LE DROIT SOCIAL EUROPEEN

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10 janvier 2007
L'EUROPE SOCIALE : UN BILAN
L'Europe sociale, dès avant même la signature du Traité fondateur de Rome (1957), s'est
retrouvée comme un objectif subsidiaire de la volonté d'intégration européenne. Pendant la
négociation de ce traité, deux camps se sont affrontés : ceux qui voulaient que l'harmonisation
sociale soit une condition nécessaire au passage à la deuxième phase du marché commun et
ceux qui s'y opposaient. L'accord donné le 6 novembre 1956 par Robert Marjolin, viceprésident de la délégation française aux négociations, proche du CNPF (l'organisation
patronale française), consacre la victoire de ces derniers. On se contentera d'affirmer que le
progrès social doit faire partie de l'objectif général et que "c'est un marché fonctionnant
harmonieusement qui favorisera l'harmonisation sociale".
Cet abandon de l'harmonisation sociale comme une contrainte d'accompagnement de la
création d'un marché commun, puis unique, va déterminer durablement la place médiocre
faite à l'Europe sociale dans un processus d'intégration qui se traduit par une remise en cause
de la conception keynésienne du rôle des pouvoirs publics. L'opposition de principe de
l'UNICE à toute harmonisation sociale sera toujours respectée.
Jamais, depuis 1957, on n'a remis en question le fait que le marché soit l'unique socle de la
construction européenne. Le marché est le seul cadre organisationnel de l'Europe, à
l'exclusion de tout autre.
Une étude exhaustive de l'Europe sociale devrait comporter non seulement les apports
positifs, mais également les effets négatifs pour les acquis sociaux nationaux de bon nombre
de décisions dans la réalisation d'un marché intérieur unique (en particulier les décisions
prises en vertu de l’Acte unique, du Traité de Maastricht et de la stratégie de Lisbonne). On
s'en tiendra, ici, à l'énumération des apports positifs.
Il est important de garder à l'esprit que ces apports positifs sont, en général, en deça des
normes en vigueur notamment dans les six Etats fondateurs et en particulier des normes
françaises, à l'exception notable de la question des discriminations hommes-femmes. Par
contre, ils ont permis, dans certains cas, d'améliorer certains aspects de la politique sociale de
pays qui ont rejoint le cadre communautaire à partir du premier élargissement.
Il est apparu impossible d'intégrer, dans une nomenclature des apports sociaux positifs de
l'Union européenne, les propositions relatives à l'emploi tant les présupposés libéraux de
toutes les initiatives en faveur de l'emploi comportent des agressions remettant en cause les
acquis sociaux. La rhétorique européenne sur la "responsabilité sociale des entreprises"
n'ayant donné lieu jusqu'ici - malgré une littérature abondante - à aucun acte juridique, n'a pas
davantage été intégrée dans cet inventaire.
A. LES GRANDS TEXTES
A. 1 Le Traité de Rome (1957) : "Les Etats membres conviennent de la nécessité de
promouvoir l'amélioration des conditions de vie et de travail de la main-d'oeuvre permettant
leur égalisation dans le progrès. Ils estiment qu'une telle évolution résultera tant du
fonctionnement harmonieux du marché commun, qui favorisera l'harmonisation des systèmes
sociaux, que des procédures prévues par le présent traité et du rapprochement des
dispositions législatives, réglementaires et administratives." (art. 117). On y voit la trace de
l'abandon de l'harmonisation sociale comme une obligation. Elle résultera du fonctionnement
"harmonieux" du marché.
A.2 Le traité consolidé instituant la Communauté européenne : les dispositions sociales font
l'objet des articles 136 à 145 et le Fonds social européen des articles 146 à 148.
A.3La Charte sociale européenne du Conseil de l'Europe, dite Charte de Turin (1961). Le
plus remarquable texte sur le sujet. Mais ce n'est qu'une déclaration d'intention.
A.4La Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux (1989) : une simple
déclaration solennelle sans portée contraignante. La CES constate : "Il n'y a pas de droits sans
possibilité de les faire respecter".
