SAISON 09/10 Forêts Du mercredi 7 au mardi 13 octobre 2009 Au Grand T © lino Dossier Jeune Public 1 Sommaire Présentation p.3 Autour du spectacle p.4 Le propos p.5 Les personnages de Forêts : généalogie p.6 De l’écriture à la mise en scène p.7 Les intentions de mise en scène Entretien avec Wajdi Mouawad p.9 Wajdi Mouawad, auteur et metteur en scène p.11 Forêts, extrait p.13 Les échos de la presse p.15 2 Forêts Texte et Mise en scène Wajdi Mouawad Assistant à la mise en scène et régie Scénographie Dramaturgie Lumières Costumes Son Maquillage Musique originale Alain Roy Emmanuel Clolus François Ismert Eric Champoux Isabelle Larivière Michel Maurer Angelo Barsetti Michael Jon Fink Avec Jean Alibert Véronique Véronique Côté Yannick Jaulin Linda Laplante Catherine Larochelle Patrick Le Mauff MarieMarie-France Marcotte Bernard Meney MarieMarie-Ève Perron Emmanuel Schwartz Guillaume SéveracSéverac-Schmitz Edmond Hélène, Sarah Achille, Albert Aimée, Odette Ludivine Douglas Dupontel Léonie, Luce Baptiste, Alexandre Loup Samuel Cohen Lucien, Edgar Production Compagnie Au carré de l’hypoténuse Espace Malraux / scène nationale de Chambéry et de la Savoie Coproduction Abé Carré Cé Carré, compagnie de création, le Fanal / scène nationale de Saint-Nazaire, le Théâtre de la Manufacture / centre dramatique national de Nancy-Lorraine, la scène nationale d’Aubusson / Théâtre Jean Lurçat, l’Hexagone / scène nationale de Meylan / les Francophonies en Limousin / Le Beau Monde ? compagnie Yannick Jaulin, la scène nationale de Petit-Quevilly Mont-Saint-Aignan, Le Grand T / scène conventionnée Loire-Atlantique, le théâtre du Trident à Québec, l’Espace Go à Montréal Avec le soutien de Théâtre 71 / scène nationale de Malakoff, la Région Rhône-Alpes, le Centre national du livre, le Conseil des Arts et des Lettres du Québec, le Conseil des Arts du Canada, la Commission permanente de coopération francoquébécoise, le Ministère de la Culture et des Communications-Québec, la Ville de Nantes et la DRAC Pays de la Loire, l’AFAA / association française d’action artistique, le Service de Coopération et d’Action Culturelle du Consulat Général de France au Québec, la DRAC Ile de France, le Ministère de la Culture et de la Communication. Du mercredi 7 au mardi 13 octobre 2009 au Grand T à 20h Relâches les vendredi 9, samedi 10 et dimanche 11 octobre Trilogie les samedis 10 et 17 octobre à 14h au Grand T - Nantes Durée du spectacle : 4h (entracte compris) Public : à partir de la 1ère / Tarif : 9€ par élève ou un pass-culture 3 Autour du spectacle Rencontres et conférences autour du Sang des Promesses de Wajdi Mouawad ● Billetterie du Grand T, Passage Pommeraye à 18h (Entrée Libre) Le mercredi 30 septembre 2009 Conférence sur Wajdi Mouawad par Charlotte Farcet, chargée de la dramaturgie pour Ciels Le mercredi 7 octobre 2009 Rencontre avec Wajdi Mouawad (sous réserve) et ses comédiens ● Théâtre universitaire de Nantes (grande salle) de 13h à 15h (Entrée libre) Le jeudi 8 octobre 2009 Rencontre avec Wajdi Mouawad et l’équipe des spectacles de Littoral et Incendies. Les Carnets du Grand T En vente à la librairie du Grand T N°14 Les Tigres de Wajdi Mouawad Le Grand T / éditions joca seria, 2009 8€ 4 Le propos « Forêts… Si l’on veut une histoire, Forêts est peut-être le récit de sept femmes qui, suite à un événement qui s’abat sur la plus jeune d’entre elles, font brutalement face à l’incohérence de leur existence. Cette plongée forcée à laquelle elles auraient bien voulu se soustraire se fera à travers les fragments éclatés d’un crâne humain retrouvé dans le camp de concentration de Dachau en 1946. Grâce au travail acharné d’un paléontologue qui a perdu tout sens et toute cohérence, chacune de ces femmes verra sa raison mise en pièce puisque