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PATHOLOGIE DE L’INTESTIN GRELE
DU COLON ET PROCTOLOGIE
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DIARRHEES AIGUES DE L’ADULTE
Louis Buscail, Jacques Frexinos
1) DEFINITION :
Diarrhée (augmentation journalière du volume et du nombre des selles) évoluant depuis
moins de 10 jours.
Il s'agit d'une pathologie extrêmement fréquente qui ne nécessite le plus souvent qu'un
traitement symptomatique. Toutefois elle peut engager le pronostic vital soit en raison du
terrain (âges extrêmes : enfant, vieillard ou terrains débilités), soit en raison des causes.
Enfin, une diarrhée aiguë peut être le mode de révélation d'une maladie chronique. Parmi
les causes de diarrhées aiguës, les toxi-infections alimentaires sont en France extrêmement
fréquentes et justifient une déclaration obligatoire.
2) ETIOLOGIES DES DIARRHEES AIGUES
2.1. DIARRHEES AIGUES INFECTIEUSES (la pathogénie des différents
germes est détaillée dans le cours sur diarrhée aiguë de l’enfant par J-P. Olives)
2.1.1) DIARRHEES BACTERIENNES
A) BACTERIES INVASIVES
Physiopathologie: Les germes invasifs sont souvent responsables du syndrome
dysentérique. Ces germes pénètrent et se multiplient dans les entérocytes (invasion pariétale)
du et provoquent des lésions muqueuses visibles en coloscopie. Le mécanisme est un défaut
de réabsorption et de sécrétion. La fièvre est fréquente, les évacuations sont évacuations
fréquentes, souvent afécales, glaireuses et sanglantes, associées à des douleurs violentes, et
habituellement à des signes d'irritation de la muqueuse rectale (syndrome rectal : faux
besoins, ténesme, épreintes).
Les risques essentiels sont la perforation intestinale et la colectasie, le syndrome infectieux
général (choc septique), les rectorragies sévères. Mais il n'y a pas habituellement de
déshydratation.
a) SALMONELLOSES
Deux types:
- Fièvres typhoïde et parathyphoïdes A, B et C
Réservoir humain et porteurs sains.
Transmission : mains sales, eau, crudités, lait, coquillages, ...
Incubation 10-20 jours (septicémie lymphatique)
1ère sem.: -> Hyperthermie sans tachycardie, constipation.
2ème sem.: -> Diarrhée, tuphos, splénomégalie
-> Rare perforation intestinale, cholécystite
Biologie: leuconeutropénie.
Diagnostic par Hémocultures - Coprocultures – puis par Sérologie dans la 2ième semaine.
Traitement : Fluoroquinolones (++), Ampicilline, triméthoprime (posologie progressive, ce
d'autant que la symptomatologie est grave, durée 15-21 J). Déclaration obligatoire.
- Salmonelles mineures : elles représentent la plupart des toxi-infections alimentaires.
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Réservoir : animaux domestiques. Il existe plus d'un millier de sérotype. Transmission:
aliments souillés (charcuterie, viande, pâtisserie)
Incubation:12-24 h après l'ingestion massive de germes
Diarrhée dysentérique - Fièvre à 40°C- Vomissements
Epidémies estivales, collectivités (++)
Evolution: 2-5 jours
Coproculture apporte la preuve bactériologique et permet antibiogramme - Sérologie inutile
(nombreux sérotypes ! - tardif)
Traitement : controversé : en général pas d'antibiothérapie, sauf sujets à risque (inefficace et
sélectionne des souches résistantes et des porteurs sains). Ne traiter que si GRAVITE ou
atteintes extra-digestives afin de limiter l'émergence de souches résistantes. Déclaration
obligatoire
b) SHIGHELLOSES
Shigella sonnei : la plus fréquente en France, S. dysenteriae, S. flexneri, et S. boydii
Réservoir de germes strictement humain. Rare en Europe Transmission inter-humaine (mains
sales, eau, fruits, ...) .
Incubation 48-72 heures.
Diarrhée dysentérique « dysenterie bacillaire » - Fièvre (39-40°c) - Vomissements
Rares manifestations neurologiques (convulsions), mégacôlon, manifestations
rhumatologiques.
Coproculture – La sérologie se positive tardivement
Antibiothérapie si atteinte sévère: Bactrim®, Ampicilline, Quinolones
Déclaration obligatoire.
c) CAMPYLOBACTER JEJUNI et COLI
Réservoir animal. Contamination aliments souillés (lait cru, volailles, ...) ou inter-humaine
Trois tableaux cliniques:
- Diarrhée dysentérique fébrile durant 15 jours (prodromes 3-5 jours)
- Abdomen aigu (simulant l'appendicite aiguë ou la péritonite)
- Fausse invagination intestinale (nourrisson)
Coproculture en milieu spécifique
Antibiothérapie non systématique: Erythromycine (10 jours)
d) YERSINIOSES
Y. Pseudotuberculosis et Y. Enterocolitica
Réservoir animal: oiseau, rongeur, bétail, porc..
Incubation: 7-12 J
Deux formes cliniques digestives (hyperthermie, parfois chronique)
- Douleur de la fosse iliaque droite (Y. Pseudotuberculosis) : pseudo-appendicite
(iléite)
- Syndrome dysentérique sanglant (Y. Enterocolitica)
Elles sont surtout remarquables par les manifestations ou formes extra-digestives : fièvre
scarlatiniforme, septicémie, érythème noueux, arthralgies (HLA B27), atteintes occulaires ou
ostéites. Il faut aussi connaître la possibilité d'évolution chronique avec atteinte iléale ulcéro
nodulaire mimant la maladie de Crohn.
