CAT/C/81/Add.2 (Part II)

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CAT
NATIONS
UNIES
Convention contre
la torture et autres peines
ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants
Distr.
GÉNÉRALE
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
6 mai 2005
FRANÇAIS
Original: ANGLAIS
COMITÉ CONTRE LA TORTURE
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION
Cinquièmes rapports périodiques des États parties attendus en 2004
DANEMARK − GROENLAND
GE.05-41464 (F)
120905
150905
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
page 2
TABLE DES MATIÈRES
Paragraphes
Page
I.
La police au Groenland ......................................................................
1−2
3
II.
Personnes condamnées à l’incarcération pour une durée
indéterminée en vertu du Code pénal groenlandais en vigueur .........
3 − 10
3
III.
La Commission sur le système judiciaire groenlandais .....................
11 − 13
4
IV.
L’administration de la justice pénale .................................................
14 − 40
5
Observations générales sur les enquêtes et les mesures
de contrainte ..............................................................................
14 − 24
5
Mesures individuelles ...............................................................
25 − 40
6
Sanctions ............................................................................................
41 − 82
9
A.
Présentation des différentes sanctions ......................................
46 − 79
10
B.
Transfert et extinction des sanctions .........................................
80 − 82
16
APPLICATION DES SANCTIONS ..................................................
83 − 100
16
A.
Application des sanctions de supervision .................................
83 − 92
16
B.
Exécution des condamnations à la prison .................................
93 − 100
19
VII. Traitement des personnes placées en détention provisoire et
des autres détenus ...............................................................................
101 − 109
21
A.
B.
V.
VI.
A.
Postes de détention....................................................................
101 − 104
21
B.
Prise en charge et traitement des détenus .................................
105 − 107
21
C.
Activités de probation ...............................................................
108 − 109
22
VIII. Comités chargés d’examiner les plaintes contre la police..................
110 − 116
22
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
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I. LA POLICE AU GROENLAND
1.
La police du Groenland assume les fonctions incombant habituellement aux personnels
en uniforme ainsi que les fonctions d’enquête et de poursuites. La plupart de ses agents sont
Groenlandais, de même que les chefs des 17 sous-districts que compte le district de police
du Groenland. À une exception près, le Directeur de la police a toujours été un Danois à ce jour.
Le district de police est placé sous la tutelle du Ministère danois de la justice, mais ses activités
de police sont contrôlées par le Directeur national de la police danoise et ses fonctions
de poursuites par le Procureur général du Royaume (Rigsadvokaten). La police s’acquitte
de plusieurs tâches qui ne relèvent ordinairement pas de cette institution, notamment les services
de secours et certaines fonctions relevant de l’autorité civile. Les peines de prison sont exécutées
sous la supervision du Département des prisons et de la probation.
2.
L’école de police (politiskolen) en place au Groenland recrute chaque année une dizaine
de stagiaires qui suivent une formation de base de deux ans et neuf mois. Tous les fonctionnaires
de police suivent un cours de recyclage en cours d’emploi au bout de 6 à 8 ans de service, puis
à nouveau au bout de 8 à 12 ans de service. Il leur est en outre possible de suivre des cours
spécialisés concernant des domaines tels que les infractions à la législation sur les stupéfiants.
II. PERSONNES CONDAMNÉES À L’INCARCÉRATION POUR UNE DURÉE
INDÉTERMINÉE EN VERTU DU CODE PÉNAL GROENLANDAIS
EN VIGUEUR
3.
En vertu des dispositions du Code pénal groenlandais en vigueur, un délinquant auteur
d’une infraction grave contre les personnes peut être condamné à l’incarcération pour une durée
indéterminée dans une institution au Groenland. Une telle condamnation peut être prononcée
si le délinquant fait peser un danger immédiat sur la vie, l’intégrité physique, la santé ou
la liberté d’autrui et si l’incarcération est la seule solution susceptible de conjurer ce danger.
4.
Le tribunal peut également condamner un délinquant à l’incarcération pour une durée
indéterminée au Danemark dans une institution assurant une prise en charge psychiatrique
(du Service des prisons et de la probation) si, en raison de troubles mentaux, ledit délinquant est
inapte à une incarcération dans un établissement au Groenland ou si l’incarcération ne peut être
assurée dans des conditions de sécurité adéquates. Dans la pratique, ce type de délinquant est
incarcéré dans l’institution de Herstedvester au Danemark et, au 27 avril 2004, 18 délinquants
étaient incarcérés dans le quartier des Groenlandais de cette institution.
5.
Les agents affectés à ce quartier, Danois pour les uns et Groenlandais pour les autres,
sont très attentifs, dans l’accomplissement de leur travail, aux différences d’ordre linguistique
et culturel existant entre Groenlandais et Danois et s’efforcent d’en tenir compte au quotidien.
Ce quartier est doté d’interprètes et d’enseignants groenlandais chargés d’assurer les
communications entre les délinquants, le personnel soignant et le reste du personnel. Cette
institution met en œuvre diverses initiatives visant à faire face aux problèmes spéciaux auxquels
sont confrontés les délinquants groenlandais qui se trouvent éloignés du Groenland pour
des périodes de longue durée.
6.
La plupart des délinquants doivent suivre un traitement contre l’alcoolisme, et des crédits
en vue de la mise en route d’un projet pilote de traitement des délinquants groenlandais
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alcooliques ont donc été affectés à cette institution, laquelle a noué des contacts avec un centre
de réadaptation des alcooliques et a acquis de l’expérience dans la prise en charge
des Groenlandais en appliquant le modèle dit du Minnesota. Un accord définitif a été conclu à
l’automne 2004 entre l’institution de Herstedvester et le Centre de réadaptation de Frederiksberg.
Un projet pilote a été lancé à la fin du mois de septembre en s’inspirant des principes du modèle
du Minnesota.
7.
Cette institution s’emploie en outre à mettre en place dans ses murs, à l’intention de tous
les détenus, des groupes d’auto-assistance, en coopération avec les Alcooliques anonymes, et il
est prévu à ce titre qu’un membre groenlandais des Alcooliques anonymes suive une formation
à la prise en charge de délinquants groenlandais dans le cadre de groupes spéciaux
d’auto-assistance.
8.
Les délinquants bénéficient d’une prise en charge psychiatrique/psychologique par
un psychologue/psychiatre appliquant diverses méthodes thérapeutiques. Une action de thérapie
environnementale est menée en parallèle et cette institution a récemment reçu des crédits
destinés à mettre en place de nouvelles modalités de traitement sous la forme d’une thérapie
cognitive comportementale de groupe modifiée pour l’adapter aux besoins spéciaux des
délinquants. Ces modalités de traitement sont désormais à la disposition des délinquants. Enfin,
les détenus ont la possibilité de suivre une psychoéducation, c’est-à-dire un enseignement relatif
aux maladies mentales, aux problèmes de dépendance, aux comportements des personnes
souffrant d’addiction, etc.
9.
Les Groenlandais condamnés à l’incarcération pour des infractions sexuelles suivent, tout
comme les Danois auteurs d’une infraction de ce type, un traitement psychiatrique/sexologique,
combiné le cas échant avec l’administration de médicaments diminuant la libido.
10. En application d’une proposition formulée par la Commission sur le système judiciaire
groenlandais, depuis 1996 une décision administrative de transfert dans une institution
au Groenland peut être prise en préparation à un changement de type de traitement et cette option
a déjà été utilisée à deux reprises. Le Service des prisons et de la probation du Groenland,
le bureau du Directeur de la police au Groenland et l’institution de Herstedvester coopèrent
en permanence en vue de préciser la procédure des transferts administratifs au Groenland.
III. LA COMMISSION SUR LE SYSTÈME JUDICIAIRE
GROENLANDAIS
11. Face aux changements à l’œuvre dans la société, en 1994 le Gouvernement danois et
le Gouvernement autonome du Groenland ont institué la Commission sur le système judiciaire
groenlandais (Den Grønlandske Retsvæsenskommission), qui est présidée par Per Walsøe, juge
à la Cour suprême, et se compose de 16 membres désignés par le Gouvernement danois et le
Gouvernement autonome groenlandais. La Commission avait pour tâche principale de procéder
à un réexamen et une évaluation approfondis de l’intégralité du système judiciaire groenlandais
et de formuler sur cette base des propositions en vue de le réformer, si nécessaire de manière
radicale.
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12. La Commission a rendu son rapport au Ministre danois de la justice le 3 août 2004.
Ce rapport (dont un résumé en anglais est joint au présent document*) a été diffusé
pour observations aux organismes et autorités compétents au Danemark et au Groenland.
Le Gouvernement danois décidera ultérieurement, en coopération avec le Gouvernement
autonome groenlandais, de la suite à donner aux diverses propositions et recommandations
présentées dans le rapport de la Commission.
13. On trouvera ci-après un récapitulatif des propositions formulées par la Commission
dans son rapport concernant: l’administration de la justice pénale; les sanctions; l’application
des sanctions; le traitement des personnes placées en détention provisoire et des autres détenus;
les comités chargés d’examiner les plaintes contre la police. Ce récapitulatif présente un intérêt
particulier dans l’optique des articles 11 et 12 de la Convention.
IV. L’ADMINISTRATION DE LA JUSTICE PÉNALE
