UNE VARIANTE CONTEXTUELLE
DU DISCOURS RAPPORTÉ AVEC MENTION : LE DISCOURS CONVOQUÉ
DANS LE JOURNAL ET LE MAGAZINE D’INFORMATION RADIOPHONIQUES
Parmi les paramètres contextuels d’un énoncé enchâssé en discours rapporté direct (DRD), les
particularités phoniques de sa profération (qualité de voix, prononciation sociolectale,
prosodie...) n’apparaissent que rarement et à l’état de traces à l’écrit ou dans l’oral spontané.
La spécificité du DRD à la radio (et à la télévision) réside dans la possibilité de donner à
entendre (et/ou à voir), grâce à l’enregistrement, la matérialité même de la locution citée, et
parfois d’autres éléments de son contexte, comme certaines contributions d’interlocuteurs
enchâssés. Or très peu de linguistes analystes du discours des médias prennent réellement en
compte le choix et l’alternance entre DRD représenté par la voix du journaliste citant et DRD
convoqué par l’enregistrement du locuteur cité. Après avoir confronté les arguments
concernant l’homologie totale ou partielle entre ces deux modes de citation, je m’interrogerai
sur les effets du contexte sonore dans les DRD instrumentés de l’information radiophonique.
Je m’appuierai sur des exemples tirés des journaux de la station publique France Inter.
1. Certains chercheurs amalgament les deux modes de citation ; d’autres les traitent en
parallèle sans les articuler ; d’autres enfin s’efforcent de donner un véritable statut à leur
différence. J’argumenterai en faveur de cette dernière position. D’une part, en effet, leur
homologie formelle indéniable impose de maintenir une description unifiée du DRD. Mais,
d’autre part, l’instrumentation induit des effets textuels et discursifs qu’on ne saurait ignorer.
2. Les deux arguments les plus saillants sont les suivants. (i) La souplesse du montage
numérique est en train de favoriser l’apparition de formes avec îlot textuel semblables à celles
de la presse écrite. Ainsi dans :
L (journaliste) à en croire Renaud Dutreil ministre des PME le gouvernement
l (ministre) continue à travailler jusqu’à la dernièr’ second’ (France Inter, 2 mai 2007).
on change explicitement, mais sans marqueur verbal, de locuteur entre le sujet le
gouvernement et le verbe continue à travailler. (ii) La dualité des contextes sonores restreint
les possibilités d’enchaînement syntaxique de l’énonciation enchâssante sur l’énoncé enchâssé
par un adverbe modal (oui, non...) ou par un connecteur argumentatif (or, car...), voire les
possibilités de reprise anaphorique d’un élément du contenu enchâssé par un pronom.
L’enchaînement ne pourra se faire que grâce à la reprise lexicale, à l’anaphore nominale ou à
la production d’un DR représenté.
Références
Broth M. et al. (éd.), 2007, Le Français parlé des médias, Stockholm : Acta Universitatis Stockholmiensis, p.
365-382 et 719-736.
López Muñoz J.M., Marnette S. & Rosier L. (éd.), 2005, Dans la jungle des discours. Genres de discours et
discours rapporté, Cadix : Servicio de Publicaciones de la Universidad, p. 413-454.
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