Chloé DEVERSON Atelier Co-Cli-Co Qu'est ce que l'Atelier Artistique, à quoi ça sert ? La guérison dépend pour beaucoup du moral et de l’investissement du malade dans son traitement. La pratique d’une activité de création lui permet de s’extraire des modalités de cure et de traitements souvent lourds et dans lesquels il n’a pas son rôle à jouer face à l’institution qui le prend en charge. A contrario, s’il devient acteur principal dans une activité artistique, cela lui permet de renouer avec un moi actif. Cet atelier se propose de mettre à disposition des patients, différents moyens d’expression appartenant à divers domaines artistiques : Théâtre : jeu, improvisation, mime, interprétation Arts plastiques : volume, modelage, dessin, peinture Ces activités ont été choisies parce qu’elles sont aisées à mettre en place avec des moyens pauvres et parce qu’elles permettent de faire appel au coté instinctif primitif de façon immédiate. La diversité des propositions leur permet, selon la sensibilité des sujets, d’aller vers le mode d’expression de leur choix. Ils peuvent également aborder plusieurs techniques. Les différents moyens mis à disposition des patients sont garants d’une plus grande chance d’adaptation. La proposition thérapeutique qui s’étaye sur des pratiques artistiques envisage le patient dans une globalité, sur les plans physiques, psychiques et sociaux. Quelle que soit la technique choisie par les patients, elle leur permet de débloquer la parole par le biais d’une action et ainsi d’amorcer un dialogue réparateur entre la personne, son environnement et des aspects d’elle-même auxquels elle s’est fermée ou bien qu’elle ignore encore : sa possibilité de vaincre la maladie avec ses moyens propres et singuliers. Il s’agit de se servir de la création artistique pour pénétrer les problématiques inconscientes de l’individu et le conduire à une transformation positive de lui-même. Le but est de partir de ses douleurs, de ses violences, de ses contradictions pour en faire dans le cadre d‘un processus créatif le matériau d’un cheminement personnel. Les ateliers d’art thérapie se proposent d’aider le patient, quel que soit la durée et le mode de sa prise en charge. Les moyens développés lors des ateliers pourront lui servir d’appuis pendant cette période de soins et dans son retour à la vie sociale. La visée thérapeutique Les problèmes engendrés par une maladie peuvent être d’ordre physique, psychologique, relationnel, familial et social. Une thérapie reposant sur une pratique artistique se propose de travailler sur chacun de ces aspects. L’atelier artistique détourne la personne de son mal de manière douce en contournant les résistances au changement. Il transforme la relation que le sujet a avec sa maladie et son traitement pour lui permettre de retrouver son indépendance et ainsi conduire à une transformation positive de lui-même. Lorsque le sujet travaille une matière, il ne peut pas penser à autre chose dans la mesure où l’activité lui demande de l’attention et de la concentration. Cet effort peut faire descendre les tensions et agir sur le stress. Le temps dévolu à l’atelier le libère involontairement de pensées obsédantes liées à sa pathologie ce qui lui permet de prendre du recul. Le geste qui accompagne l’activité artistique font subtilement travailler des muscles qui ont pu être négligés et atrophiés lors du traitement. Les objets créés permettent également de ramener à la conscience du sujet des éléments qu’il avait enfouis. Ceux-ci lui seront sans doute utiles pour la compréhension de sa maladie et des conséquences qu'elle engendre pour lui et son entourage, et seront donc utiles dans la continuité du soin avec l’équipe soignante. L’activité de groupe, centrée sur un objectif artistique, induit de nouveaux comportements sociaux. La relation entre les patients est changée par le regard qu’ils portent sur l’autre et sur eux-mêmes. Le groupe permet de recréer du lien et de retrouver leur identité : une identité qui n’est pas uniquement celle d’un individu souffrant d’une maladie, mais l’identité de quelqu’un en train de trouver de nouvelles ressources qui peuvent marquer le début d’un détachement vis-à-vis de la structure de soin. Au terme de la période de soin, le patient doit rompre avec l’équipe de soignants et son environnement protecteur. Il doit retourner dans un contexte extérieur similaire à celui qu’il avait quitté. Pour autant, lui aura changé et son entourage proche également. Cette période est sensible car la possibilité de rechute est importante. Le patient est confronté à lui-même et aux autres dans un contexte qu’il envisageait auparavant au travers du filtre de l’innocence et ensuite de la maladie. Pour amoindrir la violence de ce changement d’état, il est nécessaire de proposer des moyens de rattachement à la structure qui peuvent le rassurer. Le souvenir de la pratique artistique, les objets qui en ont résulté et l’éventuelle poursuite de cette pratique, permettent de prolonger un des aspects optimistes développés pendant la période de soin. Un autre aspect positif à dégager d’un atelier d’art thérapie est qu’il offre aux sujets une nouvelle voix d’accès à l’autre, une nouvelle possibilité de dialogue qui n’est pas en lien avec le récit abrupt et douloureux de la maladie et de son traitement. En se basant sur la découverte d’une pratique artistique, le sujet peut aborder un dialogue nouveau, constructif et valorisant. L’objectif de cet atelier est également d’aider les sujets à reprendre leur autonomie. La pratique artistique a donné naissance à de nouvelles possibilités. Elle propose des éléments tangibles, sur lesquels les individus peuvent s’appuyer pour construire une nouvelle estime de soi, qui les accompagne dans le réapprentissage à la vie sociale. Les individus sont capables de parler de cette expérience sans qu’ils aient à la nier, sans que ce soit ni tabou ni douloureux. Ils peuvent en parler comme de quelque chose qui fait partie de leur expérience et qui les a fait avancer comme n’importe quelle épreuve. L’art permet de développer les facultés d’expression, de communication et de relation, et peut participer à la reconquête de l’identité et de la dignité de la personne. Rassurer la personne dans ses capacités est l’un des objectifs dans la mesure où il est important de préciser qu’il n’y a pas de pression sur le résultat final du travail produit. Il faut que le patient puisse poser un regard sur ce qu’il a fait. Que ce soit beau ou non, il peut se découvrir dans un geste créateur, instinctif : exemple de réaction « Je ne me reconnais pas, mais je l’ai fait ! ». A partir de là, il est utile d’accompagner la personne à la rencontre d’elle-même dans un univers nouveau. Il en découle la découverte de nouvelles ressources d’expression non exploitées auparavant ou exploitées différemment qui viennent remplacer ou donner un autre point de vue sur la maladie.