A. Observations générales sur les enquêtes et les mesures de contrainte
14. Un grand nombre des règles de procédure pénale en vigueur sont demeurées inchangées
depuis l’introduction de la loi de 1951 sur l’administration de la justice au Groenland. Plusieurs
aspects de la procédure ne sont pas régis par ladite loi, mais dans la pratique les principes de la
loi sur l’administration de la justice au Danemark constituent une source d’inspiration pour les
tribunaux du Groenland s’agissant de ces aspects. Les délibérations de la Commission relatives
à l’élaboration de nouvelles dispositions dans ce domaine ont ainsi reposé sur les règles
groenlandaises et danoises en vigueur.
15. Dans le domaine pénal, par mesures de contrainte on entend certaines mesures auxquelles
la police est susceptible de recourir durant une enquête, à savoir: arrestation et détention,
restriction du secret des communications, fouille corporelle et autres contacts physiques,
confiscation, perquisition, prise et archivage d’empreintes digitales, de photos ou d’autres
matériels.
16. Le Comité permanent sur l’administration de la justice pénale du Ministère de la justice
(Justitsministeriets Strafferetsplejeudvalg) a consacré plusieurs rapports à ces mesures
de contrainte, lesquels ont servi de support aux dispositions de la loi sur l’administration de
la justice au Danemark. La Commission a estimé que les règles en vigueur au Danemark étaient
foncièrement adaptées au Groenland.
17. Le Comité permanent a été d’avis que la loi sur l’administration de la justice devrait
prévoir un catalogue exhaustif de mesures de contrainte au titre de la justice pénale et que
la règle prédominante devrait être l’interdiction d’appliquer de telles mesures à moins que leur
application ne soit expressément autorisée. La Commission a souscrit à cet avis.
18. Certaines dispositions de la loi sur l’administration de la justice au Danemark fixent
comme condition à l’adoption de mesures de contrainte au titre de la justice pénale
qu’elles visent l’auteur d’un délit ou d’un crime, c’est-à-dire d’une infraction grave, par exemple
*
Document disponible au secrétariat pour consultation.
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une infraction emportant une peine maximale d’au moins 18 mois d’emprisonnement. D’autres
dispositions fixent pour condition que l’auteur encourre une peine maximale d’au moins six ans.
Le principe est que la sévérité de la mesure doit être proportionnée à la gravité de l’infraction.
19. Le Code pénal en vigueur et le projet de loi pénale soumis par la Commission
se distinguent tous deux du Code pénal danois en ce que les différentes infractions ne sont pas
associées à un type particulier de peines (telles qu’amende ou emprisonnement) ni à une peine
minimale ou maximale. Le droit pénal groenlandais repose principalement sur un système
de sanctions.
20. La Commission propose de conserver les lignes directrices en vigueur concernant
les conditions touchant à la gravité de l’infraction. Les observations ci-après ont pour objet
d’apporter des éclaircissements sur la pratique actuelle et n’annoncent en rien un changement.
21. Là où les dispositions de la loi sur l’administration de la justice au Danemark prescrivent
une peine maximale de 18 mois d’emprisonnement ou plus, il est proposé de faire référence dans
les dispositions correspondantes de la loi sur l’administration de la justice au Groenland à une
infraction grave, c’est-à-dire une infraction emportant dans la pratique une sanction supérieure
à l’amende dans le modèle de l’échelle des sanctions (voir plus loin le paragraphe 44).
22. Là où les dispositions de la loi sur l’administration de la justice au Danemark prescrivent
une peine maximale de six ans d’emprisonnement ou plus, il est proposé de mentionner dans
les dispositions correspondantes de la loi de l’administration de la justice au Groenland
une infraction «d’une telle gravité» (ou une infraction «si grave») que la mesure de contrainte
visée s’impose. Ces deux formulations recouvrent un seul et même critère. En règle générale, par
une infraction «si grave» ou une infraction «d’une gravité telle» que la mesure en question
s’impose, on entend des infractions emportant dans la pratique une peine d’emprisonnement
d’une durée non négligeable.
23. Le principe de proportionnalité est supposé s’appliquer à toute mesure de contrainte
relevant de la justice pénale, ce qui signifie que le préjudice et le trouble causés par cette mesure
à la personne visée ne doivent pas être hors de proportion avec la gravité de l’affaire et la
nécessité de la mesure. Il est proposé de mentionner expressément le principe de proportionnalité
dans les dispositions énonçant les mesures individuelles pour veiller à ce que le tribunal
le prenne en considération.
24. En plus du principe de proportionnalité, s’applique le principe de considération, principe
général selon lequel toute mesure de contrainte doit être mise en œuvre avec la plus grande
considération possible à l’encontre de la personne ou des personnes qu’elle vise. Il est proposé
de mentionner expressément ce principe dans les dispositions de la loi concernant l’arrestation
et la détention et les dispositions relatives à toutes les autres mesures de contrainte relevant de
la justice pénale dans toutes les éventualités où le critère de considération se révèle judicieux.
B. Mesures individuelles
25. Il est proposé de conserver et d’étoffer les quelques règles en vigueur relatives aux
enquêtes et aux interrogatoires afin de les aligner sur les règles figurant dans la loi sur
l’administration de la justice au Danemark.
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26. Les règles générales relatives à l’arrestation et à la détention correspondent pour l’essentiel
aux règles en vigueur au Danemark et il est proposé de les laisser foncièrement inchangées. Il est
cependant proposé d’introduire des dispositions habilitant le tribunal à reconduire une mesure
de garde à vue jusqu’à trois fois 24 heures si le détenu ne peut être relâché immédiatement et si
le tribunal ne peut statuer rapidement sur la question de la détention en raison de l’insuffisance
des informations à sa disposition ou pour toute autre raison.
27. La Commission propose d’aligner les grands principes régissant la situation des personnes
détenues − dans un local de détention ou une prison − sur les dispositions pertinentes de la loi
sur l’administration de la justice au Danemark. En outre, le tribunal devrait être autorisé à
se prononcer sur la possibilité d’un placement alternatif d’une personne détenue.
28. La loi sur l’administration de la justice au Groenland ne contient pas de dispositions
prévoyant la détention en régime cellulaire. La Commission propose d’introduire les garanties
de procédure danoises en faveur des personnes détenues au régime cellulaire au Groenland.
La détention en régime cellulaire d’un individu aux fins de l’enquête ne sera à l’avenir possible
que sur décision préalable du tribunal, et les conditions du placement en détention en régime
cellulaire et sa durée devront être fixées par la loi.
29. En vertu des règles en vigueur relatives à la restriction du secret des communications, le
juge de district peut ordonner, à la demande de la police, que soient remis à la justice les lettres,
télégrammes et autres envois adressés à un suspect ou reçus par lui. En outre, le juge de district
peut, à la demande de la police, autoriser la police à effectuer des écoutes téléphoniques,
ordonner à Tele Greenland de fournir à la police des informations sur la transmission de
données, et autoriser la police à procéder à des opérations d’interception autres que les écoutes
téléphoniques.
30. Il est proposé de durcir les conditions auxquelles est assujettie la restriction du secret
des communications. S’agissant des écoutes téléphoniques et de l’interception des données, il est
proposé de remplacer la disposition en vigueur énumérant les infractions tombant sous le coup
de telles mesures par une nouvelle indiquant que l’enquête concerne «une infraction
particulièrement grave, une immixtion dans la vie privée, ou de la pornographie à caractère
pédophile».
31. En ce qui concerne les écoutes autres que téléphoniques, telles que le placement
d’un micro dans un local, il est proposé d’introduire une disposition indiquant que l’enquête doit
concerner «une infraction particulièrement grave qui met en danger ou est susceptible de mettre
en danger la vie, la santé ou le bien-être d’autrui, ou des biens sociaux essentiels».
32. Contrairement à la loi sur l’administration de la justice au Danemark, la loi en vigueur
relative à l’administration de la justice au Groenland ne comporte pas de dispositions spécifiques
concernant les fouilles corporelles et autres contacts physiques, et ce sont donc celles de la loi
danoise qui sont appliquées. Les policiers s’en tiennent dans la pratique aux règles danoises
et la proposition tendant à introduire ces dispositions ne suppose aucun changement de fond
significatif.
33. En vertu des règles en vigueur, la perquisition d’un local sans le consentement de la
personne dont le local doit faire l’objet de ladite perquisition exige habituellement l’autorisation
du juge de district.
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34. La Commission estime les règles actuelles trop souples et propose de durcir les conditions
encadrant les perquisitions, ainsi que les règles de procédure en la matière, en les alignant sur les
normes en vigueur au Danemark. La perquisition du domicile d’un suspect et de tout autre local
ou l’ouverture de tout objet scellé appartenant à un suspect ne pourraient, suite à pareil
durcissement, s’effectuer que s’il existe des motifs raisonnables de suspecter ladite personne
d’une infraction passible d’une peine d’emprisonnement ou s’il existe des motifs raisonnables
de supposer qu’une perquisition permettra de recueillir des éléments de preuve dans une affaire
ou de trouver des objets confiscables.
35. Les règles en vigueur autorisent la confiscation d’un objet dans les éventualités suivantes:
l’objet est réputé revêtir de l’importance en tant qu’élément de preuve; l’objet tombe sous
le coup d’une saisie; l’objet a été soustrait à une personne en commettant une infraction et peut
faire l’objet d’une demande de restitution.
