôpitaux publics à la prise en charge de la tuberculose
MR/UR;
• hôpitaux appliquant des mesures de lutte anti-infectieuse;
• nombre estimatif de malades à soigner et nombre de lits d’hôpital;
• financement des effectifs nécessaires pour administrer le DOT;
• agents de soins de santé primaires qualifiés pour prendre en charge la tuberculose-MR;
• poids du VIH chez les malades atteints de tuberculose-MR et niveau de collaboration avec
les programmes de lutte contre le VIH;
• moyens de laboratoire pour surveiller la réponse au traitement;
• attitude des soignants vis-à-vis des différentes options de soins;
• réseaux d’aide sociale qui facilitent l’approche DOT centrée sur le malade;
• capacité à éduquer les malades, et non pas seulement à les informer, concernant l’hygiène
et les mesures de lutte anti-infectieuse à domicile;
• accès géographique aux centres de soins.
L’OMS, le Partenariat Halte à la tuberculose et les institutions techniques aideront les pays à faire
cette analyse pour concevoir des modèles de soins qui répondent aux besoins des malades, qui
soient applicables dans le système de santé et d’un bon rapport coût/efficacité.
Les principes directeurs de l’OMS à l’intention des programmes antituberculeux pour la prise en
charge de la tuberculose pharmacorésistante définissent un cadre pour le traitement de la
tuberculose MR/UR sur la base des cinq composantes de la stratégie DOTS.1 Le Comité Feu vert
de l’OMS et le Partenariat Halte à la tuberculose financent l’expérimentation et l’extension de la
prise en charge de la tuberculose-MR et, en se fondant sur les principes directeurs de l’OMS,2 et
oeuvrent pour que soient assurés des soins de la plus grande qualité.
Nous allons étudier plus à fond dans les sections suivantes certaines des composantes
fondamentales de ce cadre qu’il faut examiner attentivement pour choisir et appliquer un modèle
de prise en charge de la tuberculose MR/UR, et les difficultés qu’elles posent.
1
Guidelines for the programmatic management of drug-resistant tuberculosis. Emergency update 2008.
Genève, Organisation mondiale de la Santé, 2008 (WHO/HTM/TB/2008.402).
2
http://www.who.int/tb/challenges/mdr/greenlightcommittee/faq1_initiative/en/index.html.
1.2
Veiller à ce que le traitement antituberculeux et les soins soient conformes aux
principes d’éthique et aux droits de l’homme et contribuent à la justice sociale
Le problème
Dans certaines circonstances, la façon dont ont été menés la lutte contre la tuberculose et des
soins a porté atteinte à la dignité et aux droits des patients, et les principes d’éthique
fondamentaux en santé publique et dans la pratique clinique n’ont pas toujours été respectés. Les
dispositions prises par certains gouvernements, établissements et dispensateurs pour des raisons
de sécurité publique ont pu comprendre des mesures créant un déséquilibre entre la protection de
la santé et des droits du public et celle des personnes dont on pense ou dont il est confirmé
qu’elles ont la tuberculose.
Compte tenu de l’inquiétude que suscite la tuberculose MR/UR, les réactions émotionnelles dues
à la stigmatisation et au manque d’information ainsi que la forte pression exercée sur le personnel
soignant et sur les ressources peuvent compliquer encore et compromettre la prise de décision.
Dans certains cas, les droits des patients ont été sérieusement restreints, par exemple par le
recours généralisé, plutôt qu’exceptionnel, à la détention et à l’isolement involontaires.
Les pratiques non conformes à l’éthique peuvent aussi être étroitement liées aux inégalités
d’accès à la prévention, aux soins et à la promotion de la santé concernant la tuberculose et
d’autres affections, ou à la qualité inégale de ces prestations. Les groupes pauvres, vulnérables et
très marginalisés sont ceux qui risquent le plus de contracter la tuberculose et de connaître une
issue défavorable.
Beaucoup de programmes nationaux antituberculeux (PNT) apportent actuellement une réponse
incomplète aux questions d’éthique concernant la conception et l’exécution des prestations,
surtout en ce qui concerne la tuberculose MR, par exemple:
•
Quelles sont les meilleures pratiques en matière de soins et de lutte anti-infectieuse
quand on soupçonne la tuberculose MR/UR mais qu’on ne dispose pas encore de
tests de diagnostic et de médicaments de deuxième intention?
•
Si les grands hôpitaux ne suivent pas encore de pratiques adéquates de lutte antiinfectieuse, où faut-il soigner au départ les malades contagieux?
