Science et médecine Arrêt sur... Le Réseau Connaître les données de Les objectifs du Réseau FranceCoag 1• Hémophilie, maladie de Willebrand et autres maladies hémorragiques plus rares, dont le déficit en facteur VII. Le Réseau FranceCoag (RFC) est un dispositif national reposant sur un suivi de cohorte de patients porteurs d’un déficit héréditaire en protéines coagulantes (DHPC) 1 mis en place en 2003 et coordonné par l'Institut de veille sanitaire (InVS) depuis janvier 2004. Il fait suite à un dispositif de pharmaco-surveillance intitulé Suivi thérapeutique national des hémophiles (SNH), qui avait été mis en place à la demande du ministère de la Santé en 1994. Ses objectifs sont de connaître de façon exhaustive la répartition géographique, les caractéristiques et l'évolution de la population atteinte de maladies hémorragiques dues à des DHPC, prise en charge dans les centres de traitement spécialisés, et de disposer d'un outil de veille sanitaire permettant notamment l'investigation rapide de toute suspicion de transmission par des préparations de facteurs de coagulation d'un agent nouvellement identifiable. Deux autres objectifs sont plus particulièrement orientés sur la population des enfants hémophiles sévères. Il s’agit de l’étude des facteurs de risque d'apparition d’anticorps inhibiteurs anti-facteur VIII ou anti-facteur IX et d’évaluer la faisabilité, l'observance, la tolérance et l'impact de traitements prophylactiques standardisés. Pour répondre à ces deux derniers objectifs, la sous-cohorte Pups a été constituée (lire l’article du Pr Chambost ciaprès). Au-delà de ses objectifs et de ses propres projets de recherche, le Réseau FranceCoag est un outil ouvert à tout chercheur intéressé, participant à RFC ou extérieur, après validation des projets par le comité d’orientation (CO), dont l’AFH est membre. Les chiffres des maladies hémorragiques Actuellement, il y a 5 958 patients inclus (dont 135 décédés) dans RFC : 67 % sont porteurs d’hémophilie A, 15 % d’hémophilie B, 14 % de maladie de Willebrand et 1 % de déficit en facteur VII (voir les figures ci-après). 12 Hémophilie 185 • Mars 2009 L’inclusion du patient dans RFC L’inclusion dans RFC se réalise au décours d’une consultation avec le médecin d’un centre de traitement de l’hémophilie (CTH), après remise au patient d’une note d’information qui renseigne sur les objectifs de RFC et son mode général de fonctionnement. Les données transmises, dont le recueil a été autorisé par la Commission nationale informatique et libertés (Cnil), concernent la description de la pathologie, les événements hémorragiques importants et d’autres événements médicaux marquants (infection, chirurgie…), ainsi que le traitement dont le patient bénéficie. Ces données sont anonymisées et seule l’équipe du CTH possède la liste de correspondance entre le nom du patient et le numéro d’anonymat. Les données sont transmises par le CTH sur un site Internet sécurisé géré par l’InVS. Les données de la base RFC peuvent être transmises à des équipes de recherche après l’accord du comité de pilotage du Réseau FranceCoag, nommé comité d’orientation. Le suivi, c'est-à-dire l’enregistrement des données dans la base après l’inclusion, se réalise à un rythme au mieux annuel, au cours d’une consultation prévue dans le cadre des soins habituels. Les informations enregistrées lors du suivi concernent les traitements et les événements médicaux marquants susceptibles d’être en lien avec la pathologie, qui sont survenus depuis le dernier enregistrement des données du patient dans la base RFC. De nouveaux outils de collecte et de recueil des données L’évolution du projet a amené un remaniement complet de l’environnement informatique. Ce FranceCoag l’hémophilie en France nouveau système d’information sera opérationnel fin 2009, sous réserve de l’accord de la Cnil. Il répondra à la nécessité d’une sécurisation encore plus renforcée des données médicales transmises. Bien que prévue dès la mise en place de RFC en 2002, en prolongement de la biothèque constituée pendant la période SNH (19942002), la biothèque n’est redevenue active qu’en janvier 2008. Elle contribue à la réalisation de l’objectif 2 de veille sanitaire, qui vise à disposer d'échantillons de sang permettant l'investigation rapide de toute suspicion de transmission par des préparations de facteurs de coagulation d'un agent nouvellement identifiable. Cette biothèque permet aussi de disposer d'échantillons de sang pouvant être utilisés pour mener des projets de recherche de toute nature chez des patients suivis dans RFC, sous réserve du respect de l’objectif de veille sanitaire, des dispositions législatives et réglementaires en vigueur et de l'accord du CO. Par souci d’un rapport coût/efficacité, l’organisation de la biothèque repose sur des cycles au cours desquels seule une partie des CTH qui participent à RFC proposent à leurs patients de transmettre un échantillon de sang qui sera conservé à la biobanque de Picardie, située dans le centre hospitalier universitaire d’Amiens. Cet échantillon de sang est prélevé dans le cadre des soins habituels : le prélèvement n’a lieu que s’il est programmé pour le suivi de la maladie. En 2009, les hôpitaux concernés par la biothèque sont ceux de Cochin (Paris), Le Chesnay, Lille, Marseille, Nantes et Tours. Florence Suzan Responsable de la coordination du Réseau FranceCoag Objectifs de recherche de la sous-cohorte Pups : passage à la vitesse supérieure L e Réseau FranceCoag a entraîné dès son démarrage un grand élan d’adhésion, tant de la