36. Il est proposé de durcir les règles relatives à la confiscation afin de les aligner sur les
dispositions correspondantes en vigueur au Danemark et la confiscation ne serait alors possible
que dans les trois éventualités suivantes:
a)
Recueillir des éléments de preuve, donner effet à une demande adressée par une
autorité publique aux fins de la confiscation du produit d’une infraction ou de la saisie d’un bien,
ou donner effet à la demande de restitution d’un objet qui a été soustrait à une victime;
b)
Donner effet à une demande de confiscation émanant d’une autorité publique
visant des objets de valeur ou la perception d’une amende ou pour donner effet à une demande
d’indemnisation formulée par une victime, etc.;
c)
Le défendeur s’est soustrait aux poursuites engagées dans l’affaire.
37. La loi sur l’administration de la justice au Danemark ne contient actuellement aucune
disposition concernant la divulgation, c’est-à-dire la remise ou la présentation au tribunal
de documents ou d’autres objets ayant de l’importance pour la mise en œuvre des poursuites
pénales. Dans la pratique, les policiers s’en tiennent aux règles en vigueur au Danemark, si bien
que la proposition tendant à introduire des règles relatives à la divulgation correspondant
aux règles en vigueur au Danemark n’entraînerait aucun changement majeur.
38. Montrer des photos à des personnes autres que des policiers constitue souvent un élément
essentiel d’une enquête policière. Lorsqu’un témoin s’estime capable de reconnaître un suspect
à partir d’une photo, la police peut lui montrer une telle photo en vue d’essayer d’établir
l’identité de l’auteur de l’infraction.
39. Le fait de pouvoir montrer des photos à des tiers dans le cadre d’une enquête pénale
constitue une mesure de contrainte lourde de conséquences et il est donc proposé de
ne l’autoriser qu’à l’encontre d’une personne ayant été antérieurement condamnée du chef
d’une infraction présentant un degré de gravité justifiant le recours à cette mesure dans le cadre
d’une enquête pénale ultérieure. La photo d’un individu reconnu antérieurement coupable
d’une infraction ne tombant pas sous le coup de la qualification d’infraction grave ne pourra être
montrée qu’à un policier, à moins qu’il existe des raisons précises de soupçonner ledit individu.
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40. Les dispositions en vigueur concernant l’établissement des rapports avant jugement se sont
révélées satisfaisantes dans la pratique, mais certaines opérations, telles que l’examen mental
d’un suspect, prennent souvent très longtemps, et c’est pourquoi la Commission estime que des
dispositions analogues à celles régissant la détention (délais et règles de procédure) devraient
s’appliquer en la matière.
V. SANCTIONS
41. Le Code pénal groenlandais, remontant aux années 50, se distingue des autres en ce qu’il
ne se fonde pas sur le concept de punition et ne fixe pas de peines maximales ou minimales pour
les différentes infractions. Il prévoit des sanctions très diverses, parmi lesquelles le tribunal
peut librement choisir pour sanctionner les différentes infractions.
42. La Commission s’est penchée sur le système de sanctions, son application et son
fonctionnement dans la pratique, ainsi que sur son devenir.
43. La disposition générale relative à l’application des sanctions ne fournit aux tribunaux que
des indications très limitées sur le type de sanction à prononcer dans une affaire pénale donnée.
Différentes options ont donc été envisagées quant à la manière de fournir des lignes directrices
plus étoffées concernant le choix et l’administration de la sanction dans une affaire concrète.
44. Après avoir examiné plusieurs modèles de gradation des infractions, la Commission en a
retenu un, dans lequel les conditions d’application d’une sanction déterminée sont définies par
le Code pénal. Ces sanctions sont hiérarchisées en fonction de leur degré de contrainte,
l’admonestation constituant la sanction la plus légère et l’emprisonnement pour une durée
indéterminée (détention de sûreté) la plus lourde. Le fait d’établir une échelle croissante des
sanctions a amené à accorder davantage d’importance qu’auparavant à la proportionnalité et
à l’égalité. Dans une affaire pénale concrète, le tribunal doit déterminer quel type de sanction
correspond en gravité à l’infraction commise, et en particulier se demander à quel échelon
de l’échelle des sanctions se situe la riposte appropriée. La lourdeur de la sanction ne doit pas
être appréciée en se fondant exclusivement sur l’acte délictueux en cause, mais en s’inscrivant
dans un cadre plus vaste qui peut englober des considérations telles que l’âge ou la motivation
du délinquant, ou encore la question de savoir s’il s’agit d’un primodélinquant ou d’un
récidiviste. Les circonstances aggravantes, telles que la commission antérieure d’une infraction
analogue, peuvent amener à prononcer une sanction se situant un échelon au-dessus de
la sanction qui aurait été prononcée autrement, et inversement dans le cas de circonstances
atténuantes telles que la jeunesse. Le souci de reclassement peut amener à prononcer
une sanction d’un échelon inférieur, et la composante reclassement de chaque échelon doit
transparaître dans le nouveau système.
45. Le fait de préciser dans la disposition relative à une certaine sanction les critères au regard
desquels prononcer cette sanction permet au législateur d’exercer une influence plus grande
et plus générale que précédemment dans le domaine de l’application des différentes sanctions.
Compte tenu de la formulation retenue, il n’a pas été jugé nécessaire ou utile d’imposer d’autres
limites, telles qu’une peine maximale ou une peine minimale, au pouvoir du juge de recourir,
en principe, à la totalité du catalogue de sanctions à sa disposition dans une affaire concrète.
Le modèle de l’échelle des sanctions fera ressortir plus clairement qu’auparavant la gradation
des sanctions en fonction de leur sévérité. Les rapports annuels concernant la pratique en matière
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de condamnations pourraient donc à l’avenir sensibiliser davantage la population et les hommes
politiques aux modalités d’application des sanctions, ce qui pourrait servir de point de départ
à des délibérations politiques générales sur le fonctionnement du système.
A. Présentation des différentes sanctions
46. Les différentes sanctions ainsi que les critères proposés pour en circonscrire le champ
d’application sont présentés ci-après, de même que les grandes lignes de leur contenu.
47. Le texte proposé dispose que l’admonestation peut être prononcée «si l’infraction est
particulièrement légère, en particulier si son auteur n’a jamais été condamné auparavant à une
sanction». Il est proposé de classer l’admonestation tout en bas de l’échelle des sanctions et de ne
l’utiliser, comme à présent, que dans les cas où l’infraction est si légère qu’il n’existe pas de base
pour infliger une amende ou une autre sanction.
48. Le texte proposé dispose qu’une amende peut être prononcée «si une sanction plus sévère
n’est pas nécessaire». Une amende peut en outre être infligée à titre de sanction complémentaire
à d’autres sanctions, «en particulier si le prévenu a obtenu ou escomptait un gain financier pour
lui-même ou autrui en commettant l’infraction en cause». Le montant de l’amende doit être fixé
en tenant compte de la capacité de l’auteur de l’infraction à la payer et du gain obtenu
ou escompté.
49. L’élargissement de l’éventail des sanctions devrait en principe s’accompagner d’un
moindre recours à l’amende. Dans le texte proposé, il est prévu que la police demeure investie
du pouvoir de prélever les amendes. En outre, le tribunal devrait continuer à être habilité à
remplacer une amende par une peine d’emprisonnement de courte durée (inférieure à 60 jours).
50.
Dans le texte proposé, l’emprisonnement avec sursis ne peut être prononcé que «si:
1)
Il est jugé suffisant pour empêcher l’auteur de l’infraction de commettre de nouvelles
infractions;
2)
Le degré de gravité de l’infraction ne rend pas pareille sanction inadaptée».
Dans leur forme actuelle, les condamnations avec sursis − le prononcé de la sanction étant
renvoyé au terme d’une période de mise à l’essai − sont très rarement prononcées car elles
ne sont pas perçues comme constituant une contrainte réelle et n’ont donc pas d’effet dissuasif
pour les auteurs d’infraction. Dans un souci de prévention de la délinquance, entre autres, il est
proposé que la condamnation avec sursis soit prononcée en fixant la durée de l’emprisonnement
encouru afin que l’auteur de l’infraction sache ce qu’il lui en coûtera de commettre une nouvelle
infraction. Dans son jugement de condamnation, le tribunal fixerait ainsi la durée de la période
d’emprisonnement, mais assortirait l’application de cette sanction d’un sursis correspondant à la
durée d’une période de mise à l’épreuve, au terme de laquelle la sanction s’éteindrait. Aucune
autre condition ne serait imposée à l’auteur de l’infraction que l’obligation de ne pas commettre
de nouvelle infraction durant son temps de mise à l’épreuve. La possibilité d’assortir une
condamnation à la prison avec sursis d’une amende est toutefois conservée.
51. S’il estime qu’une condamnation à la prison avec sursis ne suffirait pas à dissuader
le délinquant de commettre de nouvelles infractions et que le délinquant a besoin du soutien
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inhérent à une mise sous supervision, le tribunal peut prononcer en lieu et place
une condamnation à la supervision.
52.
Selon le texte proposé, une condamnation à la supervision doit être prononcée «si:
1)
Le délinquant a besoin d’un soutien ou d’un traitement;
2)
Le délinquant a besoin du contrôle inhérent à une mise sous supervision;
3)
La condamnation à une telle sanction n’est pas manifestement inadaptée eu égard à
la gravité de l’infraction».
53. Lors de l’introduction du Code pénal et des révisions ultérieures, la mise à l’épreuve
était censée occuper une place prépondérante dans le système de sanctions mais, en raison de
l’insuffisance des ressources, la condamnation à la mise à l’épreuve (ou à la supervision dans
la nouvelle terminologie proposée) n’occupe pas toujours une telle place.
