Faire société, faire association, faire institution.

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ANRAS - 2017
Faire société,
faire association,
faire institution.
Assemblée Générale de l’ARDESS 2017
Andrés Atenza,
Directeur Général de l’ANRAS,
PhD en philosophie et sociologie, Exécutive MBA
De la description à la question
• La « bonne société », « société à responsabilité limitée », « société de
chasse », « société de consommation », « société du spectacle » : le
mot société est généralement accompagné de qualificatifs.
• La société apparaît comme une donnée et non comme une essence,
elle est une condition d’existence et non pas une abstraction.
• Penser la société consiste à penser un objet qui est en même temps
un fait. Cela, Auguste Comte l’a mis à jour très clairement, l’étude de
la société est le point culminant de l’esprit positif, de l’esprit
d’observation.
Diapositive n° 2
La société, une réalité de fait
• La société n’est pas une construction intellectuelle, elle est une
donnée incontestable. Comme telle, elle peut être appréhendée par
la catégorie de « fait ».
• La société n’est pas contingente en ceci qu’elle est toujours présente
dans l’horizon de notre expérience : nous n’avons pas l’expérience de
sa non-existence.
• La figure de Robinson n’est possible qu’à titre de fiction : le naufragé
souffre de l’isolement parce qu’il a connu la vie sociale ; si tel n’était
pas le cas, il n’aurait pas accédé à l’humanité.
Diapositive n° 3
• L’exilé, Victor Hugo à Guernesay, est mis hors de la société par
contrainte : cette figure de l’isolement forcé confirme de toute
évidence la prégnance de la société comme condition ordinaire de
l’homme.
• La nécessité de la société apparaît d’abord comme une nécessité de
fait et non pas une nécessité de raison : nous affirmons qu’elle ne
peut ne pas être parce que nous constatons le fait de la réalité
universelle.
Diapositive n° 4
• La société est partout et nulle part ; elle n’est pas plus dans la
brasserie que dans la rue, pas plus dans les manières de table que
dans les coutumes amoureuses. Elle ne tient pas aux choses ni aux
individus, mais aux relations. Le mode d’être de la société est la
relation et non la substantialité.
Diapositive n° 5
La société, un système complexe
• La société est le lieu des passions avant d’être le lieu des intérêts :
l’ambition, la haine, l’amour, l’avarice, se déploient uniquement dans
la société parce qu’en elle, et en elle seule, peut prendre place le jeu
des allusions, des équivoques, des représentations.
• La relation à autrui est insérée dans une combinatoire de relations ;
les hommes se complaisent dans la relation sociale parce qu’ils
sentent confusément qu’ils en obtiennent un gain d’humanité.
Diapositive n° 6
• Dans la « Phénoménologie de l’esprit » Hegel indique que la première
civilisation est celle du meurtre, puis celle de la dialectique du maitre
et de l’esclave, les classes sociales selon Marx ne prennent conscience
d’elles mêmes qu’en s’opposant dans la lutte des classes .
• Les supporters s’identifient à un club en s’opposant parfois
violemment aux autres clubs.
• L’union fait la force, encore faut-il qu’il y ait une menace, une peur de
l’Autre. L’identité et l’unité d’une société procèdent de sa
confrontation à l’altérité, à l’adversaire, aux peurs qui la hantent.
Diapositive n° 7
Les peurs contemporaines permettent-elles
de faire société?
• Les fameuses peurs de l’an mil, l’inquiétude diffuse comme le dit le
grand historien Georges Duby, aujourd’hui nous sommes dans cette
même inquiétude de la globalisation, des migrants, des complots
divers, un vent de panique habite les sociétés modernes.
• Il existe un lien étroit entre les peurs et les utopies, elles cultivent le
rationnel, l’émotionnel et l’irrationnel.
Diapositive n° 8
• Les nouvelles utopies ne sont pas des idéologies dans la mesure où
elles sont plus inductives que déductives, plus expérimentales que
théoriques, plus vagues que rigides, plus évolutives que figées.
• Hans JONAS est à cet égard déconcertant. Il initialise brillamment
l’éthique et la philosophie de l’écologie en élargissant l’impératif
catégorique de Kant « agis de façon que les effets de ton action soient
compatibles avec la permanence d’une vie authentiquement humaine
sur terre ». (Principe de responsabilité)
Diapositive n° 9
Peurs et utopies mobilisatrices de la société
• Ce ne sont pas directement les peurs qui soudent la société, mais la
sublimation spirituelle des peurs en interpellation vécue d’une
transcendance, d’un ailleurs inconnu qui s’adresse à nous et nous
mobilise. L’utopie donne du sens.
• Les droits de l’hommes sauvent chaque homme de l’oppression, mais
ne sauve pas l’humanité, il faut donc une utopie écologique pour
penser un droit naturel, une loi du vivant que ne soit pas la jungle.
