« Un panier percé ? Le rétrécissement programmé du périmètre de l’assurance maladie »
Nicolas Sarkozy avait déclaré devant la presse sociale en Septembre 2007 vouloir remettre
en cause un modèle social qu’il jugeait périmé. Suivait une ode à la responsabilisation, à
l’individualisme, à la dénonciation des « fraudeurs »… La RGPP (révision générale de
politiques publiques) a confirmé la mise en musique de ce discours programmatique. Pour ce
qui concerne l’assurance –maladie et le système de santé, remettre en cause le modèle social
français -certes aujourd’hui déjà écorné- veut dire s’en prendre au principe « cotiser selon ses
moyens, recevoir selon ses besoins ».
Cela s’est traduit concrètement par la mise en place de franchises, mettant en évidence une
nouvelle donne « aujourd’hui, les malades doivent payer pour les malades ».Ces mesures, au
lourd impact social, ne suffisant évidemment pas à combler le déficit, il faut donc s’en
prendre à l’os, au noyau dur des dépenses ; différencier l’assurance de l’assistance, redéfinir
l’obligatoire,séparer le petit risque du gros risque.»
Dans ce cadre, plusieurs pistes sont avancées, non exclusives l’une de l’autre, pour alléger le
panier remboursable.
Aujourd’hui si la part socialisée des dépenses reste stable à 76% environ,le nombre de
personnes intégralement couvertes augmente, notamment les personnes en affection de longue
durée (ALD) et celles qui bénéficient de la CMU (Couverture maladie universelle). Mais pour
d’autres assurés, le taux de remboursement baisse, en lien avec les déremboursements de
médicaments et la multiplication des tickets modérateurs : le poids des « reste à charge »
augmente donc, mais insuffisamment au regard des chantres du nouveau modèle social.
La question des ALD (affections Longue durée) est donc centrale. Elle concerne 8 millions
d’assurés pour lesquelles sont mobilisées 60 % des dépenses de l’assurance-maladie. Autant
dire que pour ceux qui n’ont en tête que la réduction drastique des dépenses socialisées, elles
sont dans le collimateur,en raison de leur montée en charge (plus de 4,3% en 10 ans)et un
coût moyen par ALD de 10 000 euros(bien que le reste à charge pour les patients soit déjà
conséquent avec les dépassements tarifaires que nous connaissons aujourd’hui et les forfaits).
La réflexion tourne donc autour du périmètre : faut-il enlever des maladies de la « liste » ?,
avec des critères médicaux à prendre en compte- stade d’évolution de la maladie ou durée de
traitement ; ainsi du diabète particulièrement visé au moins dans ses premiers niveaux. Le
HCAAM (haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie) s’est penché sur la
question,estimant qu’à trop vouloir « sanctuariser » les prises en charge intégrales,en laissant
charger la barque des assurés non exonérés,on mettait en cause l’attachement à la sécurité
sociale. La HAS (Haute Autorité de Santé) a quant à elle estimé que l’ALD était davantage
traitée en terme de « situation d’exonération » ,qu’en tant que maladie chronique, au
détriment de la prévention et d’une coordination des soins permettant une prise en charge
médicale de qualité. Tout est donc prêt pour une réforme des ALD,mais laquelle ?
La récente proposition du directeur de la Cnam Frédéric Van Rockeghem visant à faire passer
à 35% les médicaments jusque là remboursés à 100% a suscité un tollé. La Cnam a émis un
avis négatif et le directeur a dû retirer ce projet qui, au début d’une campagne
gouvernementale sur le pouvoir d’achat, tombait fort mal. Mais ne soyons pas naïfs, ce
ballon d’essai n’était pas une initiative personnelle, et l’histoire n’est pas terminée de ce point
de vue, même si l’on peut se réjouir d’une unité trop peu souvent réalisée en matière de
protection sociale et qui a porté ces fruits. Elle va sans doute ressurgir sous une forme u peu
différente, quitte à faire prendre en charge le déremboursement par les complémentaires.
Mais la question des ALD est liée au projet de « bouclier sanitaire », qui pourrait à terme les
faire disparaître. Selon le mécanisme de ce "bouclier sanitaire", une idée de Martin Hirsch
mise en forme par Raoul Briet* et Bernard Fragonard,* les sommes restant à la charge du
patient ne pourraient pas dépasser 3 à 5% de son revenu brut. Un dispositif similaire a été mis