54. Conformément au souhait formulé dans le mandat de la Commission, à savoir perpétuer
en tant que principe premier du Code une conception des sanctions axée sur la réadaptation
du délinquant, il est recommandé que les sanctions à vocation de réadaptation, dont
la condamnation à la mise sous supervision, occupent à l’avenir une place prépondérante.
La proposition de la Commission tendant à renforcer les antennes locales du Service des prisons
et de la probation ainsi qu’à rationaliser les activités de supervision doit être envisagée dans
cette optique. Dans un souci de rationalisation, il est proposé de remplacer l’expression
«condamnation à la mise à l’épreuve» par «condamnation à la mise sous supervision»,
de manière à faire ressortir la composante de contrôle inhérente à cette sanction.
55. Le projet de loi pénale énumère un certain nombre de conditions dont peut être assortie
une condamnation à la mise sous supervision. Elles peuvent viser à empêcher directement
le délinquant de commettre une nouvelle infraction, par exemple l’interdiction de séjourner dans
certains lieux, ou bien à assurer la réadaptation du délinquant, par exemple l’obligation de suivre
un enseignement ou une formation, de suivre une thérapie contre une addiction, etc. Si
le délinquant ne respecte pas les conditions fixées, l’autorité de supervision saisit le tribunal
par l’intermédiaire de la police, laquelle peut en pareille circonstance également procéder
rapidement à l’arrestation et au placement en détention du délinquant jusqu’à ce que le tribunal
examine son dossier.
56. Le texte proposé prévoit une nouvelle sanction: la condamnation à un service d’intérêt
collectif qui peut être prononcée «si:
1)
Le délinquant est jugé apte à une telle sanction;
2)
Une condamnation à la prison avec sursis ou à la mise sous supervision est
inadéquate en raison de la gravité de l’infraction».
57. La condamnation à un service d’intérêt collectif correspond à une condamnation à la mise
sous supervision (avec sursis), assortie par le tribunal d’une décision en vertu de laquelle
le délinquant doit accomplir un service d’intérêt collectif non rémunéré durant son temps libre
pour un minimum de 40 heures et un maximum de 240 heures. Ce travail obligatoire doit être
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
page 12
accompli dans un délai fixé par le tribunal, qui ne peut dépasser deux ans. Au cours de cette
période, le délinquant est placé sous la supervision du Service des prisons et de la probation,
qui veille au respect de l’obligation d’effectuer un service d’intérêt collectif et de toutes autres
conditions imposées par le tribunal. Si le délinquant ne se conforme pas à la décision
lui imposant un service d’intérêt collectif ou à toute autre condition, son affaire est rapidement
soumise au tribunal, qui peut annuler le jugement et prononcer une autre sanction.
58. La Commission a institué un groupe de travail chargé de réfléchir à la mise en place
d’un dispositif de service d’intérêt collectif au Groenland, qui a pour président le Directeur de
la police et rassemble des représentants de tous les organismes compétents. Ce groupe de travail
a formulé des recommandations concernant les travaux susceptibles d’être accomplis au titre du
service d’intérêt collectif ainsi que les modalités d’accomplissement de ces travaux, notamment
la manière de veiller à ce que le service d’intérêt collectif ne porte pas préjudice au marché
général de l’emploi, par exemple en affectant un condamné à des tâches susceptibles d’être
accomplies par d’autres citoyens.
59. Une réflexion a été engagée sur la conformité du dispositif proposé avec les normes
internationales pertinentes (Convention européenne des droits de l’homme et Convention
de l’OIT concernant le travail forcé ou obligatoire). Il ne faut pas confondre le service d’intérêt
collectif avec la sanction de travail «forcé» auparavant en vigueur au Groenland. Le dispositif
de service d’intérêt collectif envisagé n’est pas contraire à ces normes internationales. Le type
et la nature des travaux qu’il est envisagé d’imposer aux délinquants sont des travaux utiles,
réalisables, dont l’horaire est bien déterminé et qui visent à faire participer des délinquants à des
activités allant dans le sens de la promotion de sa réadaptation avec d’autres personnes − ce qui
exclut les travaux physiques pénibles ayant pour seul objet de punir.
60. Il a en outre été souligné que le tribunal devait conserver une grande latitude en ce qui
concerne le choix de la sanction la plus adaptée à chaque affaire, eu égard à ses circonstances
particulières. Le champ d’application d’une sanction déterminée n’est donc pas limité à un type
particulier d’infraction.
61. Le texte proposé prévoit l’introduction d’une nouvelle sanction: la condamnation
à l’emprisonnement suivie d’une mise sous supervision «si une condamnation à la mise
sous supervision ou à un service d’intérêt collectif est inadéquate eu égard à la gravité
de l’infraction». Le tribunal pourrait ainsi condamner un délinquant à une période
d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois mois, au terme de laquelle il serait mis
sous supervision et assujetti à certaines autres conditions énoncées dans le jugement.
62. Son champ d’application couvre des affaires dans lesquelles le sens de la justice du public,
y compris des victimes, justifie un emprisonnement, tandis que la situation personnelle
du délinquant justifie la mise en place à sa libération d’une supervision et, éventuellement,
d’autres mesures de réadaptation. Cette disposition viderait de sa substance la critique formulée
à l’encontre du système actuel de sanctions, selon laquelle il serait trop indulgent − sans
pour autant compromettre les perspectives de réadaptation. Avec la condamnation
à l’accomplissement d’un service d’intérêt public, cette nouvelle sanction servirait à réduire
l’écart entre la condamnation à l’emprisonnement et les sanctions moins contraignantes,
telles que la condamnation à la prison avec sursis et la condamnation à la mise sous supervision.
Le délinquant pourrait également si nécessaire être retiré rapidement de son environnement
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
page 13
du moment afin de donner au Service des prisons et de la probation la possibilité de planifier
la période de mise sous supervision avec le délinquant.
63.
Selon le texte proposé, l’emprisonnement pourrait être prononcé «quand il est nécessaire:
1)
Pour empêcher les délinquants de commettre une nouvelle infraction;
2)
Eu égard à la gravité de l’infraction».
64. Dans le texte proposé, les dispositions relatives aux circonstances dans lesquelles peut être
prononcée une condamnation à l’emprisonnement ne diffèrent guère de celles en vigueur.
Le tribunal fixe la durée de l’incarcération, qui ne peut toutefois toujours pas dépasser 10 ans
(l’emprisonnement pour une période indéterminée − internement de sécurité − constitue une
sanction distincte exposée plus loin). Par respect pour les victimes, la communauté locale et le
sens de la justice du public, il est proposé de concevoir les prisons de manière à ce que le Service
des prisons et de la probation puisse y placer des délinquants ayant commis une infraction
contre les personnes sous un régime semi-fermé pour un certain temps à compter du jugement,
sans possibilité de quitter la prison pour exercer un emploi ou pour tout motif légal.
La possibilité de bénéficier d’une libération conditionnelle administrative en vertu des règles
actuelles est conservée, mais sous réserve d’un examen judiciaire spécial. En cas de manquement
aux conditions, il est proposé que l’affaire soit transmise au tribunal (et non plus comme
actuellement au Comité du Service des prisons et de la probation (Kriminalforsorgsnævnet),
qu’il est recommandé de dissoudre).
65. Au Groenland, la proportion de détenus par rapport à la population est relativement élevée
en comparaison des autres pays; ce phénomène s’explique en partie par le fait que, malgré
un taux de criminalité légèrement inférieur à celui du Danemark, par exemple, le pourcentage
d’infractions contre les personnes y est plus élevé. En outre, les autorités chargées de
l’application des lois parviennent à un taux d’élucidation élevé des affaires, avec pour résultat
que le nombre de cas donnant lieu à des poursuites est relativement plus élevé. Il convient
de noter à ce propos que les propositions de la Commission ne visent pas à durcir le système
de sanctions.
66. Selon le texte proposé, l’internement de sécurité pour une période indéterminée peut être
prononcé «si:
1)
Le délinquant est reconnu coupable d’homicide, de vol, de séquestration, de violence
aggravée, de menaces de la catégorie visée à l’article 94, de viol ou de toute autre
infraction sexuelle grave, d’incendie criminel ou de tentative de l’une de ces
infractions;
2)
Le délinquant fait peser un danger immédiat sur la vie, l’intégrité physique, la santé
ou la liberté d’autrui eu égard à la nature de l’infraction commise et aux informations
disponibles sur son auteur, en particulier sur la commission d’infractions
antérieurement;
3)
L’internement de sécurité est indispensable pour prévenir pareil danger».
L’internement de sécurité constitue le degré le plus élevé de l’échelle des sanctions (et non pas
une alternative).
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
page 14
67. Les critères proposés pour une condamnation à l’internement de sécurité correspondent
pour l’essentiel à ceux en vigueur concernant l’incarcération d’un délinquant. Il est proposé
de réintroduire l’expression «internement de sécurité» dans le Code pénal pour désigner
le placement en détention pour une durée indéterminée d’un criminel coupable d’une infraction
contre les personnes et faisant courir un danger immédiat à autrui.
68. Dans le mandat de la Commission figure une disposition la chargeant d’étudier et
de préciser les modalités selon lesquelles les Groenlandais incarcérés à l’institution
de Herstedvester au Danemark pourraient être rapatriés au Groenland pour y purger le reste
de leur condamnation à l’internement de sécurité dans une prison spéciale. La Commission
a proposé qu’à l’avenir tout Groenlandais condamné à l’emprisonnement de sécurité purge