A.5Le Protocole sur la politique sociale annexé au Traité de Maastricht (1992) : un texte qui
fixe surtout les modalités de la prise de décision des instances européennes en matière sociale.
Si, nouveauté, les partenaires sociaux sont obligatoirement consultés préalablement à toute
proposition de directive dans le domaine social, cela confère, de fait, à l'UNICE un droit de
préemption sur le droit communautaire du travail puisqu'il lui suffit de refuser la négociation
pour atteindre un de ses objectifs, en particulier quand il s'agit de déréguler. Le syndicalisme
de concertation est désormais bien enfermé dans le carcan libéral. Ce traité confirme la
prééminence de la dimension économique de l'intégration européenne par rapport à la
dimension démocratique et sociale. Un an plus tard, le Livre blanc de Jacques Delors sur
"Croissance, compétitivité et emploi" écarte absolument toute idée de réduction collective du
temps de travail.
A.6Le troisième pilier de l'Agenda de Lisbonne (2000) : "moderniser le modèle social
européen en investissant dans les ressources humaines et en luttant contre l'exclusion sociale"
avec pour objectif d'atteindre un taux d'emploi de 70% de la population active. Un objectif
contredit par la mise en oeuvre des deux autres piliers de l'agenda de Lisbonne : renforcement
de la flexibilité, des dérégulations, de la concurrence ; report de l'âge de la retraite.
A.7La Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (2000) : un texte en retrait sur
la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (1948), sur le Pacte International relatif aux
droits économiques, sociaux et culturels (1976), sur la Déclaration de l’OIT relative aux
principes et aux droits fondamentaux du travail (1998) et sur la Charte de Turin mentionnée
ci-dessus.
B. LES DECISIONS, DIRECTIVES ET REGLEMENTS
Il s'agit des trois instruments juridiques obligatoires. Les deux premiers chiffres indiquent
l'année d'adoption de la directive jusqu'en 1999; ensuite les premiers chiffres indiquent
l'année. Mise à jour au 24.10.2006.
I. DROIT DU TRAVAIL
- mesures spéciales relatives à la libre circulation des travailleurs : directive 64/221
- libre circulation des travailleurs : suppression des restrictions au déplacement : règlement
612/68 et directive 68/360
- droit de demeurer sur le territoire d'un Etat membre : directive 72/94
- application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés qui se déplacent dans
l'Union : Règlement 1408 du Conseil de 1971
- le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs :
directive 75/129
- obligation pour les entreprises de l’industrie de l’acier de déclarer certaines données
concernant l’emploi : décision n° 1870/75
- droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises : directive 77/187
- protection des travailleurs en cas d'insolvabilité de l'employeur : directive 80/987
- obligation de l'employeur d'informer par écrit des conditions du contrat ou à la relation de
travail : directive 91/533
- certains aspects de l'aménagement du temps de travail : directive 93/104
- comité d'entreprise européen : directive 94/45
- statistiques sur la structure et le répartition des salaires : règlement (CE) n° 2744/95
- détachement de travailleurs dans le cadre d'une prestation de services : directive 96/71
- travail à temps partiel : directive 97/81
- droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises : directive 98/50 (modifie la directive
77/187)
- rapprochement des législations relatives aux licenciements collectifs : directive 98/59
- statistiques structurelles sur les salaires et les coûts de la main d’œuvre, définition et
