Cochet Virginie Mocquant Amandine Le Langage : développement, dysphasie et remédiation Master 1 Education et Langage Université Lumière Lyon 2 Année universitaire 2009-2010 Sommaire I/ Le développement du langage ........................................................................ 3 1) Chez l’enfant dit « normal » ........................................................................................................ 3 2) Chez l’enfant dysphasique........................................................................................................... 3 II. La dysphasie ................................................................................................... 4 1) Les différentes dysphasies........................................................................................................... 4 2) Qu’est-ce-qui est affecté dans la dysphasie ? ............................................................................. 5 3) Schéma des dysphasies ............................................................................................................... 5 III. La remédiation .............................................................................................. 6 I/ Le développement du langage 1) Chez l’enfant dit « normal » L'apprentissage d'une langue maternelle par un enfant est un phénomène encore peu compris. Plusieurs théories ont été écrites. Nous fixons arbitrairement l'âge de cinq ans comme âge où l'enfant aura appris l'ensemble de sa langue maternelle, mais en réalité, l'apprentissage d'une langue se poursuit tout au cours de la vie. La majeure partie des apprentissages se font cependant entre la naissance et trois ans. On n’a longtemps cru que l'enfant apprenint sa langue maternelle par imitation, c'est-à-dire qu'il essaie de reproduire ce que l'adulte dit. Cette hypothèse a depuis été détruite par plusieurs, dont Noam Chomsky. Au milieu des années cinquante, Chomsky affirmait qu'il est impossible que l'enfant apprenne sa langue par imitation et qu'une structure appelée "Language Acquisition Device" doit exister dans le cerveau (une présumée structure neuronale). Certaines observations du comportement langagier des enfants dans leur milieu d'apprentissage ont permis de poser que les enfants doivent interagir socialement pour développer le langage Par ailleurs, nous croyons maintenant que le développement de la pensée est lié de façon inséparable au développement du langage. Si Piaget affirmait que le langage se construit sur les assises de la pensée et que Vygotsky affirmait le contraire, il est clair que l'un ne va pas sans l'autre: D'un point de vue philosophique, un concept (signifié) ne peut se fixer dans la pensée s'il n'est pas associé à une forme (signifiant).Le langage sert ainsi à nommer ce qui fait partie de notre réalité On peut généralement identifier quatre stades de développement dans l'acquisition du langage chez l'enfant. Ces stades ne sont toutefois pas des étapes rigides que tous passent au même âge; 1. le stade prélinguistique se divise en deux étapes: l'étape du babillage (de 4 ou 6 mois à 12 mois) et l'étape du premier mot (4 ou 6 mois à 12 ou 18 mois). Ce stade correspond aux essaies de sons. 2. le stade holophrastique (18 mois à 24 mois), l'enfant s'exprime par mots isolés. 3. Le stade syntaxique (de 2 à 5 ans) est la période où s'acquiert la syntaxe 4. Le stade avancé (5 ans et plus) est la période où l'enfant acquiert les fonctions les plus fines du langage. Il apprendra par exemple les formes passives, les inversions verbales, etc. 2) Chez l’enfant dysphasique La dysphasie est un trouble développemental grave du langage se manifestant par une structuration déviante, lente et disharmonieuse du langage. A cela s’ajoute des difficultés de manipulation du code entraînant des altérations durables dans l’organisation du langage à différents niveaux : phonologique, lexical, syntaxique, sémantique et pragmatique sans qu’il semble exister à l’origine de causes apparenté. La dysphasie est un marqueur de déviances, elle se caractérise par un trouble de l’encodage (dyssyntaxie-agrammatisme). C’est un syndrome neuropsychologique témoignant du dysfonctionnement ou atteinte de l’aire du langage avant l’âge d’un an. Le diagnostic est posé après une évaluation clinique à partir des productions de surface et est confirmée avec des évaluations standardisées par domaines ou par habiletés spécifiques. Entre 1 et 4% des enfants d’âge scolaire ont ce trouble. II. La dysphasie 1) Les différentes dysphasies On dénombre 5 dysphasies différentes : - La dysphasie phonologique syntaxique qui est