sa sanction dans un nouveau quartier spécialisé devant être construit à Nuuk. Cette sanction sera
appliquée conformément aux règles relatives à l’emprisonnement, la modification essentielle
apportée étant que l’aménagement et la levée de la sanction ne pourraient désormais être
prononcés que par le tribunal.
69. Selon le texte proposé, un jeune délinquant âgé de moins de 18 ans au moment
du jugement, ou dans certains cas de moins de 20 ans, pourrait être condamné à une mesure
corrective spéciale.
70. Condamner un jeune délinquant à une mesure corrective spéciale consiste pour un tribunal
à décider de placer l’intéressé sous la supervision des autorités sociales en l’assujettissant aux
mesures correctives prévues dans la législation sociale. Le tribunal décide ainsi que ce jeune
doit respecter les règles que lui imposent les autorités sociales. Cette disposition ne s’applique
toutefois que si les autorités sociales ont accepté d’exercer pareille supervision. Le tribunal
fixe la durée de la sanction, qui ne dépasse en général pas deux ans mais ne peut en aucun cas
en dépasser trois.
71. La disposition similaire du Code pénal en vigueur n’a été que très peu utilisée car
les autorités sociales ne sont encore dotées que de ressources limitées. Pour garantir une action
continue et constructive en faveur de cette catégorie de jeunes, la Commission estime donc
très important d’instaurer entre la police, le Service des prisons et de la probation et les autorités
sociales un partenariat obligatoire fondé sur des accords de coopération à l’échelon local
et faisant appel aux ressources disponibles à cet échelon.
72. Au titre de cette disposition, il est possible d’appliquer un large éventail de mesures d’un
degré de sévérité variable allant de l’orientation et de la supervision au placement en institution.
Ce type de sanction ne vient donc pas s’insérer dans l’échelle des sanctions, mais constitue
une option autre. Comme jusqu’à présent, il ne sera pas possible de condamner un jeune
de moins de 18 ans à l’emprisonnement, «à moins que des circonstances spéciales n’exigent
un tel placement». Dans des cas spéciaux, une admonestation, une amende ou éventuellement
un service d’intérêt collectif peuvent être prononcés après évaluation spécifique.
73. Pour éviter qu’un jeune ayant été condamné à cette sanction n’éprouve des difficultés
à trouver sa place dans la société, il est recommandé de ne pas l’inscrire dans le casier judiciaire
de l’intéressé au terme de la période pour laquelle elle a été imposée par le tribunal.
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
page 15
74. Le texte proposé prévoit d’autoriser l’imposition de sanctions selon des modalités spéciales
à l’auteur d’une infraction si au moment de sa commission il était atteint de maladie mentale
ou se trouvait dans un état équivalent à une aliénation mentale ou d’arriération, «et si
c’est indispensable pour dissuader le délinquant de commettre de nouvelles infractions». Cette
catégorie de sanctions est en général prononcée pour une durée indéterminée en cas d’infraction
contre les personnes. Dans les autres cas, le texte proposé prévoit une durée maximale
avec possibilité de prolongation dans certaines circonstances spéciales. Le tribunal sera appelé
à statuer sur l’aménagement ou la levée de ces sanctions.
75. Le texte proposé indique que le contenu des sanctions spéciales visant les personnes
atteintes de maladie mentale, etc., doit être souple afin de laisser au tribunal la latitude
de prononcer la sanction qui lui semble la plus adaptée à l’espèce, compte dûment tenu
des aspects touchant tant à la sécurité qu’au traitement. Les sanctions envisagées correspondent
pour l’essentiel à celles en vigueur (internement en hôpital psychiatrique, traitement, mise sous
supervision assortie d’une injonction de suivre un traitement psychiatrique) et constituent une
alternative aux mesures ordinaires prévues dans l’échelle des sanctions − également susceptibles
d’être appliquées en fonction de l’état du délinquant.
76. Le Gouvernement autonome est responsable des services de santé et donc à ce titre
du traitement des délinquants atteints de maladie mentale; il a adopté un plan pluriannuel
de renforcement du système de traitement psychiatrique concernant les services psychiatriques
de district et prévoyant la mise en place, à l’hôpital de la Reine Ingrid à Nuuk, d’un service
psychiatrique fermé − venant s’ajouter aux services ouverts en activité. Les délinquants
groenlandais pénalement irresponsables internés dans un hôpital psychiatrique au Danemark
en vertu d’une décision de justice pourront alors être rapatriés au Groenland. Il n’est guère
envisageable de mettre en place les moyens nécessaires pour assurer le rapatriement aux fins
de traitement des cas psychiatriques les plus dangereux internés dans l’institution fermée de
Nykøbing (Sjælland), ni des arriérés mentaux. Le texte proposé dispose que le tribunal
demeurera habilité à décider un placement pour traitement dans un hôpital ou une autre
institution au Danemark.
77. La privation de droits peut être infligée en complément d’une sanction mais, en vertu des
dispositions en vigueur, cette mesure (privation du droit d’exercer une profession par exemple)
est conditionnée à l’existence d’un danger immédiat d’abus. La privation de droits a pour
motivation première la prévention et ne peut donc être prononcée à titre de châtiment en soi dans
une affaire pénale. En outre, le danger d’abus doit être lié spécifiquement à l’activité en cause
(critère de prévisibilité).
78. Il est proposé de reconduire les règles en vigueur en matière de privation des droits
(après y avoir apporté quelques mises à jour), qui correspondent, à quelques exceptions près
d’ordre linguistique et procédural, à celles applicables au Danemark.
79. Une confiscation ou une saisie peut être prononcée en complément d’autres sanctions.
Les dispositions actuelles en la matière correspondent pour l’essentiel à celles en vigueur
au Danemark, et il est proposé de les conserver après en avoir actualisé certains éléments.
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
page 16
B. Transfert et extinction des sanctions
80. Le lieu d’exécution d’une sanction ne peut être transféré d’une partie du Royaume à une
autre que si la loi l’autorise expressément. Vu les progrès des communications et l’accroissement
de la mobilité, y compris des délinquants, il est proposé de prévoir la possibilité de transférer
du Danemark vers le Groenland ou du Groenland vers le Danemark le lieu d’exécution de toutes
les sanctions assorties d’une mise sous supervision, hormis les sanctions correctives spéciales
visant les jeunes (qui ont un ancrage local). Il devrait être également possible de transférer le lieu
d’exécution d’une sanction privative de liberté entre les deux parties du Royaume, mais eu égard
à sa nature il convient d’introduire le droit à un examen judiciaire de la décision de transfert.
81. En vertu des règles en vigueur, la sanction s’éteint selon des modalités dont la structure
est plus simple que les dispositions analogues de la législation danoise. Les sanctions s’éteignent
en outre au décès du délinquant et peuvent être levées par voie de recours en grâce.
82. Les règles en vigueur sont en général libellées en termes modernes adaptés et il est donc
proposé de les conserver.
VI. APPLICATION DES SANCTIONS
A. Application des sanctions de supervision
83. En vertu de la législation en vigueur, les sanctions de supervision englobent les
condamnations à la mise à l’épreuve, la supervision des personnes bénéficiant d’une libération
conditionnelle, la supervision des délinquants atteints de maladie mentale condamnés à suivre un
traitement y compris après leur sortie d’hôpital, la supervision à leur libération des délinquants
condamnés à l’internement de sécurité (au Danemark actuellement), et la supervision des
délinquants placés dans une maison de réinsertion, une institution ou une famille. Parmi
les diverses tâches incombant au personnel du Service des prisons et de la probation figurent
également les opérations préalables à la condamnation, l’exercice des responsabilités en matière
de probation à l’égard des détenus, et la prévention de la délinquance. Ces tâches sont assurées
par les agents des antennes et bureaux du Service des prisons et de la probation implantés dans
près de la moitié des 18 municipalités, alors que dans la plupart des municipalités qui n’en sont
pas dotées le Service des prisons et de la probation est représenté par un contact.
84. Les sanctions de supervision n’ont jamais fonctionné aussi efficacement que prévu,
en raison principalement du manque de professionnalisme et d’une implantation géographique
insuffisante. La mise en œuvre efficace des sanctions de supervision suppose la présence,
dans l’entourage local du délinquant, de personnes capables d’assumer les obligations liées à
la supervision, d’intervenir en cas de manquement aux conditions et de fournir au besoin
un soutien. Si une sanction de supervision ne peut être appliquée bien qu’elle soit adaptée
en l’occurrence, le tribunal doit imposer une autre sanction, moins adaptée. Le problème le plus
manifeste est que l’absence de représentation dans certaines localités et agglomérations rend
l’activité du Service des prisons et de la probation difficile, voire même impossible dans
certains cas.
85. La Commission estime nécessaire que le Service des prisons et de la probation soit
représenté dans toutes les circonscriptions judiciaires, de préférence par du personnel qualifié,
mais en cas d’impossibilité par des contacts, des particuliers faisant office d’agent de supervision
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
page 17
et des préposés à l’établissement des rapports avant jugement. Ce dispositif devrait être structuré
de manière à permettre à ces particuliers de bénéficier d’un soutien idoine de la part de
professionnels. La mise en place de ce dispositif constitue un préalable à l’application des autres
propositions de la Commission.
86. Le Code pénal devrait indiquer les résultats escomptés d’une autorité efficace
de supervision, ainsi que les tâches à accomplir par une personne mise sous supervision et
les devoirs lui incombant. Le texte proposé préconise ce qui suit à ce sujet:

