SELARL Fleurquin-Bouilloux-Albouy-Bosc-Bringer BP 108 12001 RODEZ CEDEX
ATCHOUM ! – LE JOURNAL DE L'ALLERGIE
N° 9 – NOVEMBRE 2001
ALLERGIE AUX MOISISSURES
Allergie aux moisissures : l’essentiel
-L’allergie aux moisissures est un sujet complexe et encore mal connu (multiplicité des espèces, instabilité et variabilité des souches, extrême
complexité antigénique)
-Les moisissures allergisantes les plus répandues sont Alternaria, Cladosporium, Aspergillus et Candida albicans.
-Cette allergie est le plus souvent associée à une polysensibilisation aux acariens, aux blattes et aux pollens.
-L’allergie aux moisissures est semblable à l’allergie aux pollens en ce qui a trait aux symptômes et traitement.
-Le diagnostic, évoqué par l’interrogatoire, est confirmé par les tests cutanés (prick-tests) et par le dosage des IgE sériques spécifiques. Il
existe le plus souvent une bonne corrélation entre tests cutanés et dosages d’IgE sériques spécifiques unitaires pour Alternaria.
Les moisissures
(voir tableau dernière page)
Les moisissures (champignons microscopiques), saprophytes habituels des aliments, des végétaux, des sols, des literies et même des textiles,
sont très ubiquitaires. Leurs spores libérées en grande quantité dans l’atmosphère constituent une source allergénique très importante. Trois
grandes sources principales de moisissures peuvent être distinguées sachant que l’on trouve plusieurs d’entre elles dans les différents milieux :
Moisissures atmosphériques :
Elles croissent sur des matières végétales surtout lorsqu’elles sont en voie de décomposition (forêts, jardins). Leur abondance varie à la fois
avec le cycle végétatif des plantes et les conditions atmosphériques. Pour certaines d’entre elles, on peut ainsi établir un calendrier de
sporulation (voir dernière page). Les spores émises sont présentes pendant toute la période de végétation dans les pays tempérés mais
atteignent un pic à la fin de l’été et au début de l’automne. C’est le cas d’Alternaria et de Cladosporium. Plus il fait chaud et humide et plus la
quantité de spores produite est élevée. Par contre, Aspergillus et Penicillium n’ont pas de saison définie.
Moisissures domestiques :
Les moisissures à l’intérieur des maisons sont capables de produire des spores toute l’année et sont donc responsables de symptômes
perannuels surtout dans les intérieurs humides, sombres et mal aérés. Elles peuvent croître dans des conduits d’aération et de climatisation
(chauffage central, air conditionné) ainsi qu’autour des conduites d’eau, d’où leur abondance dans les salles de bains et les cuisines. Elles
poussent aussi sur des plantes vertes fréquemment arrosées (bacs à réserve d’eau), sur des déchets végétaux et/ou animaux, tapisseries,
tentures murales, poussières de matelas et animaux en peluche. Les moisissures prédominantes sont Penicillium, Aspergillus et Fusarium, plus
rarement Mucor et Rhizopus.
Moisissures alimentaires :
Des moisissures et des levures sont utilisées dans la fabrication de nombreux aliments. Les levures du genre Saccharomyces sont utilisées
dans la préparation de la bière, du vin, des liqueurs, du vinaigre, de la choucroute et largement en boulangerie. Penicillium entre dans la
composition des fromages bleus et du camembert. Certaines sauces industrielles utilisent Aspergillus. Des plus, des champignons
microscopiques peuvent contaminer les aliments stockés même au réfrigérateur. En fait, le rôle allergénique exact des moisissures et levures
contenues dans les aliments est difficile à préciser. Les produits contenant de grandes quantités de levures comme le vin, le fromage, la pâte
de pain complet et de pizza seraient responsables d’asthme et de rhinite. Ainsi, un régime pauvre en ces aliments pourrait être bénéfique aux
enfants très allergiques.
La chaleur et l’humidité favorisent la prolifération des moisissures, de même avec les acariens. On ne les voit en principe pas, sauf lorsqu’elles
sont très nombreuses. Par exemple, le « moisi » des confitures, le « moisi » qu’il peut y avoir sur les joints sanitaires de la salle de bain ou de la
cuisine, sont en réalité des moisissures potentiellement allergisantes.
