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REVUE DE PRESSE
22 mars 2016
Dom Juan : le road-movie haletant
de Jean-François Sivadier
23 mars 2016/dans À la une, Bordeaux, La Rochelle, Lausanne, Montpellier, Nantes, Rennes, Strasbourg,
Théâtre, Villeneuve d’Ascq /par Stéphane Capron
© Brigitte Enguérand
Et c’est parti pour un an (au moins) de tournée pour cette version de Dom Juan créée au
Théâtre National de Bretagne. Jean-François Sivadier réussit un coup de maître. Du théâtre
à grand spectacle dont il parvient à bien faire ressortir la pensée critique de Molière.
« Croire ou ne pas croire en la religion ? » Lorsqu’il écrit Dom Juan au 17ème siècle, Molière était loin de se
douter que ce débat continuerait d’agiter la société en ce début de 21ème siècle. Dans une époque où l’on parle
beaucoup (trop à notre goût) du fait religieux, cette version de Dom Juan est totalement dans l’actualité. La
pensée de Molière continue d’insuffler du sens critique.
La version de Jean-François Sivadier met bien en exergue tout le questionnement de Molière (notamment
le monologue du 5ème acte sur l’hypocrisie) dans une forme totalement romanesque menée par un Nicolas
Bouchaud bondissant et facétieux. Avec Vincent Guédon en Sganarelle tout aussi espiègle, le couple fait
des étincelles sur scène. Il est entouré par une troupe réduite de quatre autres comédiens : Stephen Butel,
Marc Arnaud, Marie Vialle et Lucie Valon. Ils interprètent tous les autres rôles avec une facilité dans l’art du
travestissement qui fait qu’à aucun moment on ne perd le fil de l’histoire. On n’a jamais vu monter Dom Juan
avec autant de limpidité !
La scénographie imaginée par Daniel Jeanneteau est féérique. Dom Juan et Sganarelle gambadent dans l’espace.
Le décor est composé de multiples planètes qui descendent du ciel (référence à la Vie de Galilée). Le mot « ciel
» est important dans la pièce. Il est prononcé 62 fois et pour nous le rappeler Jean-François Sivadier le signifie
par un décompte qui s’affiche dans le décor.
Si Jean-François Sivadier utilise la musique de La Mort aux trousses ce n’est pas un hasard, car son Dom Juan
court partout. Nicolas Bouchaud, toujours aussi séduisant, est virevoltant. Il joue avec le public. Il offre des
fleurs aux femmes dans la salle. Il chante « Sexual healing » de Marvin Gaye. Cette pièce menée tambour
battant se regarde comme une grande saga, un grand feuilleton, un road-movie haletant.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
24 mars 2016
24 mars 2016
Du Misanthrope à Dom Juan,
Nicolas Bouchaud prend Molière à bras le corps
Actualité Culture
Par AFP , publié le 24/03/2016 à 14:56 , mis à jour à 14:56
Nicolas Bouchaud à Paris le 9 décembre 2015 afp.com/JOEL SAGET
Rennes - Trois ans après avoir triomphé dans «Le Misanthrope», Nicolas Bouchaud récidive à Rennes avec
Molière en Dom Juan, sur une mise en scène tout aussi déjantée de son comparse Jean-François Sivadier, dans
laquelle le comédien au regard perçant se donne corps et âme.
Il ouvrait «Le Misanthrope» en se déchaînant sur «Should I stay or should I go» des Clash, comme pour
montrer la rage d’Alceste, son personnage qui ne sait s’il doit composer avec la société ou bien la fuir.
Sur la même scène du Théâtre national de Bretagne (TNB), le comédien de 49 ans à la tignasse un peu punk
promène un Dom Juan tour à tour brillant ou enjôleur, scélérat ou terrifiant, avant de finir nu comme un ver
et couvert de boue.
Le rôle «est forcément très physique», explique ce grand brun à l’AFP. Face à la société de son époque, «Dom
Juan jette son corps dans la bataille, il paie de sa personne» tout en faisant «un bras d’honneur à la religion».
Ca tombe bien pour le comédien, associé à la mise en scène. «Je comprends un rôle quand je comprends ce qu’il
exige du corps», observe-t-il, du haut de son mètre 85.
Pour lui, «Dom Juan», c’est un «road movie». Le héros et son valet Sganarelle (interprété par l’impressionnant
Vincent Guédon) «passent leur temps à fuir en détruisant tout sur leur passage», analyse Nicolas Bouchaud.
Sivadier y répond par un décor céleste qui semble parfois s’effondrer sur les personnages, comme pour illustrer
qu’aux yeux de Dom Juan, Dieu n’est qu’un illusionniste.
Dom Juan n’est pourtant pas le rôle le plus difficile au répertoire de Nicolas Bouchaud; «Le Roi Lear» de
Shakespeare, présenté en 2007 au Festival d’Avignon avec l’ami Sivadier, a été le plus éprouvant, se souvient
l’acteur, à propos de «cette descente aux enfers avec la folie à la clé».
- Habitué d’Avignon Créé en 2013, «Le Misanthrope», tout aussi physique, lui a valu le prix du meilleur comédien du Syndicat de la
critique et une nomination aux Molières.