transmission des informations sur les coûts de la main d’œuvre : règlements (CE) n°
530/1999 et n°1726/1999
- temps de travail des gens de mer : directive 99/63
- travail à durée déterminée : directive 99/70
- certains aspects de l'aménagement du temps de travail à bord des navires faisant escale dans
les ports de la Communauté : directive 99/95
- certains aspects de l'aménagement du temps de travail : directive 2000/34 qui modifie la
directive 93/104
- certains aspects de l'aménagement du temps de travail du personnel mobile dans l'aviation
civile : directive 2000/79
- statistiques structurelles sur les salaires et les coûts de la main d’œuvre, définition et
transmission des informations sur les salaires : règlement (CE) n° 1916/2000
- droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises : directive 2001/23 (remplace les
directives 77/187 et 98/50)
- niveau minimal de formation des gens de mer : directive 2001/25
- statut de la société européenne ; implications des travailleurs : directive 2001/86
- statut de la Société européenne : règlement n° 2001/2157
- encourager la coopération entre Etats visant à lutter contre l'exclusion sociale : décision
50/2002
- cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs : directive 2002/14
- certains aspects de l'aménagement du temps de travail des activités de transport routier :
directive 2002/15
- statut de la société coopérative européenne : règlement n°1435/2003
- statut de la société coopérative européenne pour ce qui concerne l'implication des
travailleurs : directive 2003/72
- statistiques sur le revenu et les conditions de vie : règlements (CE) n° 1177/2003, n°
1980/2003, n° 1981/2003, n° 1982/2003, n° 1983/2003, n° 16/2004, n° 28/2004, n° 315/2006,
-certains aspects de l'aménagement du temps de travail : directive-cadre 2003/88
- indice du coût de la main d’œuvre : règlements (CE) n° 450/2003 et n°1216/2003
- libre circulation des citoyens : directive 2004/38 modifiant les directives 68/630 et 72/94
- niveau minimal de formation des gens de mer : directive 2005/45 modifiant 2001/25
- certains aspects de l'aménagement du temps de travail du personnel mobile des chemins de
fer : directive 2005/47
- statistiques sur le coût de la main d'oeuvre et les salaires : règlement (CE) n° 698/2006.
- législation sociale relative au transport routier : directive 2006/22
II. EGALITE DE TRAITEMENT
- égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et féminins : directive 75/117
- accès à l'emploi, à la formation professionnelle, à la promotion professionnelle et les
conditions de travail : directive 76/207
- sécurité sociale : directive 79/7
- création d'un comité consultatif de l'égalité des chances entre les femmes et les hommes :
décision 82/43/CEE de la Commission
- régimes professionnels de sécurité sociale : directive 86/378
- femmes exerçant une activité indépendante : directive 86/613
- congé parental : directive 96/34 modifiée par la 97/75
- charge de la preuve dans le cas de discrimination fondée sur le sexe : directive 97/80
- régimes professionnels de sécurité sociale : directive 96/97
- égalité de traitement en matière d'emploi et de travail : directive 2000/78
- égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l'accès aux biens et services et la
fourniture de biens et services : directive 2004/113
- programme d'action communautaire pour la promotion des organisations actives au niveau
européen dans le domaine de l'égalité entre les femmes et les hommes : décision 848/2004
- mise en oeuvre du principe d'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre
hommes et femmes en matière d'emploi et de travail (refonte) : directive 2006/54.
