CHAPITRE VI : MONNAIE ET FINANCEMENT DE L’ECONOMIE
c) La monnaie comme phénomène institutionnel et social
L’approche individualiste (ou néo-institutionnaliste), c’est l’approche néo-classique. C’est
l’approche qui ne conçoit les institutions que comme étant au service de l’efficacité marchande, donc
dans une logique de recherche d’efficacité, que ce soit au niveau global ou individualiste. On parle de
règles ici car le fait qu’on utilise telle monnaie plutôt qu’une autre est une règle qui s’impose aux
individus. Le fait qu’on va utiliser comme monnaie de l’or, de l’argent, des billets… est un processus
institutionnel qui mobilise des rapports sociaux et culturels assez variés. (Ex : problème du passage
du franc à l’euro). Ici, le seul critère est le critère de l’efficacité économique. La monnaie s’impose en
tant qu’intermédiaire des échanges, en tant qu’institution parce que la pression de la concurrence
pousse à mettre en place des institutions qui permettent une plus grande efficacité des relations
marchandes (Ex : Hayek et l’idée d’ordre spontané crée par le marché, et donc d’auto-
institutionnalisation du marché). Dans le cas de la monnaie, la vision Hayekienne ne conduit pas
automatiquement à faire de l’Etat l’institution qui doit avoir le monopole d’émission monétaire (ou
du moins l’émission de la monnaie légale). Débouche chez Hayek sur l’idée que l’émission de
monnaie peut être laissée au marché, les entreprises privées qui produisent de la monnaie entrent
en concurrence les unes avec les autres. Ensuite, les entreprises qui sont les plus efficaces dans cette
activité d’émettre de la monnaie vont être sélectionnées par le marché, ce sont celles qui arrivent à
trouver le bon équilibre entre une émission insuffisante de monnaie qui leur empêche de faire des
profits (car elles sont rémunérées par leur capacité à créer de la monnaie donc à faire payer des
intérêts à leurs clients) et une émission monétaire trop importante qui risque de les pousser à la
faillite par un déséquilibre entre leurs créances et leurs engagements (c'est-à-dire qui risque de les
pousser à des crises de liquidité). La vision Hayekienne des institutions en général et de la monnaie
en particulier débouche systématiquement sur une primauté du marché dans tous les domaines de
l’activité économique, et même dans les domaines dans lesquelles on a l’habitude de penser que
l’Etat et très présent.
L’Etat doit-il prend en charge l’émission de la monnaie ? Laidler (1977) apparente la monnaie à un
bien public (non rivalité, non exclusion). Ici, au sein d’un espace économique donné, on ne peut pas
empêcher un individu d’utiliser l’€ au sein de la zone € comme intermédiaire des échanges. A partir
du moment où un bien est public, si on laisse faire le marché, il risque de ne pas être produit. Ici, on
risque de voir circuler plusieurs monnaies différentes, autrement dit on risque de voir se constituer
plusieurs zones monétaires imbriquées les unes dans les autres, on risque de ne pas bénéficier
pleinement de l’efficacité qu’apporte l’utilisation d’une monnaie. Cela débouche sur la justification
de la nécessité de l’intervention de l’Etat pour gérer cette monnaie.
L’approche holiste : Ici, la monnaie est avant tout un phénomène social, culturel, avant d’être un
outil économique. On retrouve cette approche dans des analyses d’origines très diverses sur le plan
théorique. Dans l’analyse économique, on trouve cette approche chez Marx, car chez lui, la monnaie
(ou l’argent), est attachée au mode de production capitaliste. Cette monnaie est au fondement de la
séparation de la société en deux classes (ceux qui en ont et ceux qui n’en n’ont pas). Pour Marx, les
Classiques ont une vision de la monnaie comme intermédiaire des échanges tel que M-A-M alors que
pour lui A-M-A. L'argent permet au capitaliste bourgeois de produire des marchandises et
d'extorquer une plus-value qui va lui permettre d'avoir encore plus d'argent qu'au départ. Comme le
but est l'argent, on entrevoit déjà la logique frénétique qui pousse à accumuler toujours plus
d'argent. Dans l’approche classique, on retrouve la loi de Say.
Mauss présente la monnaie comme un « fait social total », la monnaie doit être appréhendée comme
phénomène économique, social et politique (rapport entre nations de monnaies différentes).
L’utilisation de la monnaie dans la société n’a pas systématiquement une fonction économique, mais