Allergènes et moisissures
Les moisissures sont des allergènes extrêmement complexes :
-le nombre de protéines allergéniques est très élevé et il n’y a pas d’allergène majeur. Des réactions croisées existent mais
uniquement sur les allergènes mineurs
-il y a de nombreuses souches mutantes
Les moisissures allergisantes les plus répandues sont :
Alternaria alternata m6: ce champignon est présent aussi bien à l’intérieur des habitations qu’à l’extérieur ; c’est l’allergie la plus fréquente avec
une réalité clinique importante
Cladosporium m2: 2
ème
cause d’allergie aux moisissures en fréquence
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Aspergillus m3: ce champignon est retrouvé un peu partout dans des organismes fermentés : dans la nature (paille, compost, fourrage), dans
certains aliments (fromages, farines) et dans la poussière de maison.
Epidémiologie
L’allergie aux moisissures varie en fonction de l’âge. Chez les enfants de moins de 4 ans, la réponse cutanée à l’allergène Cladosporium atteint
42%, puis diminue avec l’âge. Une étude publiée en 1995, montre que sur 594 asthmatiques de 14 à 19 ans, 20% étaient sensibilisés à
Alternaria et Cladosporium, 16,7% au botrytis, 15,7% au Penicillinium et 7,8% à l’Aspergillus. Chez l’adulte après 30 ans, on note une nette
diminution de la sensibilisation aux moisissures à 6,5%.
Les signes cliniques
La relation entre inhalation de spores et symptomatologie allergique est loin d’être toujours évidente. Rien ne distingue en effet le type de
symptômes donnés par les moisissures de celui des autres pneumallergènes perannuels.
Deux éléments peuvent cependant orienter le diagnostic :
-lorsque l’habitat ou le lieu de travail est propice au développement des spores à savoir un lieu humide, mal aéré et sombre ainsi
qu’un climat chaud et humide.
-une recrudescence saisonnière en fin d’été et début de l’automne peut orienter vers les moisissures atmosphériques, principalement
Alternaria, Stemphylium et Cladosporium. Une amélioration en altitude peut également être un facteur d’orientation vers Alternaria car
cette dernière est absente au-dessus de 1000 mètres.
Les sujets allergiques aux moisissures peuvent présenter des symptômes qui persistent pendant de longues périodes, récidiver à plusieurs
reprises au cours de l’année, ou être associés à des conditions environnementales spécifiques à l’envahissement optimum des moisissures.
Une allergie aux moisissures peut se traduire par de fréquents éternuements en salve, une rhinite, une toux, un asthme, des troubles gastro-
intestinaux, une urticaire, une migraine, des difficultés de concentrations ou des douleurs articulaires. Les symptômes déclenchés par les
spores de moisissures peuvent survenir toute l’année ou de manière saisonnière (voir calendrier de sporulation en dernière page).
L’allergie à Alternaria se manifeste souvent par une rhino-conjonctivite estivale dite « pseudo-pollinique » survenant en Août-septembre dans
des micro-climats humides. Alternaria est tenu pour responsable de crises d’asthme sévères. Les allergies isolées à Alternaria persistent le
plus souvent.
L’allergie isolée aux moisissures est rare (environ 5 à 10% des cas d’allergie aux moisissures). Elle accompagne souvent une autre allergie
(pollens, acariens, blatte). L’allergie aux moisissures semble être un facteur aggravant d’une sensibilisation à un autre allergène.
Remarque : allergies broncho-pulmonaires et moisissures
Elles peuvent revêtir plusieurs aspects suivant le ou les mécanismes immunologiques en cause :
-asthme allergique aux moisissures, de type immédiat, semblable à celui dû aux autres pneumallergènes
-mycose broncho-pulmonaire allergique, de type mixte, immédiat et semi-retardé, caractérisé par un asthme instable, souvent cortico-
dépendant pouvant évoluer vers une insuffisance respiratoire chronique
-alvéolite allergique extrinsèque, de type semi-retardé, se présentant sous forme d’une pneumopathie qui peut évoluer vers une fibrose.
Les manifestations semi-retardées (type alvéolites allergiques extrinsèques) seront traitées dans un prochain n° d’ATCHOUM.
Le diagnostic
L’étude aéromycologique de l’environnement est souvent contributive car les moisissures présentes dans un faux plafond, sur des plantes
d’appartement, dans un matelas, ne sont pas apparentes. On utilise les prélèvements d’air sur boite de pétri. Après la pousse, on identifie et
compte les colonies qui se développent. Il peut exister une concordance entre les moisissures identifiées et les sensibilisations détectées. Cette
concordance peut faire défaut. La pousse abondante d’une moisissure peut en cacher une autre.