III. SANTE ET SECURITE AU TRAVAIL
- comité consultatif pour la sécurité et la santé sur les lieux de travail : décisions 74/325 et
74/326
- exposition au chlorure de vinyle monomère : directive 78/610
- exposition aux agents chimiques, physiques et biologiques : directive 80/1107
- protection dans les cas d'atmosphère explosible (grisou) : directive 82/130
- exposition au plomb métallique : directive 82/605
- exposition à l'amiante : directive 83/477
- exposition au bruit : directive 86/188
- protection dans les cas d'atmosphère explosible (2) : directive 88/35
- amélioration de l’information dans le domaine de la sécurité, de l’hygiène et de la santé sur
les lieux de travail : décision n° 88/383 de la Commission
- exposition aux agents chimiques, physiques et biologiques (2) : directive 88/642
- amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail (intègre et complète les
précédentes): directive-cadre 89/391
- prescriptions minimales sur les lieux de travail : directive 89/654
- équipements de travail : directive 89/655
- équipements de protection individuelle : directive 89/656
- manutention manuelle de charges : directive 90/269
- équipements à écran de visualisation : directive 90/270
- exposition aux agents cancérigènes : directive 90/394
- exposition aux rayonnements ionisants : directive 90/641
- exposition aux agents biologiques : directive 90/679
- protection dans les cas d'atmosphère explosible (3) : directive 91/269
- exposition aux agents chimiques, physiques et biologiques (3) : directive 91/322
- exposition à l'amiante (2) : directive 91/382
- travail à durée déterminée et travail intérimaire : directive 91/383
- assistance médicale à bord des navires : directive 92/29
- sécurité et santé sur chantiers temporaires ou mobiles : directive 92/57
- signalisation de santé et de sécurité au travail : directive 92/58
- travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes : directive 92/85
- industries extractives par forage : directive 92/91
- industries extractives à ciel ouvert ou souterraines : directive 92/104
- exposition aux agents biologiques (2) : directive 93/88
- travail à bord des navires de pêche : directive 93/103
- appareils et systèmes de protection en atmosphère explosible : directive 94/9
- protection des jeunes au travail : directive 94/33
- protection dans les cas d'atmosphère explosible (4) : directive 94/44
- exposition aux agents biologiques (3) : directive 95/30
- équipements de travail (2) : directive 95/63
- normes de base en ce qui concerne les expositions aux rayonnements ionisants : directive
96/29
- maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses :
directive 96/82
- exposition aux agents chimiques, physiques et biologiques (4) : directive 96/94
- exposition aux agents cancérigènes (2) : directive 97/42
- exposition aux agents biologiques (4) : directive 97/59
- exposition aux agents biologiques (5) : directive 97/65
- exposition aux agents chimiques : directive 98/24
- protection dans les cas d'atmosphère explosible (5) : directive 98/65
- critères harmonisés pour l’octroi des dispenses prévues à l’article 9 de la directive 96/82 :
décision 98/433
- santé et sécurité des gens de mer : directive 99/63
- exposition au risque d'atmosphères explosives : directive 99/92
- exposition aux agents chimiques : directive 2000/39
- exposition aux agents biologiques (remplace toutes les autres sur le même sujet) : directive
2000/54
- exposition aux vibrations mécaniques : directive 2002/44
- exposition au bruit : directive 2003/10
- comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu de travail : décision 2003/C 218/01
du 22 juillet 2003
- exposition aux agents cancérigènes et mutagènes : directive 2004/37
- exposition aux champs électromagnétiques : directive 2004/40.
- liste de valeurs limites indicatives d’exposition professionnelle (modification des directives
91/322 et 2000/39 : directive 2006/15
- prescriptions minimales de sécurité et de santé relatives à l'exposition des travailleurs aux
risques dus aux agents physiques (rayonnements optiques artificiels): directive 2006/25
IV PROTECTION SOCIALE
- application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non
salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté :
règlement de base (CEE) n°1408/71. Version consolidée du 5 mai 2005
- modalités d'application du règlement (CEE) no 1408/71 relatif à l'application des régimes de
sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur
famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, modalités d'application : règlement
(CEE) n° 574/72. Version consolidée du 5 mai 2005
- harmonisation de certaines dispositions sociales dans le domaine des transports par route :
règlement (CEE) n° 3820/85
- extension aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille du règlement
n°1408/71 en ce qui concerne les régimes de sécurité sociale : règlement (CEE) n°1390/81
- transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et
leur inclusion dans le champ d’application des systèmes d’assurance-maladie : directive
89/105
- sauvegarde des droits à pension complémentaire des travailleurs salariés et non-salariés
qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté : directive 98/49.
-régimes spéciaux des fonctionnaires en matière de sécurité sociale : règlement n°1606/98
- création d’un comité de la protection sociale : décision 2000/436/CE
- création d’un comité dans le domaine des pensions complémentaires : décision 2001/548/CE
-carte européenne d'assurance maladie :
-- décision n° 189 de la CASSTM du 18 juin 2003, visant à remplacer par la carte
européenne d'assurance maladie les formulaires nécessaires à l'application des règlements du
Conseil (CEE) n° 1408/71 et (CEE) n° 574/72 en ce qui concerne l'accès aux soins pendant un
séjour temporaire dans un État membre autre que l'État compétent ou de résidence
-- décision n° 190 de la CASSTM, du 18 juin 2003, concernant les caractéristiques
techniques de la carte européenne d'assurance maladie.
