La recherche d’un bouc émissaire ou le rationnement devraient être le dernier recours pos-
sible dans une société riche et raisonnable. Si on veut gérer le système de santé par des mé-
canismes économiques, on doit affronter le fait qu’il existe des malentendus majeurs pour
deux choses importantes: la compensation des risques et le «produit système de santé».
Avec une compensation des risques efcace, les caisses maladies qui prendraient en charge des patients
en mauvaise santé seraient à égalité avec les caisses maladie qui ont sélectionné des assurés en bonne
santé, ces dernières devant leur reverser de l’argent. Les mécanismes économiques habituels (concurren-
ce, etc.) seraient donc possibles. Malheureusement, le calcul actuel de la compensation des risques basé
uniquement sur le sexe et l’âge ne prédit pas les coûts d’un collectif (il existe des personnes âgées en
très bonne santé et des jeunes très malades). Il est possible de rassembler dans une caisse maladie un
pourcentage élevé d’assurés en bonne santé, avec des primes articiellement basses. La compensation des
risques actuelle ne garantit pas la solidarité, la concurrence se fait sur les «bons risques». Le politique
en a pris conscience avec des projets d’amélioration (prise en compte de l’état de santé dans la compen-
sation des risques), mais ces projets restent insufsants pour garantir une vraie concurrence entre caisses.
Une autre raison de la difculté d’utiliser des mécanismes économiques est certainement que le «produit santé»
n’est pas facile à dénir. Dans la plupart des esprits, le parcours d’un patient est simple. Il est malade, il consulte,
le soignant pose un diagnostic, un traitement est prescrit et le patient est guéri. En fait, la chose est plus complexe.
Le patient qui consulte ne vient pas avec une maladie, mais avec un symptôme. Ce symptôme peut être
associé à différentes maladies, avec pour chacune une probabilité et un risque associé. Le travail consiste
à rechercher les informations (interrogatoire, examen physique, examens complémentaires) qui permettent
d’exclure une affection grave ou d’afrmer que l’affection est bénigne. Puis le médecin prend des décisions
le plus souvent sans avoir de diagnostic précis. Il doit obligatoirement affronter et assumer un certain degré
d’incertitude et de risque, sinon il devrait envoyer, par exemple, toutes les personnes qui ont mal à la tête
à l’hôpital pour des investigations radiologiques et une ponction lombaire… C’est le monde du raison-
nement clinique et de l’analyse décisionnelle, avec ses incertitudes et ses risques, impossibles à éliminer.
Certains vont demander des analyses qui débouchent sur un diagnostic qui n’a pas de traitement, d’autres
vont faire «trop souvent» des analyses à la recherche d’un diagnostic très peu probable et d’un intérêt thé-
rapeutique discutable. On trouve donc une importante variabilité des pratiques et des coûts. Comme il est
impossible de normaliser l’acceptation d’un risque, il devient difcile d’utiliser des outils économiques.
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