Informer le condamné de la teneur de la sanction que constitue la mise
sous supervision;

Mettre en route la supervision au plus tôt, si possible sur la base du volontariat;

Déterminer la fréquence des contacts entre le délinquant et l’autorité de supervision;

Élaborer un plan d’action pour la durée de la supervision et la post-supervision
si possible;

Surveiller efficacement le respect par le délinquant des conditions qui lui ont été
imposées;

Faire intervenir rapidement la police et le tribunal en cas de manquement
aux conditions;

Apporter conseil et assistance en vue du règlement des problèmes sociaux
et personnels;

Instaurer une étroite coopération avec les autres autorités, aussi bien judiciaires
qu’extrajudiciaires.
87. Dans le souci de renforcer l’aptitude des tribunaux à déterminer la sanction la mieux
adaptée, il est proposé d’intensifier les activités avant jugement du Service des prisons et de
la probation, qui sont les suivantes:

Établir un rapport avant jugement approprié dans les affaires où des mesures
de contrainte sont susceptibles d’être prononcées (supervision, prison);

S’assurer en la matière que toutes les dispositions voulues ont été prises en vue
de mettre en œuvre la sanction potentielle avant que le tribunal ne statue;

Mener d’intenses efforts de sensibilisation et conclure des accords provisoires
avec les établissements éducatifs pertinents, les familles d’accueil, etc.
88. Il s’est révélé particulièrement difficile de trouver des agents de supervision réunissant
les qualités requises et d’assurer la supervision de délinquants mis en liberté conditionnelle après
avoir purgé une peine de prison. Il est donc recommandé de mettre à disposition les ressources
nécessaires pour renforcer l’exécution des activités de probation dans les prisons et de
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
page 18
rationaliser la supervision des personnes au bénéfice d’une libération conditionnelle. Dans le
texte proposé, la Commission souligne qu’il convient de tirer parti de l’effet bénéfique potentiel
de la prison ainsi que de clarifier la situation en ce qui concerne le logement et les travaux
à accomplir et les aspects liés à l’entretien. Cette nécessité sera d’autant plus urgente lorsque des
centres semi-fermés et fermés auront été mis en place. Il est en outre proposé que les agents de
probation de la prison concernée coopèrent étroitement avec le futur organisme ou bureau local
de probation, ainsi que d’associer aux préparatifs tout particulier faisant office d’agent
de supervision ou la famille d’accueil concernés. L’expérience enseigne que la supervision des
personnes bénéficiant d’une liberté conditionnelle doit être très étroite, ce qui signifie qu’il faut
que les référents du Service des prisons et de la probation, ou les particuliers faisant office
d’agent de supervision privé, se rendent plus souvent dans les localités ou hameaux où de telles
personnes font l’objet d’une supervision.
89. Pour ce qui est du service d’intérêt collectif, la Commission propose que le Service
des prisons et de la probation pourvoie aux emplois nécessaires et détermine, dans le cadre d’un
accord conclu avec chaque employeur, les conditions de participation au dispositif, notamment
en veillant à faire comprendre l’importance que revêt la notification rapide au Service des
prisons et de la probation (à l’agent de supervision) de toute absence ou tout autre manquement
à l’accomplissement de l’obligation de travail. Il convient de veiller à ce que l’approbation par
le Conseil national du travail (Landsarbejdsrådet) d’un emploi potentiel pour l’accomplissement
d’un service d’intérêt collectif ne se fasse pas au détriment du marché ordinaire de l’emploi.
90. S’agissant des sanctions spéciales visant les jeunes délinquants, dès le stade
de l’établissement du rapport avant jugement relatif à un jeune délinquant, le Service des prisons
et de la probation doit avoir pleinement conscience des possibilités qu’offre la coopération
obligatoire que la Commission préconise d’instaurer entre les autorités sociales, la police et le
Service des prisons et de la probation aux fins de l’application de ce type de sanction. À l’heure
actuelle, les autorités sociales sont chargées de mettre en œuvre les sanctions spéciales, mais
le Service des prisons et de la probation devrait prendre l’initiative de la coopération et
en demeurer ultérieurement le moteur principal. Le partenariat obligatoire préconisé dans le texte
proposé a pour objet de mettre à la disposition des autorités locales un instrument souple
propre à leur permettre de définir les mesures les mieux adaptées au jeune délinquant eu égard
aux circonstances de l’espèce et susceptibles d’être mises en œuvre localement.
91. En ce qui concerne les devoirs incombant au Service des prisons et de la probation
à l’égard des délinquants atteints de maladies mentales, la Commission estime qu’il doit
entretenir des contacts intensifs avec eux, en particulier veiller au respect par ces délinquants des
conditions inhérentes à leur traitement spécial. Dans sa proposition, la Commission présuppose
que le Service des prisons et de la probation ainsi que les services de santé disposent des
ressources nécessaires à une coopération allant du stade des activités préparatoires préalables à la
prise de la sanction, à la fourniture d’orientations, et à une intervention rapide en cas de situation
de crise. Le Service des prisons et de la probation est en outre supposé disposer de psychologues
et de psychiatres.
92. La coopération au titre de la préparation de la supervision à exercer sur un délinquant
condamné à l’internement de sécurité à sa libération en vue de sa réinsertion dans la
communauté locale, qui exige des ressources considérables, sera quelque peu facilitée après
la mise en œuvre de la proposition tendant à placer les délinquants condamnés à l’internement
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
page 19
de sécurité dans une prison au Groenland. Il convient toutefois de souligner que la nature et
la portée des obligations spéciales en matière de probation à l’égard des individus placés
pour durée indéterminée parce qu’ils constituent un danger pour autrui ne se trouveront en rien
modifiés.
B. Exécution des condamnations à la prison
93. Les règles en vigueur concernent les condamnations à toutes les formes d’enfermement,
à savoir la condamnation à l’emprisonnement pour une période déterminée pouvant aller
jusqu’à 10 ans, la condamnation à l’emprisonnement pour une période de durée indéterminée
(internement de sécurité), le placement en préparation à l’exécution d’une condamnation à la
mise à l’épreuve, et la contrainte par corps pour non-paiement d’une amende. Les détenus sont
placés dans une des trois prisons ouvertes (leur capacité d’accueil cumulée étant de 74 détenus)
que compte le Groenland ou bien, pour certains, dans les postes de détention de la police
ou encore dans une maison de réinsertion du Service des prisons et de la probation. À cette
possibilité s’ajoute le placement à l’institution de Herstedvester, au Danemark.
94. Une des caractéristiques des prisons groenlandaises est qu’elles visent à couper aussi peu
que possible les détenus de la communauté locale. C’est pourquoi le travail et les loisirs prennent
place si possible hors de la prison. Les résultats obtenus sont assez positifs et, étant donné que les
conflits violents, l’adoption de mesures disciplinaires et autres sont assez rares en comparaison
avec les prisons d’autres pays, il est proposé que les détenus continuent de préférence à être
placés dans une prison ouverte. Il est toutefois proposé d’exclure du bénéfice de ce régime
les délinquants des catégories suivantes:

En considération de la victime et de la communauté locale, les délinquants reconnus
coupables d’une infraction grave contre une personne pourront être placés en régime
semi-fermé pour une durée déterminée, sans possibilité de sortir de la prison pour
aller travailler, etc. Ce régime semi-fermé sera appliqué dans les prisons en place
appliquant un régime ouvert;

Les délinquants ne se conformant pas aux restrictions afférentes aux régimes ouvert
et semi-ouvert pourront être placés dans une unité disciplinaire fermée à installer à
la prison de Nuuk;

Les délinquants condamnés à l’internement de sécurité, qui étaient jusqu’à présent
envoyés à l’institution de Herstedvester au Danemark, seront placés dans une unité
fermée d’internement de sécurité à la prison de Nuuk et bénéficieront d’une prise
en charge psychiatrique par le personnel du service de psychiatrie de l’hôpital de
la Reine Ingrid de Nuuk.
95. La mise en place de deux unités fermées à la prison de Nuuk suppose l’aménagement
d’espaces de travail et de loisirs, car les personnes qui y seront détenues ne pourront quitter
la prison que dans certaines circonstances particulières.
96. Les trois prisons existantes sont toutes situées sur la côte ouest. En vue de rendre possible
le transfert au Danemark des personnes condamnées à l’internement de sécurité, il est proposé
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
page 20
de construire sur la côte est du Groenland une nouvelle prison d’une capacité d’accueil
correspondant à celle des deux petites prisons. Cette capacité demeurera inchangée par la suite.
97. Il est recommandé de recourir davantage à la possibilité de placer les détenus dans une
maison de réinsertion, de conserver la possibilité d’un placement à court terme en poste
de détention et de réintroduire le placement en famille d’accueil, entre autres.
98. Jusqu’à présent, le séjour en prison consiste principalement en une surveillance
des détenus durant leurs loisirs et la nuit. Diverses mesures sont proposées en vue de tirer
un meilleur parti à l’avenir de la période d’incarcération, notamment les suivantes:

Mettre en place des postes de travail dans les prisons, en particulier à l’intention
des détenus placés en unité fermée ou au régime semi-fermé;

Assimiler formation et instruction au travail;

Introduire l’autogestion et diverses possibilités d’occuper le temps libre;

Introduire des options de traitement du type programme de connaissances
cognitives, etc.;