là, dans les cendres humaines de cette innommable douleur, irreprésentable, elles déchiffreront, abasourdies, les traces et le futur de leur destinée. Forêts … Forêts… Forêts… Mais si l’on veut vraiment une histoire, on peut aussi dire qu’il s’agit du récit d’une désertion : quittant le champ de bataille en 1917, un soldat, Lucien Blondel, se réfugie au coeur d’une Forêt. Là, traversant une rivière étrange et obscure, serpentant au milieu des arbres, il découvre un zoo où trois femmes vivent au milieu des animaux sauvages. Au coeur de ce paradis improbable, Lucien rencontrera Léonie avec laquelle il vivra une histoire d’amour sans se douter que leur union sera, à l’image de ce siècle, le théâtre de douloureuses déchirures. Forêts… Forêts… Forêts est peut-être l’histoire de cette femme, en 1989, qui apprend qu’elle est atteinte d’un mal incurable, son cerveau étant dévoré par une tumeur. Forêts… Forêts… Forêts est peut-être l’histoire de Loup qui, à l’âge de 16 ans, en 2006, sera forcée d’ouvrir une porte qui la mènera jusqu’aux ténèbres. » © Thibaut Baron Wajdi Mouawad 5 Les personnages de Forêts : généalogie © Wapiti Mangouste 6 De l’écriture à la scène Entretien avec Wajdi Mouawad Vous travaillez de front sur l’écriture et sur la mise en scène. Il vous arrive donc de modifier votre texte en fonction de ce que vous apportent les comédiens. Oui, c’est avant tout un travail d’équipe. Par exemple, pour Forêts on répétait le matin, l’après-midi je retravaillais sur le texte et le lendemain j’apportais de nouvelles scènes. En fin de compte l’écriture et la mise en scène m’importent moins que la construction du spectacle. Je n’hésite donc jamais à couper ou modifier le texte, parfois en direct, parfois le soir même. C’est un peu comme cela, à l’aveugle, que l’on avance. Votre travail en est d’autant plus intéressant, car vous êtes en cela étroitement lié à l’oeuvre. Mais avez-vous déjà assisté à d’autres mises en scène de vos propres oeuvres ? Oui. Mes quatre premières pièces, je les ai écrites dans le secret de ma chambre. Puis, quand j’ai fait la mise en scène de Littoral en 1996, avec des amis, nous n’avions rien d’autre à faire que du théâtre. C’est là que je me suis rendu compte que ce travail, qui s’apparente davantage au travail d’un chorégraphe, m’enflammait beaucoup plus que d’écrire et de mettre en scène après. Puisque d’une certaine manière, cela correspond davantage à ma manière d’être et de vivre le théâtre. Ce qui m’importait c’était de me mettre au service du théâtre, des comédiens. Vous écrivez finalement pour eux ? Oui, c’est-à-dire que lorsque nous commençons à travailler je leur demande des choses très simples, parfois ludiques. Par exemple, ce qu’ils rêveraient de faire sur scène. Les idées qu’ils me donnent sont des idées auxquelles je n’aurais jamais pensé tout seul. Au final, leurs désirs s’accordent à mes intuitions. C’est vrai qu’à force de connaître un acteur, je commence à le comprendre et parfois, même, je le surprends. Je leur révèle des traits qu’ils ne soupçonnaient pas. Je leur donne donc des personnages qui sont nés de ce que j’ai pu voir en eux. Ils sont très souvent beaucoup touchés par cela. Cela leur permet de sentir qu’ils sont la texture première du rôle. Propos recueillis par Laure Dubois evene.fr - Octobre 2006 La Contradiction qui fait tout pour exister « L’événement, souvent, se décide et naît à notre insu. Déjà quand il nous arrive, c’est qu’il a eu lieu. Il est passé, advenu. Nous ne pouvons ni le revoir, ni le regarder, car le temps nous entraîne loin de lui. Il ne reste que le choc de son apparition, de sa venue, de son entrée dans le visible. Notre visible. C’est de cette manière que j’aime regarder une histoire. Croire que c’est elle qui se présente à moi, non