Lycée Matisse Vence - Bac blanc séries générales - Épreuve de français du 18 Mars 2009
Éléments de correction non rédigés élaborés collectivement
Objet d'étude : le théâtre - texte et représentation
Corpus :
Texte A : Molière, L'Avare, IV, 7, 1668
Texte B : Jean Racine, Andromaque, V, 1, 1667
Texte C : Jaime Salom, L’Autre William, Traduit de l'espagnol El otro William, par André Camp, Revue L'Avant-
Scène, 1998
Annexe : Anne Ubersfeld, L'École du spectateur, 1981
I. Question transversale : réponse semi-rédigée : Vous répondrez d'abord à la question suivante (4 points) :
Comment le dramaturge implique-t-il le spectateur dans la représentation théâtrale de ces trois scènes (textes A, B
et C) ?
Importance évidente du spectateur, destinataire obligé du spectacle théâtral, voué à un rôle plus ou
moins actif dans la scénographie.
Corpus opposant une scène d'exposition (L’Autre William) et deux scènes qui tendent vers le
dénouement ou le préparent (L'Avare et Andromaque) ; corpus opposant également 2 monologues
classiques (comédie (L'Avare) et tragédie (Andromaque) de l'âge classique) à un texte contemporain
(L’Autre William). Comment le dramaturge implique-t-il le spectateur dans la représentation théâtrale de
ces trois scènes ?
En fait les dramaturges usent du procédé de la double énonciation ou destination, mais de différentes
façons. Tout d'abord, deux textes sur trois, les extraits de L'Avare et L’Autre William, reposent sur une
implication explicite du spectateur dans la représentation théâtrale, voire, comme par Jaime Salmon,
présente une mise en abyme d’un baroque modernisé.
Pour L'Avare, analyser le jeu sur les pronoms « on », « vous » et « ils » tout particulièrement, qui
renvoient au spectateur et l'impliquent dans l'énoncé théâtral, donc dans sa représentation. Pour L’Autre
William, analyser les pronoms « nous », qui incluent le guide et son public, les visiteurs du château, et
« vous », implicite à travers les formes impératives.
Ces deux textes jouent également sur des questions : nombreuses chez Harpagon, certaines s'adressent
au public et attendent une réponse (« N'est-il point caché parmi vous ? »). Le Guide de L’Autre William,
interroge quant à lui le public, toujours assimilé aux visiteurs du château, (« Tout le monde est là ? ») ou
anticipe sur ses réactions et ses propres questions (« La tête de mort ? Comment savoir ? »)
Il y a donc rupture de l'illusion théâtrale, tout particulièrement dans L'Avare : le personnage n'ignore
plus la présence du public et commente ses réactions (« Ils me regardent tous et se mettent à rire »), le
soupçonne même d’être le voleur de sa cassette. Cette rupture est moins évidente chez Salom, car le
guide n'est pas vraiment un personnage au même titre que Costrand et William : avatar du chœur
antique, il accompagne le public dans l'univers de la pièce et la commente.
Ensuite, en opposition à L'Avare et L’Autre William, le texte de Racine repose sur une implication
implicite du spectateur ; en effet, il s'agit ici d'un monologue tragique : le spectateur est seul et unique
témoin des revirements et hésitations de l'héroïne. Il est placé d'emblée dans les méandres
psychologiques du dilemme tragique et sollicité par les nombreuses questions rhétoriques. Cette
implication est différente de celle provoquée par le monologue de L'Avare : ici, pas de rupture de
l'illusion théâtrale ni de disparition du quatrième mur
: le personnage ignore les spectateurs, mais leur
présence est pourtant la raison d'être de son monologue tragique.
Wikipedia : En théâtre, le quatrième mur est une notion inventée par André Antoine qui voulait recréer sur scène la vraisemblance.
Bien avant lui, Denis Diderot, dans le Discours sur la poésie dramatique (1758), avait formulé l'idée qu'un mur virtuel devait séparer les acteurs des
spectateurs : « Imaginez sur le bord du théâtre un grand mur qui vous sépare du parterre ; jouez comme si la toile ne se levait pas. » (chap. 11, « De l'intérêt ».)
Autre explication de l'esthétique du quatrième mur, par Stendhal cette fois : « L’action se passe dans une salle dont un des murs a été enlevé par la baguette
magique de Melpomène, et remplacé par le parterre. Les personnages ne savent pas qu’il y a un public. » Stendhal, Racine et Shakespeare.
Le quatrième mur est un écran imaginaire qui sépare l'acteur du spectateur. Parallèle au mur de fond de scène, il se situe entre le plateau et la salle, au niveau
de la rampe. Avec ce système, les acteurs ont commencé à avoir des déplacements plus naturalistes et quotidiens, ils pouvaient par exemple jouer dos au
public.
Le public voit alors une action qui est censée se dérouler indépendamment de lui. Il se trouve en position de voyeur : rien ne lui échappe mais il ne peut pas
intervenir. Le personnage peut briser cette illusion en faisant un commentaire directement au public, ou bien en aparté.