08/07/07 16:04Vipassana Paris - Stephen Batchelor - Dharma - Zen - Bouddhisme - méditation - Vacuité - Sunyata
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Association Terre d'Eveil Méditation Vipassana à Paris
Textes choisis
La vacuité - par Stephen Batchelor
Ce texte est la transcription d'un enseignement donné par Stephen Batchelor
dans le cadre des retraites de méditation organisées par Dharma Network
Paris / Terre d'Eveil. Cet enseignement fut dispensé au Forum 104, à Paris, le
dimanche 16 septempbre 2003. L'enseignement est livré tel quel. Merci à
Evelyne Boutron, à qui nous sommes redevables pour le travail de
transcription.
Je voudrais aborder cet après-midi le sujet de la vacuité. Je commencerai avec quelques
citations des textes classiques du bouddhisme et continuerai en essayant de lier ces idées
classiques avec ce que nous faisons ici, ce que nous apprend la méditation Vipassana.
Voici donc quelques passages qui viennent du canon Pali, c'est à dire la collection des
textes bouddhistes les plus anciens.
Quelqu'un demande :
- "Qu'est-ce que la libération de l'esprit par la vacuité ?"
Le Bouddha répond :
- "Le moine s'installa au pied d'un arbre dans la forêt ou dans une hutte vide ; il réfléchit
ainsi : Ceci est vide de soi ou de ce qui appartient à soi. Voilà la libération de l'esprit par la
vacuité".
Beaucoup d'idées dans ce texte sont assez simples.
D'abord il y a un lien très fort entre l'idée de la vacuité et l'idée de la libération. Il est
souvent dit que le Dharma a le goût de la libération, le goût de tout ce que le Bouddha a
enseigné. Il dit une fois que, de même que l'océan est imprégné du goût du sel, de même le
Dharma est imprégné du goût de la libération.
Il y a une tentation à considérer la libération comme une sorte de salut, quelque chose
d'ultime, de très spécial, un peu comme l'éveil. Mais, dans le bouddhisme, il faut savoir
que chaque terme est toujours compris dans un contexte.
Quand on dit que quelqu'un est libre,
il faut spécifier : libre de quoi ? La
libération en soi n'a aucun sens.
Quand on parle de devenir libre dans le bouddhisme, il faut préciser très clairement, très
précisément ce qu'on essaye de quitter, de laisser tomber. C'est une certaine relation avec
soi-même.
La saisie
La libération est la libération d'une certaine façon d'être, fondée sur une crispation, sur une
saisie. Cette saisie n'a rien à faire avec les idées que nous avons philosophiquement,
intellectuellement, de ce que nous sommes.
La saisie est imprégnée dans la structure
corporelle de notre être. C'est une crispation
émotionnelle.
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Cette crispation, nous pouvons la noter par exemple quand nous nous sentons honteux,
embarrassé, quand quelqu'un par exemple nous regarde et que nous avons le sentiment
d'avoir fait quelque chose de mal. On ressent alors une conscience de soi presque physique
comme une crispation physique fortement reliée avec le sentiment de soi. C'est à ce
niveau- que le bouddhisme s'intéresse au problème du soi.
Il n'y a pas de problème d'avoir un soi, un ego; c'est simplement la façon dont les êtres
humains construisent leur vie, se reconnaissent, reconnaissent les autres, suivent leurs
aspirations. Le soi, c'est ce que nous sommes, et ça, ce n'est pas problématique. Mais ce soi
devient problématique quand il est séparé du corps, des émotions, des pensées, de toutes
les relations que nous avons avec le monde. Quand on se sent dans cette conscience
extrême de soi, on est coupé, détaché de tous les liens, aliéné. On se sent alors vraiment
seul, coincé dans ses propres sentiments d'être soi. Et pour les bouddhistes, ces sentiments
ne sont pas nécessaires, c'est une sorte de maladie existentielle, quelque chose qui est de
trop, unnecessary. La méditation et la vacuité sont alors les moyens pratiques pour
découvrir une voie, un chemin, pour relâcher cette prise, trouver une certaine ouverture.
Evidemment, ce n'est pas aussi simple que ça. On ne peut pas dire aux autres : "relâchez
cette saisie". Ce n'est pas du domaine de la volonté. Il faut donc trouver les moyens qui
vont au-delà de la volonté.
