Les structures sémantiques et discursives
du texte de visite (musées et monuments)
A la suite des analyses de Bakhtine, et des très nombreux travaux qu’elles ont
suscités, nous nous proposons de réfléchir au genre discursif du texte de visite guidée.
Chacun peut remarquer que l’activité sociale de la visite, qui tend d’ailleurs à
s‘universaliser, est fréquemment pratiquée avec un texte d’accompagnement, oral ou écrit,
produit spécialement pour cette occasion (guide de musée, guide de monument ou bien
guide d’exposition..). Dans ce genre discursif, les articulations entre la langue et les
paramètres contextuels sont particulièrement importants et complexes, puisque le texte de
visite guidée se présente, en quelque sorte, comme un médiateur sémantico-discursif
entre le lieu, le référent et le visiteur.
Dans une perspective essentiellement synchronique, nous voudrions donc montrer
comment les structures linguistiques de différents niveaux (séquences textuelles,
déictiques, adverbes de lieu ou de temps, marqueurs de référenciation et de délocution
etc…) produisent et construisent, pour le visiteur-lecteur, un cadre langagier d’accès au
référent et de représentation d’un destinataire idéal de la visite. En même temps, c’est
bien évidemment toute une signification de l’action sociale de la visite qui est déterminée
par le langage du guide.
Nous nous consacrerons exclusivement au texte écrit, en analysant un corpus
français de guides de musée, de monument (par exemple : le Guide du Louvre, le Guide
de Beaubourg, le Guide Vert et le Guide Bleu des Châteaux de la Loire).
Notre étude se développera selon les étapes suivantes :
* la définition du cadre spatio-temporel
- le texte de visite hésite souvent entre l’actualisation de la visite au présent, - parce
qu’il construit la durée de la visite du destinataire (temps de lecture et rythme de
déplacement) -, et le temps éternel et décontextualisé de l’oeuvre d’art
(contemplation illimitée et temporalité intérieure du sujet visiteur). On verra donc,
entre autres, le sémantisme des verbes, les temps de ces verbes, ainsi que les
infinitifs et les constructions participiales.. etc ;
- l’espace, quant à lui, est structuré dans le texte pour mettre en rapport le référent
(l’oeuvre ou le monument) avec le point de vue et le regard du visiteur (adverbes,
décictiques, connecteurs…)
* la présentation orientée et catégorisée du référent
- le référent est un objet cognitif qui est inséré, de manière plus ou moins marquée,
dans différents champs du savoir (séquences descriptive et explicative ancrées
dans l’histoire de l’art, dans l’esthétique, référenciation par la biographie des
artistes, etc..)
- ce référent est la source d’une expérience sensible, centrée en particulier sur le
visible (isotopie de la perception, caractérisation et définition du délocuté visiteur
comme sujet de la perception…)
* la mise en évidence d’un dispositif de communication
- l’instance énonciative peut être prescriptive, contraignante, suggestive…
(différentes formes et modalités des tournures d’obligation…)
- le destinataire idéal de la visite est l’objet d’une véritable mise en scène textuelle
(procédés d’adresse et/ou de délocution, qualifications implicites etc…)
- le dispositif de communication à une fonction pédagogico-didactique et un effet de
séduction (stratégies discursives destinées à produire un effet pragmatique
complexe)