Coproculture (milieu spécifique) en phase aiguë (rarement +). Sérologie ++ (répétée à 3
semaines d'intervalle).
Antibiothérapie non systématique : Bactrim® (5 -28 J), Cyclines ou fluoroquinolones.
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e) ESCHERICHIA COLI : trois formes possibles
- Entéro-invasive la plus fréquente
- Entéro-toxinogènes
- Entéro-pathogène
Daignostic par coproculture mais la pathogénicité est difficile à affirmer
f) SYNDROME DE FIESSENGER-LEROY-REITER
Dans la forme typique décrit l’atteinte oculo-uréthro-synoviale (conjonctivite, uréthrite
amicrobienne, arthrites asymétriques touchant les grosses articulations)
Les manifestations digestives (diarrhées dysentériformes) sont inconstantes. Importance du
terrain (HLA B27 dans 75 % des cas).
Il s'agit d'infection à Chlamydiae (sérologie)
Traitement : Tétracyclines (21 J)
B) BACTERIES ENTEROTOXIGENES
Physiopathologie : Les germes entérotoxigèniques sont responsables du syndrome
cholériforme (diarrhée sécrétoire) : L'exemple type en est le choléra. Les germes sont
adhérents à la muqueuse mais ne la pénètrent pas et ne la lèsent pas, ils agissent par sécrétion
de toxine entéropathogène qui agit au niveau de l'intestin grêle et provoque une
hypersécrétion hydro-électrolytique par stimulation de l'AMP cyclique.
En endoscopie, il n'y a donc pas de lésion colique et l'histologie est pratiquement normale. Il
s’agit d’une diarrhée aqueuse (parfois afécale), brutale, très abondante. Peu ou pas de
douleurs abdominales, pas de syndrome rectal et pas de fièvre. Par contre les signes de
déshydratation sont souvent présents qui peut aller au maximum jusqu'au collapsus.
a) CHOLERA
Bacille Gram négatif mobile. Réservoir humain. Porteurs sains. Contexte d'épidémie dans des
populations sous-alimentées.
Transmission : mains sales, vomissements, selles (contagieux ++)
Incubation: 1-7 jours
Diarrhée cholériforme typique (« eau de riz »)
Les pertes sont importantes (jusqu’à 5 à 10 l/J) : eau, Na+, K+, Cl-, bicar. L'absorption du
glucose est normale et peut permettre la réhydratation orale.
Diagnostic : oproculture en milieu spécifique
Le traitement repose sur la réhydratation, il est urgent car risque de collapsus
+ ou - antibiothérapie (Néomycine®, Tétracyclines (IV, PO), Bactrim®). Inconvénients :
favorise porteurs sains mais réduit la durée.
Déclaration obligatoire.
b) ESCHERICHIA COLI
Ce sont des E-coli entéro-toxigénes ou mixtes
Fréquente voir :diarrhées des voyageurs ("la Turista")
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c) STAPHYLOCOQUE DORE
Toxi-infection (aliments contaminés par porteurs d'une staphylococcie. « Tableau classique
du cuisinier qui a un panaris »
Endotoxine (++) thermostable avec germe thermolabile.
Tableau clinique très typique avec : après une incubation très courte (1-4 h), apparition d’une
diarrhée brutale associée à des douleurs très violentes, vomissements, sans fièvre (et
éventuellement un collapsus ).
Diagnostic clinique - Traitement symptomatique
d) CLOSTRIDIUM PERFRINGENS
Toxi-infection alimentaire à base de plats préparés (++). Incubation 10-12 h. Syndrome
dysentérique
Souvent bénin,...mais parfois déclenche des entéro-colites nécrosantes (nécrose complète du
grêle ou du côlon) : dans ce cas tarietment antibiotique (Bactrim®, Pénicillines).
e) AUTRES TOXI-INFECTIONS
Klebsielles, pyocyaniques, ...Et certaines bactéries invasives...
2-1-2) DIARRHEES AIGUES D'ORIGINE VIRALE
Gastro-entérites à symptomatologie polymorphe très fréquentes chez les enfants, et les
nourrissons (cf cours suivant)
Représentant plus de 80% des diarrhées infantiles.
Contexte d'épidémie et contexte "pseudo-grippal". Hyperthermie, douleurs abdominales,
céphalées, myalgies, vomissements, atteintes ORL.
Lymphocytose inconstante
Durée 4-7 J avec risque de déshydratation
Bénignes, en dehors d'une atteinte méningée associée
Pas de sérologie en routine.
Traitement symptomatique
a) ROTAVIRUS (++)
50% des diarrhées aiguës du nourrisson et du jeune enfant (hiver ++). Egalement chez
l'adulte
b) ENTEROVIRUS :
Poliovirus (3 types), Coxsackies A (25) et B (6), Echovirus (> 30). Virus pathogènes :
Parvovirus (++ - Norwalk), Réovirus (++)
2-1-3) DIARRHEE D'ORIGINE PARASITAIRE
Les parasitoses sont le plus souvent responsables de diarrhées chroniques, on ne les évoquera
donc pas d'emblée.
Devant une diarrhée aiguë fébrile au retour d'un pays tropical on évoquera toujours le
paludisme (frottis, goutte épaisse) et l’on fera une examen parasitologique des selles ainsi
qu’une sérologie amibiase. Il s’agira :
- de Giardia intestinalis (Lamblia) (+++) en France. Traitement : Flagyl® (7 J)
- d’une dysenterie amibienne: syndrome dysentérique souvent sanglant, non fébrile
(Entamaeba histolytica avec ulcération rectales « en coups d’ongles ». Le traitement
repose sur le Flagyl® (10-20 J).
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