PourStéphane Roy,il estpossible d’envisager qu’on puisse unjour
«stimuler» des gènes endormis quipermettraientlarégénération
des tissushumains. L’animalqu’il tienticiestunaxolotldetype
sauvage,caractérisé parsacouleurvert-noir.
Chezles urodèles,plusieurs
parties ducorps peuventse
régénérer si l’animalestmutilé.
Ainsi,on peut couper lapatte
del’axolotlautantdefois qu’on
veut,elle aurarepoussé deux
mois plustardetle nouveau
membre seraexactement
pareil aupremier. L’animal
représentéàgauche esten
réalitédeux fois pluspetit;il
mesure une vingtaine de
centimètres. Ils’agitd’unaxolotl
detype blanc.L’axolotlalbinos
seraitplutôtdeteintedorée.
La repousse,àpartir dumembre original
tronqué,se faiten deux mois.
PHOTO PIERRE McCANN, LA PRESSE ©
PHOTO PIERRE MCCANN, LA PRESSE ©
LUC DUPONT
AGENCE SCIENCE-PRESSE
Est-il illusoiredepenserqu’unjour,
nous auronslacapacitéderecréer
destissus gravementendommagés
(blessuresàlamoelle épinière,brû-
lures),voireassisteràla«repousse»
d’unmembreamputé?
Depuisdeux ans,dansson labo-
ratoiredelafacultédemédecine
dentairedel’UniversitédeMontréal,
Stéphane Royamputedespattesde
salamandreetregarde pousserles
nouvelles…«Etc’est tellementparfait
comme régénération,qu’on ne voit
aucune différenceentrel’ancienne
patteetlanouvelle. Onpeut couper
100 foislapatteet100 foiselle repous-
sera.Leprocessus prend deux mois.»
Pour explorercefascinantpouvoir,
le biologistealachancedetravailler
avecune salamandrede15à25cm
appelée axolotl. OriginaireduMexique,
elle appartientàlafamille desamphi-
biensurodèles,lesseulsvertébrés,
connus àcejour,munisd’une telle
capacitérégénératrice. L’axolotlpeut
refairecomplètementeten tous temps
sespattes,saqueue,sesmâchoires,
sapeau,samoelle épinière,sesyeux,
etmême une partie de son cœur et
de son cerveau!
«Cepouvoirde régénération –
différentdeshabituelsmécanismes
de guérison –est beaucoupplus cou-
rantchezlesinvertébrés,explique
Stéphane Roy.Parexemple,le ver
planaire–une espècedelombric
marin –ale pouvoirde semultiplier
en 50vers différents etcomplets,si
vous le sectionnezen 50bouts.»
La piqûrepour untel sujet,le
biologistel’aeuelors d’unstage post-
doctoraldetroisans(1997-2000)au
laboratoiredelagrande spécialiste
de larégénération tissulaire,ladoc-
teureS.V.Bryant,de l’Universitéde
laCalifornie àIrvine. Ensemble,ils
onttravaillé àcernerle secretdes
mécanismesgénétiquesetdesvoies
de signalisation quisontàlabase
même duprocessus de larégénération
parfaitechezlesurodèles.
Cetravail est toujours en cours,
mais«onacependantidentifié,au
sitedel’amputation,dansune mince
couche de 2millimètres,unphéno-
mène qu’on appelle ladédifféren-
ciation cellulaire,dit-il. Danscepro-
cessus,lescellulessemblentrégresser»
jusqu’austade quiétaitle leur aux
premiers tempsde l’embryon,un
peucomme sielle repartaitàzéro,
avantde «reprendredesfonction-
nalitésdiverses(peau,nerf,os,etc.)
etainsirecréerlittéralementle membre
manquant.»
Chezl’humain,comme chezle reste
desmammifères,cettecapacitésemble
absente. Etpourtant,il yadeux excep-
tions:le doigtpeut repousserchez
desenfants en basâge (voiremême
desadolescents),àune hauteur ne
dépassantpasladernièrephalange.
Etnotrefoie alacapacité,non de
reconstruireleslobesqu’on luiaurait
enlevés,maisde «régénérer»parfaite-
mentsafonctionnalité.
Serait-il possible que,même chez
lesvertébrés,cettecapacitésoitencore
cachée dansdesgènes«endormis»
depuisdescentainesde millions
d’années?
C’est cequecroitStéphane Roy.
«Ilexisteàl’intérieur dumonde vivant
une sauvegarde extrêmementforte
desfonctionnalitésgénétiques,de
sortequ’il est légitime de penser
pouvoirretrouverunjour l’équivalent
chezl’humain,sous laforme de gènes
en dormance,quel’on pourraitsti-
muler.»
Maisil yaladureréalitédufinance-
ment.«Ilyauntrèspetitnombre
de chercheurs dansle monde –
quelqueséquipestout auplus –qui
planchentsur une telle problématique.
Parcequepour beaucoup,c’est trop
fondamentalcomme question,trop
loin despréoccupationsde l’indus-
trie…»
PERFORMANT
Cettesalamandre originaire duMexiqueréussitàfaire
pousser àrépétition ses membres amputés
L’axolotl(Ambystomamexicanum)
estunmembre delagrandefamille
des ambystomidés d’Amérique.
C’estuntrès proche parent
d’ Ambystomatigrinum ,la
salamandre tigrée qu’on trouveaux
États-Unis. L’axolotlvitdans des
lacsdemontagne duMexique,dans
larégion delacapitale,Mexico.
C’estunanimalnéoténique,c’est-à-
dire qu’il gardetoutesavie des
caractères physiques considérés
comme juvéniles (etdonc
normalementperdusàl’âge adulte).
Dans son cas,il s’agitdes branchies :
l’axolotln’apasdepoumons et
passe savie dans l’eau.Sa glande
thyroïdefournitbien l’hormone
nécessaire àlatransformation du
têtarden adulte,mais en quantité
insuffisante. L’apportartificiel d’un
complémentthyroïdien lancela
transformation :on obtientun
axolotlterrestre,sans branchies. Ses
petitsserontcependantégalement
néoténiques.
La néoténie estrelativement
fréquentechezles urodèles
(amphibiens àqueue).
Les yeux del’axolotlsontdépourvus
depaupière. Ses membres ont
quatre doigtsaux pattes dedevant,
etcinq aux pattes dederrière. La
queueestcomprimée latéralement.
Ledos etlaqueueontune crête
membraneuse qui,courantsurle
dos,se prolonge jusqu’aucou.
Unado
pourlavie
queue
moelle épinière
peau
mâchoire
coeur
ouïes
membres
cornée
cristallin
rétine
encéphale