pas moi qui l’invente. Située au point exact de mon angle mort, de mon point aveugle, je ne pouvais pas la voir et voilà qu’elle surgit. Elle m’a repéré avant que je ne la repère. Je n’invente rien, je tente simplement d’accueillir. Désir juvénile d’être choisi, sans doute. Cela passera. En attendant que jeunesse se passe, voilà qu’avec la publication de Forêts, je réalise combien, depuis longtemps, je savais, sans le savoir, que j’étais en train de travailler sur une histoire qui s’écrivait en quatre parties. Mais au moment où j’écrivais la première, je ne pouvais pas dire que c’était une « première partie », justement. Tout cela s’est dévoilé peu à peu, comme sortant du brouillard dans lequel j’avançais et, avançant, le terrain s’éclairait pour que celui qui était derrière moi se referme à nouveau. Comment tout cela a-t-il commencé ? Si l’on veut une histoire, je dirai que, écrivant Incendies en 2003, je me battais contre la mauvaise impression de me répéter. Avant, il y avait eu Littoral et 7 l’écriture se liait, se mélangeait : des phrases, voire des paragraphes entiers pour ne pas dire une manière de raconter, émigraient allègrement de l’un à l’autre, me donnant la sensation assez désagréable de me copier moi-même. Cela ressemblait à un manque d’imagination flagrant puisque sans écrire la même histoire, Incendies racontait la même chose que Littoral. Alors à quoi bon écrire Incendies ? Ainsi est née l’idée d’une suite. Incendies serait la seconde partie de « quelque chose » dont Littoral est la première. Quel est donc ce « quelque chose » et qu’est-ce qui le constituait ? Avait-il une troisième, voire une quatrième partie ? Poser la question, c’était faire apparaître un horizon dégagé et, de cet horizon, j’ai vu venir quelqu’un, une ombre magnifique et passionnante à contempler dans cette marche qui l’a menée jusqu’à moi pour me dire : « C’est moi, je suis Forêts. » Avec Forêts s’achève pour moi, je crois bien, une manière de raconter et de déplier une histoire, s’achève aussi cette conviction de la nécessité des origines et de l’héritage, comme si, plus important encore que le passé, il y avait les ténèbres qu’il fallait pénétrer, quitte à y laisser sa peau et sa raison, pour tenter d’éclairer la violence de notre présence. Forêts, en ce sens, clôt définitivement ce « quelque chose » sans nom, sans titre, sans rien, amorcé en 1997. « Quelque chose » qui pourrait ressembler à une odyssée entreprise par Wilfrid dans Littoral, poursuivie par Jeanne dans Incendies et que le Loup mène à son terme, dans Forêts. « Quelque chose » sans identité mais qui tourne cependant, je crois, autour de la question de la promesse : promesse tenue, promesse non tenue. Promesse énoncée, promesse renoncée, trahie, reniée, moquée puis pleurée. La promesse et sa nécessité. Comme une erreur ou encore un bonheur, comme une damnation ou comme une victoire. Promesse comme une guerre menée contre le sens qui nous dépèce, contre le vide qui nous noie. Comme amitié dans le ciel. Ciel. Justement. Aujourd’hui que tout cela est raconté, écrit, édité, mis en scène et présenté, un désir étrange de vouloir tout renverser. Comme le besoin, urgent, de trouver une manière de prouver que toute cette insistance à raconter, l’importance de fouiller et le passé et les origines et les ténèbres et la promesse, n’est pas non plus nécessaire pour vivre. Que l’on peut exister en étant à l’opposé de tout cela. Ecrivant Forêts, j’ai eu la conviction que sans cette contrepartie cinglante qui viendrait contredire magnifiquement tout ce qui est venu avant, l’odyssée ne serait pas complétée, liée, rassemblée, réunie. Sans cette contradiction qui arriverait comme un point d’orgue, final, la violence ne serait pas entière. […] Voici donc le texte de Forêts