Les pratiques que nous faisons ici sont des moyens d'apprendre une autre façon d'être
dans le corps, dans le monde. Et cette attention à la respiration, au corps, marcher
lentement, s'asseoir pendant des heures, il est bien possible que vous les trouviez un peu
ennuyeuses. Mais il faut, dans ces moments d'ennui, réfléchir pourquoi nous faisons ces
choses-là. Dans la pratique de la méditation,
il s'agit de regarder le monde et soi-même comme processus au lieu d'une
chose fixe.
D'apercevoir le changement. Le changement n'a aucune valeur en soi. La seule valeur de
cette attention au changement est de remplacer cette idée fixe, innée, de la permanence du
moi, de la permanence des choses que nous aimons et que nous détestons, par une
compréhension issue de l'expérience de la nature changeante de toutes les choses. Après
avoir fait la méditation, surtout après une retraite, on aperçoit peut-être une certaine
transformation dans la façon dont on perçoit les choses. Et c'est très intéressant de
remarquer ça. Parce que, quand nous commençons à voir que les choses changent, ça nous
rend plus vivaces. Peut-être avez-vous remarqué cela dans le jardin. Nous arrivons ici
après une semaine de boulot, de stress etc., et ce stress, ces angoisses n'ont pas seulement
un effet sur notre propre expérience intérieure dans le sens de déprime mais ils colorent
aussi la façon dont nous regardons le monde, dont nous faisons l'expérience des choses
autour de nous. Ces choses deviennent un peu opaques, ternes, pas très vivantes, et même
pas du tout intéressantes. Nous ne sommes pas fascinés par les choses. Nous avons
l'impression parfois que les choses sont contre nous-mêmes. Le monde devient presque
menaçant.
Mais si on laisse tomber ces sentiments, cette angoisse, cet attachement, cela a deux effets.
Un effet en nous-mêmes : nous nous sentons un peu plus détendus, ouverts, à l'aise,
décrispés et
en même temps le monde se transforme aussi en quelque chose qui est
presque étincelant, éblouissant.
Les couleurs et les sons deviennent plus vivants. Même une feuille sur un arbre devient
quelque chose que nous pouvons regarder avec un certain émerveillement au lieu d'y être
complètement indifférent. Cette transformation de la perception est quelque chose que
nous pouvons vérifier par nous-mêmes, qui se trouve au cœur de ce que nous faisons ici, et
qui est en même temps un chemin qui nous mène vers cette expérience de la vacuité.
La vacuité est cette façon de parler d'un monde et d'une expérience de soi-même qui
s'ouvrent au lieu de se refermer. Pour moi, ceci est la dynamique principale, la dynamique
entre enfermement et ouverture.
Le Bouddha est un symbole d'ouverture, de
lâcher toutes ces saisies qui nous piègent
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dans une solitude névrotique où nous nous
sentons coupés des liens et des relations avec
le monde.
Mais on trouve aussi autre chose dans cette citation : le Bouddha conseille aux moines
d'aller dans la forêt, de s'asseoir dans une hutte vide et de réfléchir : ceci est vide. Ca veut
dire que la nature même éclaire cette possibilité d'être vide. Parce que la nature, c'est
toutes les choses naturelles qui n'ont pas de propriété humaine et sont libres de tous les
désirs, les craintes, les ambitions humaines. Et il est possible aussi d'avoir une telle
expérience de soi-même comme un organisme naturel qui émerge, qui dissout, qui va, qui
vient sans obstacle, sans aucun empêchement de ses propres pensées, de ses désirs.
L'expérience du corps, par exemple quand nous respirons, est l'expérience de quelque
chose qui n'est pas sous notre contrôle. On a souvent l'impression que c'est moi qui dirige
cet organisme. Dans un sens conventionnel, c'est sûrement vrai puisque ce n'est sûrement
pas Martine qui me dirige, quoique des fois, pas toujours… Ce ne sont pas les autres qui
nous dirigent. Si je prends une décision, c'est moi qui la prends, mais dans un sens plus
profond, cet organisme est hors de mon contrôle. La vieillesse, la mort sont nos destins, ce
n'est pas possible de les éviter, bien que nous tentions bien sûr de le faire. Mais finalement,
si on ne meurt pas avant que la vieillesse commence, on va vieillir, on va mourir. Et ça,
c'est le destin de tous les êtres. Dès qu'on est né, on commence à mourir.