-- décision n° 191 de la CASSTM, du 18 juin 2003, relative au remplacement des
formulaires E 111 et E 111 B par la carte européenne d'assurance maladie
-- décision n° 197 du 23 mars 2004 relative aux périodes transitoires.
- activités et surveillance des institutions de retraite professionnelle : directive 2003/41.
- extension des dispositions du règlement n° 1408/71 aux ressortissants de pays tiers qui ne
sont pas couverts par ces dispositions en raison de leur nationalité : règlement (CE) n°
859/2003
- coordination des systèmes de sécurité sociale : règlement (CE) n°883/2004
- création d’un comité de la protection sociale : décision 2004/689/CE, abrogeant la décision
de 2000.
- législation sociale relative aux activités de transport routier : directive 2006/22 et règlement
561/2006
Il existe une abondante littérature (des communications) de la Commission européenne
relative aux retraites et aux systèmes de protection sociale dont l'ambition est, dans le premier
cas, de "promouvoir la capacité des systèmes de pension à répondre aux besoins et mutations
de la société et concourir ainsi à l'amélioration de la flexibilité du marché de l'emploi" et,
dans le second cas, de revoir les systèmes de protection sociale comme souhaité lors des
sommets de Lisbonne et de Göteborg. On sait ce que cela signifie.
V. DIALOGUE SOCIAL
- accord-cadre entre la Confédération européenne des syndicats (CES) et le Centre européen
des entreprises publiques (CEEP), sur la formation professionnelle, la libre circulation et le
libre accès aux emplois publics, 1990
- comité d'entreprise européen : directive 94/45
- accord-cadre entre la CES, la CEEP et l'UNICE sur le congé parental, 1995 ; il a donné lieu
à la directive 96/34
- comité d’entreprise européen, extension au Royaume-Uni : directive 97/74
- accord-cadre entre la CES, la CEEP et l'UNICE sur le travail à temps partiel ; il a donné lieu
à la directive 97/81 (ci dessus)
- accord-cadre entre les partenaires sociaux du secteur agricole de recommandation pour
l'emploi salarié dans ce secteur, 1997
- comités de dialogue sectoriel destinés à favoriser le dialogue entre les partenaires sociaux :
décision 98/500/CE
- accord entre l’Association des armateurs de la CE (ECSA) et la Fédération des syndicats des
transports dans l’UE (FST) sur l’organisation du temps de travail des gens de mer ; il a donné
lieu à la directive 99/63 (voir ci-dessus)
- accord entre les partenaires sociaux sur les contrats de travail à durée déterminée, 1999 ; il a
donné lieu à la directive 99/70 (voir ci-dessus)
- la mise en œuvre de l'accord européen relatif à l'aménagement du temps de travail du
personnel mobile dans l'aviation civile, conclu par l'Association des compagnies européennes
de navigation aérienne (AEA), la Fédération européenne des travailleurs de transports (ETF),
l'Association européenne des personnels navigants techniques (ECA), l'Association
européenne des compagnies d'aviation des régions d'Europe (ERA) et l'Association
internationale des charters aériens (AICA) : directive 2000/79
- cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté
européenne : directive 2002/14
- création du sommet social tripartite : décision 2003/174/CE du Conseil
- accord entre la Communauté européenne du rail et la Fédération européenne des travailleurs
des transports; il a donné lieu à la directive 2005/47.