dans l’état où il se trouvait après une quarantaine de représentations menées l’hiver 2006. J’ai souhaité l’éditer après un certain nombre de soirs de spectacles pour avoir la possibilité de continuer à apporter au texte les modifications que j’ai été poussé à faire après avoir écouté les spectateurs écouter le spectacle. Aujourd’hui, le texte devrait être assez proche de sa version jouée. Enfin, je voudrais encore une fois dire combien, sans les acteurs et concepteurs qui se sont engagés si aveuglément et si entièrement, dans l’aventure, je n’aurais pas pu, ni eu la force d’arriver à la fin de l’écriture de Forêts. Cela est vrai pour Littoral et Incendies, cela le fut particulièrement pour Forêts. Sans leur attention, leur amitié et leur encouragement constant, sans leur fébrilité continue à brûler et à se consumer en portant le texte, sans leur rage à s’enrager et leur disponibilité pour permettre à Forêts de changer leur vie, je n’aurais absolument pas pu trouver la clairière au milieu du bois. Pour cette force qu’ils m’ont donnée, il me revient impérativement, ici, de les remercier comme une promesse tenue, une vie donnée, perdue puis sauvée. » Wajdi Mouawad, avril 2006 Forêts, éditions Actes Sud-Papiers 8 Les intentions de mise en scène Entretien avec Wajdi Mouawad Comment s’organise votre travail de manière générale et plus particulièrement sur un projet tel que Forêts ? C’est d’abord une rencontre avec une histoire. Un jour, je suis inspiré par des éléments inattendus : il y a une grande part de hasard dans cette rencontre. Ceci dure assez longtemps, deux ou trois ans. J’apprends alors à connaître cette histoire, à lui faire confiance, à vivre intimement avec elle... tout comme se ferait une rencontre de personne à personne. Puis je commence à écrire d’après cette idée. De là, je réfléchis au nombre de comédiens dont je vais avoir besoin et je les contacte. S’ils sont d’accord, nous commençons à travailler tous ensemble avant même que j’aie fini d’écrire le texte. Nous prenons alors du temps pour discuter et réfléchir au projet. Pour Forêts nous avons organisé une discussion de six semaines. Le temps est la chose la plus importante pour mon travail. Si je n’ai pas les moyens d’en prendre, je préfère ne pas faire de spectacle. Puis, au fur et à mesure du temps, je commence à mieux connaître les comédiens et à distribuer les rôles en fonction de ce que je ressens en eux. Quels sont les univers littéraires ou artistiques qui vous influencent en général dans votre travail et dans Forêts en particulier ? Le cinéma est très important. J’ai vu plus de films dans ma vie que tout autre chose. Sinon, c’est surtout la contemplation de la nature, la couleur d’un ciel... C’est la conjonction entre les deux. La littérature aussi m’apprend beaucoup, la peinture. Mais tout cela se fait de manière très intuitive. Ce qui m’intéresse c’est d’être subjugué par les choses que nous ne comprenons pas. Je ne supporte pas la sociologie, la psychanalyse, même si je m’y intéresse. Je ne peux pas supporter quelque chose qui veut tout m’expliquer et me prouver que je suis totalement explicable. Je suis attiré au contraire par tout ce qui exacerbe le mystère que je suis. Quelle mission donnez-vous au théâtre ? Rien d’autre que d’être du théâtre ! C’est difficile de faire du théâtre. Je ne fais rien d’autre qu’une tentative de donner de la transparence au spectateur, de lui faire comprendre comment tout cela s’est passé. Je n’ai pas de mission. Je cherche vraiment à faire en sorte que le regard du spectateur soit détourné du fabriquant, et qu’il regarde l’objet. C’est comme face à un arbre : devant un arbre vous regardez l’arbre et non celui qui l’a fait. Et ça c’est déjà compliqué. Donc ce n’est rien d’autre que du