•
Quelles sont les limites du «devoir de soigner» des agents de santé, surtout en
l’absence de véritables mesures de lutte anti-infectieuse?
•
Quels sont les principes des droits de l’homme et les lois appliqués localement pour
prendre des décisions concernant la détention involontaire?
•
Les normes internationales en matière de soins aux tuberculeux, la Charte des
patients pour les soins de la tuberculose, le Règlement sanitaire international et les
critères éthiques de la recherche sur la tuberculose et de la surveillance de la
tuberculose sont-ils appliqués?3,4,5
Même si les réponses à certaines de ces questions peuvent varier selon le contexte local, certains
pays n’ont guère de moyens, voire aucun, d’y répondre dans un cadre éthique satisfaisant.
La solution
Pour aider à éviter ou à résoudre ces problèmes, les pays devraient:
• tendre d’une manière générale vers les soins de santé primaires, la couverture universelle, le
respect des droits de l’homme, la justice sociale et le développement ;
• appliquer les six composantes de la stratégie Halte à la tuberculose pour dépister,
diagnostiquer, traiter et prévenir efficacement la tuberculose, en étant conscient qu’il faut
soigner toutes les formes de la maladie et répondre aux besoins de toutes les personnes en
difficulté, surtout les personnes pauvres et vulnérables;
• renforcer les moyens d’élaborer et d’appliquer des politiques de lutte contre la tuberculose et
de soins conformes à l’éthique, en s’appuyant sur toutes les recommandations existantes et
sur les meilleures pratiques. Cela suppose de faire appel à des comités d’éthique au niveau
national ou au niveau des établissements et de solliciter une assistance technique.
Mesures à prendre d’urgence
•
Les PNT devraient examiner officiellement les questions d’éthique concernant la politique
et la prestation de services.
•
Avec le concours d’un groupe spécial OMS sur les questions d’éthique en matière de lutte
contre la tuberculose et en concertation avec de nombreuses parties prenantes, l’OMS
arrêtera des principes directeurs d’ici le début de 2010 pour contribuer à inciter les PNT,
tous les acteurs de la prévention, du traitement et des soins à suivre des pratiques
conformes à l’éthique.
•
Les ministères de la santé et les PNT souhaiteront peut-être créer leurs propres groupes
spéciaux sur les questions d’éthique pour examiner les questions cruciales que se posent
d’emblée ceux qui élaborent les plans d’action contre la tuberculose-MR. Il sera peut-être
nécessaire aussi de légiférer.
3
The international standards for tuberculosis care. The Hague, Tuberculosis Coalition for Technical
Assistance, 2006.
4
Charte des patients pour les soins de la tuberculose. Conseil mondial des Soins, 2006
(http://conseilmondialsoins.org/index.php?nSection=1).
5
http://www.who.int/tb/features_archive/traitement_involontaire/en/index.html.
1.3
Faire participer tous les dispensateurs de soins, y compris les hôpitaux publics
Les PNT de nombreux pays à lourde charge de tuberculose ne sont pas en mesure de soigner les
cas de tuberculose MR/UR. Beaucoup de ces malades ont été pris en charge et continuent à l’être
en dehors des PNT. Certains pays à lourde charge de tuberculose MR/UR ont les moyens de la
diagnostiquer dans le secteur privé.
En Inde, par exemple, un réseau de laboratoires privés a diagnostiqué environ un millier de cas de
tuberculose-MR en 2007. En Chine et en Indonésie, les laboratoires des grands hôpitaux sont
équipés pour diagnostiquer la tuberculose pharmacorésistante. Mais, en l’absence de liens
officiels avec le PNT, la qualité du diagnostic, du traitement et des soins assurés par ces
prestateurs privés reste incertaine.
Le marché des médicaments de deuxième intention est important dans les pays à lourde charge de
tuberculose MR/UR. Mais contrairement aux médicaments de première intention, que les PNT
achètent souvent en vrac, la plupart, si ce n’est la totalité, des médicaments de deuxième intention
sont vendus sur le marché de détail. Les PNT ignorent ainsi qui sont les prescripteurs et les
bénéficiaires des médicaments contre la tuberculose-MR et cherchent rarement à les identifier.
Il existe des établissements privés qui prennent en charge la tuberculose MR/UR. À Karachi
(Pakistan), l’hôpital de l’Université Aga Khan a un programme de prise en charge qui fonctionne
bien. Dans la même ville, l’hôpital Indus, établissement moderne à vocation philanthropique
financé par des expatriés et comptant plusieurs services spécialisés, a récemment mis sur pied un
programme communautaire de prise en charge de la tuberculose-MR du type de celui dirigé par
Partners in Health au Pérou. En Inde, quelques ONG et hôpitaux privés assurent une bonne prise
en charge de la tuberculose-MR. Tout premier projet approuvé par le Comité Feu vert, la
Fondation contre les maladies tropicales installée au Centre médical de Makati, aux Philippines –
hôpital privé moderne à plusieurs spécialités –, est un exemple remarquable.