un trouble expressif, où les capacités d’expression sont atteintes, la réduction verbale est importante, il y a une mauvaise intelligibilité, un trouble de l’encodage syntaxique, un lexique réduit sans manque du mot, des difficultés associées à un trouble de la programmation motrice - La dysphasie de production phonologique, c’est un trouble expressif, où le contrôle phonologique et la mise en chaîne des éléments sont atteints, l’expression verbale a des difficultés à se réguler. Il y a un trouble massif de la parole aggravé par la répétition, le récit se construit difficilement à cause de la dyssyntaxie - La dysphasie lexicale syntaxique qui est un trouble expressif et réceptif, le contrôle sémantique est atteint et le rappel se fait difficilement. Il y a une hypospontanéité verbale, les énoncés longs et complexes sont mal compris et les difficultés mnésiques sont importantes - La dysphasie réceptive qui est un trouble réceptif où les capacités de décodage sont atteintes. Les messages verbaux et non verbaux sont difficiles à appréhender, le langage peut être développé mais il y a de la dyssyntaxie, des troubles de l’évocation lexicale et des paraphasies phonétiques - La dysphasie sémantique pragmatique qui est un trouble expressif et réceptif où les fonctions de formulation sont atteintes. Pendant le langage spontané il n’y a pas de troubles phonologiques ou syntaxiques. En situation de langage induit, il y a une mauvaise utilisation du langage, il n’est pas adapté au contexte conversationnel et il y a un trouble de l’informativité. 2) Qu’est-ce-qui est affecté dans la dysphasie ? Les domaines affectés sont : - La production phonologique : La production de sons est affectée de manière variée, ce déficit peut se situer au niveau de l’encodage linguistique (aire de Wernicke), de la programmation motrice - La conscience phonologique : Il y a un déficit de l’analyse phonologique (décodage linguistique), ou un déficit de la manipulation phonologique - L’encodage lexical : le déficit peut être un manque de mot, c'est-à-dire la difficulté d’aller chercher le mot dans sa mémoire ; ou alors une production erronée par mauvais choix linguistique au niveau de la zone d’encodage (paraphasie phonémique ou verbale) - L’encodage syntaxique : Cela peut être un agrammatisme secondaire au dysfonctionnement de l’aire de Broca ou une dyssyntaxie par dysfonctionnement de l’encodage syntaxique au niveau de l’aire de Wernicke (par exemple confusion masculin/féminin) 3) Schéma des dysphasies La dysphasie diffère selon les domaines affectés : - Dysphasie phonologico-syntaxique - Dysphasie de production phonologique - Dysphasie réceptive - Dysphasie lexico-syntaxique - Dysphasie sémantico-pragmatique III. Les remédiations 1. Un traitement différent Selon l’age de l’enfant le traitement sera différent. Si l’enfant a moins de 3 ou 4 ans, il ne sera pas confronté au même traitement que s’il est agé de 6 ans et plus Selon le degré de gravité du trouble On constate différents degré de gravité de la dysphasie ce qui va différencier le traitement attribué à l’enfant. On distingue l’enfant mutique de l’enfant dysphasique sévère ou de celui qui a un simple gène dans sa parole La relative « pureté » du trouble On distinguera si le trouble est strictement circonscrit à la parole ou s’il affecte d’autres secteurs instrumentaux, voire l’ensemble de la personnalité de l’enfant Les attentes de la famille et son investissement dans le traitement En effet tous les types de traitement ne sont pas envisageables avec toutes les familles, d’une part pour diverses raisons matérielles et d’autre part pour des raisons tenant à la manière dont les parents se représentent le trouble de leur enfant. 2 Une attitude spécifique de l’adulte face à l’enfant dysphasique L’adulte doit être vigilant a ses stratégies verbales. Il doit Ralentir le débit. Augmenter la redondance : paraphrases, synonymes, exemples, répétitions. Parler de ce qui se trouve dans l’entourage immédiat. Contrôler l’intonation. Formuler des phrases courtes, en mimant simultanément. Introduire petit à petit des phrases plus compliquées. Les stratégies non verbales : Développer et utiliser la gestualité et le langage du corps. Enrichir le message verbal avec : des dessins, des films, des images, des mimes... Ne pas contrarier le langage de l’enfant lorsqu’il devient un outil de communication. Les stratégies de contrôle de la compréhension : Laisser le temps à l’enfant de comprendre la question et de formuler une réponse. Répéter ce que l’enfant a dit en structurant la réponse. Il doit éviter de bombarder l’enfant d’explication ainsi que de faire des jeux de mots. . 