
Dossier 2
Vous recevez en consultation aux urgences une femme de 75 ans que son mari amène pour fièvre,
asthénie et céphalées, le tout évoluant depuis 3 jours. Ses antécédents consistent en un diabète sous
metformine et une HTA sous bisoprolol. A l’examen, vous retrouvez une T° à 40, une TA à 13/8, une
fréquence cardiaque à 70 ; il n’y a pas d’anomalie à l’examen cardiaque, pulmonaire ou cutané ; vous
notez une sensibilité de l’hypochondre droit ; la patiente est très asthénique, a du mal à se prêter à votre
examen, et ses propos sont incohérents, puisqu’elle se croit en 1985 et n’a plus de souvenir du voyage
au Sénégal dont elle et son mari sont rentrés il y a 10 jours. Le reste de l’examen neurologique est
normal. Les céphalées sont intenses, mais sans syndrome méningé.
1) Mentionnez vos deux principales hypothèses diagnostiques et les examens nécessaires pour les
explorer.
Encéphalopathie aiguë fébrile : on évoque :
Encéphalite herpétique : car 1ère étiologie en France de l’adulte immunocompétent, et gravité
- PL : méningite (pléiocytose, hyperprotéinorachie) lymphocytaire normoglycorachique ; pas de germe à
l’ED ou à la culture ; PCR HSV positive
- EEG : atteinte bi/monotemporale avec anomalies en pointes-ondes triphasiques
- IRM : inflammation (hypersignal T2) du parenchyme cérébral
Neuropaludisme : car exposition récente, et gravité
- frottis sanguin (et autres tests) : présence de Plasmodium falciparum
- PL normale
- imagerie cérébrale normale
2) Expliquez le traitement de chacune de ces hypothèses.
Encéphalite herpétique : urgence thérapeutique ; hospitalisation, discuter passage en réa ; traitement
antiviral par aciclovir IV 10 mg/kg/8h 21 jours
Neuropaludisme : urgence thérapeutique, passage en réanimation
- artesunate IV : traitement initial recommandé officiellement depuis 2013, pour l’instant encore en ATU
- ou quinine par voie IV 8mg/kg/8h 10 jours (après ECG) ; précédé d’une dose de charge à 16 mg/kg
- supplémentation glucose IV (5 ou 10%) car risque d’hypoglycémie / hypersécrétion d’insuline
- relai PO dès que possible
- surveillance des effets indésirables (acouphènes, aggravation de l’hémolyse, troubles du rythme
cardiaque, troubles visuels …)
3) Les examens que vous avez fait pratiquer invalident ces hypothèses, et d’autres examens vous
orientent vers le diagnostic d’angiocholite. D’ailleurs, pendant l’échographie abdominale, la radiologue
vous appelle car la patiente est difficilement réveillable ; sur place, vous notez que sa tension est à 7/4,
avec une tachycardie à 90. Que craignez-vous ? Quelle prise en charge proposez-vous ?
Choc septique (hypotension < 9 dans un contexte d’angiocholite)
Urgence thérapeutique ; Prise en charge en réanimation ; monitoring FC, Sa02, TA
Remplissage par cristalloïdes ou macromolécules 20-40 ml/kg (et arrêter -bloquants !)
Amine vasopressive par voie IV si remplissage insuffisant : noradrénaline
Antibiothérapie IV adaptée ; en l’occurrence : C3G (ceftriaxone) + ornidazole + amikacine
Chirurgie pour lever l’obstacle et draîner les collections purulentes
Arrêt metformine car risque d’acidose lactique
4) La situation nécessite finalement son transfert en réanimation et son intubation. Au 6ème jour, alors
que l’angiocholite a bien évolué sous antibiotiques et après geste chirurgical, la patiente présente à
nouveau une fièvre. Quelles peuvent en être les causes ?
Propre à la réanimation et à la période post-opératoire :
- pneumonie de ventilation (Pseudomonas, staphylocoque, entérobactéries, …) (acquise en per-
opératoire ou après)
- infection sur cathéter veineux, artériel ou urinaire
- thrombose veineuse, MTE
- infection du site opératoire
Fièvre sous ATB :
- allergie médicamenteuse (J6 = un peu tôt)
- résistance du germe, ou dose ATB insuffisante, ou pas de diffusion de l’antibiotique au site voulu
- colite pseudomembraneuse (J6 = un peu tôt)