La mort n'est pas le contraire de la vie, elle est
implicite dans la vie.
Il n'est pas possible en effet de concevoir une vie sans la mort. Comme dit le philosophe
Heiddeger, l'être humain, das Dasein, est destiné à la mort. C'est sa nature. Quand on dit
qu'on vit, on pourrait aussi dire qu'on meurt. La vie, c'est un écoulement, qui se déverse
dans la mort. Mais évidemment, on essaie de résister, de fuir ce destin en se refermant et
c'est quelque chose de tout à fait instinctif. On se renferme dans cette prise. Le soi, c'est
cette façon de saisir, cette crispation. Nous sommes tellement habitués à cette crispation
que nous avons l'impression qu'il y a quelque chose à quoi nous tenons très fortement,
que nous saisissons mais ce n'est qu'une saisie. C'est comme un poing fermé. Si on garde le
poing fermé, on a l'impression qu'il y a quelque chose dans le poing mais c'est simplement
cette force de refermer qui donne l'impression qu'il y a quelque chose. Alors que ce n'est
que la crispation elle-même.
Cette libération de l'esprit par la vacuité montre que la vacuité est quelque chose d'assez
central, essentiel. Mais en même temps, le Bouddha dit, dans un autre texte, que la
vacuité, c'est "la demeure du grand être". Ce qui veut dire que quelqu'un qui a lâché prise,
deviendra un grand être, une grande personne. Dans un sens, nous ne devenons pas ce que
nous pouvons devenir parce que nous sommes bloqués par cet attachement à être moi,
cette personne qui recule toujours.
La vacuité, ce n'est pas l'abnégation de soi mais le lâcher prise de cette façon de saisir
l'ego. Quand on commence à lâcher cette prise, on retrouve la possibilité de devenir "un
grand être" comme dit le Bouddha, c'est à dire quelqu'un qui est toujours un individu.
Mais on devient alors un individu encore plus différencié que la plupart des gens qui
restent très engagés dans ce sentiment d'être ce petit moi qui se renferme tout le temps.
La vacuité, c'est l'ouverture vers un chemin, un chemin de développement, de croissance.
C'est une façon de parler de ce qui nous bloque et de voir ce que nous pouvons devenir.
Il y a une rencontre très connue entre le Bouddha et un mendiant. Celui-ci demande au
Bouddha :
- Le soi existe-t-il ?
Le Bouddha garda le silence.
- Le soi n'existe-t-il pas ?
Le Bouddha garda encore le silence.
L'errant se leva de son siège et partit.
Le Bouddha se tourna vers son serviteur Ananda et dit : "Si j'avais répondu que le soi
existe, j'aurais prolongé la croyance qu'il y a quelque chose qui ne périt jamais, qui est
éternelle. Et si j'avais répondu que le soi n'existe pas, cela aurait encouragé le nihilisme."
Ceci est en effet l'opinion que nombre de gens ont sur le bouddhisme, que c'est une forme
de nihilisme. En réalité, c'est une voie médiane entre ces deux extrêmes, entre le soi et le
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non-soi. Ceci est très intéressant, notamment dans les écrits de Nagarjuna qui était
l'interprète principal des enseignements sur la vacuité du Bouddha. Jamais dans ses écrits,
il ne fait d'équivalence entre le non-soi et la vacuité. Quand j'étais un moine tibétain, j'ai
étudié pendant des années la philosophie bouddhiste avec les lamas.J'ai toujours compris
que la vacuité était une façon de décrire le non-soi. Mais Nagarjuna ne fait pas ça, la
vacuité n'est réductible ni à un soi ni à un manque de soi. En tant que voie médiane, la
vacuité est une façon de ne pas être piégé, soit dans l'idée que les choses existent, soit dans
celle que les choses n'existent pas. L'existence et la non-existence sont un dualisme qui est
imprégné dans nos concepts et nos façons de penser et de parler.
