Vertitude Magazine : Ce n’est peut-être qu’une impression, mais il semble
que le thème du développement durable inspire nombre d’annonceurs et de
publicitaires. Comment peut-on s’expliquer ce phénomène et faut-il s’en
réjouir ?
Il est exact que la communication a connu un réel engouement sur le développement
durable car c’est un thème susceptible de concerner l’ensemble des publics de
l’entreprise. Les clients, bien sûr, même si l’on constate un décalage considérable
entre le déclaratif et le comportemental, les investisseurs car la démarche de
développement durable réduit le risque pour les actionnaires, les salariés puisqu’il
s’agit là d’un des rares thèmes consensuels dans l’entreprise, les jeunes diplômés
puisqu’au travers de l’image, ils s’orienteront préférentiellement vers les entreprises
réputées socialement engagées.
Je suis plutôt optimiste sur cette tendance car je crois au pouvoir prédictif de la
communication. La communication ne reflète pas forcément la réalité, mais elle
l’appelle. Elle intervient comme une balise indiquant le cap à atteindre, elle vise à
institutionnaliser ce qui n’est encore qu’une promesse.
Vertitude Magazine : Quelles sont, à votre avis, les campagnes les plus
abouties ? Y-a-t-il différents degrés dans l’utilisation de ce concept ?
Certaines sont explicites, d’autres implicites, les dernières reprennent le
concept à leur compte : leur produit devient par extension durable. Enfin,
pour ce qui est des publicités vantant, par exemple les automobiles on a de
plus en plus d’informations sur les taux d’émissions et de moins en moins
sur les prix, etc.
Les entreprises qui donnent la parole à leurs parties prenantes s’engagent sur leur
crédibilité, de ce point de vue des groupes comme Danone ou Lafarge sont en
avance. Les communications de Monoprix, Dexia ou Veolia me semblent également
réussies en ce qu’elles ont mis en place des indicateurs très rigoureux sur leurs
actions environnementales. Je considère la communication de Shell comme un
modèle, surtout la campagne expliquant la raison de son engagement sur
l’environnement. Sur le visuel, il était simplement figuré des billets de banque. Loin
des promesses trop vaporeuses, je crois que c’est le type de message que le public
peut comprendre : l’entreprise ne fait pas de l’environnement par philanthropie, mais
parce que c’est aussi, et peut-être surtout, son intérêt.
Vertitude Magazine : Qu’avez-vous pensé de la campagne de
communication de Carrefour, intitulée « Mieux consommer, c’est urgent » ?
Le procès d’intention qui a été fait à Carrefour était-il, à votre avis, justifié ?
La parole de Carrefour est légitime et compréhensible. Je pense que Carrefour a un
vrai engagement et leur rapport « Développement durable » en apporte une
illustration. Ils ont un partenariat très vigilant avec la Fondation Internationale des
droits de l’homme. En outre, ils sont sur un marché très concurrentiel où il leur était
très difficile de laisser le monopole de la communication citoyenne à des groupes
comme Auchan ou Leclerc. Par contre, je suis sceptique sur le message véhiculé, il y
a comme un double décalage. Un décalage en amont, parce que la perception du
groupe Carrefour et de ses activités ne correspond pas au contenu du message, le