L’acteur né à Antony, près de Paris, le 6 novembre 1966, dans une famille de comédiens, sait mettre le public dans
sa poche, quitte à s’éloigner un peu du texte, comme quand Dom Juan demande leur prénom aux spectatrices
des premiers rangs...
Complicité également lorsqu’il abandonne son admirable diction théâtrale pour parler «normalement» aux
autres personnages. «C’est pour relancer l’écoute des gens en créant une rupture, une syncope dans le ton»,
explique-t-il.
«Chaque spectacle m’engage plus que ce qu’il y a sur le plateau», confie le comédien, dont la rencontre avec
le metteur en scène Didier-Georges Gabily, décédé en 1996, a été cruciale. Outre l’amour de la littérature,
Bouchaud trouve alors dans le théâtre «un travail de recherche sans lequel ce métier m’ennuierait à mourir».
Le comédien et Sivadier sont des habitués du TNB depuis «La Vie de Galilée» de Brecht en 2001, pièce montée
en Avignon l’année suivante, ainsi que «La Mort de Danton», de Büchner, en 2005.
Dans la même ville, Nicolas Bouchaud a partagé la scène avec Juliette Binoche en 2011 dans «Mademoiselle
Julie» de Strindberg. Au cinéma, il a côtoyé Catherine Deneuve en 2014 avec «Dans la cour», de Pierre Salvadori.
Il est remarqué pour ses monologues, comme celui d’un médecin dans «Un métier idéal» (Paris, 2013). Pour le
prochain Festival d’Avignon, il prépare avec le journaliste du Monde Nicolas Truong un montage de textes sur
l’art de l’entretien, intitulé «Interview».
Théâtre. Nicolas Bouchaud, un Dom Juan déjanté
24 mars 2016 à 18h07 / Patrick Baert. AFP /
Photo AFP
Trois ans après avoir triomphé dans "Le Misanthrope", Nicolas Bouchaud récidive à
Rennes avec Molière en Dom Juan, sur une mise en scène déjantée de son comparse
Jean-François Sivadier.
Il ouvrait "Le Misanthrope" en se déchaînant sur " Should I stay or should I go " des Clash, comme pour montrer la rage
d'Alceste, son personnage qui ne sait s'il doit composer avec la société ou bien la fuir. Sur la même scène du Théâtre
national de Bretagne (TNB) (1), le comédien de 49 ans à la tignasse un peu punk promène un Dom Juan tour à tour brillant
ou enjôleur, scélérat ou terrifiant, avant de finir nu comme un ver et couvert de boue.
" Un road movie "
Le rôle " est forcément très physique ", explique ce grand brun au regard perçant. Face à la société de son époque, " Dom
Juan jette son corps dans la bataille, il paie de sa personne " tout en faisant "un bras d'honneur à la religion ". Cela tombe
bien pour le comédien, associé à la mise en scène. "Je comprends un rôle quand je comprends ce qu'il exige du corps",
observe-t-il. Pour lui, "Dom Juan", c'est un " road movie ". Le héros et son valet Sganarelle (impressionnant Vincent
Guédon) " passent leur temps à fuir en détruisant tout sur leur passage ", analyse Nicolas Bouchaud.
De la proximité avec le spectateur
L'acteur né à Antony, près de Paris, le 6 novembre 1966, dans une famille de comédiens, sait mettre le public dans sa poche,
quitte à s'éloigner un peu du texte, comme quand Dom Juan demande leur prénom aux spectatrices des premiers rangs...
Complicité
également
lorsqu'il
abandonne
son
admirable
diction
théâtrale
pour
parler
" normalement " aux autres personnages. "C'est pour relancer l'écoute des gens en créant une rupture, une syncope dans le
ton", explique-t-il.
1. Le comédien et Sivadier sont des habitués du TNB depuis " La Vie de Galilée " de Brecht en 2001, pièce montée en Avignon l'année suivante, ainsi que " La Mort de
Danton ", de Büchner, en 2005.
2. A Rennes jusqu'au 2 avril (02.99.31.12.31), puis en tournée jusqu'à fin mai à Bordeaux, Cergy-Pontoise, Le Mans, Châteauvallon, La Roche-sur-Yon, La Rochelle et Villeneuve
d'Ascq).
25 mars 2016
THÉÂTRE
Dom Juan, jouissif libertin au petit pied, à Rennes
«Dom Juan», de Molière sur une mise en scène de Jean-François Sivadier.
Comment peut-on croire en un dieu en carton-pâte ? Et un dieu peutil être autre chose que cela, du carton-pâte, une illusion, une idée, un
(mauvais) personnage de théâtre, une création venue de l’esprit de
cette créature autrement brillante que lui, l’homme ? Il semblerait bien
que ce soit ce que nous disent Jean-François Sivadier et son équipe,
dans ce Dom Juan créé à Rennes le 22 mars. Car Dieu n’est pas très
bon acteur, dans ce spectacle. Non plus que Dom Juan d’ailleurs, qui,
incarné par Nicolas Bouchaud (lui excellent comédien), a tout d’un
ringard de seconde zone dans une soirée karaoké du samedi soir. Dom
Juan est peut-être un séducteur sur le retour, mais il a un truc : il n’a
pas peur. Et jusqu’au bout, il blasphémera s’il a envie de blasphémer,
et il affrontera la chimère divine sans reculer et sans ciller, préférant
la chair fraîche aux vues de l’esprit. Jean-François Sivadier, Nicolas
Bouchaud et leurs comparses abordent Dom Juan à leur manière, en
tenants d’un théâtre ludique et jouissif. Il décline l’idée du toc, du faux,
sur tous les tons. La scénographie à surprises et à métamorphoses est
également une vraie réussite, dans le registre du théâtre de plateau.