La vacuité, c'est une façon de vivre qui évite les
extrêmes.
Evidemment, on utilise toujours ces mots. On vit dans un monde dualiste, même si on ne
le croit pas. Ce n'est pas possible d'éviter les oppositions linguistiques qui sont une partie
de notre existence mais en même temps, il n'est pas nécessaire de croire, de s'attacher ni à
l'existence ni à la non-existence. La croyance ou le nihilisme sont deux tentations qu'on
peut remarquer partout chez les gens qui croient qu'il y a quelque chose de permanent en
eux-mêmes et ceux qui croient qu'il n'y a rien, pas de sens dans la vie, que celle-ci n'est
qu'un jeu des éléments atomiques et rien de plus. Le Bouddha ne voulait pas être coincé ni
dans un extrême ni dans l'autre.
La vacuité comme processus
Ceci nous mène à Nagarjuna lui-même et c'est ici que nous commençons à trouver une
façon de parler de la vacuité beaucoup plus claire.
Voici un verset de Nagarjuna :
"Les Bouddhas disent que la vacuité consiste à renoncer aux opinions. Ceux qui croient à
la vacuité sont incorrigibles".
C'est le cœur de la matière. En effet,
la vacuité n'est pas une chose, ce n'est pas un état, ce n'est
pas une réalité ultime, absolue qui se cache derrière les
apparences, ce n'est pas un vide mais plutôt un processus de
se vider.
En anglais, on dirait : ce n'est pas une "emptiness", c'est une "emptying". On se vide de ses
attachements, de ses préoccupations, de ses crispations et ce processus de se vider, c'est la
vacuité. Encore une fois, on a un problème de langage. On parle avec des substantifs. Le
Bouddha aussi parlait avec des substantifs. "Shunyata", c'est un substantif abstrait comme
le vide ou la vacuité. Et immédiatement, parce que nous sommes construits ainsi, nous
pensons que ce mot vacuité doit correspondre à quelque chose dans le monde, à quelque
chose de profondément caché en nous-mêmes ou derrière les apparences, un peu comme
Dieu ou le Tao. Mais cette façon de penser est précisément ce que la philosophie et la
vacuité veulent détruire.
Car la vacuité, c'est exactement le contraire.
Mais c'est très facile et même inévitable de faire ça. Il y a alors un problème avec le
langage, les mots. Il faut qu'on se méfie de toutes ces expressions, ne pas les utiliser dans
un sens littéral. Il faut peut-être voir ce mot vacuité plutôt comme un outil que comme une
vérité. C'est simplement une façon d'indiquer une autre stratégie de vivre qui consiste à
renoncer à des opinions, à laisser tomber des idées fixes et encore une fois, si nous
essayons de lier ceci avec la méditation, c'est ce que nous faisons. Quand nous sommes
attentifs au corps, à la nature changeante, contingente, à des choses interdépendantes,
c'est une stratégie, un outil pour transformer nos attitudes habituelles qui, instinctivement,
regardent les choses comme existant intrinsèquement en elles-mêmes.
On commence évidemment avec soi parce que c'est la chose la plus proche, la plus intime
dans notre expérience. On pense toujours à soi. Enfin moi, je fais ça. On est toujours
préoccupé par ses sentiments, ses idées, son futur, son passé et c'est dans un sens naturel,
enraciné dans la survie biologique. Mais en même temps, pour les êtres qui cherchent une
vérité dans leur vie, une libération de leurs compulsions instinctives, ça devient un piège,
nous nous trouvons enfermés dans des idées qui ne sont pas libératrices du tout mais qui
nous font tourner en rond, en cercle. On a cette idée dans l'hindouisme et aussi dans le
bouddhisme de "samsara". Samsara, c'est littéralement le cercle de mort et de renaissance.
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Si nous interprétons ceci de façon plus psychologique, c'est la répétition habituelle dans
nos esprits des pensées, des attachements, des émotions, des identifications. Le but du
bouddhisme, c'est de sortir de ce cercle. Et quand on sort d'un cercle, on trouve une voie,
un chemin. Le chemin est le contraire d'un cercle. Un cercle n'a pas de but, c'est une
continuation répétitive. Un chemin, c'est une ouverture vers d'autres possibilités qu'à
présent nous ne comprenons pas mais qui nous donnent le sentiment d'avoir vraiment un
but dans la vie. Et ce n'est pas simplement un but que le chemin nous donne mais aussi
une liberté de bouger, de vivre sans obstacle.