Diapositive n°
L’utopie de la sacralisation de la personne
humaine.
• Une autre grande peur contemporaine est celle des fanatismes. Ceuxci ne se réduisent pas aux fanatismes religieux et terroristes, il y a des
fanatismes politiques, scientifiques, des apprentis sorciers, il y a le
fanatisme financier de la mondialisation ultralibérale.
• La valeur d’un homme n’est pas relative à sa valeur marchande, à son
utilité, à ses performances. Elle est absolue. L’idée collective se fait
jour d’un respect inconditionnel de la dignité de la personne
humaine. Puisque toute vérité n’est que relative et provisoire et le
bonheur annoncé est plus ou moins déjà illusoire, rien ne vaut la
peine qu’on sacrifie l’homme sur l’autel d’une soi-disant vérité ou
d’un soi-disant bonheur.
Diapositive n°
• Faire société, c’est d’abord faire humanité contre l’inhumanité du
fanatisme ou l’inhumanité du matérialisme, l’une et l’autre niant,
chacune à sa façon, le caractère sacré de la personne humaine.
• Sa dignité en acte est de respecter la dignité des autres et d’être
respectée. Les personnes font société.
Diapositive n°
L’utopie du nomadisme planétaire
• La peur de l’immigration est le fonds de commerce de bien de
populismes.
• En rejetant le communautarisme, en choisissant l’intégration
républicaine des immigrés, en défendant la diversité culturelle, en
encourageant le métissage de couples interculturels tout en
dénonçant les syncrétismes culturels schizophréniques, en voulant
tout et son contraire, la société ne sait plus qui elle est ni autour de
quelles valeurs s’unifier.
Diapositive n°
L’utopie de l’économie du don
• L’avidité, la cupidité, la vénalité, la spéculation et la folie des marchés
financiers imposent leurs lois au monde. Cette adversité va-t-elle
susciter une nouvelle forme de socialisation ?
• En effet il se développe ce qu’on appelle une économie du don aux
aspects multiples : la politique des transferts sociaux par la fiscalité et
la protection sociale, les actions caritatives et les fondations issues
des grandes entreprises, l’économie sociale et solidaire, les
mutuelles…
• Il faut donc être plus attentif à la valeur du lien social qu’à la
concurrence arriviste.
Diapositive n°
• « la réciprocité, à la différence du marché est une relation […] qui
conçoit les individus en relation de complémentarité et
d’interdépendance volontaire. […] La réciprocité ainsi conçue peut
être rapprochée du don » écrit Elena Lasida.
Diapositive n°
Faire association :
une approche du changement démocratique
• Investir l’espace public, orienter son action vers la justice et la
sincérité, tels sont les engagements de tous ceux qui font association.
• Quand l’espace public est contrait par la pression du pouvoir
administratif et du marché, accaparé par les impératifs catégoriques,
la vie démocratique est alors suspendue ; il convient d’inventer des
lieux libres de débats, il convient de rendre compte de la tension dans
cet espace public et organiser la dynamique démocratique.
Diapositive n°
• Les sujets démocratiques font association en créant des liens de
socialisation et d’individuation, la finalité politique n’est pas
première, les personnes libres éprouvent un pouvoir d’agir ensemble.
• L’apport des associations à la démocratie tient à ce qu’elles sont des
lieux dans lesquels les citoyens peuvent définir eux-mêmes les
modalités de leur action.
• L’association tire sa cohérence dans le conflit qui l’oppose aux
pouvoirs organisés, elle revendique le bien commun et met en
exergue les insuffisances de la société .
Diapositive n°
Faire institution
• On oppose souvent agir et penser, comme si l’action avait plus
d’importance dans la réalité que la pensée.
• Or la pensée ne précède pas l’action, elle ne lui succède pas non plus ;
la pensée est une action : penser c’est agir, parce que c’est modifier
les représentations du réel que nous portons en chacun de nous et,
par là, modifier volontairement ou involontairement nos modes
d’action.
• Agir citoyennement pour la santé et la solidarité c’est d’abord un acte
de pensée un acte fondateur de l’action au sens du « je peux » de
l’homme capable, pour reprendre l’expression de Paul Ricoeur.
Diapositive n°
• Penser le « je peux agir » c’est créer des liens dynamiques entre le
sens et notre capacité à vivre dans une même société, inventer les
liens de proximité humains nécessaires à la communauté.
• Faire institution c’est imaginer les espaces de pouvoirs et de
délibérations.
• Donner vie aux instances délibératives et organiser la prise de la
parole, faire institution c’est aussi pointer la question de l’autorité,
penser une utopie managériale.
Diapositive n°
• Faire institution c’est augmenter l’autorité et la responsabilité,
l’institution c’est un tétraphamakon, une pharmacopée autour de 4
vertus cardiales : le sens des limites, le sens des possibles, le sens du
bon et le sens de la totalité.
Diapositive n°
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