Fabienne Darge
25 mars 2016
29 mars 2016
« Dom Juan » comme une fête cosmique
au TNB de Rennes
Philippe Chevilley / Chef de Service | Le 29/03 à 07:00, mis à jour à 10:11
© Brigitte Enguerand
Comme ils tanguent, les astres ! Et sur le grand chantier de la Terre, l’homme qui ne croit pas au Ciel court
gaiement à sa perte. Jean-François Sivadier fait du « Dom Juan » de Molière – son nouveau spectacle créé
au Théâtre national de Bretagne – une fête galante cosmique, où le libertin athée déverse sa mélancolie par
saccades, entre deux clowneries et chansons. Quel grand écart vertigineux ! Dans le sublime décor d’échafaudage
céleste éclairé de lustres-planètes (où l’on retrouve la patte de Daniel Jeanneteau) alternent burlesque et gravité.
Chaque scène est réglée comme un numéro de cirque, marqué d’une pointe noire de désespoir. Le metteur en
scène mixe avec audace son théâtre de bois, de sable et de plumes avec des éclairages de concert-rock et des
musiques de film. Dom Juan est « road-movie » ou série à épisodes serrés, et la fable n’en est que plus belle.
Dom Juan plus fort, plus loin, que Tartuffe… L’homme à femmes n’hésite pas à draguer des spectatrices, à
chanter « Sexual Healing » de Marvin Gaye au micro… et surtout à délivrer haut et fort sa parole d’athée :
dénonciation de la bigoterie, de l’intolérance (avec une petite lecture de Sade à la clef). Et quand débarque la
commandeur pour l’embarquer, même pas peur ! Il ricane dans les flammes. Vent debout contre l’intégrisme
religieux : Molière, Sivadier… et Nicolas Bouchaud.
BOUCHAUD, L’ARTISTE
Car Bouchaud est Dom Juan, Dom Juan est Bouchaud... Ce diable de comédien et ce diable d’homme ne font
qu’un. D’une grande puissance physique, l’artiste distille sa superbe ironie, sa vive intelligence, sa noblesse
blessée, tour à tour clown noir et clown blanc, avec son port de dandy et son phrasé moderne. Il est épaulé par
le Sganarelle frêle et aérien, aux allures de Puck et de punk, de Vincent Guédon.
Les autres personnages ne sont pas en reste. Dans son genre, l’Elvire de Marie Vialle fera date. Très diva-rock
star dans sa première scène furieuse, déesse ivre dans la seconde, elle tient tête à son amant infidèle. Elle campe
également Mathurine, la jeune paysanne. Lucie Valon déploie avec brio ses talents clownesques dans les rôles
de Charlotte, du Pauvre et du serviteur La Violette. Avec un tel aéropage, ce « Dom Juan » s’impose sans tunnel
et sans ennui… Un Molière à grand spectacle, populaire et subversif comme il se doit. Un Molière baroque du
XXIe siècle... Jean-François Sivadier n’a pas seulement dépoussiéré un classique. Il l’a propulsé dans un nouvel
espace-temps.
LE JOURNAL DE 7 H…
Marc Fauvel
mardi 29 mars 2016
http://www.franceinter.fr/player/reecouter?play=1260949
Dom Juan version road-movie halletant…
Le Dom Juan de Molière traîne peut-être sur votre bibliothèque depuis des lustres, et
bien on le dépoussière au Théâtre National de Bretagne. Nouvelle version présentée à Rennes,
mise en scène par Jean-François Sivadier avec Nicolas Bouchaud dans le rôle titre. Cela se
ragarde comme une grande série hollywoodienne, Stéphane Capron n’en n’a pas perdu une
miette.
Si Jean-François Sivadier utilise la musique de La Mort aux trousses, ce n’est pas un hasard : son
Dom Juan court partout, sa mise en scène est un road-movie haletant.
Jean-François Sivadier : « C’est un pièce romanesque. C’est curieux car elle est assez
insaisissable en fait. Il y a des personnages qui n’ont qu’une ou deux scènes, qui passent
comme ça … C’est vraiment des rencontres, ce sont des épisodes : c’est comme du théâtre
roman. »
Nicolas Bouchaud incarne un Dom Juan facétieux qui n’hésite pas à chanter du Marvin Gaye.
Nicolas Bouchaud : « Je change de costume et je mets un nouveau masque. Je vais
t’embobiner, t’embrouiller et chanter Sexual Healing pour te calmer. Après avoir cru voir
la statue du Commandeur bouger il dit « C’est bon ! je pense qu’on a eu une vision, cela
n’existe pas ». Ça c’est le débat de la pièce : il y a celui qui ne croit pas, Dom Juan qui est
profondément athée et Sganarelle qui représente cette Parole, de façon farcesque. « Il
faut bien croire à quelque chose » et Dom Juan rigole.