Les prick-tests :
La valeur des tests cutanés réalisés par prick-tests est assez discutée, surtout pour certains allergènes. Pendant longtemps, ces tests cutanés
furent réalisés avec des langes de moisissures auxquels on préfère actuellement les allergènes purs dont la qualité a été considérablement
améliorée notamment pour Alternaria, Stemphylium, Aspergillus et Cladosporium.
Les IgE spécifiques :
La recherche des IgE sériques spécifiques peut actuellement concerner la quasi-totalité des moisissures impliquées. La positivité des tests est
en général modérée (classe 2 et 3).
Les tests de dépistage sont très intéressants dans le cadre des moisissures car il y a peu de réactions croisées, ce qui ne permet pas de
choisir un allergène type.
Le Phadiatop : c’est un mélange représentatif des épitopes (sites antigéniques) reconnus par les IgE spécifiques de 94% des patients
allergiques aux pneumallergènes (acariens de la poussière de maison, phanères d’animaux, moisissures, pollens…). Le seuil de positivité de
ce test est basé sur l’expression clinique des symptômes d’allergie respiratoire.
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Le mélange moisissures mx2 : il comprend m1 Penicillium notatum / m2 Cladosporium herbarum / m3 Aspergillus fumigatus / m5 Candida
albicans / m6 Alternaria alternata / m8 Helminthosporium halodes
Ce test donne donc un résultat global : s’il est positif, les données de la clinique et de l’enquête s’orienteront vers un ou plusieurs des
allergènes connus.
Le mélange pollens moisissures Pax 3 : il comprend Aspergillus fumigatus m3, Aternaria alternata m6, pollen de blé g15, pollen de seigle g12.
Ce mélange est utilisé dans le cadre du dépistage des allergies professionnelles (professions exposées : fermier, minotier, meunier, boulanger,
pâtissier).
Il est important de rappeler que la sensibilisation limitée à une ou plusieurs moisissures est relativement rare, même chez l’enfant. Les
associations sont très fréquentes avec d’autres pneumallergènes courants et bien souvent le problème le plus délicat sera d’estimer
exactement la part de l’allergie aux moisissures dans un tableau de poly-sensibilisation.
Les allergies croisées
Il existe peu de réactions croisées concernant les moisissures ; on notera les réactions croisées entre Alternaria, Stemphylium et Curvularia.
Le traitement
A coté du traitement symptomatologique propre à chacune des manifestations de l’allergie aux moisissures, cette dernière pose 2 problèmes
particuliers : celui de l’éviction et celui de la désensibilisation.
Eviction et Prévention
Chez les personnes allergiques aux moisissures, les conseils suivants peuvent diminuer leur concentration dans l’environnement intérieur :
-aérer
-garder un taux d’humidité entre 30 et 40%
-enlever les papiers peints humides et les plantes
-utiliser un déshumidificateur dans certaines pièces
les humidificateurs sont une source de moisissures : leur emploi doit être surveillé et l’appareil nettoyé régulièrement.
-ventiler les espaces confinés (salles de bains, cuisine, buanderie…)
-éviter de garder des objets enfermés pendant de longues périodes
-Dans les toilettes : s’assurer que l’excès d’humidité soit éliminé correctement par un ventilateur fonctionnel, essuyer les surfaces humides
après la douche, employer une substance fongicide régulièrement.
-Dans la cuisine : ventiler durant la préparation des repas, vider les poubelles le plus tôt possible, ne pas laisser trainer des aliments moisis,
vérifier le contenu du réfrigérateur et le nettoyer fréquemment
-S’assurer que l’air du sèche linge soit bien dirigé vers l’extérieur
-éviter les promenades en forêt après la pluie ou par temps de brouillard, éviter de ramasser les feuilles mortes.
Aliments à éviter :
Les personnes allergiques ne devraient pas consommer les pelures de pomme de terre, des carottes et autres légumes à racines.
Désensibilisation
L’immunothérapie aux moisissures n’est pas recommandée étant donné la mauvaise qualité de extraits allergéniques disponibles, sauf pour
certains extraits d’Alternaria (et de Cladosporium) : dans le cadre d’une allergie isolée, suffisamment invalidante, et si l’éviction est difficile.
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