Le 15 décembre 2008 Succès complet de la présidence française après le Conseil européen des 11 et 12 décembre Les Vingt sept, sous l’impulsion de la présidence française, ont déminé les dossiers difficiles qui restaient sur la table : I- Oui au traité de Lisbonne Les Tchèques seront les 26ème à ratifier le texte. Et les Irlandais ont promis de procéder à ratification référendaire avant le 1er novembre, date d’entrée en fonction de la nouvelle Commission. L’opération consiste à sanctuariser dans la constitution irlandaise quelques points sensibles en Irlande (neutralité, questions sociales et éthiques, politique fiscale…) et faire voter les Irlandais sur cette sanctuarisation. La nouvelle Commission sera une Commission « Lisbonne » et le nouveau Parlement, élu sous l’empire du traité de Nice avec 732 députés, passera sous l’empire du traité de Nice et passera à un effectif de 754 (la délégation française passera de 78 à 72 eurodéputés en 2009 puis 74 en 2010, les Allemands conservent 99 députés). Quant au président stable du Conseil, il n’entrerait en fonction qu’au 1er janvier 2010. II- Oui au plan climat-énergie Un accord politique est trouvé et Nicolas Sarkozy peut légitimement se prévaloir d’avoir arraché le compromis, même si la version adoptée est éloignée des propositions initiales, notamment au profit des industries. La priorité officielle numéro 1 de la présidence française est donc atteinte. Les principales décisions concernent 1) le secteur de l’électricité : Les entreprises de ce secteur auront besoin d’acquérir seulement 30 % (au lieu de 100% prévus initialement) de leurs quotas d’émission de CO2 aux enchères à partir de 2013 à condition que plus de 30% de leur électricité soit produite à partir d’un seul combustible fossile ou que le PIB national par habitant est inférieur à 50% de la moyenne UE. Cette part devrait progressivement passer à 100 % d’ici à 2020. Des révisions régulières sont prévues tous les deux ans. 2) les secteurs soumis à la concurrence internationale et aux risques de fuite de carbone Un secteur ou sous-secteur est considérés comme « à risque » si les coûts directs et indirects additionnels engendrés par le système européen entraînent une augmentation des coûts de production « d’au moins 5 % » de la valeur ajoutée brute et si le secteur peut prouver qu’il est exposé à la concurrence internationale pour plus de 10 % (ratio total exports+total imports divisé par total chiffre d’affaires et importations). Ces deux conditions sont cumulatives sauf si l’accroissement des couts dépasse 30% ou si le taux de concurrence internationale dépasse 30%. Ces secteurs seront déterminés par la Commission avant le 31 décembre 2009 et pourront être revus chaque année.. Les secteurs considérés comme « à risque significatif » de fuite de carbone se verront octroyer jusqu’à 100 % de leurs crédits de CO2 (jusqu’en 2020 au moins) gratuitement au cas où ils atteignent un point de référence considéré comme la meilleure technologie disponible dans le secteur. 3) Autres secteurs Pour les secteurs non exposés au risque de fuite de carbone, la part des crédits de CO2 mis aux enchères est fixée à 20 % pour 2013. D’ici 2020, 70 % des permis devront être achetés aux enchères (contre les 100 % prévus auparavant). Ce seuil sera porté à 100% en 2025. 4) Répartition des ressources issues de la vente des quotas - 10 % des quotas d’émission dans le cadre (ETS) doivent être réservés à un fonds de solidarité destiné à aider les neuf pays pauvres d’Europe centrale et orientale dans leur transition vers une production d’énergie plus propre ; 2 % supplémentaires doivent être redistribués à ces neuf pays, la majeure partie de ces 2% allant à la Roumanie (29 %), à la Pologne (27 %) et à la Bulgarie (15 %) ; les 88% restant sont répartis entre les Etats conformément à la part d’émission de l’actuel système. - Chaque Etat détermine l’utilisation du produit des enchères mais les Vingt-sept se sont engagés à affecter la moitié des bénéfices provenant des enchères ETS aux les technologies propres. Restent cependant deux questions : -que va faire le Parlement européen co-législateur qui compte tenu de ses orientations et de ses votes précédents ne saurait se satisfaire d’un texte trop restrictif ? Réponse le 17 décembre à Strasbourg : ou bien une majorité absolue de 393 eurodéputés se constitue pour amender le texte et la discussion redémarre avec une seconde lecture et des navettes avec le Conseil sous présidence tchèque ou le Parlement se contente du texte actuel et vote un « conforme ». Les Verts au Parlement ont qualifié les conclusions de « pas en arrière dramatique » « En allouant une part aussi importante de permis d’émissions gratuitement, le système ETS se transformerait en une aubaine pour les industries les plus polluantes d’Europe. » -comment vont se mettre en place les dispositions arrêtées ? La négociation va continuer à Bruxelles sur tous les points et avec tous les secteurs, sur le détail des dispositifs. C’est ce que Bruxelles nomme « comitologie » (la rédaction des décrets d’application) où les enjeux sont tout aussi importants. Au demeurant, le Conseil européen a commandé à la Commission de préparer après