Dans une époque où on parle beaucoup du fait religieux, cette version de Dom Juan est
totalement dans l’actualité. La pensée de Molière continue aujourd’hui d’insuffler du sens
critique.
Bouchaud-Guédon en duo dans Dom Juan
Théâtre - Publié le 01/04/2016 à 15:54
Agnès LE MORVAN.
Vincent Guédon et Nicolas Bouchaud, dans la vie, puis sur scène... Vincent Guédon et Nicolas Bouchaud, dans la vie, puis sur scène...
Agnès Le Morvan/Brigitte Enguérand
Sur scène, ils sont Dom Juan et Sganarelle. En coulisses, deux comédiens complices. Rencontre
avec Nicolas Bouchaud et Vincent Guédon.
Pourquoi ce personnage si peu fréquentable de Dom Juan est-il devenu un mythe ? « Sans doute parce qu’on se passionne
pour la cruauté », analyse Nicolas Bouchaud. Au Théâtre national de Bretagne, à Rennes, le comédien incarne Dom Juan
dans une mise en scène de Jean-François Sivadier pleine de fantaisie.
Mais quand Molière écrit la pièce, au XVIIe siècle, Dom Juan n’est pas encore un mythe. « Mais un grand seigneur
libertin qui ne croit en rien, qui jouit pour lui-même, poursuit le comédien. C’est la complexité d’un personnage qui
est avant tout un parasite avant d’être un révolutionnaire. Il agit beaucoup plus qu’il ne parle. Et c’est le couple qui fait
réfléchir le spectateur. » Le couple, c’est celui qu’il forme avec Sganarelle, son valet, interprété à l’époque par Molière, qui
adorait observer son Dom Juan, joué, cette fois, par le comédien Vincent Guédon.
Subtile et drôle
Dans la pièce, les deux s’adonnent à un dialogue ininterrompu, un ping-pong verbal, tout au long d’un voyage qu’ils
qualifient de « road movie », jusqu’à la mort de Dom Juan. « Et si le valet dans les comédies classiques sert à arranger des
mariages, il n’a là aucune utilité dramaturgique, constate Vincent Guédon. Fidèle à son engagement pour Dom Juan, il
est là pour renvoyer la balle. En même temps, la pièce n’existe pas sans le couple. C’est lui qui la structure. » Et finalement,
qui blasphème le plus ? Face à son maître qui ne croit en rien, Sganarelle défend la religion, mais de façon ridicule et
comique.
Sur scène, le duo Bouchaud-Guédon, subtil, drôle, régale le public, faisant ressortir la haine et l’amour qui unissent ces
deux personnages. Le metteur en scène lui-même reconnaît qu’il n’aurait peut-être pas monté la pièce sans ses deux
comédiens, complices de quinze ans, qui font partie de la famille Sivadier.
Ensemble, ils avaient déjà, dans Le misanthrope, joué Alceste et Philinte, « avec déjà beaucoup de sous-entendus, de
méta-discours, de méta-théâtralité, se souvient Nicolas Bouchaud. Mais là, c’est plus qu’un duo maître-valet, il y a
beaucoup d’émotions à différents moments de la pièce. » « On est nous-mêmes finalement ! » ajoute Vincent Guédon.
Libres, et pas enfermés dans le carcan psychologique d’un personnage. « Nous sommes à la fois le marionnettiste, le
personnage et la marionnette. Avec toutes les ruptures de jeu et de ton souhaitables. Et un rapport direct au public. »
Avec un plateau sans cesse en mouvement, des comédiens qui vont et viennent près des spectateurs, des anachronismes
et des improvisations. Bref, un spectacle qui déborde de la scène.
Le « Dom Juan »
de la bande à Jean-François Sivadier monte au ciel
7 AVR. 2016 PAR JEAN-PIERRE THIBAUDAT
En montant la pièce de Molière, Sivadier (artiste associé au Théâtre National de Bretagne) et ses acteurs
dont l’emblématique Nicolas Bouchaud (qui est à Sivadier ce que Gérard Philipe fut à Vilar) continuent d’y
façonner les habits remis à neuf d’un théâtre populaire.
Sganarelle et Dom Juan © Brigitte Enguerand
Six acteurs seulement pour jouer sur un immense plateau gavé de toiles, de fils et de planches, tout le « Dom
Juan » de Molière (sans compter les bonus), l’esprit bateleur du metteur en scène Jean-François Sivadier et de
sa bande d’acteurs et collaborateurs emmenée par Nicolas Bouchaud a encore frappé. Et n’oublions pas les
techniciens. Ils ne chôment, ils entrent littéralement dans le danse de ce spectacle et viennent légitimement
saluer à la fin du spectacle.
De «La Vie de Galilée» à «Dom Juan»
Le soir de la dernière au TNB (Théâtre National de Bretagne) où le spectacle a été créé, le directeur du lieu,
François le Pillouer cachaitson émotion sous son immense carcasse. Atteint par la limite d’âge, il quittera à
regret son poste à la fin de l’année civile, laissant la saison prochaine faite et bien faite à celui, à celle ou à ceux
qui lui succèderont. Quand un metteur en scène quitte la direction d’un grand établissement, sa compagnie est
assurée d’une subvention pour au moins trois ans. Quand des intendants de valeur comme Le Pillouer bientôt,
comme José Alfarrobail y a peu (théâtre de Vanves) s’en vont, ils se retrouvent le bec dans l’eau. Y a que’que
chose qui cloche là d’dans, comme chantait Boris Vian.
