Fiche pratique Soutenir la motivation du patient / Florence DA SILVA
Pour Infos Réseau janvier 2015.
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Comment soutenir la motivation des patients ?
Fiche pratique - Florence DA SILVA
1. QUEST-CE QUE LA MOTIVATION ?
La motivation est un phénomène complexe dans lequel on doit prendre en compte à la fois des facteurs
intrinsèques au patient mais aussi des facteurs liés à son environnement.
Un patient qui ne met pas en œuvre les conseils, les prescriptions, n’est pas un patient qui fait preuve de
mauvaise volonté et ce n’est que très rarement un patient dans le déni au sens strict du terme (mécanisme
inconscient de défense).
La psycho-sociologie modélise la motivation comme ayant plusieurs composantes :
- l’importance que le patient accorde à la problématique de santé concernée
- la confiance qu’il a en lui de réussir à se traiter ou à faire les changements de comportements
nécessaires
- le sentiment du patient d’être prêt à se traiter ou à faire les changements de comportements
nécessaires (on parle de « disposition à changer »)
Qu’est-ce alors qu’un patient « motivé » ? C’est un patient :
- Qui est convaincu que la problématique de santé pour laquelle on lui demande de se traiter ou de
changer un comportement est importante à prendre en compte, qu’il est concerné et vulnérable à cet
égard ; que la situation pourrait avoir des conséquences graves pour lui et/ou son entourage.
o Donc le patient a besoin qu’on l’aide à identifier ses propres bonnes raisons d’être observant ou
de changer un comportement lié à la santé.
- Et en plus qui se sent capable de se traiter ou de mettre en œuvre les changements de
comportements nécessaires (sentiment d’avoir les compétences, ou sentiment d’être capable d’acquérir
les compétences nécessaires ou sentiment général de confiance en soi).
o Donc le patient a besoin qu’on soutienne sa confiance en soi, qu’on le valorise, qu’on l’aide à
repérer ses ressources personnelles.
- Et en plus qui se sent prêt à mettre en œuvre le traitement ou les changements de comportements
nécessaires (prêt parce que c’est le bon moment au regard de ses contraintes personnelles, de son
organisation, de son travail, de sa vie familiale, d’autres changements en cours…).
o Donc le patient a besoin qu’on l’aide à se préparer au changement.
2. RECONNAITRE QUE CHANGER EST UN PROCESSUS DIFFICILE
« Changer est difficile ». En intégrant cette notion le professionnel accompagne au mieux le patient, sans
jugement de valeur.
Changer se fait selon un processus par étape et chacun à son rythme en dehors de toute considération
relative à « la volon ».
Une de ces étapes normales est l’ambivalence, c'est-à-dire vouloir et ne pas vouloir à la fois. Le patient a
alors besoin qu’on l’aide à « peser le pour et le contre ».
o Exemple : « Je sais que je devrais mesurer ma glycémie au moins 3 fois par jour mais avec mon
boulot le midi ce n’est pas possible, je ne veux pas que tout le monde le sache ».
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Une autre étape normale est la « rechute ». Le patient a alors besoin qu’on s’appuie sur les réussites
passées, et qu’on l’aide à se réengager dans le changement avec des étapes réalistes pour lui.
Par conséquent, la motivation « n’apparaît » pas, elle se construit. Et dans les situations les plus difficiles
comme dans le champ de la santé, elle se construit avec l’aide d’un professionnel qui peut accompagner le
patient à trouver en lui les ressources pour construire sa motivation intrinsèque au changement.
3. COMMENT EVALUER LA MOTIVATION DU PATIENT ?
Lorsqu’on dit « Ce patient ne me semble pas motivé », il est important de préciser en quoi sa motivation n’est pas
encore solide : est-ce un problème d’importance, de confiance ou de disposition ?
Evaluer la motivation c’est donc évaluer chacune de ces trois composantes. La question « est-ce que vous êtes
motivé à… ? » n’est pas très utile car elle est peu précise et potentiellement génératrice d’un jugement de valeur
sur la « volonté » du patient.
Voici quelques questions ouvertes qui permettent d’échanger avec le patient pour évaluer où il en est en termes
de motivation :
A quel point c’est important pour vous de réussir à prendre ce traitement ?
A quel point avez-vous confiance en vous pour réussir à prendre ce traitement ?
A quel point vous sentez-vous prêt à prendre (recommencer à, augmenter) ce traitement ?
4. COMMENT SOUTENIR LA MOTIVATION DU PATIENT ?
4.1. Aider le patient à trouver ses bonnes raisons de se traiter (au sens large : adaptez les exemples à vos
situations de travail)
4.1.1 Poser des questions évocatrices du changement, par exemple :
A quel point c’est important pour vous de réussir à prendre ce traitement ?
Quelles sont vos raisons les plus importantes de prendre de traitement selon vous... ?
Si vous réussissiez à bien prendre ce traitement, quels seraient les avantages d’après vous ?