Renforcer les efforts de probation, notamment dans un souci de prévention de
la délinquance.
99. Les règles relatives au séjour en prison ont été révisées ces dernières années en tenant
compte des recommandations internationales relatives au traitement des détenus. Les nouvelles
règles proposées visent à concilier la nécessité de protéger la communauté contre la criminalité
avec des garanties de procédure et des possibilités de traitement pour les délinquants condamnés.
100. Le principe fondamental est, comme jusqu’à présent, qu’un détenu peut exercer ses droits
civiques ordinaires dans la mesure où sa privation de liberté ne l’empêche pas en soi de le faire.
Il est proposé de prescrire que, durant l’exécution d’une sanction, aucune restriction ne puisse
être imposée aux condamnés hormis celles que prévoit la loi ou dont est assortie la privation
de liberté. Dans le projet de loi élaboré par la Commission, le maintien des restrictions liées à
la privation de liberté est motivé − outre par le souci de préserver la sécurité et l’ordre − tant par
l’existence d’un risque particulier de voir le délinquant commettre une nouvelle infraction grave
que par le respect du sens de la justice du public. Les règles proposées concernant le droit
de recourir à la force et d’imposer des mesures disciplinaires, de même que les autres règles
relatives aux décisions contraignantes, se fondent sur les règles de la justice pénale visant à
garantir la régularité de la procédure aux individus en cause. Ces règles garantissent en outre
un accès particulièrement facile à la possibilité d’examen judiciaire de certaines décisions
administratives, à savoir les décisions entraînant (une prolongation de) la privation de liberté,
telles que le refus de mise en liberté conditionnelle, ainsi que certaines décisions incombant
habituellement aux tribunaux mais prises par les autorités administratives à l’égard d’une
personne privée de liberté, telles que les décisions de confiscation et de saisie.
CAT/C/81/Add.2 (Part II)
page 21
VII. TRAITEMENT DES PERSONNES PLACÉES EN DÉTENTION
PROVISOIRE ET DES AUTRES DÉTENUS
A. Postes de détention
101. Un défendeur peut être arrêté et placé en détention avant jugement dans un poste local
de détention, où peuvent également être détenues des personnes en état d’ébriété et − dans les
postes les mieux équipés − des personnes purgeant une condamnation de courte durée. Un détenu
peut également être placé dans un quartier spécial de la prison de Nuuk et − à titre
exceptionnel − dans les prisons d’Aasiaat ou de Qaqortoq.
102. Des postes de détention sont en place dans les 17 districts de police, pour un total
de 51 cellules. Les huit postes de détention construits au début des années 90 sont équipés d’un
système de surveillance par télévision, d’un système d’interphone et d’un dispositif d’alarme
incendie. Les autres postes de détention ont été dotés d’équipements analogues à la même
époque.
103. Des postes de détention sont en outre en place dans six petites localités ou hameaux
dépourvus d’agents de police permanents; ils ne sont pas utilisés très souvent et ne disposent pas
de matériel de surveillance électronique.
104. Une étude menée en 1998 en vue de déterminer s’il y avait lieu d’installer des postes de
détention dans les hameaux a fait apparaître que les gens privés de liberté étaient souvent placés
dans des locaux inadaptés à cette fin et vivaient dans des conditions inadéquates mais que, vu
la faiblesse des besoins, rien ne justifiait la mise en place immédiate de postes de détention dans
les hameaux; la police a alors coopéré avec les autorités locales pour déterminer s’il existait
dans les hameaux concernés des locaux se prêtant à l’accueil des personnes privées de liberté.
La Commission n’a dès lors pas jugé nécessaire de recommander la construction de postes de
détention dans les hameaux, mais a recommandé de recourir aussi peu que possible à la privation
de liberté dans les hameaux et de placer les personnes en état d’ébriété à leur domicile,
si possible sous la supervision d’un auxiliaire de police local. Si la privation de liberté est
indispensable, il est recommandé que les personnes privées de liberté soient placées dans les
postes ou locaux de détention existants.
B. Prise en charge et traitement des détenus
105. Des dispositions communes concernant la supervision de tous les détenus figurent dans
les ordonnances du Directeur de la police relatives aux prisons et postes locaux de détention.
Ces ordonnances portent sur le maintien de l’ordre et la sécurité, les attributions du personnel
et les droits et devoirs des détenus, ainsi que sur les règles applicables en matière de fouilles,
de fermeture des cellules et de fréquence des rondes, les mesures à prendre en cas de maladie et
les modalités de plainte. La Commission n’a aucune observation à formuler au sujet des règles
communes.
106. Les règles concernant spécifiquement les personnes en état d’ébriété disposent
qu’elles doivent être libérées du poste de détention dès qu’elles sont dégrisées et que l’heure
de cette libération doit être consignée dans le registre des arrestations. Les règles applicables
aux personnes détenues en prison valent également pour les condamnés placés dans un poste
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de détention, avec toutefois les aménagements nécessaires eu égard aux différences existant
en ce qui concerne les équipements et la dotation en effectifs, entre autres, de ces deux catégories
d’établissements. La Commission ne propose aucune modification en la matière.
107. Il convient de prendre note des dispositions de la loi sur l’administration de la justice
(et de l’ordonnance sur l’exécution des sanctions), en vertu desquelles les règles applicables
aux personnes purgeant une peine de prison s’appliquent également aux autres détenus dans
la mesure où l’objet de cette détention ou le souci du maintien de l’ordre et de la sécurité rendent
cette mesure nécessaire et qu’elle est compatible avec l’objet de la détention. La Commission
recommande à la Direction du Service des prisons et de la probation de coopérer avec
le Directeur de la police en vue de l’élaboration d’un ensemble spécifique de règles concernant
le traitement des détenus. Ces règles devraient reposer sur celles proposées par la Commission
concernant le traitement des personnes purgeant une sanction d’emprisonnement. La plupart
de ces règles doivent être appliquées immédiatement aux détenus, mais des règles spéciales
devraient être élaborées concernant le droit de visite, la correspondance postale, les permissions
et l’exercice d’une activité professionnelle.
C. Activités de probation
108. En vertu d’une disposition expresse du Code pénal, les bureaux de la probation du Service
des prisons et de la probation sont chargés de veiller au bien-être et de superviser les personnes
incarcérées en vue de leur mise à l’épreuve. Sa compétence s’étend dans la pratique aussi bien
aux détenus avant jugement qu’aux délinquants condamnés. Suite à un accord conclu avec
le Directeur de la police, la police locale est tenue de signaler immédiatement au Service
des prisons et de la probation toute arrestation, en particulier d’un détenu en régime ouvert.
109. La Commission recommande que le Service des prisons et de la probation soit chargé,
en application de la loi sur l’administration de la justice, d’élaborer des règles détaillées relatives
à l’aide à la probation à fournir aux détenus en vue d’atténuer les handicaps d’ordre social,
personnel et professionnel découlant d’une période de détention. Le contact devrait être établi
aussitôt que possible, et au plus tard dans les sept jours suivant l’arrestation. Ce dispositif était
déjà en cours de mise en place au moment où la Commission a soumis son rapport. Il s’agit de
prendre des dispositions en vue tant de l’exécution de la future sanction que d’aider à résoudre
les problèmes d’ordre personnel et social.
VIII. COMITÉS CHARGÉS D’EXAMINER LES PLAINTES
CONTRE LA POLICE
110. Les plaintes visant les activités de la police ne faisaient pas l’objet de règles spéciales
avant le 1er janvier 2000. Afin de servir de support aux délibérations de la Commission relatives
aux traitement des plaintes et des affaires pénales concernant des membres de la police, le bureau
du Directeur de la police a établi une liste de toutes les plaintes portées contre la police par écrit
entre 1992 et 1998. Sur la période de 1992-1996, un quart des plaintes (15 sur 60) ont débouché
sur des décisions du Directeur de la police, du Procureur général ou du Ministère de la justice
(droit d’appel ordinaire). En 1997 et 1998, la police a examiné 14 plaintes visant le
comportement de policiers, 43 appels contestant des décisions de la police, et 17 signalements
faisant état d’actes criminels commis par des policiers dans l’exercice de leur service.
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111. Les délibérations de la Commission relative à la mise en place d’un nouveau système
actualisé d’examen des plaintes se sont fondées sur le système d’examen des plaintes en place
au Danemark. La Commission a estimé souhaitable de conserver un système simple et uniforme
qui repose de plus sur les options disponibles au Groenland et dont les intervenants aient une
bonne connaissance des spécificités groenlandaises. Eu égard à ces considérations, l’intervention
des procureurs régionaux ou du Procureur général semble tout aussi inadaptée qu’inutile.
Compte tenu de la structure spécifique du district de police et de la rotation régulière des
titulaires, le Directeur de la police du Groenland jouit d’une plus grande indépendance à l’égard
de ses fonctionnaires de police que ses homologues au Danemark. En combinant un directeur
de la police à la groenlandaise avec un comité d’examen des plaintes contre la police s’inspirant
du modèle danois, le système unifié pourrait être maintenu tout en le plaçant sous la supervision
d’un comité impartial d’examen des plaintes, afin de rassurer le public. On a estimé que
ce dispositif constituait dans l’ensemble un mécanisme fonctionnel et crédible d’examen
des plaintes.
112. C’est dans ce contexte qu’a été institué le Comité d’examen des plaintes contre la police
au Groenland (Politiklagenœvn for Grønland), qui se compose d’un membre président
(un avocat pratiquant au Groenland) et de deux membres non juristes. Ces membres sont
nommés par le Ministère de la justice sur recommandation du Conseil du barreau, de la Société
juridique et du Gouvernement autonome du Groenland. Le Comité est habilité à connaître des
plaintes visant le comportement de policiers, ainsi que des actions pénales engagées contre
des fonctionnaires de police. Le Comité peut demander au Directeur de la police de procéder
à de nouveaux examens ou à de nouvelles investigations, et lui indiquer comment l’affaire
devrait être traitée et quelles décisions devraient être prises, à son avis. Le Comité peut porter
devant le Procureur général tout désaccord avec le Directeur de la police, dont tout désaccord
portant sur une décision du Directeur relative à une plainte. Les plaintes peuvent être déposées
auprès de la police ou du Comité.
113. La Commission n’a pas voulu que la mise en place du nouveau système d’examen des
plaintes soit renvoyée à une date postérieure à la fin de ses travaux, et sa proposition dans ce sens
a été mise en œuvre par la voie de la loi no 905 du 16 décembre 1998 sur l’examen des plaintes et
des poursuites pénales concernant les fonctionnaires de police au Groenland (lov om behandling
af klager og kriminalsager vedrørende politipersonale i Grønland). Cette loi est entrée
en vigueur le 1er janvier 2000 et donne lieu à l’établissement de rapports annuels par le Procureur
général. Dans son rapport de 2002 sur le traitement des plaintes contre les fonctionnaires
de police au Groenland, le Procureur général a indiqué entre autres qu’au bout de trois années
d’activité le comité chargé d’examiner les plaintes contre la police au Groenland fonctionnait
bien et que, comme au Danemark, son action avait eu pour effet d’instaurer la confiance dans
les relations entre citoyens et policiers.
114. Le nombre de plaintes est allé en diminuant, pour tomber à 14 plaintes en 2002 contre
24 en 2001 et 36 en 2000. Le recul du nombre de plaintes a donc été de 42 % en 2002 par rapport
à 2001 et de 61 % par rapport à 2000.
115. Le rapport du Procureur général indique qu’en 2002 aucune des plaintes déposées
ne portait sur une affaire impliquant la mort d’une personne ou des blessures graves imputées
à une intervention de la police ou au cours d’une période de garde à vue, alors qu’en 2001
trois plaintes de ce type avaient été déposées.
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116. Le rapport du Directeur de la police du Groenland attribue la diminution du nombre
d’affaires de ce type à l’attention accrue portée aux problèmes liés à la détention, notamment
la prise en charge, la sécurité et les documents. Dans son rapport, le Procureur général a souligné
qu’il jugeait cette évolution très satisfaisante et espérait qu’elle allait se confirmer dans les
années à venir.
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