Jean-François Sivadier est artiste associé au Théâtre national de Bretagne depuis l’an 2000. C’est au TNB qu’il
a créé en 2001 « La Vie de Galilée » de Brecht. Une boucle se boucle avec « Dom Juan » cette année, les deux
pièces formant une sorte de diptyque avec le ciel pour témoin, d’autant plus que « La Vie de Galilée » a remis
le couvert cette saison. Entre temps, Sivadier a créé au TNB, « La Mort de Danton » (Büchner), « La Dame de
chez Maxim » (Feydeau), « Le Misanthrope » (Molière), mettant en pratique et glanant les fruits (à commencer
par un public fidélisé) d’un théâtre populaire dans ses habits reprisés et remis à neuf, où la connivence est l’amie
de la connaissance.
Tout cela est là à fleur de plateau dans ce « Dom Juan ». Et dans la salle du TNB. Comme c’était à prévoir et à
espérer, mi Dom-Juan- ni Nicolas, l’acteur Bouchaud a tôt fait de descendre du plateaupour aller demander leur
prénom à deux jolies filles du public, d’une voix plus qu’appétissante assortie du traditionnel regard enjôleur,
lesquels prénoms seront intégrés plus tard dans le spectacle. Son Dom Juan est plus un joueur qu’un séducteur,
mais c’est un jeu sans règles, tous les coups sont permis pour gagner la (pro)mise. Autre jeu complice : quand
le mot ciel est prononcé par l’un des personnages, un compteur lumineux (comme à la Sécu) en décompte le
nombre, de 61au dernier « ciel » de la pièce, celui qui n’emporte pas les belles au septième ciel comme l’aura fait
si souvent l’hidalgo Dom Juan mais foudroie ce dernier qui, jusqu’au dernier instant, refuse de croire au ciel.
Un athée endurci.
Une pièce audacieuse et gigogne
On le sait, Molière a écrit cette pièce juste après le querelle du « Tartuffe » qui lui avait valu les foudres de l‘église.
« Tartuffe » était moins une pièce contre cette dernière que contre l’hypocrisie, mais Dom Juan n’est pas loin de
penser de toute religion relève de l’hypocrisie, de l’intox, heureusement que Daech ne lit pas Molière pourtant
traduit arabe depuis longtemps. Molière sait que sa situation est compliquée, il écrit vite son« Dom Juan »,
Jouvet souligne cette rapidité quand il travaille la pièce au Conservatoire. Il n’a pas le temps de revoir sa copie,
d’en domestiquer la portée. Comme l’écrit Jacques Copeau, de toutes les pièces de Molière, « Dom Juan » est «
celle où il a montré le plus d’audace », c’est aussi « la plus surprenante à coup sûr ».
Cependant, ce n’est pas la mieux construite. Elle n’a pas la perfection du « Misanthrope », mais elle crée un
personnage comme celui d’Elvire, unique dans le théâtre de Molière et la scène du pauvre, est, elle aussi, unique.
Dom Juan rencontre un homme qui fait l’aumône, il lui demande d’adjurer sa foi dans, son amour du dieu
chrétien, contre un louis d’or. L’homme affamé refuse, Dom Juan finalement lui donnera le louis d’or « pour
l’amour de l’humanité ». La scène fut coupée lors de sa création, dès la deuxième représentation, un panneau
lumineux « scène censurée »ponctue la séquence dans la mise en scène de Sivadier. Le rôle-titre, interprété par
Nicolas Bouchaud, nous montre un Dom Juan amoureux du genre féminin comme Georges Brassens (chanson
dans le spectacle) et des jeux amoureux comme Le Marquis de Sade, autre pourfendeur de l’hypocrisie (extrait
de « La philosophie dans le boudoir » dans le spectacle).
Quand Molière se défoule
Molière fait aussi de « Dom Juan » une pièce à grand spectacle, il y recycle probablement des machines à effets
théâtraux, des toiles peintes, des morceaux de décor. C’est un aspect qui n’a pas échappé à la sagacité de Louis
Jouvet, qui fut le « Jouvey » régisseur de scène de Copeau. Sivadier renoue avec ces machineries, ces toiles, ce
côté bricolé à la diable. La scénographie qu’il cosigne avec Daniel Jeanneteau et Christian Tirole multiplie les
effets de lumière, de fumigènes, de planches et de rideaux sur un plateau dominé par un ciel de sphères, de
boules de cristal, une galaxie (clin d’œil à Galilée).
Molière se défoule et s‘en donne à cœur joie, Sivadier et ses acteurs aussi. La représentation connait parfois
des effets de tassements, c’est une des conséquences de la construction à la diable (si je puis dire) de la pièce.
Vincent Guédon, excellent Sganarelle, ouvre les festivités avec la fameuse tirade du tabac qui met le public en
appétit : « qui vit sans tabac n’est pas digne de vivre » ! Comme il est réjouissant d’entendre ces mots dans un
monde où l’interdiction de fumer transforme certains (surtout des anciens adeptes) en fervents de l’intolérance.