VI. FORMATION PROFESSIONNELLE
- principes généraux pour la mise en oeuvre d'une politique commune de formation
professionnelle : décision 63/266
- création d'un centre européen de formation professionnelle : règlement (CEE) 337/75
- dispositions financières applicables au centre européen pour le développement de la
formation professionnelle : règlement (CEE) n° 1416/76
- extension des aides à la réadaptation aux travailleurs mis en préretraite : décision n° 1006/92
- statistique sur la formation professionnelle en entreprise : règlement (CE) n° 1552/2005
- reconnaissance des qualifications professionnelles : directive 2005/36 et abrogeant les
directives 77/452 77/453, 78/686, 78/687, 78/1026, 78/1027, 80/154, 80/155, 85/384, 85/432,
85/433, 89/48, 92/51, 93/16 et 1999/42.
D. LE FONDS SOCIAL EUROPEEN
Ce fonds, créé par le Traité de Rome, a pour buts de "promouvoir les facilités d'emploi et la
mobilité géographique et professionnelle des travailleurs ainsi qu'à faciliter l'adaptation aux
mutations industrielles et à l'évolution des systèmes de production notamment par la
formation et le reconversion professionnelles".
En 2003, trois objectifs généraux lui ont été assignés : le plein emploi, la qualité et la
productivité au travail, la cohésion sociale avec un marché du travail favorisant l'insertion.
E. FONDATION POUR L'AMELIORATION DES CONDITIONS DE VIE
ET DE TRAVAIL
Règlement (CEE) N° 1365/75 du Conseil du 26 mai 1975 créant une Fondation européenne
pour l'amélioration des conditions de vie et de travail, modifié en 1993, 2003 et 2005.
Site Internet : http://www.fr.eurofound.europa.eu/
F. LE FONDS D'AJUSTEMENT A LA GLOBALISATION
Avec quarante-cinq ans de retard sur les USA, les disciples néolibéraux de la Commission
européenne ont proposé la création d'un Fonds d'ajustement à la globalisation pour éviter
"d'affaiblir l'appui du public à la libéralisation des échanges et à l'ouverture des marchés" et
apporter une aide aux "rares" victimes de l'ouverture. Règlement du Parlement et du Conseil
de 2006.
E. EVALUATION
E.1L'inventaire présenté ci-dessus peut impressionner si on se garde de le comparer au reste
de l'acquis communautaire. Remis dans cette perspective, il fait apparaître clairement que, à
l'échelle européenne, la politique sociale n'est qu'un appendice du projet de marché unique.
E.2Les grandes directives phares présentées par la Commission européenne comme des
illustrations de la réalité de l'Europe sociale - détachement des travailleurs, licenciements
collectifs, comité d'entreprise européen, etc. - ne bénéficient pas du même souci d'effectivité
de la part de la Commission que celui observé dès lors qu'il s'agit de faire respecter les règles
de la concurrence. Ainsi, par exemple, de la directive 2002/14 sur l'information et la
consultation des travailleurs que huit Etats membres n'ont toujours pas transposée dans leur
droit interne. On ne voit pas le Commissaire à l'Emploi et aux affaires sociales intervenir avec
la même insistance et la même vigueur que ses collègues de la concurrence ou du marché
intérieur. Au contraire, c'est ce Commissaire qui propose de soumettre les services sociaux
d'intérêt général - dont la sécurité sociale - aux règles de la concurrence !
E.3Le droit communautaire ne contient aucune disposition opposable pour rendre effectifs au
niveau de l’Union européenne des droits collectifs qui responsabilisent les pouvoirs publics
européens : le droit au travail, le droit à un salaire décent, le droit à un minimum d'existence,
le droit à une allocation de chômage, le droit à un salaire minimum garanti, le droit à une
retraite décente, le droit de grève transnational.
E.4 Aucune politique sociale hardie n'est venue équilibrer la réalisation du marché unique
impulsé par l'Acte unique préparé sous la direction de Jacques Delors (1986).
E.5On a fait très grand cas, pendant la présidence Delors, du dialogue social que ses
initiatives ont mis en place. Mais si on considère que le dialogue social n'a jamais permis
d'aborder la régulation des conditions de travail autrement que dans le cadre de la modération
salariale, on se rend compte que ce dialogue social n'a pas été à même de traiter de l'essentiel.
