Règlement sur les aliments et les drogues de Santé Canada : «Un
fabricant de médicaments ne peut combiner dans une même annonce
de l'information promotionnelle sur un médicament d'ordonnance
donné et une maladie ou un état particulier».
C'est pourquoi Pfizer doit choisir l'un ou l'autre : pour Aricept, on nous
parle de l'Alzheimer sans nommer le médicament, tandis que dans sa
campagne pour Viagra, elle ne donne que le nom du produit.
C'est ainsi que Santé Canada a choisi de protéger le public contre une
publicité qui pourrait conduire à des dérives, comme la surmédication
ou même l'automédication. On tente ainsi de résister au modèle
américain, où les annonces disent tout sur les médicaments, laissant
les patients passer leurs commandes à leur médecin.
Cela dit, même forcée à la sobriété, la publicité canadienne pour les
médicaments d'ordonnance a des effets pervers, selon certains
médecins.
Urgentologue au Centre de santé universitaire McGill (CUSM), Sophie
Gosselin entend régulièrement des patients lui parler des publicités
qu'ils ont vues à la télévision.
«Ils me disent qu'ils ont vu une annonce décrivant une condition qui
ressemble à la leur, ou qu'ils ont lu sur internet que telle pilule pouvait
les guérir. Si tu travailles trop, c'est normal que tu sois fatigué; si tu
t'alimentes mal, c'est normal que tu fasses du cholestérol; si tu vis un
deuil, c'est normal que tu vives une mauvaise passe.»
Face au pouvoir de la pub, le professionnel est parfois désarmé.
«Quand le patient se présente chez le médecin, c'est difficile de donner
des explications. Il faut avoir des arguments, leur montrer l'autre point
de vue, l'autre côté de la médaille. Et quand je suis aux urgences, je
n'ai pas le temps d'expliquer tout ça», poursuit Mme Gosselin.
«Le message principal de ces annonces, c'est : venez plus souvent voir
votre médecin, même si vous n'avez que des symptômes légers»,
déplore Christine Meyers, urgentologue à l'hôpital Royal-Victoria.
«Dans le cas de l'Alzheimer, la science est encore relativement
impuissante et il est difficile de diagnostiquer ses symptômes précoces
sans les confondre avec une perte normale de mémoire», ajoute Mme
Meyers.