Presque tous les dispensateurs de soins peuvent jouer un rôle important dans la prise en charge de
la tuberculose pharmacosensible. Toutefois, compte tenu de leur complexité, le traitement de la
tuberculose MR/UR et les soins qu’elle exige doivent être assurés par des spécialistes rattachés à
des établissements équipés en conséquence. La surveillance du traitement peut être confiée à la
communauté, mais avec le soutien de spécialistes. Les initiatives mixtes public-privé doivent être
adaptées aux exigences de la prise en charge de la tuberculose MR/UR au sein d’un programme.
Seule une extension rapide de la prise en charge de la tuberculose MR/UR au sein d’un
programme peut mettre un frein à l’apparition et à la propagation de ces formes de la maladie.
Les PNT ont peu de chances d’y parvenir s’ils ne s’intéressent qu’aux établissements publics.
Une démarche progressive consistant à d’abord renforcer les laboratoires et les centres
thérapeutiques du secteur public pour ensuite aider les structures extérieures au programme risque
d’être trop lente.
Les PNT doivent adopter une démarche plus globale pour recenser, renforcer et rendre
opérationnels un nombre suffisant d’établissements de tous les secteurs : secteurs public et privé,
secteur des entreprises et secteur du bénévolat. Si, comme aux Philippines, il est
vraisemblablement plus long et plus coûteux de résoudre les problèmes de qualité ou d’autres
problèmes connexes dans certaines ONG ou dans certains établissements privés que de créer un
établissement public à partir de rien, il faut agir sur les deux fronts simultanément. Si le secteur
public ne peut entreprendre les deux chantiers à la fois, il faut mobiliser des moyens extérieurs au
programme pour répondre aux besoins.
Mesures à prendre d’urgence
•
Les partenaires techniques devraient aider les PNT à dresser un état des lieux du diagnostic
de la tuberculose MR/UR, du traitement et des soins dans le pays en englobant les secteurs
public et privé, le secteur des entreprises et le secteur du bénévolat.
•
Les PNT devraient cartographier les sources de cas de tuberculose MR/UR et les endroits
où ils sont actuellement diagnostiqués et soignés.
•
Les PNT devraient étudier les pratiques d’autres laboratoires et dispensateurs de soins en
matière de diagnostic et de traitement de la tuberculose MR/UR et déterminer si elles sont
judicieuses.
•
Les PNT devraient évaluer les forces et les faiblesses des laboratoires et des dispensateurs
de soins extérieurs au programme et la mesure dans laquelle ils peuvent collaborer à
l’extension de la prise en charge de la tuberculose MR/UR.
•
Les PNT devraient progressivement associer à la prise en charge de la tuberculose MR/UR
les laboratoires et les établissements extérieurs au programme qui le souhaitent, tout
d’abord en nouant des liens avec eux et en mobilisant leur potentiel.
1.4
Collaboration avec les programmes de lutte contre le VIH en vue de renforcer
la lutte à la fois contre la tuberculose et contre le VIH
Le problème
Les personnes vivant avec le VIH ont plus de risques de contracter la tuberculose MR/UR, la
mortalité peut atteindre 90% et l’espérance de vie est très réduite. Un diagnostic et un traitement
précoces de la tuberculose pharmacorésistante sont donc cruciaux, mais malheureusement
compliqués. Les interactions médicamenteuses entre le traitement antirétroviral (TARV) et le
traitement antituberculeux posent également de grandes difficultés : le risque de toxicité grave est
important et les effets indésirables sont fréquents quand on associe le TARV et les
antituberculeux de deuxième intention.
Sur les 27 pays considérés comme prioritaires pour la tuberculose MR, 12 le sont aussi pour la
co-infection tuberculose/VIH.6 On recense dans ces pays 750 000 cas de tuberculose liés au VIH,
ce qui représente 54% de tous les cas de tuberculose liés au VIH dans le monde.7
Le VIH accélère probablement la propagation de la tuberculose MR/UR, surtout dans les pays où
la prévalence de ces formes de tuberculose est élevée. Le nombre de nouveaux cas d’infection à
VIH est stable ou augmente dans les pays où il y a une forte proportion de cas de tuberculose MR,
notamment en Chine, en Fédération de Russie, en Lettonie et en Ukraine, et où des mesures
6
Afrique du Sud, Chine, Estonie, Ethiopie, Fédération de Russie, Inde, Indonésie, Myanmar, Nigéria,
République démocratique du Congo, Ukraine et Viet Nam.