théâtre. Certes, c’est une tautologie, mais s’il n’y a pas ça, il n’y a rien, et il faut qu’il soit sublime ou rien. Je ne cherche pas à sauver le monde mais à rien d’autre que de faire une pièce limpide et transparente, afin que le spectateur soit entièrement submergé. C’est ainsi que la beauté de la pièce révèle ses messages, même les plus violents. C’est un dialogue avec le public. De là, donc, peut surgir beaucoup de choses. Travaillez-vous avec d’autres artistes : plasticiens, musiciens... Dans quelle mesure interviennent-ils dans votre travail ? Quelle est leur part de création dans vos spectacles ? Après un filage, je demande à ce que toute l’équipe soit présente. Toute l’équipe de création parle alors du projet dans son ensemble, chacun parle de la lumière, du maquillage ou de tel ou tel costume... Pour Forêts par exemple, nous avons eu la chance de pouvoir travailler toujours sur plateau. Nous avons tout d’abord mis des bâches en plastique dans l’espace pour bloquer le regard et trouver des volumes. Puis, nous nous sommes demandés de quoi ils étaient composés : bois, céramique, métal... Là encore, tout le monde intervient. Le sonorisateur, par exemple, est beaucoup 9 intervenu à cette étape du travail, afin de donner du son à cet espace de manière naturelle. J’exige en général beaucoup de présence de la part de toute l’équipe. J’ai beaucoup de mal à travailler de manière fragmentée, c’est-à-dire à ne travailler qu’avec le scénographe ou le sonorisateur. Propos recueillis par Laure Dubois evene.fr - Octobre 2006 © Thibaut Baron Dans Forêts, Loup évoque "la peur de ne pas trouver [sa] place dans le monde". Aujourd'hui, avez-vous trouvé votre place dans le monde ? Trouver sa place dans le monde est un problème moins géographique qu'intime. J'ai voyagé, beaucoup, et les endroits que je préfère sont les aéroports. La chose la plus difficile qu'on ait à faire dans la vie, c'est s'assumer. Aujourd'hui, j'assume mes choix, mes envies. Alors oui, on peut dire que j'ai, enfin, trouvé ma place. Propos recueillis par Mathieu Laviolette-Slanka evene.fr - Juin 2009 10 Wajdi Mouawad, auteur et metteur en scène Né au Liban en 1968, Wajdi Mouawad doit, à l’âge de huit ans, abandonner sa terre natale pour cause de guerre civile et commencer un exil qui le conduit en France. Il doit cependant quitter la France en 1983, car l’État lui refuse les papiers nécessaires à son maintien sur le territoire. Il rejoint alors le Québec. C’est là qu’il fait ses études et obtient en 1991 son diplôme de l’École nationale de Théâtre de Montréal. Écrivain et metteur en scène, il crée une première compagnie Théâtre Ô Parleur, puis de 2000 à 2004, il assure la direction artistique du Théâtre de Quat’Sous à Montréal. ©Angelo Mouawad En 2005, il fonde au Québec, avec Emmanuel Schwartz, Abé carré cé carré, compagnie de création et en France, Au carré de l’hypoténuse, compagnie de création. Au cours des quinze dernières années, Wajdi Mouawad s’est imposé au Canada autant qu’en France par la vigueur de sa parole et la singulière netteté de son esthétique théâtrale. Il s’est acquis une réputation internationale grâce à un théâtre mu par une puissante quête humaniste; théâtre qui met en avant l’acteur comme porte-parole au sens fort de ce terme. Sa démarche va toujours dans le sens d’une prise de parole qui installe une tension entre la nécessité de la résistance individuelle et le non moins nécessaire renoncement à l’emprise du moi. À ce propos, il aime citer Kafka : «Dans le combat entre toi et le monde, seconde le monde.» Mettant en scène ses propres textes Littoral (1997), Willy Protagoras enfermé dans les toilettes (1998), Rêves (2000), Incendies (2003), Forêts (2006), Seuls (2008) et Ciels (2009), Wajdi Mouawad s’intéresse aussi à