Et les trois accords-cadres à vocation législative, si souvent mis en avant (congé parental,
travail à temps partiel, travail à durée déterminée), sont loin d'avoir produit les effets
escomptés. Le dialogue social interprofessionnel n'a plus produit d'accord engendrant des
instruments juridiquement contraignants nouveaux depuis 1999 !
E.6 Le bilan de plus de dix ans d'application de la directive créant le comité d'entreprise
européen (1994) est loin d'être satisfaisant, malgré les efforts des organisations syndicales: la
moitié des entreprises concernées (qui emploient au moins 1.000 travailleurs dans l'Union et
150 dans au moins deux pays) n'a toujours pas de comité d'entreprise européen; dans les
entreprises où il existe, la rencontre annuelle prévue par la directive réduit le comité au rôle de
chambre d'enregistrement. L'instauration des comités d'entreprise européens n'a pas remis en
cause les rapports de domination dans l'entreprise ; il les a au contraire renforcés comme le
souligne un rapport du Comité économique et social européen de juin 1993.
E.7Certaines directives récentes dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail sont en
fait des coordinations et des mises à jour de textes antérieurs revus dans le cadre de l'agenda
"Mieux légiférer" voulu par l'actuelle Commission. Un agenda qu’elle identifie comme un des
dossiers-clés de la compétitivité. Cet exercice se traduit en fait non seulement par une
rationalisation des textes, mais aussi par une revue à la baisse des obligations qu'ils
contiennent. Le programme "Mieux légiférer" n’est pas neutre. Il fournit à la Commission
une opportunité pour remettre en cause la régulation politique elle-même. La directive
« qualifications professionnelles » en a fourni un exemple. La volonté de revoir la directive
"temps de travail" en fournit un autre.
E.8 L’inventaire qui précède ne concerne que le droit contraignant. La Commission a présenté
un grand nombre de recommandations, de communications, de Livres verts, de Livres blancs
sur le modèle social et sur la protection sociale qui visent à les « recadrer », à les
« moderniser » en vue de passer du « welfare state » au « workfare state ».
E.9La stratégie de Lisbonne, pourtant adoptée alors que les gouvernements sociauxdémocrates étaient majoritaires, signe un basculement : la politique sociale n'est plus un
objectif en soi. Elle n'existe que dans la mesure où elle satisfait les besoins économiques. Les
droits sociaux ne sont plus abordés que dans une perspective fonctionnelle par rapport aux
attentes des milieux d'affaires. Par exemple, la santé et la sécurité ne sont plus des droits, ce
sont des instruments pour fournir des travailleurs en bonne santé. Le droit à une formation
tout au long de la vie est instrumentalisé de la même manière (comme le réclament avec
insistance le MEDEF et l'UNICE). Et la Commission européenne ne dit pas autre chose dans
sa communication "actions communes pour la croissance et l'emploi : le programme
communautaire de Lisbonne" [SEC(2005)981] : "Pour exploiter le capital humain mondial et
extraire les richesses de ses connaissances, la Commission travaillera (...) en faveur d'un
cadre commun (....) ." C'est bien ainsi qu'on peut interpréter, par exemple, l'usage fait de la
directive sur l'égalité de traitement entre femmes et hommes qui aboutit à réintroduire le
travail de nuit pour les femmes !
E.10On oublie trop souvent que le modèle social en vigueur au sein de chaque État n’est pas
le résultat d’un travail législatif et gouvernemental régulier et spontané. Il est le résultat, dans
chaque pays, du rôle croissant des organisations sociales et syndicales. Il est le résultat de
revendications d’une confrontation permanente avec le monde patronal. Aussi longtemps que
cette confrontation ne sera pas portée massivement et systématiquement au niveau européen,
l’Europe sociale dépendra de rapports de forces occasionnels et aléatoires au Conseil des
Ministres et au Parlement européen.
Raoul Marc JENNAR
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