Sujet de bac th 1, octobre 2008 1 THÈME DU PROGRAMME : PROGRES TECHNIQUE ET EVOLUTION ECONOMQIUE CHEZ SCHUMPETER Ce sujet comporte deux documents : Document 1 Le capitalisme, répétons-le, constitue, de par sa nature un type ou une méthode de transformation économique et non seulement il n’est jamais stationnaire, mais il ne pourrait jamais le devenir. […] En fait, l’impulsion fondamentale qui met et maintient en mouvement la machine capitaliste est imprimée par les nouveaux objets de consommation, les nouvelles méthodes de production et de transport, les nouveaux marchés ; tous éléments créés par l’initiative capitaliste. […] L’ouverture de nouveaux marchés nationaux ou extérieurs et le développement des organisations productives depuis l’atelier artisanal et la manufacture jusqu’aux entreprises amalgamées telles que l’U.S. Steel, constituent d’autres exemples du même processus de mutation industrielle – si on me passe cette expression biologique – qui révolutionne incessamment de l’intérieur la structure économique, en détruisant continuellement ses éléments vieillis et en créant continuellement des éléments neufs. Joseph Schumpeter, Capitalisme, Socialisme et Démocratie, Payot, 1983 [Première Edition 1942]. Document 2 On parle aujourd’hui de nouvelle économie pour évoquer la croissance remarquable réalisée par les EtatsUnis depuis 1995, y ramenant le taux de chômage en dessous de 4 %. Des chercheurs américains estiment que l’accélération est due pour moitié à la diffusion de l’usage des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), le reste étant d’ailleurs fortement affecté par les progrès réalisés dans la production des composants électroniques. […] Nous savons qu’aujourd’hui les nouvelles technologies de l’information sont beaucoup moins diffusées en Europe qu’aux Etats-Unis. […] Il y a tout lieu de penser que notre retard va nous conduire à une croissance rapide des investissements de ce type au cours des prochaines années et que, le moment venu, cela constituera un facteur d’accélération de la croissance. Edmond Malinvaud, « France : retour au plein emploi ? », Futuribles, n°261, février 2001. QUESTIONS 1) A l'aide de vos connaissances et du document 1, vous expliquerez comment Schumpeter perçoit l’évolution économique. (10 points) 2) Expliquez la phrase soulignée (document 1). (5 points) 3) Le document 2 apporte-t-il une confirmation de la thèse de Schumpeter ? Justifiez votre réponse (5 points) Sujet de bac th 1, octobre 2008 2 Corrigé – Spécialité : Progrès technique et évolution économique chez Schumpeter 1) A partir de vos connaissances et du document, vous expliquerez comment Schumpeter perçoit l’évolution économique. J. A. Schumpeter (1883 – 1950) est un auteur qualifié d’hétérodoxe puisqu’il apparaît en marge de la pensée libérale ou keynésienne pour cette première moitié du XXe siècle. Il analyse en particulier ici la dynamique du capitalisme présenté comme un système en permanence déséquilibré (alors que l’analyse libérale dominante de l’époque développe l’approche de l’équilibre général des marchés et le rôle de la flexibilité des prix). Son analyse se centre notamment sur la relation qu’il existe entre le progrès technique, les innovations et la croissance économique. J. A. Schumpeter va développer le rôle primordial des innovations dans la croissance économique. Ces innovations, au nombre de cinq (les produits nouveaux, les procédés de production, les marchés, les matières premières ou l’organisation productive), sont introduites dans le système économique par les entrepreneurs. Ils vont mettre en mouvement le système capitaliste en brisant sa routine c’est-à-dire en prenant des risques et en effectuant un pari sur l’avenir. Cet aventurier qu’est l’entrepreneur est à la fois motivé par le profit qu’il peut retirer de son innovation et par « un goût du risque » effréné. Les innovations vont être le principal facteur explicatif des cycles longs de l’économie, observés depuis la fin du XVIIIème siècle : période d’expansion puis de récession. Il s’est appuyé sur les travaux de l’économiste russe Kondratieff qui