Copenhague une proposition législative sur les modalités de distribution des crédits de CO 2 gratuits. III- Oui au plan de relance européen Pas de surprise : l’addition des dépenses engagées par chacun des Vingt-sept permet d’arriver au total de 170 milliards d’euros, -la somme est complétée par 15 milliards de la BEI pour 2009 (et pour 2010). Ces interventions, bénéficieront aux PME, pour l'énergie renouvelable et pour le transport propre notamment dans le secteur automobile, de même que la création du Fonds européen 2020 pour l’énergie, le changement climatique et les infrastructures (« fonds Marguerite ») en partenariat avec des investisseurs institutionnels nationaux; -et 15 milliards de crédits communautaires redéployés grâce à procédures et l'accélération de la mise en oeuvre des programmes financés par le Fonds de Cohésion, les Fonds structurels ou le Fonds européen agricole et de développement rural en vue du renforcement des investissements d'infrastructures et en matière d'efficacité énergétique; A u total on arrive au 200 milliards, soit 1.5% du PIB européen, seuil politique et technique que Barroso s’était fixé. immédiat, être limitées dans le temps et ciblées sur les secteurs le plus touchés et les plus importants (ex. le secteur automobile et la construction); Ces mesures peuvent prendre la forme, en fonction des situations nationales, d'une augmentation de la dépense publique, de réductions judicieuses de la pression fiscale, d'une diminution des charges sociales, de soutiens à certaines catégories d'entreprises ou d'aides directes aux ménages en particulier les plus vulnérables; A noter : - l’appel des Vingt-sept à l’adoption des mesures liées à la crise financière (agences de notation, supervision bancaire, normes comptables) et des directives en cours sur les exigences de fonds propres des banques, sur la solvabilité des compagnies d'assurance, sur les organismes de placement collectif en valeurs mobilières et sur la protection des dépôts des épargnants. - la réaffirmation de la nécessité de respecter les règles du pacte de stabilité : celui-ci est « la pierre angulaire »du cadre budgétaire de l'UE. Il offre la flexibilité permettant la mise en œuvre de l'ensemble des mesures du plan de relance. Conscient que ces dernières creuseront temporairement les déficits, le Conseil réaffirme son plein engagement en faveur de finances publiques « soutenables » et appelle les Etats membres à revenir dès que possible, conformément au Pacte, et au rythme du redressement économique, vers leurs objectifs budgétaires de moyen terme. - une ouverture sur le dossier TVA puisque l’UE se donne 3 mois pour régler la question : ce qui rendrait possible et la pérennisation des taux réduits pour les secteurs à haute intensité de main d’œuvre (dont bâtiment) et l’ouverture à de nouveaux secteurs (ex. restauration) - la franchise temporaire de deux ans au-delà du seuil "de minimis" en matière d'aides d'Etat pour un montant jusqu'à 500.000 euro - le recours, pour 2009 et 2010, aux procédures accélérées prévues dans les directives marchés publics, afin de ramener de 87 à 30 jours la durée des procédures d'appels d'offres les plus couramment utilisées pour les grands projets publics. IV. Oui à un accord à l’ OMC Le Conseil européen s’engage en faveur d’un accord sur l’OMC avant la fin de cette année sur des modalités conduisant à la conclusion du programme de Doha pour le développement avec un résultat ambitieux, global et équilibré. Pascal Lamy vient de tempérer les perspectives d’un accord. V- Oui à la Stratégie de Lisbonne Les Vingt-sept ont réaffirmé leur volonté de voir aboutir un nouvel agenda de Lisbonne pour 2010. Les travaux de Laurent Cohen-Tanuggi et du MEDEF restent plus que jamais d’actualité. Conclusion Au total, le bilan de la présidence française est un quasi 10/10 par rapport à ses six priorités de départ et aux quatre qui ont éclaté depuis juillet 1-Euro Med : lancement le 13 juillet à Paris et confirmation du process piloté par Henri Guaino cet automne 2-Immigration : pacte de l’immigration voulu par Brice Hortefeux et mis en place 3-Agriculture : réouverture du dossier par Michel Barnier pour préparer l’après 2013 4-Energie : le paquet énergie sera bouclé 5-Climat : un accord vient d’être trouvé sur ETS et énergies renouvelables 6-Défense : le Conseil a adopté une très longue déclaration sur le renforcement de la politique européenne de sécurité et de défense. 7-Crise institutionnelle : le traité de Lisbonne est relancé 8-Crise Georgienne : la France a réagi et pris le leadership dans une amorce de résolution du conflit. Le sommet UE-Russie du 14 novembre a été un succès. 9-Crise financière : succès du plan Sarkozy-Brown et lancement réussi du G20 10-Crise économique : lancement du plan de relance européen A quoi, il faut ajouter le succès sur le paquet Telecom où un accord a été trouvé. Seules contrariétés : l’échec du sommet avec la Chine du 1er décembre annulé par les Chinois pour cause de Daï lama, l’absence d’avancées sur la gouvernance de l’euro (JeanClaude Junker a seulement été reconduit à son poste de président de l’eurogroupe), et le fait de devoir abandonner le flambeau à la république tchèque.