Shakespeare (Macbeth), Cervantès (Don Quichotte), Irvine Welsh (Trainspotting), Sophocle (Les Troyennes), Frank Wedekind (Lulu le chant souterrain), Pirandello (Six personnages en quête d’auteur), Tchekhov (Les Trois Soeurs), Louise Bombardier (Ma mère chien)… Depuis 2007, il est directeur artistique du Théâtre français du Centre national des Arts d’Ottawa et parallèlement, il s’est associé pour trois ans avec sa compagnie française à l’Espace Malraux scène nationale de Chambéry et de la Savoie. Travaillant des deux côtés de l’Atlantique, il réunit autour de ses projets de nombreux partenaires, acteurs, concepteurs et théâtres français et canadiens. Au Festival d’Avignon, Wajdi Mouawad a déjà présenté Littoral en 1999. Il a été l’artiste associé du Festival d’Avignon 2009. BIOGRAPHIE 11 Ses oeuvres publiées Seuls – Leméac / Actes Sud-Papiers, 2008 Le Soleil ni la mort ne peuvent se regarder en face – Leméac / Actes Sud-Papiers, 2008 Un obus dans le coeur, Actes-Sud Junior (collection D’une seule voix), 2007 Assoiffés – Leméac / Actes Sud-Papiers, 2007 Forêts – Leméac / Actes Sud-Papiers, 2006 Willy Protagoras enfermé dans les toilettes – Leméac / Actes Sud-Papiers, 2004 Incendies – Leméac / Actes Sud-Papiers, 2003 Rêves – Leméac / Actes Sud-Papiers, 2002 Pacamambo – Leméac / Actes Sud-Papiers / Heyoka Jeunesse, 2000 Littoral – Leméac / Actes Sud-Papiers, 1999 Les Mains d’Edwige au moment de la naissance – Leméac, 1999 Alphonse – Leméac, 1996 Le Songe – Dramaturges Editeurs, 1996 Visage retrouvé, roman – Leméac / Actes Sud, 2002 Je suis le méchant ! Entretiens avec André Brassard – Leméac, 2004 Architecture d’un marcheur : entretiens avec Wajdi Mouawad de Jean-François Côté – Leméac, 2005 Ses oeuvres non publiées Lettre d’amour d’un jeune garçon (qui dans d’autres circonstances aurait été poète mais qui fut poseur de bombes) à sa mère mort depuis peu, 2005 La Mort est un cheval, 2002 Couteau, 1997 John, 1997 Journée de noces chez les Cromagnons, 1992 Déluge, 1985 Pour le cinéma Wajdi Mouawad a adapté et réalisé Littoral. BIBLIOGRAPHIE 12 Forêts, extrait 10. Luce a. Telle grand-mère, telle mère ACHILLE. Luce ! Regarde qui est là ! C’est Loup ! Notre petite-fille ! LUCE. Tu as enlaidi puis tu as grossi. Tu ressembles à ta mère. LOUP. Oui, puis toi tu ressembles à ta fille ! Fait qu’on est deux à lui ressembler. LUCE. Je ne sais pas de quoi tu parles, j’en ai pas de fille. LOUP. C’est bizarre, parce que moi j’ai pas eu de mère. LUCE. Tu t’habilles comme le diable. LOUP. C’est pour faire peur au bon Dieu. LUCE. Qu’est-ce que tu peux bien connaître au bon Dieu. LOUP. Tu me prends pour une grosse épaisse ? LUCE. Epaisse, je ne sais pas trop encore, mais grosse certainement. LOUP. Hey, qu’est-ce que tu me veux, toi, calice ? LUCE. Tu m’énerves aussi facilement que ta mère. LOUP. Mais je peux fesser plus fort par exemple. LUCE. Tu es une petite vite, toi. LOUP. Puis toi une vieille criss ! DOUGLAS DUPONTEL. Loup… LOUP. Qu’est-ce qu’elle me veut, elle ! LUCE. Comme sa mère ! LOUP. Bon. Douglas, tu lui poses les questions que tu veux, puis on s’en va ! Puis fais vite parce que je sens que je vais finir par y casser les deux jambes. ACHILLE. Luce ! Elle est descendue de Montréal pour venir te voir. DOUGLAS DUPONTEL. Ecoutez, Luce, je crois qu’Achille vous a expliqué pourquoi nous sommes venus. LUCE. Achille vous a encore raconté des histoires. Il raconte beaucoup trop d’histoires. J’espère que vous ne l’avez pas cru. DOUGLAS DUPONTEL. Il nous a parlé de vous. LUCE. C’est une rengaine chez lui. 13 DOUGLAS DUPONTEL. On voulait simplement vous demander si vous saviez certaines choses sur vos parents ou sur vos grands-parents. LUCE. Je sais que la nature est bien faite : les parents se mettent à sentir mauvais le jour où