Le dixième alinéa du Préambule de 1946 expose que la nation assure à l’individu et à sa
famille les conditions nécessaires à leur développement. Le onzième alinéa du Préambule de
1946 énonce, pour sa part, que la nation garantit à tous la protection de la santé, la sécurité
matérielle, le repos et les loisirs et que tout être humain qui se trouve, en raison de son âge, de
son état physique ou mental, de la situation économique, dans l’impossibilité de travailler, a le
droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence. C’est au législateur
qu’il appartient toutefois, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation, de déterminer les
modalités de mises en oeuvre des principes ainsi proclamés par le Préambule.
Le Conseil constitutionnel a déjà reconnu que ces principes ne faisaient pas, par eux-mêmes,
obstacle à l’institution par le législateur de mécanismes de solidarité mis en oeuvre par des
collectivités territoriales, notamment les départements (décision n° 96-387 DC du 21 janvier
1997). Il faut relever, au surplus, que le pouvoir constituant, en adoptant la loi
constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République, a
marqué que les collectivités territoriales avaient vocation à exercer davantage de
compétences, s’agissant de celles qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon.
Sans doute doit-on considérer, lorsque sont en cause les principes posés par le Préambule de
1946, qu’il appartient toujours au législateur, même après l’intervention de la loi
constitutionnelle du 28 mars 2003, de prévenir par des dispositions appropriées la survenance
de ruptures caractérisées d’égalité dans la mise en oeuvre, par des collectivités territoriales,
des compétences qui leur sont confiées. On peut, en particulier, considérer qu’il doit en aller
ainsi en matière d’allocations d’aide sociale qui répondent à une exigence de solidarité
nationale, mises en oeuvre par les départements (décision n° 96-387 DC du 21 janvier 1997 ;
décision n° 2001-447 DC du 18 juillet 2001).
Mais, au cas présent, il ne fait pas de doute que le législateur a pris les mesures appropriées
pour éviter que l’attribution aux départements de la mise en oeuvre du revenu minimum
d’insertion n’entraîne des ruptures caractérisées d’égalité.
A cet égard, on doit souligner que le revenu minimum d’insertion demeure un droit pour tous
ceux qui remplissent les conditions mises à son attribution et que ces conditions d’attribution,
notamment les conditions d’âge, de ressources et de composition du foyer, comme le montant
et le régime de l’allocation ou encore les règles relatives à la répétition d’allocations indues,
demeurent fixées par le législateur ou par le pouvoir réglementaire général. Ces éléments de
cadrage essentiels demeurent déterminés, pour l’ensemble du territoire national, par des
autorités de l’Etat. On peut ajouter que l’Etat assumera le contrôle de la mise en oeuvre du
dispositif par les départements, par la voie du contrôle de légalité exercé par les préfets et par
la voie de missions de contrôle exercées par l’inspection générale des affaires sociales. L’Etat
demeure, enfin, responsable du suivi des politiques conduites en matière d’allocation et
d’insertion des bénéficiaires du revenu minimum d’insertion ; à cet effet, la loi déférée a
prévu la transmission au préfet, par le président du conseil général, de données comptables et
d’informations relatives aux bénéficiaires et aux prestations.
On doit aussi relever que les décisions individuelles, désormais prises par le président du
conseil général, demeurent susceptibles d’être contestées devant les juridictions d’aide
sociale. Les décisions de refus ou celles qui suspendent ou mettent fin au versement de
l’allocation devront, d’ailleurs, être motivées en vertu des dispositions générales de la loi du