Scène de «Dom Juan» © Brigitte Enguerand
Saluons les autres acteurs, Marie Vialle qui est à la fois Elvire (la femme épousée et abandonnée) et Mathurine
(l’une des deux paysannes sur lesquelles Dom Juan jette son dévolu), Stephen Butel qui joue le paysan Pierrot
et le créancier Monsieur dimanche, Marc Arnaud à la fois valet et frère d’Elvire, et Lucie Valon qui revient en
homme pauvre après avoir été Charlotte, la première paysanne séduite.
L’hypocrisie de l’Eglise jusqu’au tombeau
La pièce fut peu jouée du temps de Molière. Et disparait presque des radars par la suite. Quand Jouvet entre
comme professeur au Conservatoire dans les années 1930, elle n’y est pas étudiée. Sa mise en scène de « Dom
Juan », après celle de Copeau, apparaît sombre et cérébrale, avec une Elvire passant de « l’extase amoureuse»
à « l’extase religieuse ». Elle devait imprimer sa marque sur les mises en scène futures. Sivadier et sa bande
réhabilitent son impatience, son impertinence et sa truculence.
Quoi qu’il en soit, Dom Juan meurt foudroyé parce qu’il ne croit pas en Dieu. Molière mourra sans signer « l’acte
de renonciation » au métier de comédien, si bien qu’il ne recevra pas les derniers sacrements. Il sera toutefois
enterré chrétiennement mais selon les ordres de l’Archevêché en loucedé, un service plus que minimum :« sans
aucune pompe, et avec deux prêtres seulement, et hors des heures du jour ». L’hypocrisie de l’Eglise aura eu
raison de lui, sa postérité le vengera. Dédions cet article au Prélat des Gaules.
Dom Juan sous un ciel vide
Didier Méreuze, le 12/04/2016 à 8h45
Avec Nicolas Bouchaud dans le rôle-titre, Jean-François Sivadier dynamite le mythe du « grand seigneur
méchant homme » pour lui rendre son humanité.
Dom Juan (Nicolas Bouchaud, à gauche) et Sganarelle (Vincent Guédon) dans une adaptation joyeuse et percutante. / Brigitte Enguerand/Divergence
L’Apostrophe, Théâtre des Louvrais, à Cergy-Pontoise (Val-d’Oise)
Curieux destin que celui de Dom Juan. Créée en 1665 pour une quinzaine de représentations seulement, reprise dans une version versifiée et expurgée pendant près
de deux siècles, cette « comédie » devra attendre, pour être reconnue comme le chef-d’œuvre qu’elle est, que Louis Jouvet la mette en scène, interprète du rôle-titre,
en 1947.
Depuis, elle n’a cessé d’être remise régulièrement sur le métier du théâtre. Trois ans après s’être confronté une première fois à Molière avec Le Misanthrope, c’est au
tour de Jean-François Sivadier de s’en emparer.
Au diable (c’est le cas de le dire !), la révérence policée que l’on doit aux « classiques », tels qu’ils sont encore trop souvent assénés dans les lycées. Accompagné
de toute sa bande – Nicolas Bouchaud et Véronique Timsit étant signalés « collaborateurs artistiques » –, c’est une vision joyeuse, ludique, à la fois complexe et
percutante qu’il en propose.
Humain avec ses travers, ses bonheurs, ses contradictions
Volontiers provocatrice dans son athéisme affirmé avec l’ajout d’un extrait de Français, encore un effort si vous voulez être républicains d’un Sade dénonçant toute
religion. On s’amusera plus de la mise en exergue de l’éloge du tabac qui ouvre la pièce : une « passion des honnêtes gens, qui réjouit et purge les cerveaux humains
», et qui « inspire des sentiments d’honneur et de vertu à tous ceux qui en prennent ».
Qu’importe ces écarts, le Dom Juan qu’il dessine est avant tout un humain. Avec ses travers, ses bonheurs, ses contradictions. Frère et proche – ou ennemi et
lointain, c’est selon – de chacun, mais pour qui, dans un monde d’hypocrisie, de faux dévots et de vrais fanatiques, seuls comptent l’instant présent, l’assouvissement
des désirs, fussent-ils les plus ­égoïstes, puisqu’il n’y a pas d’immortalité, puisque le ciel est vide.
Ce Dom Juan, c’est Nicolas Bouchaud, plus magnifique, plus séducteur et séduisant que jamais. Dès qu’il apparaît, on ne saurait lui résister : surgissant dans la salle,
il s’approche d’une spectatrice, s’enquiert de son prénom, improvise un compliment, lui offre des fleurs, puis reprend le bouquet pour le donner à une nouvelle.
Énergie, générosité, vitalité
Jouisseur, qui avoue : « L’amour que j’ai pour une belle, n’engage point mon âme à faire injustice aux autres », il est, par-delà un détachement qui n’interdit pas la
profondeur, à la fois distant et proche, grave et pétillant.
Irritant à l’occasion, il émeut tout autant, bondissant, presque dansant, prenant le micro pour chanter le Marvin Gaye de Sexual Healing, toujours en complicité totale
avec ses partenaires magnifiques d’énergie, de générosité, de vitalité : Vincent Guédon, détonant Sganarelle ; Marie Vialle, Elvire moins soumise que combative ;
Stephen Butel, bouleversant Pierrot d’anthologie se plaignant à sa belle d’avoir perdu son amour au profit de Dom Juan, qui va le rosser avec une violence terrible…
Il faut citer encore Marc Arnaud, Lucie Valon… Ils sont six. On les croirait cinquante !