Qu’est-ce qui pourrait se passer d’après vous si vous ne pas preniez pas ce traitement régulièrement ?
Qu’est-ce que vous pourriez faire / qu’on pourrait faire pour que vous réussissiez à prendre ce traitement
régulièrement ?
Quand vous preniez bien le traitement, quels bénéfices avez-vous ressentis ?
Quand vous preniez bien le traitement, qu’est-ce qui vous a aidé à tenir le coup, à le prendre bien
régulièrement ?
4.1.2. Ecouter attentivement les réponses du patient, les valider, les valoriser. Si besoin l’aider à
approfondir, à aller plus loin :
C’est-à-dire « vous seriez plus en forme »… ?
Quand vous dites que vous seriez en meilleure santé, qu’est-ce que vous voulez dire exactement ?
Donnez-moi un exemple…
Qu’est-ce que vous voyez d’autre ?
4.1.3. Résumer ce discours en faveur du changement
Finalement si je résume ce que vous m’avez dit vous avez plusieurs bonnes raisons d’essayer de prendre ce
traitement régulièrement :… (lister les raisons évoquées par le patient).
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Donc si je résume, les conséquences si vous ne prenez pas ce traitement c’est… (lister les conséquences
évoquées par le patient)
Avec cette pratique, le patient va se convaincre lui-même de l’importance du changement. C’est pour cela que
l’on pourra parler de motivation intrinsèque. Ce n’est pas au professionnel de lister au patient les arguments
pour et contre (de le convaincre) ; C’est au patient de faire ce travail pour s’approprier ses arguments.
4.2. Aider le patient à avoir confiance en lui pour y arriver
4.2.1. Y croire
Avant toute chose l’intervenant doit être optimiste sur les capacités du patient à mettre en œuvre le changement
souhaité. Si l’intervenant est convaincu que le patient n’y arrivera pas, il est démontré que cela diminue les
chances du patient d’y arriver.
Il y a toujours des ressources chez tous les patients. Les intervenants peuvent les repérer et les nommer. Bien sûr
il ne s’agit pas de flatterie, mais de valorisation factuelle.
4.2.2. Valoriser
Valoriser les efforts, les réussites, les bonnes initiatives, les qualités du patient. Par exemple :
Je vois que vous avez vraiment fait beaucoup d’efforts pour vous adapter…
Vous avez eu raison de nous appeler pour qu’on résolve ensemble de problème de masque. Vous avez envie
d’y arriver.
Vous montrez beaucoup de détermination à réussir à prendre ce traitement malgré les difficultés, bravo.
C’est courageux de votre part de persévérer bien que vous ne ressentiez pas encore de bénéfices.
C’est une très bonne idée d’essayer d’y arriver petit à petit…
Je vous trouve d’autant plus courageux que vous n’en ressentez pas les bénéfices et je vous encourage à
persévérer…
Je vois que depuis la dernière fois, vous avez fait des efforts pour y arriver et je mesure à quel point cela n’a
peut-être pas été facile pour vous compte tenu de…
4.2.3. Transformer l’échec en essai…
Par exemple :
Bon, cette fois-ci vous vous êtes découragé et vous avez arrêté (ou beaucoup diminué…) le traitement. Ce
n’est pas un échec définitif. Voyons plutôt cela comme une étape vers la réussite. Maintenant vous avez une
expérience de plus sur laquelle vous appuyer, alors on va s’appuyer dessus pour répartir.
CONCLUSION :
Education et motivation
Accompagner le patient dans la construction de sa motivation à changer fait partie intégrante de la démarche
d’éducation thérapeutique. Si le volontariat du patient est indispensable, la solidité de sa motivation (telle que
définie ici) ne devrait pas être un prérequis à la proposition d’inclusion dans un programme d’éducation
thérapeutique. La motivation va se construire et se solidifier au fil du parcours éducatif du patient, avec l’aide des
intervenants qui mettront en œuvre un style relationnel motivant de manière transversale, voire des activités
spécifiques individuelles et/ou collectives. Mieux, la proposition d’inclusion dans un programme d’éducation
thérapeutique devrait d’emblée s’appuyer sur l’esprit de l’entretien motivationnel.
Intégration de l’esprit de l’entretien motivationnel dans la démarche éducative : les axes principaux
Reconnaître que le changement est difficile
Accepter l’ambivalence et la rechute comme normales
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Penser que le patient a des capacités pour y arriver
Poser des questions qui permettent au patient d’évoquer les avantages du changement
Valoriser le patient pour ses efforts, ses réussites
Mettre en valeurs ses qualités et capacités personnelles
Pour aller plus loin :
Télécharger la fiche pratique « Rouler avec la résistance du patient »
Télécharger la bibliographie de base Entretien Motivationnel
Télécharger l’article : GACHE P. et Al. L’entretien motivationnel : quelques repères théoriques et
quelques exercices pratiques. In : Revue médicale suisse. N°3080.
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