il est temps pour les enfants de quitter la maison. DOUGLAS DUPONTEL. Le nom de votre mère par exemple : vous vous appelez Luce Davre mais vous êtes arrivée sous le nom de Luce Brouillard. Comment êtes-vous passé de Brouillard à Davre ? LUCE. Je ne vous connais pas. Pourquoi est-ce que je vous donnerais le nom de ma mère ? DOUGLAS DUPONTEL. Pour Loup, pour Aimée, pour vous. LUCE. Ca ne vaut pas le nom de ma mère. LOUP. Bon on s’en va ! DOUGLAS DUPONTEL. Attendez ! ACHILLE. Loup, si tu pars, tu ne la reverras plus jamais, tu ne lui parleras plus jamais ! C’est ta grand-mère. LOUP. Ca ne me tente pas pantoute de rester seule avec elle ! DOUGLAS DUPONTEL. Loup, je dois aller à Moncton. Il y a un centre de reconstitution faciale à partir de restes humains non identifiés. Le crâne est déjà chez eux. Demain je devrais avoir une première image de synthèse du visage. ACHILLE. Je vais vous y amener. Loup, reste avec elle, aime-la, ne cherche pas à la comprendre, fais juste l’aimer. DOUGLAS DUPONTEL. Je reviendrai vous chercher. 14 Les échos de la presse « On reste scotché à son fauteuil, quatre heures durant ! Il y a belle lurette qu’on n’avait pas vu de spectacle qui suscite autant de ferveur que Forêts, de Wajdi Mouawad… Retenez bien son nom. » Le Nouvel Observateur « Wajdi Mouawad invente une mythologie contemporaine… Il nous livre le spectacle le plus impressionnant du moment. » Epok « Un spectacle de quatre heures plus que foisonnant. Une réussite. Aux Francophonies de Limoges, c’est par une ovation debout que s’est achevée la première. » Les Inrockuptibles « Forêts, de loin la plus élaborée et la plus émouvante de toutes les œuvres signées Wajdi Mouawad… Un spectacle inoubliable, une œuvre qui occupe d’ores et déjà une place singulière dans la brève histoire du théâtre québécois. » Voir « Avec Forêts, comme il l’avait fait avec Incendies, Wajdi Mouawad vient nous donner l’occasion de nous demander (collectivement presque, si on songe au “beau milieu” dans son ensemble) ce qu’est le théâtre et à quoi il sert. » Le Devoir « Entrer dans Forêts, de Wajdi Mouawad, c'est partir pour un long voyage. […] Un voyage, qui remonte et remoule le temps du théâtre et de la littérature, de la tragédie antique au conte contemporain, de la saga au roman initiatique. Six générations de femmes sont au coeur de ces Forêts, profondes comme peut l'être la vie quand un secret traverse, ronge et détruit une famille qui le subit. […] Il faut croire Wajdi Mouawad quand il dit que son écriture est "une plongée en apnée". Elle nous emporte comme si nous étions pris dans le courant puissant d'un fleuve, à une profondeur où l'éclat de la réalité rejoint l'obscurité de l'inconscient, où soi est un autre, où l'eau noie les frontières entre l'instant et le temps. Il y a dans cette écriture beaucoup de mots majuscules - Mort, Amour, Douleur et un goût de l'Infini qui peuvent prêter à sourire. Mais on l'oublie, tant la rage d'aimer et la volonté d'exister guident l'histoire de Forêts, avec ses générations d'enfants à qui leur mère a un jour dit : "Je ne t'abandonnerai jamais", avant de disparaître à jamais. Ainsi, Wajdi Mouawad dresse un incandescent hymne à la vie, magnifié par des acteurs à la hauteur de son enjeu. Devant un tel élan, une telle générosité, on s'incline. » Le Monde, mai 2006 15 « […] Wajdi Mouawad sait nous faire regarder une fête d’anniversaire déjantée, l’embouchure du Saint-Laurent, l’Alsace à l’aube du XXe siècle, la ferveur des surréalistes, ou celle des résistants, la douleur de l’alcoolisme, la folie de l’utopie, avec trois fois rien - un seul décor – et des acteurs si naturels – ni distanciés, ni réalistes – que tous ensemble ils se jouent de la dictature des horloges, et de celle du pessimisme. […] Face à la