3 Stratégie pour contourner les difficultés d’apprentissages Pour remédier à la phonologie Favoriser un accès visuel ou un code gestuel. Différentier les lettres phonétiquement proches en utilisant des gestes. Introduire un code gestuel pour apprendre à lire et écrire ainsi que pour construire le lexiqu e orthographique et renforcer la mémorisation. Remedier L’agrammatisme Mettre l’accent sur la compréhension plutôt que sur la production, en accompagnant un texte d’images, ce qui aide également à éviter le problème de mémoire. Aider l’enfant à dépasser le cap de la stratégie lexicale, trop restreinte, qui ne prend pas en considération les indices grammaticaux et les nuances syntaxiques. Se calquer sur des modèles de structure de phrases, en utilisant des phrases lacunaires par exemple, en travaillant par catégories grammaticales. Dans un premier temps, présenté des phrases qui contiennent un lexique simple et connu de l’enfant. Complexifier et allonger progressivement les modèles. Conjugaison : mettre l’accent sur la reconnaissance et sur la compréhension des formes verbales. .Le décodage Introduire une approche visuo-graphique. Remplacer les représentations auditives par des représentations visuelles et kinesthésiques. L’accès au sens Utiliser le mime, des images, des films vidéo ou des dessins. Utiliser la stratégie lexicale pour comprendre les phrases comme stratégie passerelle. Le passage à l’écrit Passer par des modèles appris explicitement en classe. Le mime, le dessin ou des images en séquences peuvent être des supports d’imagerie mentale qui servent à comprendre, à s’approprier, à conceptualiser et à synthétiser la phrase. 4 Renforcement des acquis pédagogiques Il est essentiel de renforcer certains outils et fonctions cognitives des élèves dysphasiques. Le lexique orthographique A construire, dans un premier temps, avec des mots que l’enfant a appris en classe. A l’introduction de nouveaux mots, présenter l’image associée au mot et renforcer par une expérience vécue (association orthographe-sémantique). Faire évoquer un mot à l’enfant en le faisant « voir » ce mot écrit « dans sa tête ». Faciliter l’évocation par l’utilisation des images, utilisées lors de l’apprentissage des entités imagesmots écrits. Utiliser l’amorçage par écrit. Mettre à la disposition des enfants un dictionnaire imagé. Utiliser des canaux visuo-kinesthésiques et graphiques (perception), et accompagner chaque nouveau mot d’une reproduction de mémoire, à court et à long terme. Proposer un contexte sémantique. Les mémoires visuelles Proposer des jeux de mémoire basés sur des indices visuels (couleurs, formes, détails manquant sur des images, loto, puzzles,…). Proposer des séquences visuelles, qui évolueront progressivement (d’abord deux, ensuite trois gestes de lettres comme le préconise la méthode de lecture constructive,des séquences de blocs disposés dans l’espace, des séries de couleurs,…). Renforcer la mémoire à long terme par des exercices de reproduction à intervalles variés. Renforcer l’expression Utiliser la gestualité. 5 Apprentissage du langage écrit La lecture proposez aux enfants d’entrer dans la lecture par un code, introduit via les canaux les plus efficaces chez l’enfant dysphasique : le canal visuel et le canal gestuel. Ensuite, le canal kinesthésique estutilisé au moment de l’oralisation car, nous demanderons à l’enfant de mimer ce qu’il a compris. La technique de lecture : Méthode Ledan Voici la façon de pratiquer : 1. Présenter la graphie : o Cela se dit [O] (Il ne faut pas écrire « Oh ! », mais il importe d’en amener le sens). Il s’agit de travailler « la sémantique de la lettre ». 2. Idem avec "a" (« Ah ! ») 3. - Cela s’écrit : a m i - Cela se lit : ami. (Les gestes sont liés) - Cela se dit : [ami] (Avec ou sans support gestuel) 4. Travailler « la permanence de la syllabe » par la reconnaissance visuelle précédant l’oralisation. Exemple : le « mi » de ami et le « mi » de midi, c’est pareil. 5. Poursuivre progressivement le travail par l’apprentissage des sons : Exemple : le son < oi > J’écris puis «o»«i» Le passage à l’écrit Pour le passage à l’écrit, les compétences visuelles et kinesthésiques de l’enfant doivent être entraînées afin que celui-ci puisse reproduire des mots en ne recourant pas à l’auditivo-verbal. L’enfant n’est pas obligé de dire pour écrire. Pour ce passage à l’écrit, les gestes utilisés sont les mêmes qu’en lecture. Ils permettent l’organisation séquentielle des graphèmes (et non des phonèmes). Des dictées muettes sur base des gestes sont proposées à l’enfant.