7
Global tuberculosis control: epidemiology, planning, financing. WHO report 2009. Genève, Organisation
mondiale de la Santé, 2009 (WHO/HTM/TB/2009.411).
d’urgence s’imposent pour combattre ces deux épidémies qui se recouvrent partiellement.8 Bien
que mal étudié, ce problème est aussi une préoccupation de santé publique en Afrique
subsaharienne.
La solution
Pour mieux déterminer dans quelle mesure l’infection à VIH et la résistance aux antituberculeux
se recoupent, il faut tenir compte du statut sérologique pour le VIH dans les enquêtes sur la
pharmacorésistance. Il faut également étudier les possibilités de synergie entre la surveillance du
VIH et la surveillance de la résistance aux antituberculeux.
En 2007, seulement 11% de l’ensemble des malades de la tuberculose dans les 27 pays
prioritaires pour la tuberculose-MR a passé un test de dépistage du VIH, proportion qui n’était
que de 2% en 2004. Un sur quatre (25%) des malades testés était VIH-positif et près d’un tiers
(29%) d’entre eux ont été mis sous traitement antirétroviral (TARV). En continuant dans cette
voie, on veillera à garantir les éléments suivants pour développer à l’échelle nationale les activités
de collaboration entre les programmes nationaux de lutte contre la tuberculose et contre le sida:
• le dépistage du VIH pour tous les cas et cas suspectés de tuberculose, qu’ils soient atteints
d’une forme pharmacosensible ou pharmacorésistante;
• la détection intensifiée et rapide des cas de tuberculose, principalement par les agents de
santé des services spécialisés dans le VIH;
• le diagnostic et le traitement précoces des cas de tuberculose pharmacosensible et
pharmacorésistante parmi les personnes vivant avec le VIH;
• la prévention de la tuberculose une fois la maladie évolutive exclue;
• la mise en place de mesures de lutte contre la tuberculose dans tous les centres de soins aux
VIH-positifs.
Dans les endroits où la pharmacorésistance et le VIH se recoupent en grande partie et où il est
difficile d’établir un diagnostic précoce, le traitement empirique de la tuberculose
pharmacorésistante évitera une surmortalité des porteurs du VIH.
Un accès facilité à un diagnostic plus sûr et plus rapide de la tuberculose (notamment grâce aux
techniques de culture et aux tests moléculaires), en particulier pour les personnes vivant avec le
VIH, permettra de déceler les souches pharmacosensibles et pharmacorésistantes pour offrir un
traitement approprié. L’étude des possibilités de synergie entre les services de laboratoire pour le
VIH et ceux pour la tuberculose présentera des avantages pour les uns comme pour les autres.
Pour obtenir ces résultats, les acteurs de la lutte contre la tuberculose et contre le VIH devront
collaborer plus étroitement en vue d’intégrer la tuberculose-MR et la tuberculose UR dans la
planification stratégique concernant la tuberculose et le VIH et de susciter la volonté politique
8
Report on the global AIDS epidemic 2008, ONUSIDA.
nécessaire pour agir et financer l’action. Une plus grande mobilisation des groupes
communautaires permettra aux communautés de contribuer à prévenir la propagation de la
tuberculose et de réclamer des services communs tuberculose/VIH, y compris des services de
prévention, de diagnostic et de traitement précoces de la tuberculose.
La recherche opérationnelle sur les meilleurs modèles de soins aux personnes vivant avec le VIH,
y compris les essais cliniques de traitements combinés (antituberculeux et TARV) plus courts et
plus efficaces, est aussi un aspect de la solution.
Mesures à prendre d’urgence
•
Déterminer l’étendue du problème en faisant figurer le dépistage du VIH parmi les critères
des enquêtes nationales sur la résistance aux antituberculeux.
•
Étendre les activités de collaboration tuberculose/VIH dans l’ensemble du pays.
•
Faciliter l’accès des personnes vivant avec le VIH à des services de diagnostic de la
tuberculose de meilleure qualité, y compris aux techniques de culture et aux tests
moléculaires.
•
Mobiliser davantage les groupes communautaires.
•
Resserrer la collaboration entre les acteurs de la lutte contre la tuberculose et contre le VIH
et renforcer la volonté politique.
•
Entreprendre des travaux de recherche fondamentale et opérationnelle sur les modèles
optimaux de soins en cas de tuberculose MR/UR liée au VIH.
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