L’esprit des machineries du XVIIe siècle
Pour parvenir au terme de cette course inexorable et chaotique, Sivadier s’est associé deux scénographes : Christian Tirole et Daniel Jeanneteau. Ensemble, ils ont
conçu un décor renouant magiquement avec la tradition et les artifices du théâtre à machineries du XVIIe siècle, ouvrant sur le ciel, entraînant jusqu’aux entrailles
de la terre.
Le ciel, ce sont ces sphères, boules et ampoules, suspendues et ballottant dans les airs, telles des planètes abandonnées à leur sort. La terre, c’est le plancher aux lattes
qui se démontent, se remontent, se redémontent tandis que brume et fumée envahissent à grands jets, au gré des éléments qui se déchaînent : bourrasque, tempête,
séisme, éclairs…
Dans un coin, en haut, un panneau lumineux décompte à rebours, le nombre de fois où est employé le mot « ciel ». Il démarre à 62. Il finit à zéro.
12 avril 2016
13 avril 2016
Théâtre. Eros contre Thanatos :
le «Dom Juan» diablement subversif de Jean-François Sivadier
Par Hugues Le Tanneur @desmotsdeminuit
Publié le 13/04/2016 à 11H12
© Brigitte Enguérand
Pour sa deuxième incursion dans le théâtre de Molière, après Le Misanthrope en 2013, le metteur en scène
dresse un portrait du séducteur en athée irréductible, servi par le fidèle Nicolas Bouchaud dans le rôletitre aux côtés de Vincent Guédon dans celui de Sganarelle. Ce spectacle finement troussé mené tambour
battant par des acteurs au jeu intense et pétillant dépoussière le mythe avec brio.
Très haut, dans les cintres ou presque, un prompteur décompte les occurrences du mot «Ciel». Chaque fois
qu’un acteur le prononce un chiffre lumineux apparaît. C’est d’autant plus remarquable qu’on peut donner
plusieurs sens à ce mot. Pas sûr, par exemple, que parler de «s’envoyer en l’air» ou «d’aller au septième ciel»
corresponde à la signification visée dans la pièce de Molière.
Dans la société au sein de laquelle évolue Dom Juan, le Ciel – avec une majuscule – désigne l’autorité suprême
aussi bien que l’au-delà. Autrement dit, tout ce à quoi Dom Juan s’oppose. Par ce rappel amusant, Jean-François
Sivadier ne se contente pas de situer le contexte originel de la pièce, il crée un lien entre l’époque de Molière et
la nôtre. Être athée n’a pas le même sens aujourd’hui qu’au XVII e siècle.
«Rien n’établit et ne prouve mieux l’être souverain de Dieu et son domaine sur nous que la mort», écrit Bossuet.
Affirmer haut et fort son athéisme, c’est donc risquer pas moins que la damnation éternelle. La statue en cartonpâte du Commandeur qui nous fait sourire aujourd’hui avait une autre résonance au temps de Molière. D’où
l’intérêt de cette mise en perspective, d’autant plus forte que le décor, somptueux avec ses planètes suspendues
à différents niveaux, évoque l’immensité de la voûte céleste – renvoyant au passage aux découvertes de Galilée
d’alors.
Acharnement
À contempler ce panorama baroque alors que la représentation n’a pas encore commencé, on pense justement à
la mise en scène de La Vie de Galilée de Bertolt Brecht que Sivadier reprenait la saison passée. Plusieurs acteurs
qui jouaient dans ce spectacle sont d’ailleurs présents dans Dom Juan; dont Nicolas Bouchaud dans le rôle-titre
et Vincent Guédon dans celui de Sganarelle. Le fait que le second s’efforce par tous les moyens de se démarquer
du premier est un des ressorts comiques majeurs de la pièce. Dom Juan n’est pas encore apparu sur scène que
Sganarelle angoissé le décrit déjà comme «le plus grand scélérat que la terre ait jamais porté». Un portrait au
vitriol du séducteur, rythmé par des coups de cymbales, qui évidemment met l’eau à la bouche.
Sitôt en scène, Nicolas Bouchaud se rue dans la salle pour batifoler parmi le public et draguer au passage
quelques spectatrices en leur offrant des fleurs. Le goût d’accumuler les conquêtes amoureuses pour aussitôt les
laisser tomber a toujours été le trait principal du personnage. Un des paradoxes de Dom Juan c’est sa constance,
si l’on peut dire, dans l’inconstance. Volage, frivole, certes; mais surtout obstiné, il ne lâche jamais sa proie.
Nicolas Bouchaud incarne à la perfection cette détermination inébranlable. Son Dom Juan est, au fond, plus
grave que léger. Il y a même une forme d’acharnement dans son attitude, bien décidé à s’affirmer en esprit libre,
précurseur du Marquis de Sade qu’il cite à plusieurs reprises; même s’il doit pour cela aller jusqu’au bout, c’està-dire défier la mort.
