Paris, le 4 janvier 2010 Lettre ouverte à Mesdames Roselyne Bachelot et Nora Berra et à Monsieur Xavier Bertrand Mesdames les Ministres, Monsieur le Ministre, Nous constatons avec regret la parution sous vos signatures au Journal Officiel du 31 décembre 2010 du décret n° 2010-1731 du 30 décembre 2010 relatif à l’intervention des professionnels de santé exerçant à titre libéral dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes et de l’arrêté fixant les modèles de contrats-types. En effet, ces textes empêchent désormais l’exercice effectif du droit des usagers dans les EHPAD. Permettez nous d’abord de vous rappeler la critique générale formulée par le Président de l’Ordre National des Médecins le 22 mars 2010 dans sa circulaire N° 10-023 (paragraphe IV alinéa g) : « Il n’est pas acceptable de trouver des clauses prévoyant que c’est la signature du contrat qui autorise le médecin à soigner un résident. Comme nous l’avons indiqué plus haut, le libre choix doit pouvoir s’exercer, en toutes circonstances. » Pour nos organisations, ce texte soulève plus de problèmes qu’il n’en règle ; permettez-nous de vous en donner deux exemples : Un médecin traitant soignant huit personnes âgées dans huit EHPAD différents (donc peu impliqué dans la vie de chaque établissement) bénéficierait d’une rémunération annuelle au titre des réunions de coordination de 736 euros (4C dans chacun des 8 EHPAD), pendant que son confrère qui suit quarante résidents dans le même EHPAD, connaît les équipes soignantes et les projets personnalisés des résidents, ne bénéficierait que de 92 euros. Il s’agirait donc d’une prime à la dispersion, contraire à l’esprit même de toutes les dispositions de la loi 2002-2 et des textes qui l’accompagnent. Par ailleurs, demander au médecin traitant de : « – respecter la charte des droits et libertés, le règlement de fonctionnement de l’EHPAD prévu à l’article L. 311-7 du code de l’action sociale et des familles et éviter pour ses visites, sauf urgence, les horaires de repas ; – assurer la continuité des soins conformément à l’article R. 4127-47 du code de la santé publique, hors permanence des soins, notamment en indiquant ses coordonnées et, lorsqu’il est désigné, les coordonnées de son remplaçant en cas d’absence ainsi que ses dates de congé » confine au mépris du bon sens de nos confrères (qui attend que son patient soit à table pour lui rendre visite…) et revient sur la parole de la ministre de la Santé du précédent gouvernement donnée à Nice il y a six mois (« les mesures de la loi HPST viennent d’être mises "entre parenthèses" par la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, à l’occasion d’une déclaration lors de l’ouverture, le 25 juin, du congrès national de médecine générale. Parlant de "preuve de confiance", la ministre a voulu rassurer les médecins libéraux : "Je sais que beaucoup (d’entre eux) s’efforcent de garantir la continuité des soins à leurs patients. Je sais (qu’ils) revendiquent la responsabilité d’organiser euxmêmes la continuité des soins." ». Notons au passage que le remplaçant ne pourrait intervenir dans l’EHPAD, puisqu’il n’aurait pas préalablement signé de contrat… Mesdames les Ministres, Monsieur le Ministre, nous n’ignorons pas les quelques dérives que connaît notre profession. Nous n’admettons pas qu’elles soient érigées en généralités, et qu’en leur nom on émette des règlements aussi nocifs pour la majorité des confrères de bonne volonté qui participent activement à la vie des EHPAD qu’inutiles contre la toute petite minorité qu’ils prétendent « remettre dans le droit chemin ». En revanche, le décret prévoit (article R-313-30-1) que le contrat-type du professionnel de santé intervenant en EHPAD fixe « la formation de ce professionnel ». L’implication des médecins traitants aux problématiques liées à la coordination en EHPAD doit en effet être utilement recherchée par la reconnaissance des compétences acquises en matière de bonnes pratiques gérontologiques, notamment dans le cadre du Développement Professionnel Continu. Nos organisations proposent des évolutions, dans le cadre d’un cursus de formation standardisé, qui pourront permettre aux spécialistes de médecine générale de faire reconnaitre leurs compétences acquises en ce domaine. Nous sollicitons donc de votre part un rendez-vous dans les meilleurs délais que vos agendas vous permettront de libérer, pour – avant qu’il ne soit trop tard – vous présenter nos suggestions communes concernant la modulation des contrats-types, la commission de coordination gériatrique et l’évolution des missions comme du temps de présence du médecin coordonnateur. Dans cette attente, nous vous prions de recevoir, Mesdames les Ministres, Monsieur le Ministre, l’expression de notre plus haute considération. Docteur Michel SALOM Docteur Philippe MARISSAL Président du Syndicat National De Gérontologie Clinique Président du Syndicat National des Généralistes et Gériatres Intervenant en EHPAD