avait mis en évidence, dans les années 20, l’existence de cycles d’une cinquantaine d’années ; Schumpeter a tenté d’expliquer l’existence de ces cycles. Chaque phase d’expansion (augmentation du PIB) correspond à l’apparition de grappes d’innovations. Les innovations se traduisent par des investissements, une création d’emplois, une hausse du pouvoir d’achat (due à la création d’emplois mais aussi aux gains de productivité qui entraînent augmentation des salaires et une baisse des prix) pour la population active. Pour l’entreprise, elle peut se retrouver en situation de monopole temporaire (nouveau produit par ex.) ou bénéficier d’une baisse de ses coûts de production (innovations de procédés), ce qui est (dans les deux cas) source de profit. Des entrepreneurs copieurs, par effets d’entrainement, entrent sur le marché, attirés par les profits à réaliser. L’augmentation de la demande d’une part et des profits d’autre part vont à leur tour provoquer une augmentation importante de l’investissement et de la production. Mais plus on avance dans le temps, plus les effets des innovations s’épuisent. Lors de la « phase de récession », la concurrence s’accroît entre les entrepreneurs et chacun veut conserver ses parts de marché. L’offre va devenir trop abondante par rapport à la demande. Ceci va entraîner une baisse des prix et les profits diminuent. Certains ne pourront plus rembourser leurs emprunts (faillite). De plus, la demande se sature. On a donc une baisse de l’investissement et de la production et une répercussion catastrophique au niveau de l’emploi. Donc, la récession succède à l’expansion jusqu’à ce que de nouveaux entrepreneurs arrivent avec de nouvelles innovations pour relancer la croissance. En effet, la période de récession va inciter les entrepreneurs à innover ; lorsque les effets des innovations majeures commencent à se faire sentir, l’activité économique reprend et l’économie va entrer à nouveau dans un cycle long. Ainsi, le système capitaliste ne sera jamais caractérisé par la stabilité : la disparition et l’apparition de nouvelles techniques ou de nouveaux produits rythment l’activité économique le rythme de la croissance est donc cyclique en raison des innovations. 2) Explication de la phrase soulignée Schumpeter évoque ici le processus de « destruction créatrice ». Il emploie cette expression pour montrer que de nouvelles innovations majeures vont venir remplacer les anciennes devenues obsolètes. De nouvelles branches se développent, condamnant les branches et entreprises dépassées ou incapables de s’adapter. Elles contribuent donc à leur disparition en parallèle à la diffusion des produits ou des procédés nouveaux dans l’économie. Donc va se mettre en place les bases du futur essor économique : naissances de nouvelles activités, créations d’emplois, nouveaux modes de vie qui ont fait disparaître des anciennes activités (et emplois). Le capitalisme est en perpétuel mouvement car la destruction créatrice fait régulièrement table rase du passé, et ouvre la voie aux activités nouvelles l’introduction des innovations sécrète en permanence de l’instabilité puisque les éléments nouveaux rendent obsolètes les plus anciens. 3) Le document 2 apporte-t-il une confirmation de la thèse de Schumpeter ? Justifiez votre réponse Le document 2 évoque le rôle des investissements américains depuis les années 1990 dans les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC). Les NTIC ont une place de plus en plus conséquente tant au niveau des produits que des procédés de production. Les innovations réalisées dans ce domaine expliqueraient une grande partie de la croissance économique américaine, réduisant par la même occasion le chômage. Se développe alors le sentiment selon lequel l’économie américaine serait entrée dans un nouveau cycle de Kondratieff en phase A, les innovations de la « nouvelle économie » constituant le moteur de cette dynamique. L’auteur espère, par ailleurs, que les pays européens suivront le même chemin que les Etats-Unis afin de dynamiser notre croissance. Cette évolution semble donc confirmer la thèse de Schumpeter.