Une voie, un chemin
Nagarjuna dit aussi que la vacuité, c'est la voie médiane elle-même. Ca veut dire que la
vacuité est une voie. Ça n'a peut-être pas beaucoup de sens. Mais si on réfléchit un peu,
une voie, un chemin, un sentier, c'est une vacuité. Par exemple, si nous regardons une
colline et apercevons un chemin qui traverse cette colline, nous avons l'impression que le
chemin s'est surimposé sur le champ. En réalité le sentier, c'est simplement l'absence de
gazon, de plantes, de rochers qui nous permet de traverser le champ. Même chose avec
une forêt. Les voies qui nous permettent de traverser une forêt ne sont que des écarts entre
les arbres, les rochers, les buissons. Dans un sens littéral, un chemin, un sentier, c'est une
vacuité, une "emptiness", c'est un manque de quelque chose et c'est un manque qui nous
permet de bouger, de marcher sans obstacle.
Le bouddhisme parle beaucoup des obstacles et surtout des obstacles psychologiques
comme la haine, la paresse, etc. Ces obstacles sont les choses en nous-mêmes qui nous
empêchent de suivre le chemin. Ils nous bloquent. Et ces blocages sont des choses qui
nous forcent à tourner en rond. Quand on se sent bloqué par quelque chose, on se sent
incapable de sortir de ce dilemme. On ne peut pas bouger. On ne peut pas faire de progrès.
On se sent vraiment coincé, agrippé, crispé. Mais dès qu'on trouve une façon de sortir d'un
certain blocage, et ce pourrait être par exemple par une analyse psychanalytique, on
ressent tout de suite une libération. On voit encore une fois la connexion, le lien entre le
chemin, le lâcher prise et la vacuité.
Quand on médite, les moments les plus bénéfiques sont ceux on sent une certaine
ouverture mais il ne s'agit pas d'une ouverture passive, ce n'est pas un état où on est
complètement à l'aise. On a l'impression qu'après une méditation qu'on considère comme
une "bonne" méditation, que quelque chose se débloque. Cette méditation nous a aidés à
nous ouvrir. Toutes ces métaphores d'ouverture, de vacuité ne sont que des métaphores
mais qu'il faut toujours lier avec l'expérience. Autrement, il reste des idées philosophiques,
bouddhistes qui sont peut-être très intéressantes et très profondes mais n'ont aucun effet
sur la qualité de notre vie ici et maintenant qui est la chose centrale. Les enseignements,
les pratiques doivent avoir un effet de transformation maintenant, et non dans un certain
avenir on deviendra bouddha après plusieurs vies progressives. Ceci est peut-être un
contexte utile à avoir mais pour nous, la méditation doit agir sur ce que nous ressentons ici
et maintenant.
Le questionnement
Je voudrais terminer en parlant des liens entre la vacuité, cet emptying, ce processus de se
vider, et le questionnement dont Martine a parlé ce matin et la créativité.
Pour moi, une idée très centrale dans la méditation et c'est quelque chose que nous
trouvons surtout dans le Zen, c'est
le fait que nous-mêmes et le monde dans lequel nous
vivons ne sont pas quelque chose que nous pouvons
prendre pour acquis, mais plutôt un mystère, quelque
chose de profondément mystérieux.
Dans l'état de samsara, dans cet état de crainte et d'habitudes, le monde ne se présente pas
comme mystérieux mais comme quelque chose que l'on connait déjà. Et dès qu'on pense
qu'on connaît quelque chose, très rapidement ça commence à être un peu ennuyeux, pas
très intéressant, un peu terne, fade. La vacuité ou ce lâcher prise est une ouverture à un
sentiment assez vivant du mystère des choses et de soi-même. Le questionnement que
Martine a introduit ce matin : "Qu'est-ce que c'est ?" "Qu'est-ce que ceci ?" est une façon
d'exprimer cette impression de mystère. Effectivement, si on continuait une pratique Zen,
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