part des centres de traitement que du côté des patients. Ceci aboutit au résultat spectaculaire de 6 milliers d’inclusions enregistrées et d’une masse considérable de données collectées. Les attentes sont fortes par rapport au nouveau système d’information qui verra le jour au cours des tout prochains mois. En effet, au-delà des améliorations de fonc- tionnement, l’arrivée de cette nouvelle version du projet devrait grandement faciliter la valorisation des données et la production d’indicateurs épidémiologiques utiles, pour : • la meilleure connaissance de la population des patients atteints d’hémophilie, de la maladie de Willebrand ou de maladie hémorragique apparentée, • le suivi en temps réel de cette population. Hémophilie 185 • Mars 2009 13 Science et médecine Arrêt sur ... Dans le même temps, les partenaires de RFC ne perdent pas de vue les objectifs plus spécifiquement dédiés à la recherche clinique inscrits dès le lancement du projet. Rappelons ces deux objectifs qui avaient d’ailleurs justifié la constitution d’un protocole spécifique intitulé sous-cohorte Pups : • connaître les facteurs de risque d'inhibiteurs chez les enfants atteints d'une hémophilie sévère et les modalités de prise en charge des inhibiteurs chez ces patients, • évaluer la faisabilité, l'observance, la tolérance et l'impact de traitements prophylactiques standardisés, en particulier de la prophylaxie primaire, chez les enfants atteints d’hémophilie sévère. En ce qui concerne l’identification de facteurs de risque d’inhibiteurs dans l’hémophilie A sévère, plus de 320 enfants répondent déjà aux critères pour participer à la recherche, ce qui représente un effectif à la hauteur de la plus grande série rapportée dans la littérature. Cependant, pour obtenir des résultats significatifs, il est essentiel que tous les paramètres identifiés comme facteurs de risque potentiel puissent être analysés. Or, la sous-cohorte Pups était initialement constituée des enfants inclus très précocement, c’est-à-dire avant quatre journées de traitement. En fait, la volonté de constituer le groupe le plus large possible pour cette étude a fait rattacher tous les patients nés depuis le 1er janvier 2000, lorsque l’histoire thérapeutique pouvait être parfaitement retracée. Les parents dont les enfants sont concernés par ce changement de cohorte sont donc informés au cas par cas du passage au suivi de la sous-cohorte Pups, qui se traduit par un recueil de données supplémentaires. Certains de ces renseignements, tels le génotypage du facteur VIII, l’ethnie et les antécédents familiaux, sont critiques pour une analyse complète. La transmission de ces données complémentaires est indispensable pour réaliser l’analyse pertinente identifiant les facteurs de risque d’inhibiteurs. L’enjeu de la communication rapide de ces données est important puisqu’il s’agit de permettre à la cohorte française d’apporter une contribution Si vous voulez en savoir plus sur le Réseau FranceCoag, vous pouvez en parler à votre médecin spécialiste et consulter le site www.francecoag.org Trois posters sur les données de RFC présentés au congrès mondial de l’hémophilie 2008 à Istanbul sont également consultables sur le site Internet du Réseau FranceCoag. 14 Hémophilie 185 • Mars 2009 significative aux connaissances sur un sujet qui laisse encore place à de nombreuses interrogations au niveau international, par exemple en ce qui concerne l’éventuel impact du type de concentré antihémophilique. Pour l’autre objectif qui concerne l’évaluation de l’impact de la prophylaxie, le nombre de patients concernés dans la base de données RFC devrait permettre là encore de produire des résultats originaux. En effet, les analyses intermédiaires montrent une très nette adhésion pour la prophylaxie chez les jeunes enfants hémophiles sévères depuis la diffusion de recommandations de prophylaxie au début des années 2000. Ceci se traduit à la fois par une augmentation rapide de la proportion d’enfants traités en prophylaxie de longue durée et par un rajeunissement très significatif du passage au traitement prophylactique. Une étude la plus exhaustive possible chez les jeunes enfants hémophiles sévères sera utile pour vérifier les conditions de mise en œuvre de la prophylaxie (pourcentage de la population couverte, âge et critères de début, état articulaire au démarrage, schéma de traitements). Dans le même temps, il sera important de vérifier quels sont les facteurs associés à une plus ou moins bonne adhésion au traitement prophylactique. En dehors des critères déjà renseignés dans RFC, on prévoit de recueillir des données complémentaires pour cette étude et en particulier d’adresser un questionnaire aux parents, de manière à mieux appréhender les facteurs susceptibles d’influencer l’adhésion au traitement. Ce travail qui débute est un préalable indispensable aux études à moyen et long terme dont l’objet sera une évaluation des résultats des régimes standardisés de prophylaxie au niveau du bénéfice orthopédique, de la qualité de vie et des enjeux médico-économiques. Finalement, c’est bien un passage à la vitesse supérieure pour la mise en œuvre des projets de recherche qui se profile de manière contemporaine à l’arrivée de la nouvelle version informatique de la base de données RFC. Ce sont tout naturellement les objectifs inscrits dans le projet de manière structurelle dans le cadre de la sous-cohorte Pups qui sont déployés de manière prioritaire. Pr Hervé Chambost Centre de traitement de l’hémophilie de Marseille Président du CO Réseau FranceCoag