La disparition de l'URSS 25 ans plus tard : réflexions
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La disparition de l'URSS 25
ans plus tard : réflexions
- Comprendre... - Histoire -
Date de mise en ligne : samedi 14 mai 2016
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La disparition de l'URSS 25 ans plus tard : réflexions
L'auteur est assesseur au Centre de recherche de l'Économie Mondiale (CIEM). Il a été
ministre de l'économie de Cuba.
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I
Cette année sera célébré le 25ème anniversaire de la disparition de l'Union soviétique, intervenue le 25 Décembre
1991, après un processus de décomposition qui a vu le naufrage de la plus grande expérience de changement social
dans l'histoire de l'humanité.
Se sont ainsi trouvés perdus l'effort et le sacrifice des peuples qui, au prix d'une lutte héroïque, ont donné la vie de
bon nombre de leurs enfants pour construire une société meilleure. Dans la seule Seconde Guerre mondiale, ce sont
quelques 27 millions de Soviétiques qui sont morts en affrontant le fascisme qu'ils ont réussi à vaincre dans le sang
et le feu, ouvrant également la voie pour la libération des peuples de l'Europe de l'Est et en donnant une impulsion
décisive aux révolutions anti-coloniales dans le Tiers-monde.
Durant l'après-guerre, l'impérialisme n'a pas bénéficié d'un hégémonie incontestée. L'existence de l'URSS et des
pays socialistes d'Europe, unis à la révolution socialiste en Chine d'abord et Cuba ensuite, a changé le rapport des
forces politiques dans le monde, obligeant à un recul - non sans résistance - des forces les plus réactionnaires dans
le monde entier, un processus qui durera jusque dans les années 70 du siècle dernier.
Cependant, l'offensive tant interne du capitalisme - pour liquider les conquêtes des travailleurs-, qu'externe - pour
freiner l'avancée de politiques plus progressistes et révolutionnaires -, a commencé à imposer ses conditions dans
les années 80 sous les gouvernements de Ronald Reagan aux États-Unis et de Margaret Thatcher en Angleterre. Et
cela a eu lieu - pas par hasard - au milieu d'un affaiblissement du bloc socialiste européen, à la fois en matière de
politique intérieure, comme sur la scène internationale, ce qui a inauguré immédiatement la crise terminale éclatant
dans la seconde moitié des années 80.
On a beaucoup écrit ces dernières années sur les causes de l'effondrement du socialisme en Europe, mais
dans la plupart des cas, les auteurs ne cherchent qu'à confirmer, comme le politologue nord-américain
Francis Fukuyama, la prévalence du capitalisme comme seul régime possible pour l'existence de l'humanité,
approche dans laquelle l'expérience socialiste est uniquement évaluée comme un accident sur un chemin qui se
termine par la « fin de l'histoire » conçue comme la "fin des idéologies".
En réalité, la multiplicité des causes de l'effondrement du socialisme européen n'a pas été traité d'une manière
exhaustive, bien qu'à la lumière du temps écoulé depuis lors, il soit possible d'identifier un groupe d'éléments qui
illustrent la complexité de la construction socialiste et le poids des erreurs commises dans ce processus, qui ont
finalement conduit à son effondrement.
Cet exercice d'analyse n'est pas seulement utile du point de vue de la connaissance historique, mais il doit permettre
de fournir des leçons pertinentes à ceux qui persistent dans l'édification du socialisme comme la meilleure alternative
pour le développement de nos peuples. Il n'est pas étonnant que notre Commandant en Chef nous ait mis en garde
le 17 Novembre 2005 :
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"Une conclusion à laquelle je suis parvenu après de nombreuses années : parmi les nombreuses erreurs que
nous avons commises, l'erreur la plus importante a été de croire que quelqu'un connaissait le socialisme, ou
que quelqu'un savait comment construire le socialisme."
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Et plus tard, il a ajouté :
"Ce pays peut s'autodétruire par nous-mêmes ; cette Révolution peut se détruire, alors même que nos
adversaires ne pourraient pas parvenir à la détruire : nous oui et ce serait notre faute"
Dans le prolongement de cette analyse, il y a quelque temps, j'ai accordé à la remarquable journaliste Rosa Miriam
Elizalde un entretien de travail - inédit - où j'ai abordé les divers aspects de cette question qui aujourd'hui pourraient
servir de base à une réflexion un peu plus large sur les causes de l'effondrement de l'URSS et quel rôle les médias
ont joué en cette matière. Il serait également utile d'examiner ce que Catalejo a récemment publié sur le site du
magazine Temas autour des complexités de la construction du socialisme sous le titre "Si le socialisme n'est pas
correctement assimilé, il reste de surface".
II
On ne peut pas négliger que le socialisme a été jusqu'à présent une société en construction, non totalement
consolidée nulle part, ni dans le cas du socialisme réel, ni dans des processus existants, avec les modèles de la
Chine, du Vietnam, de Cuba et de la RPD de Corée.
En examinant les expériences en Europe orientale et en particulier dans l'ex-Union soviétique, on observe que les
processus ayant conduit à l'effondrement du socialisme ont eu beaucoup en commun, et aussi - bien qu'il y ait eu
quelques particularités - que les erreurs ont été toutes aussi communes. Il y a eu un point de départ similaire, parce
que dans tous les cas, l'attente a existé de surpasser rapidement les énormes iniquités, les injustices, les inégalités
que le capitalisme avait provoquées au cours de son histoire.
