
Séminaire de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales 
 
La mesure du trouble mental 
Des principes aux usages 
 
 
Organisé par Philippe Le Moigne 
Chargé de Recherche à l’INSERM 
Chercheur au CERMES3 - Centre de Recherche Médecine, Sciences, Santé, Santé Mentale et Société 
Université Paris Descartes, EHESS, CNRS (UMR 8211), INSERM (U988) 
 Exposé des motifs 
Que la place occupée par les échelles psychiatriques soit devenue centrale dans 
le  processus  de  recherche,  l’expertise  sanitaire  et  bien  au-  delà,  fait  l’objet  d’un 
constat  largement  partagé.  Pour  autant  comment  rendre  compte  d’un  tel 
développement ?  D’abord,  on  doit  souligner  que  ces  échelles,  à  la  fois  pour  des 
raisons de validation interne mais également en vertu de leur rôle dans la sélection 
des  patients,  ont  acquis  le  statut  d’un  « rouage  nécessaire »  qui  n’est  pas  sans 
expliquer  leur  diffusion  en  biomédecine.  Ensuite,  si  on  revient  à  la  genèse  des 
échelles  diagnostiques  les  plus  diffusées,  à  commencer  par  le  DSM-III,  on  pourra 
faire  observer  que  leur  construction  a  offert  un  lieu  de  négociation  et  de 
structuration, face à une crise affectant à la fois la désignation du trouble mental et la 
régulation de sa prise en charge (Philippe Le Moigne) 
Pour  autant,  que  peut-on  dire  de  l’incidence  de  ces  tests  lorsque,  délaissant 
l’exposé  de  leurs  principes,  on  ausculte  leurs  usages ?  D’abord  quel  est  leur 
rendement  dans  le  domaine  de  la  preuve ?  Certaines  de  ces  échelles  ont  donné 
légitimité  à  de  nouvelles  pathologies,  à  l’instar  de  la  dépression,  mais  ont-elles 
apporté des éléments de validation aux thérapies qui leur sont dédiées, qu’elles soient 
relationnelles  ou  chimiques ?  (Xavier  Briffault).  Cette  question  du  rendement 
s’applique également au travail de catégorisation induit par la construction de toute 
échelle.  Si  on  est  en  droit  d’en  attendre  la  formulation  d’entités  et  de  troubles 
suffisamment  stables  et  cohérents,  cette  perspective  est-elle  tenable  dans  le  cas  de 
catégories aux contours  mal arrêtés, tel  que l’« handicap psychique » ? En  vertu de 
quoi,  que  donnent  à  voir  ces  grilles  des  personnes  auxquelles  elles  sont  censées 
s’adresser,  au  regard,  précisément,  des  perceptions  que  ces  personnes  ont  d’elles-
mêmes (Pascale Roussel) ? 
L’incidence des tests  et de leur passation dans la vie sociale demeure encore 
méconnue  parce  que  peu  observée.  On  voit  bien  que  la  fabrication  d’un  test  ne  se 
conçoit pas sans aller-retours entre raison logique et raison pratique, psychométrie et 
clinique, recherche et activité professionnelle, et que cette série d’ajustements impose 
de ménager du « jeu » au regard des principes défendus par l’exposé canonique des 
tests.  Le  succès  acquis  par  le  Mini  Mental  State  Examination  (MMSE),  dans 
l’observation  des  malades  d’Alzheimer,  peut  offrir  ici  matière  à  déchiffrer  les 
mécanismes  qui  structurent  ce  « jeu »  et  la  nature  des  arrangements  qu’il  permet 
(Baptiste Brossard). Mais encore,  la légitimité scientifique du test  une fois acquise, 
quel en est le retentissement clinique ? Autrement dit, quelle place occupe-t-il dans la 
consultation et l’activité thérapeutique ? Et comment contribue-t-il, dans la maladie 
d’Alzheimer,  à  structurer  la  relation  entre  le  professionnel,  le  patient  et  son 
entourage ? (Aude Béliard) 
…/…