© Brigitte Enguérand
Crépuscule
Sur le plan dramaturgique, la pièce de Molière a toujours semblé mal ficelée, accumulant, voire empilant,
les scènes un peu comme Don Juan le fait pour ses conquêtes. À cela s’ajoute le déséquilibre entre le couple
Sganarelle-Dom Juan et le reste des personnages. Face à cet écueil compliqué à négocier, le parti pris de JeanFrançois Sivadier a été de coudre ensemble les différentes séquences; comme si l’on assistait à une fuite en avant
irrépressible, tandis que la figure du héros se transforme progressivement.
On passe ainsi d’un Dom Juan frivole à la résolution de plus en plus ferme d’un esprit fort farouchement décidé
à ne pas s’amender, quitte à employer la ruse et à se faire passer pour un dévot si nécessaire. Au point qu’on finit
par se demander: cet irréductible dont l’appétit de vie et la sensualité ne sont jamais rassasiés et qui en même
temps ne craint pas la mort ne serait-il pas au fond plus qu’humain: une projection mentale, un fantasme, un
héros mythique voire un surhomme nietzschéen?
Du coup l’envers de cette formidable volonté de puissance apparemment capable de se jouer de tout, ce sont
les autres, ses adversaires, ses conquêtes, ses créanciers, les petites gens… Interprétés par Stephen Butel, Marc
Arnaud, Marie Vialle et Lucie Valon, qui assument chacun plusieurs personnages, ils nuancent ce spectacle
à la fois drôle et crépusculaire de couleurs chatoyantes, apportant une dose indispensable de piquant et ce
pétillement spirituel qui en font toute la saveur.
18 avril 201
19 avril 2016
Jean-François Sivadier
présente son Dom Juan au Mans
Le Mans - Modifié le 19/04/2016 à 21:00 | Publié le 19/04/2016 à 20:59
Jean-François Sivadier, metteur en scène de Dom Juan. | Archives Ouest-France
La pièce tourne depuis un mois. Le metteur en scène sera aux Quinconces, mercredi et jeudi. Un théâtre
pas comme les autres pour celui qui a grandi au Mans.
Vous avez débuté comme comédien, vous êtes metteur en scène. Qu’est-ce qui vous a poussé à prendre cette
voie ?Si je n’étais pas comédien, je ne serais pas metteur en scène. Dans mon travail, je parle énormément du
travail de l’acteur, de son jeu. La mise en scène m’est venue très jeune. Avec Yann-Joël Collin au conservatoire
du Mans, on animait des stages auprès de jeunes de notre âge. On en a fait à La Flèche, à Sablé. On avait monté
La nuit des rois qu’on a présentée au CE de Renault. En 1996, Didier-Georges qui montait Dom Juan, Chimère
et autres bestioles est décédé. J’ai terminé sa mise en scène. Je connaissais la pièce comme tout le monde, mais
je l’ai découverte de l’intérieur en grande partie avec le regard de Gabily.
Shakespeare, Brecht, Büchner et Molière… Qu’est-ce qui vous attire chez ces grands auteurs ?Mon
regard d’acteur guide mes choix. J’ai envie de donner des rôles importants à ceux qui m’accompagnent depuis
longtemps. J’ai un amour particulier des grands textes, des grandes langues.
Qu’a-t-il de différent des autres, votre Dom Juan ? Je suis revenu à l’origine des choses. L’axe de départ, c’est la
confrontation d’un acteur avec le texte. Je cherche dans le jeu de l’acteur le plaisir de l’auteur.
Qui est Dom Juan ? Je n’ai pas de réponse. Je demanderais plutôt qui sont Dom Juan et Sganarelle ? En créant
ce couple, Molière a créé une machine de guerre infernale pour lutter contre ceux qui avaient interdit Tartuffe.
Dom Juan, c’est quelqu’un qui blasphème pendant deux heures !
20 avril 2016
11 mai 2016
Dom Juan vu par Jean-François Sivadier au Grand R
La Roche-sur-Yon - Publié le 11/05/2016 à 00:46
Comédien, auteur, metteur en scène de théâtre
et d’opéra, Jean-François Sivadier est artiste
associé au Théâtre national de Bretagne depuis
2000. C’est l’un des rares « grands » du théâtre
français à n’avoir jamais foulé la scène du
Manège. Et c’est l’un des coups de coeur de la
scène nationale du Grand R pour cette saison.
« Les costumes et la scénographie de son Dom
Juan sont flamboyants », admire la directrice
Florence Faivre. « La production que nous
proposons aux Yonnais est du même niveau que
ce que l’on peut voir dans la cour d’honneur du
palais des papes pendant le festival d’Avignon.
» Un lieu que Jean-François Sivadier connaît
bien pour y avoir présenté Le Roi Lear en 2007.
Cette fois-ci, c’est à l’audacieuse pièce de
Molière, Dom Juan, qu’il prête son talent. «
Est-il un monstre, un conquérant idéaliste, un
petit marquis plein de vanité, un philosophe
matérialiste ? Ou bien la promesse de toutes ces
métamorphoses ? », questionne le programme
du Grand R. Cette version moderne permettra
peut-être de se faire une idée.
Dans cette nouvelle création, Sivadier est
entouré de ses comédiens fidèles : Nicolas
Bouchaud (Dom Juan) et Vincent Guédon
(Sganarelle).
Vincent Guédon (Sganarelle) et Nicolas Bouchaud (Dom Juan).
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