Présentation
Si l'on peut parler de succès à propos de l'émergence des nouvelles technologies de
l'information et de la communication (NTIC), c'est d'abord parce que ses concepteurs et ses
diffuseurs ont su en faire un outil capable de s'adapter à tous les milieux et de rendre service
partout où l'on manipule des signes (c'est-à-dire dans presque tous les domaines de l'activité
humaine). La première réussite des NTIC est de faciliter et accélérer certaines tâches
autrefois laborieuses, mais elles peuvent aussi en venir à modifier radicalement la manière
même de travailler en général, en instaurant un nouveau mode de traitement de
l'information, dont l'originalité est sans doute que, plus que tout autre, en rendant les signes
"manipulables" et transmissibles par essence, il substitue à un modèle de gestion centralisé
un modèle en réseau, reposant sur des processus de réciprocité et d'échange.
C'est en ce sens que les NTIC recèlent un germe de démocratisation de la société toute
entière. Il ne s'agit pas seulement de dire qu'elles facilitent la réception et l'envoi de
messages et d'informations. Il faut aussi, plus profondément, qu'elles réussissent à constituer
un champ d'interactions et d'échanges où tous les types d'acteurs puissent venir s'inscrire,
qu'elles soient capables de soutenir un monde commun, un espace d'élaboration d'une vie
publique à l'échelle de la planète. C'est pourquoi il est important d'encourager le processus
de socialisation qui est à l'oeuvre dans l'histoire de ces technologies, d'abord conçues dans
un cadre militaire, puis passées par pans entiers dans la sphère publique grâce à l'action de
nombreux chercheurs et d'informaticiens. Mais il faut également affirmer cette vocation
sociale face aux risques d'un contrôle exclusif des NTIC par les intérêts financiers et
commerciaux, qui ne peuvent que contribuer à la dissolution des espaces collectifs au profit
de la sphère individuelle de consommation.
Il est évident que les NTIC peuvent déboucher sur le meilleur comme pour le pire. Agir pour
faire éclore les innovations sociales dont ces technologies sont porteuses implique avant tout
de comprendre qu'elles ne créent pas immédiatement de nouvelles conditions, mais
s'appuient d'abord sur les conditions existantes, suivent les lignes de partage et de fracture,
quitte à les modifier et à les renouveler progressivement. Il faut saisir la manière dont les
NTIC s'inscrivent, à différents niveaux, dans des rapports de force (culturels, politiques,
économiques, etc.) pour savoir où et comment peser pour infléchir leur évolution - et, par là,
l'évolution de ces rapports eux-mêmes.
Les fiches de ce dossier sont extraites pour la plupart de la base de données
Dialogue pour le Progrès de l'Humanité (DPH).
Dossier réalisé par Olivier Petitjean, FPH. Adresse : 38, rue Saint-Sabin 75011 Paris.