PILAR - »asopis za druπtvene i humanistiËke studije / Godiπte VI. (2011.), br. 11(1)
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En Croatie, les années 1900 se confondaient avec une phase de transition. L’échi-
quier politique subissait des évolutions constantes et les
unionistes
du Parti nation-
al, les
magyarons
, auxiliaires de la domination hongroise sur le royaume, et majori-
taires à la diète (le
Sabor
), assistaient indifférents aux affrontements et réconcilia-
tions, aux tentatives d’alliance et aux divorces successifs de leurs adversaires. Jus-
qu’à la fin du XIXesiècle, la résistance avait gravité autour de deux pôles principaux:
le Parti national indépendant, soutenu par le chanoine Franjo RaËki et l’évêque de
–akovo Josip Juraj Strossmayer,55champions de l’idée
yougoslave
dans une per-
spective
croatiste
et
austro
-
slaviste
, et le Parti du droit dont les membres, les
prava-
πi
, avec Ante StarËeviÊ en tête de gondole, s’étaient à l’origine assigné pour mission
de préparer le terrain à la libération de la Croatie par les puissances étrangères et
avaient fini par reconnaître la légitimité des Habsbourg.66La scission du second en-
fanta en 1895 le Parti pur du droit sous la houlette de l’avocat Josip Frank.77Les fig-
ures historiques de la vie politique s’effaçaient progressivement et un renouvelle-
ment des cadres et des idéologies s’opérait lentement. La nouvelle génération se dis-
putait leur héritage tout en le jugeant dépassé et obsolète. Elle se sentait capable de
tenter ses propres expériences pour parfaire le travail des anciens. Le conflit clas-
sique en Europe centrale entre
libéraux
et
nationaux
fit ainsi place à un pullulement
de courants et de mouvements, et à un émiettement du paysage politique para-
doxalement concomitant aux entreprises de rassemblement des forces les plus effi-
caces jusque-là dans le combat contre l’hégémonie de Budapest.
En 1903, la
banovina
fut remuée par un violent
mouvement populaire
aux
accents anti-magyars, durant lequel les paysans se retrouvèrent souvent en première
ligne face aux forces de l’ordre.88Dans la foulée, Khuen-Héderváry quitta Zagreb
pour endosser le rôle de ministre-président de Hongrie. Le fragile
Parti croate du
droit
,99fraîchement bricolé par l’assemblage des principales tendances opposition-
nelles, commençait déjà à prendre l’eau, fissuré de toutes parts. Les frères RadiÊ
crurent percevoir une occasion à saisir, un climat général propice, voulurent battre
le fer encore chaud et charpentèrent, au cours des années 1904—1905, le
Parti po-
55Sur les deux hommes voir Franjo ©ANJEK (dir.),
Meunarodni znanstveni skup Josip Juraj Strossmayer
,
Hrvatska akademija znanosti i umjetnosti, Zagreb, 2006; William Brooks TOMLJANOVICH,
Biskup Josip
Juraj Strossmayer: nacionalizam i moderni katolicizam
, Hrvatska akademija znanosti i umjetnosti — Dom
i svijet, Zagreb, 2001; M. GROSS,
Vijek i djelovanje Franje RaËkoga
, Novi Liber, Zagreb, 2004.
66Voir entre autres M. GROSS,
Izvorno pravaπtvo. Ideologija, agitacija, pokret
, Golden marketing, Zagreb,
2000; M. GROSS,
Povijest pravaπke ideologije
, SveuËiliπte u Zagrebu — Institut za hrvatsku povijest, Za-
greb, 1972; Josip HORVAT,
Ante StarËeviÊ: kulturno-povijesna slika
, A. Velzek, Zagreb, 1940; Dubravko
JEL»I∆, Tomislav SABLJAK (dir.),
Ante StarËeviÊ i njegovo djelo
, Hrvatska akademija znanosti i umjetnosti,
Zagreb, 1997; Jasna TURKALJ, Zlatko MATIJEVI∆, S. MATKOVI∆ (dir.),
Pravaπka misao i politika
, Hrvatski
institut za povijest, Zagreb, 2007.
77Se référer à S. MATKOVI∆,
»ista stranka prava 1895.—1903.
, Hrvatski institut za povijest, Zagreb, 2001.
88Voir
»asopis za suvremenu povijest
, Zagreb, t. 37, 2005, n° 3 (livraison entièrement consacrée aux
événements de 1903).
99Il regroupait le Parti du droit, le Parti national indépendant, la Jeunesse progressiste, la Communauté
ouvrière croate de tendance chrétienne sociale et s’allia un temps au Parti pur du droit.