Ces expériences ont toujours été amenées à essayer de brûler les étapes, mais la réalité montre que la
transformation en profondeur requise pour le socialisme, en particulier dans son élément fondamental, qui est la
transformation des personnes, de la mentalité des gens, ce qui à Cuba a plus récemment été appelé « changement
de mentalité », est un processus très complexe et à long terme. Les personnes ne changent pas d'opinion, ne
changent pas leurs idées, parce qu'un changement s'est produit uniquement dans les relations de propriété. Cela
exige un changement culturel très profond que de passer de l'individualisme capitaliste à une mentalité collective, à
la solidarité sociale et à la gestion économique du consensus et dans tout ce processus, la politique spécifique du
socialisme joue un rôle fondamental.
Cette différence, - au moins conceptuellement -, a été remarquée très tôt. Lénine a affirmé qu'il y avait une grande
différence entre nationaliser et socialiser la production. Nationaliser est un acte juridique qui est exécuté à un
moment déterminé et qui provoque un changement dans les rapports de propriété à partir de là. Mais alors que les
gens se sentent propriétaires et qu'ils pensent différemment et agissent [néanmoins] comme dans le
capitalisme - lequel a dirigé pendant des siècles le fonctionnement du monde - cela ne se produit pas
rapidement. Probablement une partie de la société en est capable, l'avant-garde en est capable, mais la grande
masse des gens ne change pas. Et Lénine a vérifié cela en pratique dès les premières années d'existence de
l'URSS.
Alors, au milieu du fracas révolutionnaire, puis immédiatement après la guerre civile, il a abouti à des conclusions qui
semblent aujourd'hui extraordinairement fausses. En effet, à compter de 1919, il a proposé d'éliminer l'argent parce
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que la guerre avait pratiquement démonétisé la société. L'argent avait cessé d'exercer ses fonctions, et on a
commencé à échanger sous la forme de troc de biens entre tiers. Il semblait que ce fut le chemin, parce que d'autre
part, Lénine avait repris de Marx et d'Engels l'idée que dans le socialisme il n'existe pas de relations mercantiles, à
partir du niveau de développement que pouvait développer la société.
Dans l'Anti Dühring le thème est présenté de cette façon. En effet, Marx et Engels ont parlé d'une transition dans son
contexte, dans le monde plus développé de l'époque sous le capitalisme. Dans une transition simultanée vers le
socialisme cela se présentait comme une possibilité réelle et a ensuite cela a été présenté comme un objectif
réalisable, ce qui a donné lieu dans l'Internationale à des mouvements pour faire progresser en parallèle dans les
pays européens du monde développé une société de qualité supérieure. Il a existé l'idée de ce qu'on pourrait
effectivement passer simultanément au socialisme dans tout le système ; et qu'étant donné le haut niveau de
développement atteint, on pourrait se passer du marché en un temps relativement court.
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Cette idée a été reprise dans le contexte de la guerre civile qui éclate en Mars 1918 en Russie et des expressions
remarquables d'idéalisme apparaissent comme celle proclamant la disparition de l'argent. Cette thèse a même été
conceptualisée dans le livre L'ABC du communisme de Nicolás Bujarin et Eugenio Preobazhenski publié en 1920.
Lorsque la guerre civile a pris fin à la fin de 1920, ces conditions extraordinaires de survie disparaissent, une énorme
masse de paysans de l'Armée Rouge est démobilisée et il faut commencer à produire dans des conditions normales.
Lénine se rend compte qu'il est impossible de continuer à utiliser des facteurs de mobilisation inhérents aux
situations d'urgence et doit tenir compte, dans la vie réelle, des conditions très complexes de la reconstruction d'un
pays dévasté par la guerre.
La réalité indiquait clairement qu'avec quatre-vingts pour cent de paysans, cette population ne pouvait pas changer
ses habitudes d'un jour à l'autre, et qu'il fallait utiliser d'autres mécanismes pour que ces personnes se sentent
encouragées à produire. Il ne suffisait pas seulement de dire que la terre appartenait à tous, et, au milieu d'un pays
menacé par la faim, en mars 1921, il a fallu implanter la Nouvelle Politique Économique, connue sous le nom de
NEP.
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La NEP en son temps a quasiment créé un schisme théorique, parce qu'un an plus tôt on avait dit qu'étaient
pratiquement créées les conditions pour la transition vers une société supérieure ; et tout à coup, en mars 1921, il
faut revenir à l'impôt en espèces, au paiement en argent, il fallait stimuler le paysan de manière mercantile et il fallait
s'engager dans un processus de reconnaissance de la réalité, à savoir que la Russie, en tant que pays de très faible
développement, ne pouvait pas ignorer la nécessité de développer la production mercantile de produits de base pour
survivre. Au-delà de ce que cette expérience apporterait comme autres conséquences, Lénine a toujours conçu la
NEP comme un processus temporaire de transition, jusqu'à ce que les conditions aient été créées pour aller
à la coopération, une première phase de socialisation de la production, comprise comme processus de
socialisation, une production directement liée aux besoins de la société.
Les idées concernant cette nécessité d'avancer dans ce processus, Lénine les a exposées dans un article intitulé «
Sur la coopération », écrit en Mars 1923, où il réclame que l'on prenne en compte que la NEP n'est pas le chemin
définitif et qu'il faut stimuler l'union des forces productives de sorte que la population comprenne qu'en travaillant
ensemble, la productivité s'accroît grâce à un processus graduel de coopération.
Toute cette période initiale de construction du socialisme en Union soviétique se déroule dans des circonstances
extraordinaires : la guerre civile l'a été dans l'ordre militaire, dans l'ordre de la survie ; et aussi la NEP l'a été dans
une circonstance extraordinaire.
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