Les autochtones cananéens où s’étaient installées les tribus semi-nomades, étaient des
agriculteurs en pleine décadence, regroupés autour de cités royales juchées sur des
hauteurs. Le culte au dieu Baal, pourvoyeur des pluies nécessaires à l’agriculture, était
dans la main du roi. Ce lien que le roi avait entre le ciel et la terre était symbolisé par
« l’arbre de vie » au milieu du jardin du palais.
Les semi-nomades en immigration étaient au contraire des itinérants au gré des
transhumances printanières. Après une période d’assimilation où l’on essaie de tout
mettre en commun, même les dieux, l’immigrant privilégie des valeurs liées à sa propre
histoire de sorte qu’il apparaît en rival aux yeux de l’autochtone et est rejeté.
L’immigrant a alors sur lui l’avantage de n’avoir rien à perdre et il est souvent
vainqueur.
Il en résulte une recomposition partagée des fondamentaux. En l’occurrence, les
cosmogonies du Nil, des deux fleuves ou encore celles d’Ugarit et de son Baal, sont
recouvertes par celles du désert, et le tissage opéré sur le mythe par l’histoire est celui
de l’immigration des tribus semi-nomades en lien avec les semi-nomades déjà installés
en terre de Canaan.
Pour mettre un terme à ces conflits
Le rédacteur qui voit la solution à ces conflits dans la réforme de Josias, centrée sur la
Torah et le Temple, double « l’arbre de vie » de l’antidote de son temps : la Torah de
Moïse qui devient dans le texte « l’arbre de la connaissance du bien et du mal » (2,9), lui
aussi au milieu du jardin.
Le texte poursuit : Adam, aura à la cultiver/cultuer et la garder (2,15). Le jardin étant
masculin en hébreu, ce féminin, sous la plume du rédacteur ne peut désigner que la
Torah qu’il demande de « garder » et à laquelle on doit rendre un culte (2,16 ; Dt 5,15).
Les traductions araméennes anciennes du targum mentionnent explicitement la Torah
comme complément d’objet des verbes « cultiver/cultuer » et « garder ». Ces deux
derniers termes font partie du vocabulaire caractéristique du deutéronome et
concernent la Torah dans son aspect cultuel (la’avod/cultiver et cultuer) et éthique
(lishemor/garder les commandements). Le targum néofiti, un des plus anciens, traduit
ainsi Gn 2,15 : « Pour rendre un culte selon la Loi et pour garder ses commandements ».
Au temps du rédacteur Josianique, une relecture inspirée d’Ezéchiel 28,12s où l’Eden est
clairement identifié comme une montagne symbolique du roi de Tyr, « l’arbre de vie »
désigne tout aussi bien le roi auquel il n’est pas permis de toucher sous peine d’être
exclus du royaume et chassé du paradis, que la Torah, « arbre de la connaissance du bien
et du mal », dont il est le garant
.
Les codes du mariage qui en résultent
Adam doit prendre ses distances par rapport aux cultes du Baal et à « l’arbre de vie » et
s’il y retourne, il encoure la peine de mort. Les codes qui résultent du remodelage de
fondamentaux avant le regroupement en royaumes et de leurs instances judiciaires, sont
des codes apodictiques garantis par Dieu lui-même à défaut d’un pouvoir installé. La
sanction d’origine divine est alors la mort infligée par Dieu en personne : « mot tamut /
On se rappellera comment l’écrivain josianique du livre de Samuel décrit la poursuite
de David par Saul. Et comment David, le prétendant au Royaume évite par deux fois de
tuer Saül que Dieu livrait entre ses mains pour la raison que l’on ne touche pas au oint
de YHWH (1 S 24,7 ; 26,9).