formidable chaleur, à la liberté, à la profondeur que dégage ce théâtre-là, on pense, un peu, à un autre Québecois, Robert Lepage, et aux Anglais du Théâtre de Complicité. Mais c’est juste une piste, car Wajdi Mouawad n’appartient qu’à lui. Et la salle, dont une horde d’ados, lui fait une standing ovation à n’en plus finir. Ce qui, croyez-moi, est très rare... » Blog du Nouvel Observateur, octobre 2006 « Un théâtre de haut vol est descendu sur le Trident. Un souffle sacré et un lyrisme puissant propulsent la très attendue production belgo-franco-québécoise de Forêts, de Wajdi Mouawad. Elle ne décevra pas ceux et celles qui voient en la scène le lieu de reconnaissance rituelle de nos droits et responsabilités de citoyens de l’humanité et de la beauté du vivant. En regard de la fête scénique, Forêts est pur accomplissement. L’énergie éruptive du verbe de l’auteur Mouawad, le metteur en scène Mouawad la dissémine dans une narration visuelle et sonore poétique, sensuelle, vivante, souple et d’une irréprochable cohérence. Un récit à la théâtralité affichée, dont les fines transitions ne gaspillent ni le temps, ni le sens des actions vécues jusque-là. C’est du fondu-enchaîné jamais froid. La scène est presque toute à la combustion de la parole et du corps des acteurs, chacun dévoué au registre de son personnage. Entre trois murs dont les latéraux s’inclinent légèrement vers l’arrière, un plancher à chevrons meublé de rien de plus qu’une table démontable, des chaises et quelques accessoires éloquents. Ici et là, les murs parlent peinture. Celui du fond pleure à l’évocation de l’inceste. Mouawad recourt à des actualités sonores, à l’arrêt sur image, au tatouage, use du tableau vivant photographique, procédé de fécondes suspensions nostalgiques. Les costumes collent aux personnalités et époques. Les éclairages et un paysage musical et sonore varié modulent avec force le combat entre les ténèbres et la lumière. […] De suspense en comédie, drame, tragédie et épopée, ce théâtre de l’espèce parle de filiation, de promesses tenues et non tenues, de don de soi et de la mécanique brouillonne et aveugle de l’histoire, tous propos dont le thème maître est la présence du mal en nous et parmi nous. Wajdi Mouawad n’est pas un auteur de la « déconstruction ». Ou s’il l’est, il l’est à sa manière qui consiste à tremper très profondément sa plume dans le temps humain pour y puiser une encre chargée de la sage colère des anciens. Ce qu’il en remonte, c’est un riche bouillon de références aux grands mythes fondateurs et littéraires. Caïn et Abel, d’autres figures de la Bible, les destitués de Sophocle et d’Eschyle, les Karamazov de Dostoïevski sont quelques-uns des « miroirs » que Mouawad brandit pour dire sa colère contre les coutumiers vengeurs et en appeler de la solidarité des vivants. Son Forêts, c’est le Labyrinthe des Grecs anciens, ces méandres indéchiffrables où nous sommes livrés à la dent d’un Minotaure qui n’est autre que nos brillantes dispositions au mal. » Le Soleil, février 2007 Plus d’articles sur le site du Grand T à l’adresse suivante : http://www.legrandt.fr/La-presse-en-parle.html 16 Les Lycéens nantais nous racontent… Ouest France, juillet 2009 17 SAISON 09/10 Contacts Jeune Public Le Grand T Marion Echevin / 02 28 24 28 18 [email protected] Pascale Degrieck / 02 28 24 28 08 [email protected] Florence Danveau / 02 28 24 28 16 [email protected] Clémence Jouin / 02 28 24 28 17 [email protected] Dossier réalisé à partir des documents fournis par la Compagnie Au carré de l’hypoténuse De nombreuses pistes de travail autour des spectacles dans le document « Aller au théâtre… » http://www.legrandt.fr/IMG/pdf/Aller_au_theatre.pdf Le Grand T - BP 30111 - 44001 Nantes cedex 01 Tel 02 28 24 28 24 / Fax 02 28 24 28 38 18